AMBITIONS ET ASPIRATIONS D’UNE RÉGION Un nouveau cadre pour l’éducation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord APERÇU GÉNÉRAL Aperçu général Ambitions et aspirations d’une région Un nouveau cadre pour l΄éducation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Cet ouvrage présente un aperçu général du rapport Expectations and Aspirations: A New Framework for Education in the Middle East and North Africa (doi : 10.1596/978-1-4648-1234-7). La version intégrale du rapport définitif, une fois publié, sera affichée en format PDF sur le site https://openknowledge.worldbank.org/. Des exemplaires du rapport peuvent également être commandés à l’adresse «https://publications.worldbank​ .org/» http://Amazon.com. Pour toute citation, reproduction et adaptation, veuillez utiliser la version définitive du rapport. © 2019 Banque internationale pour la reconstruction et le développement/La Banque mondiale 1818 H Street NW, Washington, DC 20433 Téléphone : 202–473–1000 ; Internet : www.worldbank.org Certains droits réservés La publication originale de cet ouvrage est en anglais sous le titre de Expectations and Aspirations : A New Framework for Education in the Middle East and North Africa en 2018. En cas de contradictions, la langue originelle prévaudra. Cet ouvrage a été établi par les services de la Banque mondiale avec la contribution de collaborateurs extérieurs. Les observations, interprétations et opinions qui y sont exprimées ne reflètent pas nécessairement les vues de la Banque mondiale, de son Conseil des Administrateurs ou des pays que ceux-ci représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données citées dans cet ouvrage. 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Licence : Creative Commons Attribution CC BY 3.0 IGO Traductions — Si une traduction de cet ouvrage est produite, veuillez ajouter à la mention de la source de l’ouvrage le déni de responsabilité suivant : Cette traduction n’a pas été réalisée par la Banque mondiale et ne doit pas être considérée comme une traduction officielle de cette dernière. La Banque mondiale ne saurait être tenue responsable du contenu de la traduction ni des erreurs qu’elle pourrait contenir. Adaptations — Si une adaptation de cet ouvrage est produite, veuillez ajouter à la mention de la source le déni de responsabilité suivant : Cet ouvrage est une adaptation d’une o euvre originale de la Banque mondiale. Les idées et opinions exprimées dans cette adaptation n’engagent que l’auteur ou les auteurs de l’adaptation et ne sont pas validées par la Banque mondiale. Contenu tiers — La Banque mondiale n’est pas nécessairement propriétaire de chaque composante du contenu de cet ouvrage. 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Reproduite avec l’autorisation de Kjpargeter/Freepik.com. Auto- risation nécessaire pour toute autre utilisation. Illustrations inclus dans l’ouvrage : les illustrations suivantes ont été créées par des artistes affiliées à thenounproject.com. Schéma ES.1/Schéma 1 : « Rope » de Pedro Banos Cancer. Schéma ES.2/Schema 7 : « Handshake » de Gregor Cresnar ; « Climbing » de IYIKON ; « Man Pushing Big Ball » de Gan Khoon Lay ; « Pull » de Pavel, N. Schéma 2/Schema 17 : « Diploma » de Ben Davis; « Brain » de Max Hancock. Schéma 21 : « Handshake » de Gregos Cresnar ; « People » de Anastasia Latysheva; « Idea » de Ben Markoch. Table des matières Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . vii Remerciements. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ix Résumé analytique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xi Abréviations. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xvii Aperçu général. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, l’éducation présente encore un vaste potentiel non exploité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Beaucoup de choses ont changé dans la région MENA – et dans le monde – mais l’éducation n’y a pas évolué . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Quatre tensions freinent l’éducation dans la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Un nouveau cadre est nécessaire pour réaliser le potentiel de l’éducation dans la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 Renforcer l’offre éducative. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 Accroître la demande de compétences. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 Un nouveau pacte pour l’éducation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53 Libérer le potentiel de l’éducation est possible. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60 Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62 Encadré 1 Le conflit fait payer un lourd tribut à l’éducation dans la région MENA. . . . . . . . . . . . . . . . 5 2 Rapport sur le développement dans le monde 2018 : Apprendre à réaliser les promesses de l’éducation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 3 Priorité à l’éducation de la petite enfance dans les Émirats arabes unis. . . . . . . . . . . . . . . . 21 4 Attirer les meilleurs étudiants vers l’enseignement dépend de l’adéquation des politiques et programmes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 iii i v    Table des matières 5 Les chefs d’établissement doivent également agir en tant que dirigeants pédagogiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 6 L’enseignement adaptatif est bénéfique pour les élèves. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 7 Il est important d’améliorer l’instruction en langue étrangère. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 8 Les conflits dans la région MENA privent d’éducation de nombreux enfants. . . . . . . . . . . 35 9 Le paradoxe des genres constitue un double défi pour le capital humain dans la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 10 Les EdTech offrent des possibilités de faire un bond en avant à l’apprentissage . . . . . . . . . 42 11 Dans l’éducation, les signaux parlent des compétences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 12 Réformer l’enseignement professionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 13 La Finlande et la République de Corée appliquent des modèles différents, mais efficaces. . 50 14 Au Rwanda, l’éducation a joué un rôle dans la consolidation de la paix. . . . . . . . . . . . . . . 53 15 Le Pérou a réussi à harmoniser les intérêts. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 16 Le secteur éducatif égyptien utilise la technologie pour assurer la redevabilité. . . . . . . . . . 59 Schéma ES.1 Quatre tensions freinent l’éducation dans la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xiii ES.2 Un nouveau cadre pour l’éducation dans la région MENA. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xiv 1 Quatre tensions freinent l’éducation dans la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 2 La région MENA est prise dans une « logique du diplôme ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 3 Les élèves de la région MENA sont plus susceptibles de devoir mémoriser . . . . . . . . . . . . . 8 4 L’obéissance joue un rôle central dans l’éducation des enfants de la région MENA . . . . . . 10 5 Les enseignants de la région MENA ont moins d’autonomie que ceux des pays de l’OCDE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 6 Un temps considérable est consacré à l’éducation religieuse dans la région MENA. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 7 Les notions de « renforcement de l’offre, d’accroissement de la demande et de pacte » offrent un nouveau cadre à l’éducation dans la région MENA. . . . . . . . . . . . . 14 8 Ce qui compte pour la croissance, ce sont les compétences. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 9 Ajusté à l’apprentissage, le nombre d’années d’études effectives chute considérablement dans la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 10 Dans la région MENA, les inscriptions dans l’enseignement préscolaire sont inférieures à celles de nombreuses autres régions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 11 Fortes différences dans les taux de scolarisation dans l’enseignement préscolaire de la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 12 Les heures de travail exigées des enseignants de la région MENA sont nettement inférieures à celles des pays les plus performants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 13 L’absentéisme des enseignants est généralisé dans toute la région MENA. . . . . . . . . . . . . . 28 14 La région MENA présente les plus larges écarts de performance entre les élèves les meilleurs et les plus faibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 15 La région MENA présente les plus forts écarts de scores au test entre les sexes . . . . . . . . . 37 16 Des ordinateurs sont disponibles dans les écoles de la région MENA, même si la couverture varie considérablement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 17 La région MENA a besoin d’une logique de la compétence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 18 Des relations personnelles (wasta) sont essentielles pour l’obtention d’un emploi dans la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 19 Dans la région MENA, les chefs d’établissement ont moins d’autorité que ceux des pays de l’OCDE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 T a b l e d e s m a t i è r e s    v 20 La tolérance est associée à l’éducation, mais l’intolérance est élevée même parmi les personnes instruites de la région MENA. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52 21 L’apprentissage est une responsabilité collective, et chacun est redevable . . . . . . . . . . . . . . 57 Tableau 1 Les pays de la région MENA affichent des résultats parmi les plus évaluations internationales des élèves. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 faibles aux ­ 2 Les évaluations nationales et internationales à grande échelle sont apparues dans la région MENA depuis 2007 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 3 Les écarts de performance entre les élèves se sont à la fois réduits et ­ creusés dans la région MENA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 Avant-propos En 1963, la Tunisie, un pays de la région réflexion profonde sur la région, son poten- Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA – tiel, son avenir et sa place dans un monde Middle East and North Africa), a marqué dynamique et en mutation rapide. Il s’inscrit l’histoire en persuadant la Banque mondiale dans un dialogue ouvert, notamment par la de l’aider à financer, développer et promou- Banque mondiale, avec les pays de la région voir son système éducatif. D’autres pays ont MENA sur leurs politiques éducatives et le depuis suivi, plaçant la Banque en tête de besoin urgent de réformes profondes. Le rap- l’investissement dans l’éducation à travers le port vient dans la foulée de la publication, en monde. octobre 2018, de l’Indice de capital humain, Cinquante-cinq ans plus tard, en 2018, qui mesure comment les pays préparent leurs lorsque la question s’est de nouveau posée, citoyens à un avenir productif et révèle de neuf pays de la région MENA se sont mani- vastes lacunes dans les pays de la région festés et ont choisi de faire partie des premiers MENA. L’Indice confirme que l’éducation est à adopter le Projet sur le capital humain. cruciale pour renforcer les capacités humaines Beaucoup d’autres ont suivi. de la région MENA et réaliser son potentiel Ils l’ont fait parce qu’ils étaient conscients humain. d’une réalité difficile : la région dont ils font Les faits sont éloquents et réclament partie est à la traîne en ce qui concerne l’in- notre attention. Plus que dans toute autre vestissement pertinent et efficace dans leur région du monde, les jeunes de la région atout le plus précieux – leur population et MENA ont atteint des niveaux d’instruction leur jeunesse. Ces pays ont également mani- nettement supérieurs à celui de leurs parents. festé une volonté de mieux faire, d’avancer Mais, contrairement à d’autres régions, ces plus vite et de relever le défi formidable d’agir progrès peinent encore à se traduire en de résolument pour changer le cours de l’histoire meilleures opportunités et des revenus plus – et pour offrir une vision nouvelle, positive, élevés. ambitieuse et tournée vers l’avenir à leur La mobilité intergénérationnelle de la région, leurs pays, leur jeunesse. région MENA est la plus forte du monde en Cet ouvrage sur les réformes complètes ce qui concerne l’éducation, mais elle est attendues par les systèmes éducatifs de la faible en ce qui concerne les revenus. La région MENA arrive à un moment de dépense moyenne dans l’éducation de la vii v i i i   A v a n t - p r o p o s région est supérieure à la moyenne mondiale. Aujourd’hui, un pacte doit impérativement Malgré cela, le rendement de l’apprentissage être passé avec la jeunesse, et la Banque mon- figure parmi les plus bas. diale aura un rôle actif et dynamique à y Le rendement de l’apprentissage des filles jouer. En plus des diagnostics que n’importe surpasse de loin celui des garçons, affichant quel rapport peut fournir, et celui-ci en est un l’écart entre les genres le plus profond dans bon exemple, il nous faut davantage de solu- l’ensemble des pays. La région enregistre tions innovantes, créatives, ambitieuses, de pourtant les taux de participation des femmes pointe et sur mesure pour nos pays parte- à la population active les plus bas du monde. naires. Nous devons mettre en évidence les La région MENA enregistre les taux de faiblesses et contribuer à y remédier. C’est en ­ chômage des jeunes les plus élevés du monde, ce sens qu’iront nos efforts et notre énergie, principalement parmi les personnes instruites, parce que nous croyons fermement que les les femmes en particulier. économies et les pays de la région MENA Tout cela entraîne une énorme perte de doivent se fixer un objectif ambitieux : non productivité pour les économies de la région seulement combler l’écart de capital humain, et conduit à ses nombreux paradoxes. mais aussi accéder à un avenir prospère, paci- Ces dernières années, la région a été témoin fique et stable répondant aux attentes et aspi- des effets dévastateurs des attentes non satis- rations de leurs jeunes. faites et des aspirations déçues de sa popula- tion, en particulier des jeunes et des femmes. Ferid Belhaj Nous devons tirer des leçons de ces temps Vice-président troublés, toujours d’actualité — tirer des Région Moyen-Orient et Afrique du Nord leçons et agir. La Banque mondiale Remerciements Ce rapport a été préparé par Safaa El Tayeb Pezzani, Samia Sekkarie, Jee Peng Tan, Simon El-Kogali, manager du pôle Éducation pour Thacker, Ayesha Vawda et Mohamed Yassine. la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Les auteurs remercient également les assis- Nord (MENA) à la Banque mondiale. Il tants de recherche de l’Université St. Catherine s’appuie sur les contributions d’une équipe Kapono Asuncion pour leurs apports, notam- dirigée par Lianqin Wang et Caroline Krafft ment Zea Branson, Taylor Flak, Lyndsay et composée de Mariam Nusrat Adil, Kast, Caitlyn Keo et Johanna Tatlow. Des col- Mohammed Audah, May Bend, Maja lègues du pôle Éducation de la région MENA Capek, Angela Demas, Laura Gregory, Igor et d’autres unités ont également fourni de pré- Kheyfets, Almedina Music, Robert Prouty, cieuses informations. Manal Quota, Jamil Salmi, Elisabeth Différentes versions du rapport ont bénéfi- Sedmik, Samira Nikaein Towfighian, cié des observations et suggestions pertinentes Venkatesh Sundararaman et Noah Yarrow. de Ragui Assaad, Benu Bidan, Kamel Braham, Le rapport a été préparé sous l’encadrement Michael Crawford, Luis Crouch, Amit Dar, général de Hafez Ghanem, vice-président Sameh El-Saharty, Mourad Ezzine, Tazeen pour la Région Afrique ; Shantayanan Fasih, Deon Filmer, Poonam Gupta, Amer Devarajan, directeur principal ; Jaime Hasan, Raja Bentaouet Kattan, Xiaoyan Saavedra, directeur principal ; Rabah Arezki, Liang, Lili Mottaghi, Halsey Rogers et Sajjad économiste en chef ; Daniel Lederman, éco- Shah. Les auteurs tiennent également à remer- nomiste en chef adjoint ; Luis Benveniste, cier les membres de l’équipe de direction directeur ; et Keiko Miwa, directrice. régionale pour la région MENA pour leurs Les auteurs remercient les collègues sui- commentaires. vants pour leurs contributions, notamment Le rapport a grandement bénéficié des Husein Abdul-Hamid, Fadila Caillaud, commentaires reçus au cours de consulta- Michael Drabble, Jiayue Fan, Kasra Farivari, tions régionales et nationales. En particu- Katherina Hruskovec Gonzalez, Samira lier, les auteurs sont reconnaissants pour Halabi, Yue-Yi Hwa, Pierre Kamano, Thomas les précieuses remarques recueillies au Michael Kaye, Amira Kazem, Lisa Lahalih, cours des événements régionaux de consul- Jee Yoon Lee, Juan Manuel Moreno, Harriet tation organisés en décembre 2017 à Nannyonjo, Shahram Paksima, Karine Amman (Jordanie) et à Beyrouth (Liban). ix x   R e m e r c i e m e n t s Des remarques, réflexions et suggestions du présent rapport : Sabra Ledent, l’éditrice ont été reçues au cours de l’événement de la principale du rapport et Jewel McFadden, qui part du Dr Omar Razzaz, Premier ministre a coordonné le processus de publication en et ancien ministre de l’Éducation de la collaboration avec Maja Capek, Emma Etori Jordanie ; du Dr Tarek Shawki, ministre de et Elisabeth Sedmik, du département l’Éducation de la République arabe Éducation de la région MENA. Aya Krisht a d’Égypte ; et de M. Fadi Yarak, directeur conçu la couverture. Patricia da Camara, général du ministère de l’Éducation du Karolina Ordon et Ashraf Saad Allah Liban. Les auteurs sont reconnaissants éga- Al-Saeed ont fourni des orientations et un lement pour les précieux commentaires soutien à la communication et à la diffusion. reçus des représentants des gouvernements, Elisabeth Mekonnen a apporté un soutien des milieux académiques, des organisations administratif général. non gouvernementales, des organisations de Le rapport s’appuie sur la littérature et la la société civile et des organismes de déve- documentation produite par des chercheurs et loppement international de l’ensemble de la spécialistes du monde entier et sur les propres région MENA. expériences et interactions des auteurs avec de Les auteurs tiennent à remercier particuliè- nombreux administrateurs, responsables des rement tous ceux qui ont soutenu les efforts politiques, étudiants et éducateurs spécialisés de publication, diffusion et communication de la région MENA. Résumé analytique La région du Moyen-Orient et de l’Afrique Les 435 millions d’habitants de la région du Nord (MENA) 1 laisse inexploitée une MENA traversent actuellement une période grande partie de ce que l’éducation est de grande adversité. Les menaces perma- capable d’apporter en termes de capital nentes qui pèsent sur la paix et la stabilité humain, de bien-être et de richesse. Or, économique génèrent des difficultés dans de depuis des siècles, l’éducation est au cœur nombreux secteurs. Depuis le Printemps de l’histoire et des civilisations de la région. arabe, la croissance économique est au ralenti Au 20e siècle, elle a joué un rôle fondamen- (Banque mondiale 2015a), le taux de chô- tal dans le combat des nations pour l’indé- mage des jeunes a augmenté et la qualité des pendance, dans la construction d’États et services publics s’est détériorée (Brixi, Lust, et d’économies modernes et dans la définition Woolcock 2015 ; Banque mondiale 2013a). des identités nationales. Aujourd’hui, la Même dans les pays relativement stables, les région MENA enregistre la plus faible part diplômés enregistrent de moins bons résultats de capital humain dans la richesse mondiale sur le marché du travail (El-Araby 2013 ; totale (Lange, Wodon, et Carey 2018). Si les Krafft 2013 ; Rizk 2016 ; Salehi-Isfahani, jeunes de la région ont réussi à atteindre un Tunali, et Assaad 2009 ; Tzannatos, Diwan, et niveau d’instruction supérieur à celui de Ahad 2016). Le net ralentissement du marché leurs parents, ils n’ont en revanche pas su mondial du pétrole a exacerbé ces difficultés convertir leurs acquis scolaires en nouvelles et soumis les pays riches en ressources à une possibilités de revenus (Narayan et al. pression accrue (FMI 2017), révélant le besoin 2018). En d’autres termes, si la région a la plus impérieux encore de promouvoir le déve- plus forte mobilité intergénérationnelle loppement du capital humain dans l’ensemble absolue en matière d’éducation par rapport de la région MENA. à d’autres régions du monde, la mobilité En dépit des investissements importants intergénérationnelle en matière de revenus réalisés dans l’éducation ces 50 dernières est faible. Dans la plupart des autres années, de l’augmentation impressionnante régions, la corrélation entre le niveau d’ins- des taux de scolarisation et d’une participa- truction et la mobilité du revenu est positive tion égalitaire des filles et des garçons à (Narayan et al. 2018). presque tous les niveaux d’enseignement, la xi x i i    R é s u m é a n a ly t i q u e région MENA n’a pas su tirer pleinement Quatre tensions parti des avantages personnels, sociaux et économiques que peut apporter l’éducation. Le processus éducatif s’articule autour d’un Au cours de ces mêmes 50 années, la ensemble complexe de facteurs et d’acteurs République de Corée a elle aussi investi dans intervenant à plusieurs niveaux. Les facteurs son capital humain et, de pays en développe- extérieurs au système éducatif —politiques, ment qu’elle était au début des années 1960, économiques et sociaux —interagissent de elle est devenue aujourd’hui l’une des 20 pre- manière formelle et informelle avec le sys- mières économies mondiales. La Corée a mis tème éducatif et influent sur ses perfor- en place un système éducatif de niveau inter- mances. Les normes comportementales et la national et ses élèves se situent invariable- polarisation idéologique des gouvernements, ment en tête du classement des évaluations des groupes d’intérêts et des citoyens peuvent internationales des apprentissages, contraire- empêcher certains pays de fournir des biens ment aux élèves de la région MENA qui enre- publics (Banque mondiale 2016b). gistrent régulièrement les moins bons L’éducation dans la région MENA a été frei- résultats. née par ces normes comportementales et En dépit des nombreuses évolutions poli- cette polarisation idéologique qui se matéria- tiques, économiques et sociales qu’a connues lisent dans quatre séries de tensions la région MENA, ses systèmes éducatifs sont (schéma ES.1) : (1) qualifications et compé- restés largement inchangés. Au cours des dix tences ; (2) discipline et esprit critique ; dernières années, l’apparition et le développe- (3) contrôle et autonomie ; et (4) tradition et ment de nouvelles technologies à travers le modernité. Ces quatre tensions - qui ont monde ont bouleversé la vie de milliards d’in- empêché l’éducation d’évoluer et d’offrir un dividus et modifié la nature du travail. apprentissage permettant aux élèves de pré- Partant, la nature des compétences nécessaires parer leur avenir -sont étroitement liées à pour s’intégrer sur le marché du travail évolue l’histoire, à la culture et à l’économie poli- elle aussi (Banque mondiale 2019). S’il ne fait tique de la région, mais elles se manifestent aucun doute que la technologie fera évoluer la à des degrés divers selon les pays et déter- demande sur le marché du travail, son poten- minent dans une large mesure les relations tiel en tant que catalyseur de l’offre pédago- sociales et politiques. Elles ont orienté et gique reste largement inexploité dans la façonné les politiques éducatives dans les région. En effet, la technologie n’est pas seule- pays de la région MENA depuis l’indépen- ment un objectif éducatif indispensable pour dance, et elles sont au cœur des débats entrer dans le monde du travail, elle est aussi ­ n ationaux actuels autour des réformes un moyen au service de l’éducation, un outil éducatives. pédagogique unique, capable d’améliorer la Ces tensions se manifestent à l’école et dans qualité, l’efficacité et l’efficience de l’offre la salle de classe, à travers les programmes, la éducative. pédagogie et les normes qui définissent les La région MENA a les capacités et les res- interactions entre la direction de l’établisse- sources nécessaires pour mettre la technologie ment, le corps enseignant, les parents et les au service de systèmes éducatifs capables de élèves. Elles déterminent en définitive les résul- renforcer son capital humain. Elle dispose tats scolaires des jeunes de la région MENA et des outils et des conditions qui lui permettent influent sur leur vie ainsi que sur les écono- de se réformer en profondeur et de créer des mies et les sociétés dans lesquelles ils vivent. sociétés prospères et pacifiques. La capacité À l’heure où le monde est de plus en plus de l’éducation à développer le capital humain connecté, ces tensions peuvent avoir des effets et à impulser des changements dépend qui dépassent les frontières de la région. Si cependant de sa qualité, de son accès à des ­ rien n’est fait pour y remédier, la région environnements économiques et sociaux MENA ne pourra tirer pleinement profit de complémentaires et de sa faculté à exploiter ­ l’éducation, quel que soit l’investissement intelligemment la technologie. financier qu’elle y consacrera. R é s u m é a n a l y t i q u e    xiii Qualifications et compétences. Une qualifi- SCHÉMA ES.1  Quatre tensions freinent l’éducation dans cation - titre, diplôme ou certificat - est géné- la région MENA ralement associée à l’acquisition d’un Tradition ensemble précis de compétences. Sur le mar- ché du travail, les qualifications sont un indi- Discipline Quali cations cateur de productivité, selon le principe que la productivité est fonction du nombre d’années d’études. Traditionnellement, dans l’ensemble Salle de classe École Société de la région MENA, quiconque possédait un Éducation Contrôle Autonomie niveau d’études suffisant avait accès à un emploi dans le secteur public. Dès lors, il devenait plus important d’obtenir un diplôme que d’acquérir des compétences. Partant, dans Esprit Compétences la région MENA, il y a peu –voire aucun – critique rapport entre les qualifications obtenues et les Modernité compétences acquises. Les pays sont donc pris Source : Banque mondiale. dans une « logique du diplôme » : les familles poussent leurs enfants à obtenir des diplômes plus qu’à acquérir des compétences (Salehi- pouvoirs entre les ministères centraux, les Isfahani 2012) et, en réponse à cette demande, bureaux régionaux et les établissements le système éducatif délivre des diplômes. scolaires. Plusieurs pays de la région MENA ­ Discipline et esprit critique. Dans les socié- se sont essayés à la décentralisation, à tés où les normes sociales sont fortes, la disci- l’autonomie et à la responsabilité en matière ­ pline permet d’en assurer le respect. Les d’éducation, avec plus ou moins de succès. notions de discipline et d’esprit critique sont Certains pays ont appliqué un modèle étroitement liées à la pédagogie et aux pro- décentralisé, déléguant le pouvoir de décision ­ grammes scolaires ainsi qu’aux interactions aux collectivités locales et aux établissements quotidiennes au sein de l’école et de la salle de ­ scolaires, mais sans leur donner les moyens ou classe entre les chefs d’établissement, le corps la capacité de mettre ce pouvoir en œuvre. enseignant et les élèves. L’importance exces- Tradition et modernité. Selon certains uni- sive accordée à la discipline conduit à privilé- versitaires, le défi majeur que doit relever la gier la mémorisation et l’apprentissage passif. région MENA est de parvenir à concilier les Dans l’ensemble de la région MENA, les pro- besoins de développement dans un monde grammes s’appuient dans une large mesure moderne et les impératifs moraux d’une sur l’apprentissage par cœur et laissent peu de société religieuse. La modernité - ou les forces champ au développement de l’esprit critique. du changement - et la tradition entrent dès La discipline est certes importante, mais un lors en conflit (Cook 2000), antagonisme qui excès de discipline risque de brider la capacité peut entraîner une conflictualité dans les des élèves à apprendre, à penser, à creuser des ­ p rocessus éducatifs (Massialas et Jarrar idées ou à mettre en doute des concepts. 1987). Dans la région MENA, la modernité L’esprit critique, en revanche, permet aux est souvent associée aux modèles et schémas élèves de comprendre leur environnement, de occidentaux et les opposants au changement contextualiser des concepts au moyen de utilisent cet argument pour empêcher les questions et d’expériences et d’acquérir les réformes. Or, la modernité est un processus de compétences dont ils ont besoin pour renouvellement des normes et il n’y a pas apprendre tout au long de leur vie. « une », mais « des » modernités. Il ne s’agit Contrôle et autonomie. L’opposition entre pas de remplacer la tradition par la moder- le contrôle et l’autonomie se traduit dans le nité, mais plutôt de reconsidérer les pratiques débat actuel autour de la décentralisation des et les normes traditionnelles qui minent le services éducatifs et de l’équilibre des potentiel de l’éducation et de s’engager dans x i v    R é s u m é a n a ly t i q u e une démarche de renouvellement qui prépare humain. En réalité, ce sont les compétences les élèves à s’adapter à un monde en acquises par l’apprentissage – et non les mutation. années de scolarité - qui déterminent la contribution de l’éducation à la croissance économique (Barro et Lee 2013 ; Hanushek Un nouveau cadre pour et Woessmann 2008 ; Banque mondiale l’éducation 2018e). La région MENA a relevé le défi de la scolarisation. Elle doit désormais relever Pour révéler le potentiel de l’éducation, la celui de l’apprentissage. Le nombre réel d’an- région MENA doit s’attaquer à ces quatre nées de scolarité a augmenté dans l’ensemble tensions et mettre en place un système édu- de la région MENA, certains pays atteignant catif qui prépare tous les élèves à un avenir une moyenne proche d’un cycle complet productif et réussi. Moderne et souple, ce d’enseignement primaire et secondaire. En système devrait également promouvoir une revanche, lorsque l’on ramène le nombre réel culture de l’excellence et un apprentissage d’années de scolarité à l’apprentissage, on créatif. Il devrait également tirer profit des observe que le nombre effectif d’années de technologies révolutionnaires et adopter scolarité est inférieur au nombre réel de 2,9 des approches modernes de manière à offrir années en moyenne. En d’autres termes, la aux jeunes les compétences dont ils ont piètre qualité de l’éducation dans la région besoin pour décider de la trajectoire qu’ils MENA se traduit par près de trois années souhaitent suivre dans la vie et pour s’adap- d’enseignement perdues (Banque mondiale ter aux changements locaux, nationaux et 2018e). mondiaux. Enfin, le système devrait reposer Pour renforcer l’offre éducative, les pays sur une vision nationale commune, en prise doivent concentrer leurs efforts sur sept avec les objectifs généraux de développe- domaines : ment du pays. Son succès reposera sur l’in- vestissement de la société tout entière. Pour 1. Garantir l’acquisition des compétences de mettre en place un tel système, la région base – de la petite enfance aux premières MENA doit adopter un nouveau cadre années de scolarité — nécessaires à pour l’éducation — un cadre proposant un l’apprentissage et à la réussite futurs. renforcement concerté de l’offre éducative, 2. Veiller à ce que les enseignants et les chefs une demande accrue de compétences, et d’établissement, qui sont les maillons les un nouveau pacte pour l’éducation. plus importants du processus d’apprentis- (schéma ES.2).2 sage, soient qualifiés, dûment sélectionnés, L’éducation ne réalise son potentiel que utilisés à bon escient et encouragés à se lorsqu’elle apporte les compétences et les perfectionner sur le plan professionnel. connaissances qui composent le capital 3. Moderniser la pédagogie et les pratiques d’enseignement pour encourager la SCHÉMA ES.2  Un nouveau cadre pour réflexion, la créativité et l’innovation. l’éducation dans la région MENA 4. Régler le problème de la langue d’instruc- tion compte tenu du décalage entre l’arabe Une demande parlé et l’arabe standard moderne. La accrue de compétences langue, la religion et l’identité nationale Un nouveau pacte sont si étroitement liées qu’il est difficile de pour l’éducation formuler une recommandation régionale. Ce phénomène est certes régional, mais il Un renforcement se manifeste de maintes façons selon les de l’offre pays ; aussi est-il nécessaire d’adopter une éducative approche spécifique pour chacun des pays Source : Banque mondiale. concernés. R é s u m é a n a l y t i q u e    xv 5. Réaliser des évaluations de l’apprentissage assouplissent les mesures régissant l’emploi, permettant un suivi régulier des progrès qui dissuadent les employeurs de chercher des des élèves dans leur apprentissage. moyens ouverts et transparents de recruter 6. Donner à tous les enfants, quels que soient des personnes qualifiées. Répondre à la leur sexe, leur race, leurs origines ou leurs demande de compétences suppose également capacités, la possibilité d’apprendre — de réformer la fonction publique de manière à condition essentielle à l’amélioration des pouvoir recruter, motiver et préparer les meil- résultats scolaires au niveau national. leurs enseignants et les affecter dans les éta- 7. Exploiter la technologie aux fins d’amélio- blissements où ils seront le plus utiles. rer l’offre éducative et de promouvoir l’ap- Enfin, la demande de compétences devra prentissage auprès des élèves et des s’appuyer sur des programmes capables de éducateurs et préparer les élèves à évoluer préparer les élèves à la vie économique et dans un monde toujours plus numérique. sociale, c’est-à-dire veillant à ce que les acquis des élèves soient en adéquation avec les com- Pour tirer profit de l’éducation, la région pétences que l’on attend d’eux. Ces pro- MENA doit mettre en phase l’offre éducative grammes devraient en fait servir de lien entre et la demande de compétences. Sans une réor- les diverses sphères de la société, le marché du ganisation du marché du travail vers une travail et le système éducatif. Parallèlement, demande accrue de compétences, la contribu- les programmes devraient refléter la transition tion de l’éducation à l’économie ne sera pas d’une logique du diplôme à une logique de la pleinement effective. Bien qu’il puisse être compétence. Les systèmes sont en phase bénéfique, un effort concerté en faveur de lorsque les programmes officiels tiennent l’apprentissage ne suffit toutefois pas pour compte des compétences recherchées par la réaliser pleinement le potentiel de l’éducation. société et le marché du travail. Inversement, Cet effort nous rapprocherait de cet objectif, lorsque les programmes officiels sont dépassés mais il s’agirait en quelque sorte d’une et déconnectés de la réalité, les acquis des approche de « deuxième choix » qui laisserait élèves ne correspondent plus aux attentes de la majeure partie du potentiel inexploité la société et des employeurs. (Rodrik 2008). La meilleure approche consis- L’importance du contexte. Les réformes terait à entreprendre des réformes multisysté- éducatives opérées dans les pays de la région miques qui assurent la correspondance entre MENA, axées sur une offre éducative renfor- l’offre éducative et la demande de compé- cée et une demande accrue de compétences, tences, notamment des réformes économiques donneront des résultats différents selon les visant à permettre une meilleure adéquation contextes. Il existe une multiplicité de modèles entre les compétences requises sur le marché pour transformer l’éducation. La Finlande et du travail et celles transmises par l’éducation la Corée sont en tête du classement 2015 du et recherchées par les parents et les élèves Programme international pour le suivi des ainsi que des mesures destinées à corriger, acquis des élèves (PISA), signe qu’elles offrent notamment, les distorsions du secteur de un apprentissage solide. Et pourtant les deux l’éducation. Les employeurs accorderaient systèmes éducatifs à l’origine de cet apprentis- moins d’importance aux diplômes et s’atta- sage sont bien différents. Les pays de la région cheraient davantage aux compétences. Les MENA doivent déployer des efforts de parents et les élèves pourraient alors exiger du réforme qui reposent sur ce qui est réalisable système éducatif qu’il apporte des compé- dans le contexte éducatif, économique et tences. Néanmoins, pour que la région social ; autrement dit, le succès des réformes MENA abandonne la logique du diplôme de l’éducation dépendra de la prise en compte pour entrer dans celle de la compétence, il des contraintes existantes (Rodrik 2008), faut que les employeurs communiquent mais aussi de la manière dont ces réformes davantage sur les compétences qu’ils attendent sont conçues, introduites, approuvées et mises et, par ailleurs, que les responsables politiques en œuvre dans un pays donné. L’efficacité des x v i    R é s u m é a n a ly t i q u e différentes solutions politiques dépend sou- vision commune qui tienne compte des quatre vent de l’existence de conditions complémen- tensions qui freinent l’éducation, du contexte taires et de ressources suffisantes. local et des normes sociales à l’origine de ces Pour opérer une réforme en profondeur de tensions. Un leadership fort est nécessaire l’éducation, il convient de s’attaquer aux pour concilier les intérêts et mobiliser les sou- normes sociales inefficaces qui lui font obsta- tiens autour d’objectifs nationaux communs cle. Faire évoluer des normes n’est pas chose auxquels l’éducation doit contribuer. Le nou- aisée, mais n’est pas pour autant impossible. veau pacte reposera également sur l’idée com- Sensibiliser la société au coût et à l’inefficacité mune que l’éducation est l’affaire et la de certaines normes ou aux bénéfices que lui responsabilité de tous, autrement dit que procureraient les réformes pourrait faire évo- l’obligation de rendre des comptes ne luer les mentalités, mais, pour cela, il faut concerne pas le seul secteur de l’éducation. s’appuyer sur des données tangibles, sans lien Enfin, il suppose que les investissements et les avec un discours idéologique ou politique, et ressources soient conformes aux priorités de s’attacher à des réformes authentiques et la vision. Les systèmes éducatifs très perfor- majeures et non à des changements mineurs mants —comme ceux du Japon, de la Corée de politique (Khemani 2017). La modification ou de Singapour —sont de parfaits exemples des lois peut également faire évoluer les de pactes pour l’éducation qui fédèrent les dif- normes, mais promulguer des lois ne suffit férentes parties prenantes. Ces pays ont pas ; il faut qu’elles soient strictement appli- adopté une vision commune de l’éducation et quées et respectées. Une réaction comporte- entrepris, avec constance et cohérence, des mentale à des mesures d’incitation à court réformes pour bâtir un capital humain vec- terme peut conduire à faire évoluer les com- teur de croissance économique (Wong 2017). portements et les normes sociales à plus long Par son histoire, sa culture et ses res- terme (Banque mondiale 2015d). sources, la région MENA a les moyens d’en- Un pacte pour l’éducation. Il n’appartient trer de plain-pied dans un avenir reposant sur pas aux seuls éducateurs d’améliorer l’éduca- une société de la connaissance et une écono- tion ; toute la société doit être mobilisée : mie du savoir. La région nourrit d’immenses responsables politiques, entrepreneurs, chefs aspirations et ambitions. Il est possible de communautaires et religieux, mais aussi libérer le potentiel de l’éducation, mais, pour parents, enseignants, chefs d’établissement cela, il faut que toutes les parties prenantes et élèves. L’éducation peut potentiellement s’engagent à en faire non seulement une prio- jouer plusieurs rôles dans une économie et rité, mais aussi une urgence nationale. une société, mais les objectifs des différents acteurs sont parfois antagonistes. Les avis souvent contradictoires, les convictions pro- Notes fondes et les intérêts divergents sont de loin 1. La Banque mondiale définit la région MENA les aspects qui compliquent le plus la tâche. comme comprenant les pays et écono- La divergence des objectifs des différentes mies suivants : Algérie, Bahreïn, Djibouti, parties prenantes représente un obstacle République arabe d’Égypte, République majeur. islamique d’Iran, Iraq, Jordanie, Koweït, Il est donc essentiel de proposer un nou- Liban, Libye, Malte, Maroc, Oman, Qatar, Arabie Saoudite, République arabe syrienne, veau pacte pour l’éducation qui concilie les Tunisie, Émirats arabes unis, Cisjordanie et intérêts d’un large éventail de parties pre- Gaza et République du Yémen. Le présent nantes – parmi lesquelles les enseignants, rapport exclut Malte de l’analyse car ce pays les chefs d’établissement, les inspecteurs, présente peu d’éléments communs avec le responsables politiques, la collectivité, les ­ reste de la région. les employeurs et les élèves — et forme une 2. Traduit en anglais par «push for learning, alliance puissante. Il importe d’élaborer une pull for skills, and a new education pact». Abréviations AAO Apprentissage assisté par ordinateur AMS Arabe moderne standard AREF Académie régionale de l’éducation et de la formation BFP Budgétisation fondée sur la performance DPE Développement de la petite enfance EGMA Early Grade Mathematics Assessment (l’évaluation des compétences en mathématique dans les premières années primaires) EGRA Early Grade Reading Assessment (évaluation des compétences les plus élémentaires en lecture) EPE Éducation de la petite enfance FLOT Formation en ligne ouverte à tous LdI Langue d’instruction MENA Région Moyen-Orient et Afrique du Nord MICS Enquête en grappes à indicateurs multiples ( Multiple Indicator Cluster Surveys) OCDE Organisation de coopération et de développement économiques PDI Personne déplacée à l’intérieur de son propre pays PIRLS Programme international de recherche en lecture scolaire PISA Programme international pour le suivi des acquis des élèves TIC Technologies de l’information et de la communication TIMSS Tendances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences (Trends in International Mathematics and Science Study) USAID United States Agency for International Development (agence américaine pour le développement international) xvii Aperçu général ‫ان رصيد أي امة متقدمة هو أبناؤها المتعلمون وان تقدم الشعوب واألمم انما يقاس بمستوى التعليم وانتشاره – شيخ زايد ال نهيان‬ « La richesse d’une nation développée réside dans ses enfants instruits, et le progrès des éducation. » peuples et des nations se mesure par l’état et la portée de leur ­   — Cheikh Zayed Al Nahyane Au Moyen-Orient et en Afrique ­ ENA. Le niveau d’études et la mobilité des M revenus sont fortement corrélés dans la plu- du Nord, l’éducation présente part des autres régions et dans les pays à encore un vaste potentiel non hauts revenus du monde, mais pas dans la exploité région MENA (Narayan et c ­ oll., 2018). Les familles et les individus investissent dans les Les jeunes de la région Moyen-Orient et études dans l’espoir de bénéficier de bonnes Afrique du Nord (MENA) 1 disposent possibilités d’emploi, mais dans la région aujourd’hui de davantage de possibilités MENA, le rendement de l’éducation sur le d’études que leurs parents et ont atteint des marché du travail est parmi les plus faibles niveaux d’instruction plus é ­ levés. La mobi- du monde pour les particuliers (Patrinos, lité intergénérationnelle absolue de la région 2016). Au-delà du marché du travail, au MENA est la plus forte du monde en ce qui contraire de ce qui se passe dans d’autres concerne l’éducation (Narayan et ­ c oll., régions, l’éducation dans la région MENA 2018). Ces niveaux d’instruction élevés ne se n’est que faiblement associée à des retom- traduisent toutefois pas en de meilleures pos- bées sociales telles que l’engagement civique revenu. La mobilité intergénéra- sibilités de ­ et la participation aux questions communau- tionnelle des revenus est faible dans la région taires (Diwan, 2016). 1 2   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région La région MENA a également la plus faible l’université n’a aucun rapport avec la vie ou la part de capital humain dans l’ensemble de la réalité du travail – du temps perdu dans un richesse mondiale (Lange, Wodon et Carey, système défaillant », a déclaré l’un des partici- 2018). La contribution de l’éducation au pants à ­ l’enquête. « Dans notre pays, faire des capital humain, à la croissance économique et études ne sert qu’à obtenir un diplôme, pour aux retombées sociales est bien documentée finalement se retrouver sur son canapé ou (Becker, 1962 ; Lochner et Moretti, 2004 ; dans les cafés, sans travail et sans avenir pour Milligan, Moretti et Oreopoulos, 2004 ; tous les étudiants », a noté un autre Mincer, 1974 ; OCDE, 2014 ; Sala-i-Martin, ­ répondant. Des milliers d’autres ont exprimé Doppelhofer et Miller, 2004). L’éducation une insatisfaction analogue à l’égard de l’édu- offre un vaste potentiel inexploité de contri- cation dans leurs p ­ ays. La frustration expri- bution au capital humain, au bien-être et à la mée dans le sondage Facebook n’est pas richesse de la région MENA (Lange, Wodon seulement un ressenti, mais en fait la réalité à et Carey, 2018). Elle est, depuis des siècles, au laquelle sont, aujourd’hui, confrontés des mil- cœur de l’histoire et des civilisations de la lions de jeunes de la région ­ MENA. Cela peut région. Au XXe siècle, l’éducation a été au ­ changer. et doit ­ centre des luttes des pays pour l’indépen- Pourquoi la région MENA n’a-t-elle pas dance, de l’édification des États et économies été capable d’exploiter pleinement son poten- modernes, et de la définition des identités tiel en éducation ? Comment la région, dont ­nationales. l’excellence éducative a pendant cinq siècles La région MENA a énormément investi suscité l’innovation dans les sciences et le dans l’éducation au cours des cinquante der- développement social et qui a été un cataly- nières années et a atteint une croissance seur de la Renaissance européenne et de la impressionnante dans les taux de scolarisation révolution scientifique (Overbye, 2001), se et la parité des genres dans la quasi-­ totalité retrouve-t-elle aujourd’hui en queue de pelo- des niveaux ­ d’études. Et pourtant, aucun des ton en ce qui concerne le rendement de l’édu- pays de la région, quelles que soient leur géo- cation ? Et pourquoi la région n’a-t-elle pas graphie, leur démographie, leur économie ou réussi à faire mieux malgré les investissements leur société, n’a été capable d’engranger tous importants réalisés au cours des cinq der- les avantages personnels, sociaux et écono- nières décennies ? Et surtout, que peuvent miques de ­ l’éducation. Au cours des mêmes faire les pays de la région MENA pour sortir cinquante années, la République de Corée a de cette impasse et retrouver leur position de elle aussi investi dans son capital humain et leaders en éducation et en innovation ? réussi à transformer le pays en développement Comment peuvent-ils libérer le potentiel de qu’elle était au début des années soixante en leur capital humain pour créer des sociétés une des vingt premières économies du m ­ onde. prospères et pacifiques ? La Corée a mis en place un système éducatif Les pays de la région MENA ont la possi- de très haut niveau, et ses étudiants se classent bilité de révéler le potentiel inexploité de régulièrement aux premiers rangs des évalua- l’éducation et de satisfaire les attentes et aspi- tions i ­nternationales. Les étudiants de la rations de leurs jeunes citoyens et des généra- région MENA se situent, eux, régulièrement tions ­futures. Mais il leur faudra surmonter parmi les derniers à ces ­évaluations. certains ­ obstacles. Ce rapport identifie quatre En 2017, 92 % des répondants de la région séries de tensions qui freinent l’éducation MENA, interrogés dans le cadre d’un sondage dans la région MENA : 1) qualifications et de la Banque mondiale sur Facebook deman- compétences ; 2) discipline et esprit critique ; dant s’ils pensaient que l’éducation améliorait 3) contrôle et autonomie ; et 4) tradition et leurs chances sur le marché de l’emploi de modernité. Ces tensions se retrouvent au sein ­ leur pays, ont répondu « Non » et, comme l’a des pays, des sociétés, des communautés et noté l’un des répondants, « Non, mille fois des ménages, et elles se manifestent et se ren- ­non  ».2 « Ce qui est enseigné à l’école et à forcent dans les écoles et les salles de c ­ lasse. A p e r ç u g é n é r a l    3 Tant qu’elles ne seront pas résolues, aucun Les pays arabes, qui constituent la majeure investissement dans l’éducation ne récoltera partie de la région, ont en commun une les avantages ­ attendus. Le présent rapport langue et de vastes pans de leur histoire et propose un nouveau cadre appelant à de leur c­ ulture. Beaucoup ont un passé édu- accroître la demande de compétences pour catif similaire, notamment certaines des renforcer l’offre éducative au sein d’un nou- premières universités du monde et d’impor- veau pacte pour ­ l’éducation. Malgré de dures tantes contributions historiques au savoir pressions régionales géopolitiques et socioé- et au développement humains (Abi- conomiques et d’éprouvantes tendances mon- Mershed, 2010 ; Rugh, 2002). Plus récem- diales, la région MENA a les capacités et les ment, en raison de la similitude de leurs moyens de mettre en place des systèmes édu- trajectoires après l’indépendance, leurs humain. catifs pour renforcer son capital ­ méthodes pédagogiques et les problèmes de leurs marchés du travail se chevauchent largement. Dans toute la région, la qualité ­ de l’enseignement et le rendement de l’ap- Beaucoup de choses ont changé prentissage sont également confrontés à dans la région MENA – et dans le bon nombre de problèmes ­ semblables. monde – mais l’éducation n’y a Il y a une décennie, la Banque mondiale a abordé la crise de la qualité de l’éducation pas évolué dans la région MENA dans le rapport The Aujourd’hui, les 435 millions d’habitants de Road Not Traveled : Education Reform in the la région MENA traversent une période de Middle East and North Africa (World Bank, graves ­difficultés. Les menaces permanentes 2008). Elle a observé que les pays de la région pour la paix et la stabilité économique avaient mis en place un système éducatif prin- contribuent aux problèmes de nombreux cipalement centré sur les intrants, tels que la secteurs. La croissance économique est restée ­ construction d’écoles, mais qu’ils n’avaient constamment faible depuis le Printemps pas fait grand-chose pour changer les incita- arabe (Banque mondiale, 2015a), le chô- tions et le comportement des é ­ ducateurs. Le mage des jeunes est en hausse, et la qualité rapport proposait une nouvelle approche des des services publics s’est détériorée (Brixi, systèmes éducatifs fondée, d’une part, sur Lust et Woolcock, 2015 ; Banque mondiale, l’amélioration des incitations et de la redeva- 2013­ a). Même dans les pays relativement bilité publique, et d’autre part, sur la réalisa- stables, les résultats se sont aggravés pour les tion d’un équilibre entre l’offre de diplômés et diplômés sur le marché du travail (El-Araby, la demande de main-d’œuvre sur le marché 2013 ; Krafft, 2013 ; Rizk, 2016 ; Salehi- du ­travail. Les pays de la région MENA se Isfahani, Tunali et Assaad, 2009 ; Tzannatos, sont, de fait, embarqués dans de nombreuses Diwan et Ahad, 2016). Parmi les facteurs réformes de leurs secteurs éducatifs, mais avec exacerbant ces problèmes figure la forte peu ou pas de ­ succès. Dans certains cas, les récession du marché mondial du pétrole, qui réformes ont été fragmentaires ou non coor- a intensifié la pression sur les pays produc- données, ou bien n’ont pas réussi à résoudre teurs (FMI, 2017) et rendu encore plus les problèmes ­ fondamentaux. Dans d’autres, ­ pressante la nécessité d’accélérer le dévelop- elles n’ont pas été suffisamment financées ou pement du capital humain dans l’ensemble communiquées aux parties c ­ oncernées. de la région ­MENA. Entretemps, les réformes éducatives n’ont, Bien que les pays de la région présentent trop souvent, pas accordé suffisamment d’importantes différences du point de ­ d’attention aux interactions entre le secteur vue de leur développement économique éducatif et les autres secteurs, aux tendances et des difficultés sociales et politiques aux- socioéconomiques et politiques générales, aux quelles ils sont confrontées, ils partagent de normes comportementales, et aux intérêts des nombreuses caractéristiques et ­ d ifficultés. divers ­groupes. 4   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région Au cours des dix années écoulées depuis compte 1,5 milliard d’utilisateurs dans le The Road Not Traveled, beaucoup de choses m ­ onde. Aujourd’hui, plus de deux tiers des ont changé dans la région et dans le monde, jeunes Arabes utilisent Facebook et mais les systèmes éducatifs de la région WhatsApp. De plus, YouTube, qui n’avait que ­ MENA sont restés figés, conçus pour trois ans en 2008, a aujourd’hui 1,5 milliard répondre à la forte demande d’une large et d’utilisateurs dans le monde, et l’Arabie saou- croissante population en âge d’aller à l’école dite est son plus gros marché en consomma- avec des mécanismes identiques à ceux des tion par ­habitant. Les jeunes Saoudiens de 15 décennies p ­ récédentes. Au cours de cette à 24 ans passent en moyenne 74 minutes par décennie, les pays MENA ont dépensé en jour à regarder des vidéos en ligne (Radcliffe moyenne 4,5 % de leur revenu national sur et Lam, 2018). En même temps, le monde et l’éducation, et plus de 15 millions de garçons la région ont connu une forte augmentation et filles supplémentaires se sont inscrits à des investissements dans les applications des ­ iveaux.3 En même temps, le l’école à tous les n technologies de l’information et de la commu- contexte politique de l’économie s’est consi- nication visant à améliorer l’enseignement dérablement ­ modifié. Le Printemps arabe de (EdTech), qui ont atteint le chiffre record de 2011 a déclenché un mouvement de contesta- 9,5 milliards de dollars EU en 2017 (Shulman, tion populaire générale réclamant de meil- 2018). La Khan Academy, qui a ouvert ses leurs services de base et une égalité des portes en 2008, utilise YouTube pour donner c hances. Ce mouvement a causé la chute ­ des cours à des millions ­d’élèves. d’anciennes dictatures en Égypte, en Libye et Entretemps, les avancées, l’automatisation en Tunisie, la modification de constitutions en et l’innovation technologiques influencent de Jordanie et au Maroc, et bouleversé le statu plus en plus les nouveaux emplois et modi- quo dans presque tous les pays de la r ­ égion. fient la nature du ­travail. Même si beaucoup La République arabe syrienne et la République de postes de fabrication manuelle ont été du Yémen sont toujours aux prises avec une automatisés, la technologie a le pouvoir de guerre civile (voir encadré 1) qui a engendré créer de nouveaux emplois et d’accroître la l’une des pires crises liées aux réfugiés de tous productivité (Banque mondiale, 2019). Le temps. Elle a infligé de grandes souffrances les ­ rôle de la technologie en tant que facteur à des millions de réfugiés dans l’ensemble de façonnant la future demande de main- la région et dans le monde, et imposé de d’œuvre est indéniable, mais son rôle en tant graves contraintes aux communautés hôtes que catalyseur de l’offre d’enseignement est (Conférence de Bruxelles, 2019 ; HCR, une occasion à ­ exploiter. Cela nécessitera 2019­a). d’investir dans le capital humain, l’enseigne- Les dix dernières années ont également été ment et les nouveaux profils de compétences marquées par des avancées technologiques dans la région ­MENA. remarquables. À l’époque du rapport The ­ Malgré les nombreuses transformations Road Not Traveled, l’iPhone avait un an, politiques, économiques et sociales interve- Twitter démarrait à peine, et Facebook n’avait nues dans la région MENA au cours de la qu’environ 145 millions d’utilisateurs dernière décennie, ses systèmes éducatifs sont (Guardian, 2014). En 2016, les pays MENA en grande partie restés les m­ êmes. Si l’éduca- comptaient 107 abonnements à la téléphonie tion est potentiellement capable de susciter mobile pour 100 personnes,4 et en 2017, ils d’importantes contributions économiques et enregistraient presque 100 millions d’utilisa- sociales, sa capacité à apporter un change- teurs actifs des médias sociaux (Radcliffe et ment ne dépend pas seulement de sa qualité, Lam, 2018). Sur les 2,1 milliards d’utilisa- mais aussi des environnements économiques teurs actuels de Facebook, plus de 100 mil- et sociaux complémentaires et de son apti- lions se trouvent dans la région ­ MENA. Le tude à tirer intelligemment parti des réseau social WhatsApp, lancé en 2009, ­technologies. A p e r ç u g é n é r a l    5 ENCADRÉ 1 Le conflit fait payer un lourd tribut à l’éducation dans la région MENA Depuis des années, la région MENA a été ravagée par sur les systèmes éducatifs dans les pays d’origine des de violents conflits et des crises prolongées forçant ­ éfugiés. Les réfugiés ne disposent également pas tou- r des millions de gens à quitter leur foyer en quête de jours des documents nécessaires, ou les pays d’accueil sûreté et de ­sécurité. Bien qu’elle n’héberge que 6 % ne sont pas toujours en mesure de vérifier l’authenticité de la population mondiale, la région accueille plus de leurs documents (ESU, 2017). d'un tiers des réfugiés du monde et un quart des per- Au niveau tertiaire, environ 5 % des Syriens de 18 sonnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDI) à 24 ans réfugiés dans la région MENA sont inscrits en raison d’un ­ conflit.a Cette situation a mis à rude dans l’enseignement supérieur (Commission euro- épreuve les systèmes éducatifs des pays h ­ ôtes. Par péenne, 2018). Les études tertiaires ne constituant pas exemple, en 2018-2019, les écoles publiques du Liban une priorité dans les programmes d’aide d’urgence, le ont absorbé près de 213 000 étudiants non libanais, financement reste un obstacle majeur (Commission dont la majorité a pu être accueillie en dédoublant les européenne, 2017, Nakweya, 2017). horaires d’enseignement dans 346 établissements sco- L’infrastructure et les services éducatifs des pays en laires publics du pays (ministère de l’Éducation et des conflit ont été fortement t ­ ouchés. Par exemple, dans Études supérieures, Liban, 2019). La Jordanie admi- les 16 villes ayant subi des combats intensifs durant nistre elle aussi 209 établissements scolaires à double la guerre d’Irak, seuls 38 % de l’infrastructure sco- horaire et dispense des services éducatifs non officiels laire totale sont intacts et 18 % (190 établissements) gérés conjointement par des organisations internatio- ont été détruits (Banque mondiale, 2018­ b). Deux tiers nales et le ministère de l’Éducation (Gouvernement de des écoles de la République du Yémen ont besoin de Jordanie, 2018). En plus des établissements scolaires, réparations (Unicef, 2018). En Syrie, environ un tiers les pays hôtes sont confrontés à d’autres défis dans la des bâtiments scolaires ont été endommagés, détru- fourniture de services éducatifs convenables aux ­ PDI. its, occupés par des parties au conflit, ou servent à Par exemple, ils manquent souvent d’informations héberger des PDI (Conférence de Bruxelles, 2017).­ ­ onde. a. Voir IDMC (2019) ; HCR (2019a, 2019b) ; UNRWA (2019) ; Banque mondiale, base de données des indicateurs du développement dans le m Quatre tensions freinent comportementales et cette polarisation idéo- logique qui se matérialisent dans quatre l’éducation dans la région MENA séries de tensions : qualifications et compé- Le processus éducatif s’articule autour d’un tences ; discipline et esprit critique ; contrôle ensemble complexe de facteurs et d’acteurs et autonomie ; tradition et modernité intervenant à plusieurs n ­ iveaux. Les facteurs (schéma 1). extérieurs au système éducatif – politiques, Ces tensions sont étroitement liées à l’his- économiques et sociaux – interagissent de toire, à la culture et à l’économie politique manière formelle et informelle avec le ­ système de la région, mais elles se manifestent à des éducatif et façonnent ses ­performances. Les degrés divers selon les pays et déterminent normes comportementales et la polarisation dans une large mesure les relations sociales idéologique des pouvoirs publics, groupes politiques. Elles ont orienté et façonné les et ­ d’intérêts et citoyens peuvent empêcher politiques éducatives des pays de la région certains pays de fournir des biens ­ MENA depuis l’indépendance, et elles sont publics (Banque mondiale, 2016­ b). Dans la au cœur des débats nationaux actuels autour région MENA, l’éducation a été freinée par des réformes é ­ ducatives. Ces tensions ont ces interactions complexes, ces normes entravé l’évolution des systèmes éducatifs 6   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région SCHÉMA 1  Quatre tensions freinent l’éducation dans discipline et à l’esprit critique qu’à la tradi- la région MENA modernité. Troisièmement, les tion et à la ­ tensions ne sont spécifiques ni à la région Tradition MENA ni à une époque ­ donnée. Discipline Historiquement, les pays du monde entier Quali cations ont lutté contre ces tensions lors de la défi- nition de leurs objectifs et p ­ olitiques. Quatrièmement, une même position ne peut Salle de classe École Société Éducation s’appliquer à chacun des pays ou à la région Contrôle Autonomie dans son ­ensemble. Sur la base de ses objec- tifs de développement et de sa vision natio- nale, chaque pays doit décider où il souhaite Esprit Compétences situer son système éducatif au sein de ces critique ­tensions. Modernité Source : Banque m ­ ondiale. Qualifications et compétences La tension entre les qualifications et les ainsi que leur capacité à fournir aux élèves compétences a été une source de débats des compétences les préparant à leur ­ futur. durant presque cinquante a ­ ns. Depuis Les écoles et les salles de classe sont les les années 1970, des économistes et socio- plateformes où s’exercent ces tensions à tra- logues ont argumenté à propos des liens vers les programmes scolaires, la pédagogie entre l’éducation, les compétences et le et les normes définissant les interactions marché du travail, utilisant de nombreuses entre la direction de l’établissement, le corps théories et modèles tels que la théorie du enseignant, les parents et les ­élèves. Ces ten- capital humain de Becker (Becker, 1962), le sions déterminent en définitive les résultats crédentialisme de Collins (Collins, 1979), scolaires des jeunes de la région MENA et et le modèle des signaux de Spence (Spence, affectent leurs vies ainsi que les économies 1973). Une qualification – titre, diplôme ­ ivent. Dans et les sociétés dans lesquelles ils v ou certificat – est généralement associée à un monde de plus en plus connecté, les effets l’acquisition d’un ensemble précis de com- de ces tensions peuvent s’étendre au-delà pétences ou de c ­ onnaissances. Sur le mar- des frontières de la ­ région. Si rien n’est fait ché du travail, les qualifications sont un pour y remédier, la région MENA ne pourra indicateur de productivité, en raison du tirer pleinement profit de l’éducation, quel principe voulant que la productivité soit que soit l’investissement financier qu’elle y fonction du nombre d’années d’études ­consacrera. (Page, 2010). Les qualifications confèrent Quatre caractéristiques de ces tensions également un certain statut dans la société : méritent d’être ­mentionnées. Premièrement, un diplôme plus élevé est associé à un sta- elles ne s’excluent pas mutuellement et tut plus élevé et affecte des domaines tels coexistent le long d’un c ­ ontinuum. Le défi que le ­mariage. pour les pays consiste à déterminer où sur le L’histoire de l’éducation en tant qu’instru- continuum ils veulent être et quel équilibre ment appelé à générer des bureaucrates pour serait optimal pour obtenir les résultats le secteur public a façonné la structure s ouhaités. Deuxièmement, les quatre ten- ­ actuelle du système éducatif et du marché du sions se chevauchent dans certains domaines ­ ENA. Traditionnelle­ travail dans la région M et peuvent se renforcer ­ mutuellement. Par ment, quiconque possédait un niveau d’études exemple, les notions de contrôle et d’auto- suffisant – diplôme ou certificat – avait nomie peuvent aussi bien être associées à la accès à un emploi dans le secteur p ­ ublic. A p e r ç u g é n é r a l    7 Dès lors, il devenait plus important d’obtenir du contrat social de la région (Assaad, 1997 un diplôme que d’acquérir des ­ compétences. et 2014). Les salaires élevés et le rôle dis- Les pays de la région MENA sont ainsi deve- proportionné de l’État dans l’emploi au nus des sociétés dans lesquelles il y a peu ou sein de la région MENA ont écarté le sec- pas de rapport entre les qualifications obte- teur privé (Behar et Mok, 2013 ; Nabli, nues et les compétences acquises (Assaad, 2007), et les stratégies des pouvoirs publics Krafft, et Salehi-Isfahani, 2018). Entretemps, pour accroître l’emploi de qualité dans les établissements d’enseignement n’ont pas le secteur privé ont largement échoué, été incités à veiller à ce que les qualifications maintenant ainsi à un faible niveau les impliquent que les diplômés disposent des opportunités pour les nouveaux diplômés compétences ­concernées. (Dahi 2012  ; Salehi-Isfahani 2012  ; Même si la taille du secteur public en Springborg 2011) et réduisant la demande tant qu’employeur a diminué dans de de ­compétences. nombreux pays de la région MENA, son La notion de réduction de l’emploi dans héritage perdure sous la forme d’une le secteur public, un aspect clé du nouveau « logique du diplôme » (Salehi-Isfahani, contrat social arabe, a connu peu de succès 2012). Dans celle-ci, les employeurs du dans la région (Devarajan et Ianchovichina, secteur public émettent une forte demande 2017). Depuis le Printemps arabe, les appels de qualifications tandis que les signaux à un nouveau contrat social n’ont pas émis par le secteur privé en faveur des entraîné de changement significatif dans le compétences sont ­ f aibles. En réponse aux rôle du secteur ­ p ublic. Au contraire, signaux du marché, les étudiants et leurs l’Égypte, la Jordanie et la Tunisie ont toutes familles se concentrent donc plus sur les augmenté les salaires de la fonction publique qualifications (certificats ou diplômes) que pour enrayer d’autres contestations (Capital sur les compétences que ces qualifications Economics, 2017). Même si cette approche devraient idéalement représenter (voir apaise le mécontentement social et soutient schéma 2). temporairement l’économie, elle renforce Dans les pays de la région MENA, cette simplement l’idée que l’emploi dans le sec- « logique du diplôme » résulte en partie des teur public constitue l’unique voie vers des déséquilibres du marché du travail, où l’im- salaires élevés, une carrière professionnelle posant secteur public constitue l’employeur et un bon statut au sein de la société – préféré (Barsoum, 2015 ; Banque mon- ­ m aintenant ainsi la région dans une diale, 2013­ a ). Outre ses salaires plus éle- « logique du ­diplôme ». vés, l’emploi dans la fonction publique est recherché pour son plus grand prestige, ses plus généreux avantages, et son meilleur SCHÉMA 2  La région MENA est prise dans une « logique du environnement de travail, en particulier diplôme » pour les femmes (Barsoum, 2015). Les attentes à l’égard du secteur public sont Système éducatif Forte offre également élevées parce que les possibilités de diplômes Forte demande d’emploi sont souvent traitées comme un de diplômes droit et ainsi encore davantage dissociées de ­l ’éducation. Plusieurs constitutions Faible demande Employeurs régionales comprennent le « droit au tra- de compétences privés vail », engendrant ainsi la conviction très répandue que l’emploi doit être fourni par Jeunes and Forte demande Employeurs l’État et non par le secteur privé (Barsoum, familles de diplômes publics 2015). Cette idée est un héritage des garan- ties d’emploi de l’État qui faisaient partie Source : Adapté d’Assaad, Krafft et Salehi-Isfahani (2018). 8   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région Discipline et esprit critique violente 5 affecte négativement le dévelop- pement physique, psychologique et social Les termes discipline et esprit critique ont de des enfants et entrave leur apprentissage multiples définitions et ­usages. Dans le pré- et leurs performances scolaires, réduisant sent contexte, la discipline est définie comme ainsi le développement du capital humain « la pratique consistant à former des per- (El-Kogali et Krafft, 2015 ; UNICEF, sonnes à obéir aux règles ou à un code de 2010). La discipline violente appliquée conduite » (Oxford) ou « la formation cor- aux enfants est courante dans la région rigeant, adaptant ou perfectionnant les M ENA. Dans une étude portant sur ­ facultés mentales ou la moralité » 50 pays, l’UNICEF (2013) a révélé que la ­( Merriam-Webster’s ). L’esprit critique est région MENA détient le plus fort pour- défini comme « un examen de faits ou de centage d’enfants de 2 à 14 ans subissant principes » ­ (Merriam-Webster’s). Dans les une discipline violente, ces chiffres attei- sociétés où les normes sociales sont fortes, la gnant 79 à 95 % en République du discipline permet d’en assurer le ­ respect. La Yémen, en Cisjordanie et à Gaza, en discipline est certes importante pour le res- Tunisie, en Irak, en Algérie, en Syrie pect et la retenue, mais un excès de (avant le conflit), au Maroc et en Égypte contrainte peut brider l’aptitude des élèves à (El-Kogali et Krafft, 2015). apprendre, penser, creuser des idées ou Les notions de discipline et d’esprit cri- mettre en doute des c ­ oncepts. L’esprit cri- tique sont étroitement liées à la pédagogie et tique, en revanche, permet aux élèves de aux programmes scolaires, ainsi qu’aux inte- comprendre leur environnement, de contex- ractions quotidiennes des élèves avec le tualiser des concepts au moyen de questions corps ­ e nseignant. L’importance excessive et ­d’expériences. accordée à la discipline conduit à privilégier Un certain degré de discipline est la mémorisation et l’apprentissage ­ passif. important et nécessaire, mais la discipline Dans l’ensemble de la région MENA, les programmes s’appuient dans une large mesure sur l’apprentissage par cœur SCHÉMA 3  Les élèves de la région MENA sont plus susceptibles de et laissent peu d’espace au développement de devoir mémoriser l’esprit ­c ritique. D’après les enseignants, Pourcentage des élèves de quatrième année obligés de mémoriser des faits et principes dans de nombreux pays de la région MENA, pour toutes ou presque toutes les leçons, 2015 la part des élèves de quatrième année obligée 70 d’apprendre par cœur les règles, procédures 60 58 57 57 et faits en mathématiques et en sciences pour 60 53 53 toutes ou presque toutes les leçons atteint 49 48 50 45 44 presque le double de la moyenne internatio- 42 nale (voir schéma 3). Cette part dépasse Pourcentage 40 60 % au Maroc, à Oman, au Liban, en 30 Jordanie et au Koweït, un pourcentage nette- ment supérieur à celui de nombreux pays 20 hautement ­ performants. Par exemple, seuls 10 10 % des élèves de quatrième année doivent 0 apprendre par cœur pendant la plupart des leçons de mathématiques au Canada et en e an te ie an n ïn c ït U r ta o pt Ira we EA an re di ar Nouvelle-Zélande, 11 % en Suède et aux Lib Om Qa y h u rd M Ko Ég Ba ao Jo es États-Unis, et 14 % en Irlande et à ­ Singapour. bi a Ar En raison de cet apprentissage « par cœur » Moyenne internationale des règles, procédures, faits et principes, les Source : Martin et ­coll., 2016. élèves sont incapables de faire preuve d’une A p e r ç u g é n é r a l    9 compréhension de base de leurs applications cognitives et de l’apprentissage indiquent quotidienne. Dans les Tendances de à la vie ­ que les approches interactives facilitent une l’enquête internationale sur les mathéma- expérience efficace de l ­’apprentissage. tiques et les sciences (TIMSS – Trends in (Barkley, Cross et Major, 2005 ; Prince, International Mathematics and Science 2004). Cette combinaison permet aux Study) de 2015, moins de la moitié des élèves futurs diplômés d’élargir leurs perspectives de quatrième année étaient capables de et de s’équiper des compétences nécessaires déchiffrer un graphique élémentaire, et en pour accéder au marché du t ­ ravail. Malgré Égypte et en Arabie saoudite, seuls quelque cela, dans la région MENA, les pro- 55 % des élèves de quatrième étaient en grammes d’enseignement postsecondaire mesure d’interpréter un pictogramme simple sont plus axés sur la théorie que la pra- coll., 2016). (Mullis et ­ tique ; ils ont tendance à appliquer des pro- L’accent excessif placé sur la mémorisa- grammes scolaires désuets, centrés sur la tion de faits, principes, règles et procédures théorie et le « par cœur », plutôt que sur les n’exclut pas le fait que certaines connais- connaissances pratiques et le raisonnement sances doivent être r ­ etenues. Il s’agit plutôt analytique (El Hassan, 2013). du degré d’intensité de cet accent et de l’ex- La tension entre la discipline et l’esprit périence générale de l’élève en c ­ lasse. La critique concerne également les relations science cognitive fournit des informations entre le corps enseignant et la direction des permettant de nuancer la compréhension de établissements et celles entre les parents et l’équilibre entre l’apprentissage par cœur et leurs ­ enfants. Dans de nombreux pays de la les processus de plus haut niveau tels que région MENA, l’obéissance est perçue l’apprentissage par la ­ découverte. La capa- comme une qualité particulièrement impor- cité à résoudre des problèmes et à porter un tante que les enfants doivent acquérir à la regard critique sur une nouvelle matière maison. Des qualités plus liées à l’esprit cri- ­ dépend des connaissances de base conservées tique, telles que l’imagination et l’expres- en mémoire (Kirschner, Sweller et Clark, sion de soi, sont moins encouragées (voir 2006). Une pratique répétée de la réflexion schéma 4). En outre, la tension entre la dis- est essentielle pour l’acquisition de connais- cipline et l’esprit critique se retrouve égale- sances et compétences fl ­ exibles. En outre, les ment dans les sociétés où il existe des élèves ont besoin d’être encadrés par les normes sociales fortes en matière de classe enseignants pour développer les connais- sociale, genre ou ­ hiérarchie. Par exemple, sances et compétences nécessaires à un tra- une récente enquête complète auprès vail cognitif indépendant et ­ c omplexe. Il des ménages, réalisées sur des hommes et existe donc idéalement un équilibre entre femmes de 18 à 59 ans a révélé qu’en l’apprentissage par cœur et la résolution de Égypte, 90 % des hommes et 58 % des problèmes de haut niveau et, selon la tâche femmes étaient d’accord avec la déclaration et le niveau, toute la question est de trouver « au sein de son foyer, un homme doit avoir l’équilibre ­approprié. le dernier mot dans les décisions » (ONU La tension entre la discipline et l’esprit Femmes et Promundo, 2017). Les résultats critique existe également dans l’enseigne- étaient similaires en Cisjordanie et à Gaza ment supérieur, où elle peut entraver l’offre (80 % des hommes et 48 % des femmes) et de recherche multidisciplinaire, axée sur les au Maroc (71 % des hommes et 47 % des solutions et à impact élevé (Banque mon- f emmes). Ces normes sociales peuvent ­ diale, 2017­ a). Les programmes d’enseigne- affecter négativement l’attitude des femmes ment supérieur efficaces privilégient la et jeunes filles à l’égard de l’esprit critique formation pratique plutôt que la connais- et du droit de poser des questions tant à la sance t ­héorique. Les preuves de plus en maison que dans d’autres contextes tels plus solides fournies par les sciences que l’école, l’université ou le lieu du ­ travail. 1 0   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région SCHÉMA 4  L’obéissance joue un rôle central dans l’éducation des enfants de la région MENA Pourcentage des répondants à l’enquête ayant mentionné l’obéissance, l’imagination ou l’expression de soi comme des qualités particulièrement importantes que les enfants doivent être encouragés à acquérir à la maison  70 60 50 Pourcentage 40 30 20 10 0 en k ya ït ie rie za r te sie oc an ta Ira we an yp Ga Lib ar Lib m gé ni Qa rd M Ko Ég Yé Tu Al et Jo ie an rd sjo Ci Obéissance Imagination Expression de soi Source : Enquête World Values, Vague 6 (2010-2014), Inglehart et ­coll. (2014). Note : Ces résultats sont tirés de la question suivante : « Voici une liste de qualités que les enfants peuvent être encouragés à acquérir à la ­maison. La ou lesquelles considérez-vous comme particulièrement importantes ? Veillez choisir au maximum 5­ réponses ». Les réponses potentielles comprennent : l’indépendance, le travail acharné, le sens des responsabilités, l’imagination, la tolérance et le respect d’autrui, l’économie ou épargne, la détermination ou persévérance, la foi religieuse, le désintéressement, et l’expression de ­soi. Contrôle et autonomie degrés de ­réussite. Dans certains cas, le pou- La tension entre contrôle et autonomie est voir décisionnel était accordé, mais pas généralement associée au débat sur la décen- soutenu par les ressources nécessaires pour tralisation des services et l’équilibre des mettre en œuvre les d ­ écisions. Par exemple, p ouvoirs entre les ministères centraux, ­ en 2002-2007, la décentralisation en Égypte les administrations régionales et les établisse- n’a pas été appuyée par des ressources finan- ments s ­ colaires. En général, la décentrali- cières suffisantes (Ginsburg et c ­ oll., 2010). sation a pour objectif d’améliorer la Dans les années 2000, la décentralisation gouvernance en favorisant l’autonomie, la semble avoir été suffisamment financée en redevabilité et la réactivité aux conditions et Arabie saoudite, mais les tâches et devoirs aux besoins ­ locaux. Ces éléments peuvent à transférés au niveau local étaient plus admi- leur tour améliorer l’apprentissage des nistratifs qu’axés sur le développement des ­ élèves. Au cours des dernières décennies, plu- établissements scolaires locaux (Almannie, sieurs pays de la région MENA ont expéri- 2015). Dans d’autres cas, des politiques ont menté certains aspects de la décentralisation, déployé un modèle décentralisé sans mettre de la déconcentration et du transfert de pou- en place la capacité d’assumer les fonctions voir du niveau central vers les niveaux décentralisées au niveau régional ou s ­ colaire. régional et scolaire, mais leurs systèmes édu- Par exemple, les académies régionales catifs sont restés très ­ centralisés. Ces tenta- d’éducation et de formation (AREF) du tives de décentralisation ont connu divers Maroc se sont vu accorder une autonomie ne A p e r ç u g é n é r a l    11 leur permettant que de gérer certaines déci- SCHÉMA 5  Les enseignants de la région MENA ont moins sions logistiques et financières sur la base de d’autonomie que ceux des pays de l’OCDE Pourcentage des élèves de 15 ans fréquentant des établissements scolaires dans lesquelles directives fournies par les autorités centrales les enseignants sont largement responsables des décisions pédagogiques (PISA, 2015) (Banque mondiale, 2015­ c). Aucune formule magique ne permet d’at- 90 teindre l’équilibre entre le contrôle centralisé 80 et l’autonomie dans l ­’enseignement. Il doit 70 être déterminé au sein du contexte du pays en 60 Pourcentage tenant compte de la taille, de la géographie et 50 40 de la répartition de la population de ­ celui-ci. 30 L’important est de trouver un équilibre dans 20 la définition des rôles et responsabilités des 10 acteurs institutionnels (par exemple, le pou- 0 voir central, les autorités locales et les com- Tunisie Jordanie Algérie Qatar EAU Liban Moyenne munautés) et de définir le lieu de contrôle des OCDE processus éducatifs et les mécanismes utilisés Politiques de discipline des élèves Politiques d'évaluation des élèves pour piloter le système (Banque mondiale, Contenu des cours Manuels 2005). En d’autres termes, l’équilibre entre le a. Source : OCDE, 2016­ contrôle central et l’autonomie doit refléter les Note : OCDE = Organisation de coopération et de développement économiques ; PISA = ­Programme international pour le suivi des acquis des ­élèves. rôles et responsabilités dévolus à la gouver- nance centrale par rapport à la gouvernance locale, ainsi que le pouvoir et la redevabilité essentiel d’un enseignement efficace (Evans et politiques par rapport au pouvoir et à la rede- Popova, 2015). Une autonomie limitée aux vabilité ­professionnels. niveaux régional, provincial et scolaire en Une autonomie limitée de l’établissement matière d’embauche et d’affectation des ensei- scolaire et du corps enseignant peut empêcher gnants limite également les possibilités de les directeurs d’établissement et les ensei- faire correspondre les caractéristiques des gnants de se montrer proactifs dans le proces- enseignants avec les besoins ­ d’enseignement. sus d’apprentissage, et d’assumer la Une plus forte autonomie dans les établis- responsabilité des acquis des élèves, s’ils ne se sements d’enseignement supérieur a tendance considèrent que comme des exécutants d’une à produire de meilleurs résultats (Aghion et approche centralisée (Akkary, 2014). Dans la coll., 2009 ; Banque mondiale, 2011). Malgré ­ région MENA, les enseignants ont nettement cela, la plupart des universités de la région moins de responsabilités décisionnelles que MENA n’ont qu’une autonomie très limitée ceux des pays membres de l’Organisation de sur les questions académiques, de recrutement coopération et de développement écono- financières. En 2012, la Banque mondiale a et ­ miques (OCDE) (voir schéma 5). Des études comparé les pratiques de gouvernance de menées en République islamique d’Iran, en 100 universités en Algérie, en Égypte, en Irak, Jordanie et au Koweït ont montré que les au Liban, au Maroc, en Tunisie, et en autorités centrales y contrôlaient strictement Cisjordanie et à Gaza (Banque mondiale, le contenu des programmes scolaires et les 2013­ c). L’autonomie des établissements était pratiques pédagogiques, laissant peu d’auto- très faible dans les universités publiques, les nomie aux enseignants (Afshar et Doosti, décisions relatives à des sujets tels que le pro- 2016 ; Al-Yaseen et Al-Musaileem, 2015 ; gramme scolaire, le recrutement du corps pro- Banque mondiale, 2015d ; Namaghi, 2009). fessoral et la collecte de fonds étant prises par Une autonomie limitée des enseignants nuit les autorités locales ou ­centrales. Les universi- à la satisfaction au travail et à l’acquisition tés privées, en revanche, jouissaient d’une net- des compétences des élèves, notamment parce tement plus grande autonomie dans les sept qu’elle empêche les enseignants de s’adapter économies de la région MENA considérées au niveau réel de leurs élèves, un aspect (Banque mondiale, 2013­ c ). Lors d’une 1 2   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région enquête de suivi menée en 2016, le degré englobe à la fois l’apprentissage et l’enseigne- d’autonomie ne semblait pas avoir beaucoup ment (l’acquisition et le don de connaissance changé pour les universités tant publiques que ou de ­science). En arabe, « éducation » se dit privées (Banque mondiale, 2017­ b).6 Il est également tarbiya, qui désigne l’éducation intéressant de constater qu’une comparaison dans le sens de faire grandir ou ­ d ’élever. entre les notes autoattribuées et les notes Il contient la racine rabba qui signifie élever réelles de l’enquête révèle que les institutions ou ­éduquer. Taalim et tarbiya ont un sens publiques perçoivent leur autonomie comme proche des mots latins educere (diriger et for- supérieure à celle déterminée par l’évaluation mer) et educare (élever et éduquer) (Bass et externe, tandis que les universités privées se Good, 2004 ; Cook, 1999). font une idée plus exacte de leur propre degré Au cœur du débat sur la tradition et la d’autonomie (Banque mondiale, 2017­ b). modernité se trouve le degré auquel l’éduca- Une plus grande autonomie à un niveau tion doit être centrée sur l’acquisition de décentralisé requiert des capacités, des res- connaissance ou de science (taalim) par rap- sources et des mécanismes de ­ redevabilité. port à l’acquisition de valeurs ­(tarbiya). Cette Lorsque l’autonomie et la redevabilité sont question est illustrée par l’évolution des noms bien combinées, elles s’accompagnent généra- donnés aux ministères de l’Éducation dans les lement de meilleures performances des élèves pays de la région ­ MENA. Ils sont passés de (OCDE, 2011­ a). Les établissements scolaires « ministères de Tarbiya » à « ministères de dotés de plus d’autonomie en matière de Taalim », certains pays utilisant les deux contenu des cours, d’évaluation des élèves et termes dans la même ­ dénomination.7 Lorsque d’allocation des ressources ont tendance à les ministères de l’Éducation ont été créés au avoir de meilleurs résultats que ceux qui en milieu du XXe siècle, après l’indépendance ont ­moins. En fin de compte, les systèmes sco- dans la plupart des pays de la région MENA, laires de la région MENA doivent trouver un ils s’appelaient « ministères de Maarif » – le équilibre entre le contrôle et l’autonomie, pluriel de maarifa ­(connaissance). L’Égypte, soutenant au mieux l’apprentissage et fournis- par exemple, a commencé avec le « ministère sant aux établissements scolaires les res- de Maarif », avant de le renommer « minis- sources et la flexibilité nécessaires pour fixer tère de T­ aalim ». Actuellement, il s’appelle et atteindre des objectifs ambitieux en matière « ministère de Tarbiya et de ­ Taalim  ». Ce d’acquis ­scolaires. changement a été une décision délibérée prise durant le mandat du président Jamal Abdel Nasser, qui considérait l’éducation comme le Tradition et modernité processus requis pour former une personne Selon certains spécialistes, le plus grand défi dans son intégralité et pour façonner l’identité auquel sont confrontés les pays de la région égyptienne (Ahramonline, 2015). MENA est de mettre en adéquation les Les valeurs et principes véhiculés par l’édu- besoins de développement du monde moderne cation dans la région MENA sont modelés et les impératifs moraux d’une société reli- par des discours nationaux généralement gieuse, donnant lieu à une tension entre dominés par les élites et des groupes p­ uissants. modernité et tradition (Cook, 2000). L’accent Les salles de classe et les programmes mis sur la tradition plutôt que sur la moder- deviennent les arènes où se joue la lutte entre nité, ou la puissance du changement, peut modernité et t ­radition. Les pays de la région entraîner des conflits au sein des processus MENA ne sont pas les seuls à connaître cette éducatifs (Massialas et Jarrar, 1987). Cette tension entre tradition et modernité au tension se retrouve dans la définition et le but moment de définir l’objectif de ­ l’éducation. de ­l ’éducation. Taalim (« éducation » en Tout au long de l’histoire, les pays du monde arabe) contient la racine ilm (« connais- entier ont eu des difficultés à se moderniser sance ») dont le pluriel est ouloum, qui signi- tout en maintenant leurs normes culturelles, fie également science ou ­ sciences. Taalim leurs valeurs et leurs traditions, avec A p e r ç u g é n é r a l    13 l’éducation en tant que ­ vecteur. Lorsque le région MENA sont liés à la tradition orale gouvernement Meiji (1868-1912) a mis en des Arabes d’avant l’islam, qui a été utilisée œuvre des réformes fondées sur les modèles pour conserver et diffuser les préceptes de éducatifs occidentaux, les Japonais ont eu ­l’islam. peur de perdre leur identité et leurs v ­ aleurs. Bien qu’il revienne aux pays de déterminer Ces craintes ont conduit à la publication du quelles valeurs ils souhaitent transmettre à « Rescrit impérial sur l’éducation » de 1890, leurs citoyens, il est important de reconnaître mettant l’accent sur les valeurs japonaises et les compromis nécessaires au niveau du temps les principes ­ confucéens. Depuis lors, la poli- alloué aux différentes matières ; plus de temps tique éducative japonaise a préservé un équi- accordé à l’éducation religieuse implique libre entre le maintien des valeurs japonaises moins de temps pour d’autres disciplines telles traditionnelles et l’intégration de certains que les mathématiques et la ­ science. Il est éga- aspects des meilleurs systèmes éducatifs du lement important de reconnaître l’impact sur monde (OCDE, 2010). Ernst Friedrich l’apprentissage des modes d’enseignement Schumacher, un économiste britannique des traditionnels. Dans de nombreux pays de la ­ années 1970, soutenait que le but de l’éduca- région MENA, les propositions de réforme du tion est de transmettre les valeurs « grâce système éducatif se sont heurtées à une oppo- auxquelles nous appréhendons, interprétons sition, car elles étaient perçues comme une et vivons le monde » et que la science « ne tentative pour modifier l’identité ­ nationale. peut produire des idées guidant nos vies [ ­ ...] et En Jordanie, par exemple, l’introduction de ne s’applique en aucun cas à la façon de réformes du programme scolaire a suscité une mener notre existence ou à notre interpréta- levée de boucliers, principalement de la part tion du monde » (Schumacher, 1973). Selon des groupes religieux conservateurs qui l’ont lui, l’éducation n’a aucune valeur si elle ne qualifiée de tentative pour saper les valeurs et transmet pas des convictions ­ fondamentales. l’identité islamiques du royaume (Kirdar, En d’autres termes, le but de l’éducation se 2017). De même, au Koweït, divers groupes rapproche essentiellement du concept de tar- ont protesté contre les réformes en cours du biya et non de ­ taalim. programme scolaire, l’accusant d’imposer des Les valeurs traditionnelles et les convic- concepts ­importés. tions fondamentales des pays de la région La modernité n’implique pas d’importer MENA sont ancrées dans l’islam, qui consti- un modèle s ­ pécifique. Dans de nombreux tue le fondement de l’identité nationale.8 Ces pays de la région MENA, la modernité est valeurs et convictions sont au cœur de associée aux approches et modèles occiden- l’éducation. La part du temps d’instruction ­ taux, un argument utilisé à la fois par les par- consacrée à l’éducation religieuse dans la plu- tisans et les opposants au ­ changement. La part des pays de la région MENA est nette- modernisation est un processus à travers ment supérieure à celle dédiée en moyenne à lequel les normes sociales évoluent et sont la religion, l’éthique et la morale dans les pays renouvelées ; et la modernité peut prendre des de l’OCDE (voir schéma 6). Par exemple, sur formes ­ multiples. Il ne s’agit aucunement de la base des dernières informations compa- remplacer la tradition par une forme de rables disponibles, en Arabie saoudite, en modernité, mais plutôt de revoir les pratiques Bahreïn, dans les Émirats arabes unis, en Irak, et normes traditionnelles qui entravent le au Koweït, au Maroc et en République du potentiel de l’enseignement, et d’entamer un Yémen, les élèves de première année processus de ­ renouvellement. À mesure que le consacrent plus du double de la moyenne de monde évolue, la modernité est ­ inéluctable. l'OCDE (5%) à l'éducation religieuse. Les pays de la région MENA doivent préparer L’éducation religieuse reflète également les leurs élèves en les équipant des connaissances, pratiques traditionnelles d’apprentissage compétences et valeurs nécessaires pour parti- centrées sur la m ­ ­ émorisation. Les fondements ciper à un monde en pleine mutation, s’y de l’apprentissage « par cœur » dans la adapter et y ­ réussir. 1 4   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région SCHÉMA 6  Un temps considérable est consacré à l’éducation religieuse dans la région MENA Pourcentage du temps d’enseignement consacré à l’éducation religieuse en première année primaire 30 28 20 18 Pourcentage 15 15 15 13 12 10 10 9 7 6 5 0 Yémen Arabie Maroc Oman Irak Koweït Bahreïn EAU Égypte Djibouti Algérie Tunisie saoudite Moyenne de l'OCDE Sources : OCDE (2017a) : moyenne de l’OCDE (concerne toutes les années primaires) ; UNESCO Données mondiales de l'éducation: Septième édition 2010-11: Algérie (2004) ; Bahreïn (2004) ; Djibouti (2008) ; Irak (2011) ; Koweït (2004) ; Oman (2004) ; République du Yémen (2004) ; Tunisie (2008). Calculs de la Banque mondiale basés sur des sources en ligne pour l'Égypte (2014), le Maroc (2016), les Émirats arabes unis (2016) et l'Arabie saoudite (2017). Note : OCDE = Organisation de coopération et de développement économiques. Un nouveau cadre est nécessaire nouveau pacte pour l’éducation (voir schéma 7). Le reste de ce rapport décrit les pour réaliser le potentiel de actions à prendre pour mettre en œuvre ce l’éducation dans la région MENA ­cadre. Pour réaliser le potentiel de l’enseignement, En lien avec cet effort, le Rapport 2018 de les pays de la région MENA doivent s’atta- la Banque mondiale sur le développement quer aux quatre tensions et mettre en place dans le monde met en évidence la crise mon- un système éducatif préparant tous les diale de l’apprentissage (Banque mondiale, élèves à un avenir productif et couronné de 2018­ e). Il met en lumière l’ampleur de la crise succès. Un tel système doit être moderne et ­ et propose une voie à suivre cadrant bien avec souple, et entretenir une culture de l’excel- les notions de renforcement de l’offre, d’ac- lence et de la créativité dans ­ l’apprentissage. croissement de la demande et de pacte décrites Il doit également tirer profit des technolo- ici. Il souligne une nouvelle fois à quel point il ­ gies perturbatrices et adopter des approches modernes afin d’offrir aux jeunes les com- SCHÉMA 7  Les notions de « renforcement de pétences dont ils ont besoin pour définir l’offre, d’accroissement de la demande et de leur trajectoire de vie et pour s’adapter pacte » offrent un nouveau cadre à l’éducation aux changements locaux, nationaux et dans la région MENA ­ mondiaux. Enfin, il doit être fondé sur une vision nationale commune, et être lié aux Une demande accrue de objectifs de développement généraux du compétences pays. La société tout entière doit prendre sa ­ Un nouveau pacte pour part de responsabilité dans son ­ succès. Pour l’éducation mettre en place un tel système, les pays de la région MENA doivent adopter un nouveau Un renforcement cadre pour l’éducation – comprenant un de l’offre éducative renforcement concerté de l’offre éducative, une demande accrue de compétences, et un Source : Banque mondiale A p e r ç u g é n é r a l    15 ENCADRÉ 2 Rapport sur le développement dans le monde 2018 : Apprendre à réaliser les promesses de l’éducation Le faible niveau d’apprentissage n’a rien d’une fata- pour que l’ensemble du système fonctionne en faveur lité dans les pays à revenu faible et ­i ntermédiaire. de ­l’apprentissage. Ensemble, ces trois actions poli- Quand l’amélioration de l’apprentissage est une tiques peuvent donner lieu à un système cohérent, priorité, de grands progrès deviennent possibles, où chaque élément contribue à l’apprentissage des comme en témoignent des réussites telles que celle ­ élèves. Le résultat de ces efforts est une éducation qui de la République de C ­ orée. Pour s’améliorer, un contribue à la croissance et au ­ développement. Des pays doit 1) évaluer l’apprentissage, pour en faire un pays s’y sont déjà attelés en scolarisant de nombreux objectif sérieux ; 2) agir sur la base de faits, pour enfants et ­ jeunes. Le moment est venu de concrétiser que les établissements scolaires soient utiles à tous les promesses de l’éducation en accélérant l’appren- les apprenants ; et 3) mettre d’accord les acteurs, tissage pour ­tous. Source : Banque mondiale (2018­e). est important que toutes les parties prenantes le nombre d’années d’études effectives est en collaborent pour promouvoir un accent sur moyenne inférieur de 2,9 au nombre d’an- l’apprentissage et les compétences (voir nées d’études ­réelles. En d’autres termes, la encadré 2). piètre qualité de l’éducation dans la région MENA correspond à peu près à trois années d’études perdues (Banque mondiale, ­ 2018­e). Renforcer l’offre éducative Par exemple, en 2010, les jeunes adultes jor- daniens affichaient en moyenne 11 années Se concentrer sur l’apprentissage, pas d’études, tout comme ceux de la Nouvelle- seulement sur la scolarisation Zélande et du Kazakhstan (schéma 9). Le potentiel de l’éducation ne se réalise que Après ajustement à l’apprentissage, la lorsque celle-ci confère les compétences et les Jordanie perdait deux à trois années connaissances qui constituent le capital d’études par rapport à la Nouvelle-Zélande humain. Ce sont, en fait, les compétences ­ Kazakhstan. et au ­ acquises par l’apprentissage – et non les La crise de l’apprentissage dans la région années d’études – qui déterminent la contri- MENA se manifeste à travers toutes les bution de l’éducation à la croissance écono- années primaires et secondaires et dans dif- mique (schéma 8) (Barro et Lee, 2013 ; matières. Aucun pays de la région férentes ­ Hanushek et Woessmann, 2008 ; Banque MENA n’est proche du niveau médian mondiale, 2018­e). international du pourcentage d’élèves attei- La région MENA a relevé le défi de la gnant les faibles niveaux de référence inter- scolarisation, elle doit maintenant en faire nationaux des récentes Tendances de autant pour celui de l ­’apprentissage. Le l’enquête internationale sur les mathéma- nombre d’années d’études réelles a aug- tiques et les sciences (TIMSS – Trends in menté dans l’ensemble de la région MENA, International Mathematics and Science certains pays atteignant une moyenne Study ) et du Programme international de proche d’un cycle complet d’enseignement recherche en lecture scolaire (PIRLS) (voir primaire et ­secondaire. Toutefois, dans la tableau 1). Seuls 42 % des élèves égyptiens région MENA, lorsque le nombre d’années de huitième année avaient une compréhen- d’études réelles est ajusté à l’apprentissage, sion de base des ­ sciences. Au Maroc, seuls 1 6   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région SCHÉMA 8  Ce qui compte pour la croissance, ce sont les compétences Croissance moyenne annuelle du PIB par habitant entre 1970 et 2015, en fonction des résultats aux tests, du nombre d’années d’études effectuées, et du PIB par habitant initial a. Résultats aux tests et croissance (en fonction du PIB b. Années d’études et croissance (en fonction du PIB initial par habitant et du nombre d’années d’études) par habitant initial et des résultats aux tests) 3 y = 0.00 + 0.07 x Croissance annuelle du PIB par habitant (%) Croissance annuelle du PIB par habitant (%) 3 t = 0.82 2 R2 = 0.02 2 1 1 0 0 –1 y = 0.00 + 1.59 x t = 7.39 –1 –2 R2 = 0.55 –3 –2 –1.5 –1 –0.5 0 0.5 1 –2 –1 0 1 2 3 Scores aux tests Années d'études Source : Rapport sur le développement dans le monde 2018, schéma 1.5 (Banque mondiale, 2018­e). 36 % des élèves de quatrième année attei- premières années d’études – nécessaires à gnaient un niveau minimum en ­ l ecture. l’apprentissage et à la réussite futurs. Selon les résultats de l’évaluation 2015 du 2. Veiller à ce que les enseignants et les Programme international pour le suivi des chefs d’établissement, qui sont les mail- acquis des élèves (PISA), en Algérie, en lons les plus importants du processus Jordanie, au Liban, au Qatar, en Tunisie et d’apprentissage, soient qualifiés, correc- dans les Émirats arabes unis, les élèves de tement sélectionnés, utilisés à bon 15 ans accusent en moyenne un retard de escient, et encouragés à se perfectionner deux à quatre années d’études par rapport professionnellement. aux pays membres de l’OCDE, dans l’appli- 3. Moderniser la pédagogie et les pratiques cation de leurs connaissances et compé- d’enseignement pour encourager la tences en lecture, en mathématiques et en réflexion, la créativité et l’innovation. sciences à des situations de la vie r ­ éelle. 4. Régler le problème de la langue d’ins- L’Algérie et le Liban, qui ont tous deux par- truction, compte tenu du décalage entre ticipé à l’enquête PISA pour la première fois l’arabe parlé et l’arabe standard moderne. en 2015, ont constaté que plus des deux Le lien étroit entre la langue, la religion tiers de leurs élèves ne maîtrisaient pas les et l’identité nationale rend difficile de compétences de base en sciences, lecture et formuler une recommandation régionale. ­mathématiques. Ce phénomène est certes régional, mais il Le faible rendement de l’apprentissage se manifeste de maintes façons diffé- dans les pays de la région MENA requiert un rentes selon les pays. Une approche spé- renforcement de l’offre dans plusieurs aspects cifique doit donc être adoptée pour du processus ­ éducatif. Pour renforcer l’offre chaque pays. éducative, les pays doivent concentrer leurs 5. Effectuer des évaluations de l’apprentissage efforts sur sept domaines clés : pour suivre de manière régulière les progrès des élèves dans leur apprentissage. 1. Garantir l’acquisition des compétences de 6. Donner à tous les enfants une chance d’ap- base – depuis la petite enfance jusqu’aux prendre, quels que soient leur sexe, leur A p e r ç u g é n é r a l    17 SCHÉMA 9  Ajusté à l’apprentissage, le nombre d’années d’études effectives chute considérablement dans la région MENA Années d’études réelles et années d’études ajustées à l’apprentissage des jeunes de 25 à 29 ans a. Années d'études réelles 16 14 15 13 13 13 13 13 13 13 14 14 14 12 12 12 12 13 11 11 11 12 12 12 10 10 10 11 11 11 11 9 10 10 8 8 9 Années 8 6 6 6 4 2 0 Qa ïn riq o na vé e Irl nie ng e Isr ie Ro Mal l e- n Ko roc hr t p. ab sao AU iq Égy te Th d’Ir e aïl an uv J u S e ell or ud Ka Zéla nie Lit hst e hu an n d C nie e Su lie e ala e ya Ja te on ts-U a Ré ap e Co r e Sin , Ch is Af N swa e str ie rq ar on É Can Uni Ré .ar e E e aë p. ou Ba eï g K ta ad Slo isi d g za nd e R hil èd M Itali Ho nd g in t ré t d ui um po g n r Au uss e t am d’ di ue p a ue rvè Bo an w e- da a a a isl e u M u k T b i tio Ré Ara ra No p dé eH Fé Sd RA b. Années d'études ajustées à l'apprentissage 16 14 14 14 13 13 12 11 11 11 11 10 10 10 11 11 11 10 9 9 10 10 10 8 9 9 7 7 7 7 Années 8 6 6 6 6 6 6 6 6 4 4 4 2 0 tsw ïn e d rq a vé e ga rée ie ow c ou ït ue Qa te du tar Bo ahre d r e iq E ie aïl an e- vè i l e Lit alais e Ka hu ie kh ie n str ie n d Su lie us e M ie I ie Ro I ngr l ya rla ie e e s-U a Ré , Ch n Sin .Co e ur Th d’Ir U uv N C e ’Ég uie Ét na i on Ja is ell o hil Ho sraë Ca -Un ab K aro ab Tu an at d Slo alt e R èd Jo ypt Zé g M and um nd p in d sta g po B Su sa e n ue A am dan za an Au Ital s n di po a an M r riq gK tio Af ar Ar isl ra on No p. dé p. eH Ré Ré Fé Sd RA Sources : Banque mondiale (2018e), d’après les données de 2010 de Barro et Lee (2013) et du TIMSS de 2015 (Mullis et ­coll., 2016). Note : Pour les besoins de cette illustration, les années d’études sont ajustées à l’aide des résultats en mathématiques des élèves de huitième année, tirés des Tendances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences (TIMSS) de 2015. Les résultats sont comparés à ceux de Singapour (l’économie enregistrant les meilleurs ­résultats). race, leurs origines ou leurs capacités. Il Accorder la priorité aux premières s’agit là d’une condition essentielle pour années pour donner des bases à l’amélioration des résultats scolaires au l’apprentissage niveau national. Commencer dès la petite enfance 7. Exploiter la technologie pour améliorer La période allant de la naissance jusqu’à l’offre éducative et promouvoir l’appren- l’âge d’environ 6 ans, pendant laquelle le cer- tissage auprès des élèves et des éducateurs, veau connaît son plus grand développement, et pour préparer les élèves à un monde de est essentielle pour le développement de plus en plus numérique. 1 8    Ambitions e t aspir ations d'une région TABLEAU 1  Les pays de la région MENA affichent des résultats parmi les plus faibles aux évaluations internationales des élèves Pourcentage des élèves atteignant les références internationales faibles des enquêtes TIMSS 2011 et 2015 et PIRLS 2016 Mathématiques (TIMSS) Quatrième année Huitième année 2011 2015 2011 2015 Médiane internationale 90 93 Médiane internationale 75 84 Bahreïna 67 72 Bahreïna 53 75 Émirats arabes unisa 64 68 Émirats arabes unis 73 73 ­ Rép. islamique d’Iran 64 65 Liban 73 71 Qatara 55 65 Rép. islamique d’Irana ­ 55 63 Omana 46 60 Qatara 54 63 Arabie saouditeb 55 43 Omana 39 52 Maroca 26 41 Rép. arabe d’Égypte ­ 47 Koweïtb 30 23 Jordanieb 55 45 Maroca 36 41 Koweït 37 Arabie saouditeb 47 34 Sciences (TIMSS) Quatrième année Huitième année 2011 2015 2011 2015 Médiane internationale 92 95 Médiane internationale 79 84 Bahreïn 70 72 Émirats arabes unis 75 76 Émirats arabes unisa 61 67 Bahreïna 70 73 Qatara 50 64 Rép. islamique d’Iranb ­ 79 73 Rép. islamique d’Iranb ­ 72 61 Omana 59 72 Omana 45 61 Qatara 58 70 Arabie saouditeb 63 48 Jordanieb 72 63 Maroca 16 35 Liban 54 50 Koweïtb 37 25 Koweït 49 Arabie saouditeb 68 49 Maroca 39 47 ­ Rép. arabe d’Égypte 42 Lecture (PIRLS) Quatrième année 2011 2016 Médiane internationale 95 96 Émirats arabes unisa 64 68 Qatara 60 66 Rép. islamique d’Iranb ­ 76 65 Arabie saoudite 65 63 Omana 47 59 Maroca 21 36 Sources : Martin et ­coll. ; Mullis et ­coll. (2016, 2017). Note : Les médianes internationales pour 2011 et 2016 ne peuvent être comparées, car l’ensemble des pays n’est pas le même pour les deux ­années. L’Égypte et le Koweït n’ayant pas participé à l’enquête TIMSS sur la huitième année en 2011, leurs cellules sont laissées ­vides. a. Augmentation statistiquement significative entre 2011 et 2015/2016. b. Diminution statistiquement significative entre 2011 et 2015/2016. A p e r ç u g é n é r a l    19 l’enfant (Berlinski et Schady, 2015 ; d’opportunité du rattrapage du retard à l’aide Heckman, 2006 ; Leseman, 2002). Au cours de cours de remédiation peuvent être élevés de ces années, plus d’un million de nouvelles au cours des années ­ suivantes. Pour tirer plei- connexions neuronales se forment chaque nement parti du rendement élevé du DPE, les ­ seconde. C’est également au cours de cette pouvoirs publics doivent élargir l’accès à des période que les éléments constitutifs du cer- programmes de DPE de qualité, comprenant veau se créent et que l’environnement de des interventions de nutrition prénatale et l’enfant stimule son développement cérébral néonatale, de santé et d’éducation parentale, (Center on the Developing Child, 2009 ; ainsi qu’une stimulation socioaffective et Shonkoff et Garner, 2012). Les expériences ­cognitive. et l’environnement précoces de l’enfant, en La région MENA n’a pas suffisamment particulier les pratiques parentales dont il investi dans le ­ DPE. En conséquence, la plu- bénéficie, constituent des contributions part des enfants arrivent à l’école sans avoir majeures à son développement cognitif pré- été préparés à ­l’apprentissage. Le taux brut de coce (Paxson et Schady, 2007). Les interven- scolarisation dans l’enseignement préscolaire tions parentales et de développement, en atteint à peine 31 %, moins que dans de nom- particulier celles ciblant les enfants défavori- breuses autres régions et avec de grandes dif- sés, peuvent avoir des répercussions impor- férences entre les pays (voir schémas 10 et tantes (sans doute les plus importantes) sur 11). En outre, la région MENA propose éga- le capital humain (Hamadani et ­ coll., 2006 ; lement la plus faible offre publique d’ensei- Heckman, 2006 ; Temple et Reynolds, gnement préscolaire, avec seulement 29 % 2007). Les programmes de développement d’inscriptions dans les programmes publics, de la petite enfance (DPE), comprenant des contre 71 % dans les écoles maternelles et programmes à domicile, des centres, et un crèches privées (El-Kogali et Krafft, 2015). enseignement préscolaire (maternel), peuvent Il ne suffit pas d’étendre la couverture du jouer un rôle important dans l’accumulation DPE : sa qualité est également i ­mportante. du capital humain avant l’école ­ primaire. Des programmes de DPE de qualité peuvent Toutefois, l’impact des programmes de DPE dynamiser le développement intellectuel et dépend de leur qualité et peut être plus signi- social de l’enfant, en le préparant à l’appren- ficatif pour les enfants défavorisés (Berlinski, tissage à l’école primaire (Heckman, 2006). Galiani et Gertler, 2009 ; Berlinski, Galiani De nombreuses données prouvent que les pro- et Manacorda, 2008 ; Bouguen et ­ c oll., grammes d’enseignement préscolaire de qua- 2013 ; Hazarika et Viren, 2013 ; Jung et lité spécialement conçus pour les enfants Hasan, 2014 ; Temple et Reynolds, 2007 ; défavorisés ont un impact positif sur les reve- Vegas et Santibáñez, 2010). nus des bénéficiaires et réduisent même la cri- À cause de l’importance du développement minalité (Elango et c ­ oll., 2015 ; Schweinhart de la petite enfance, les effets les plus forts et coll., 2005). Ces programmes sont égale- et ­ les plus rentables de l’investissement public ment plus rentables que d’autres interventions dans l’éducation peuvent être obtenus au d’éducation – telles que la réduction de la cours des premiers stades de la v ­ ie. En jetant taille des classes – et contribuent à la diminu- les bases des compétences cognitives et socioé- tion des écarts de performance entre les motionnelles, les investissements engagés au différents statuts socioéconomiques, ethnies ­ cours des premières années sont les plus ren- et origines géographiques (Glewwe, 2013 ; tables en ce qui concerne la future producti- Heckman, 2006). vité (Banque mondiale, 2018­ a). En revanche, Les pays de la région MENA devraient si la croissance du développement n’est pas accélérer l’élargissement de l’accès à un ensei- soutenue dès le plus jeune âge, les enfants gnement préscolaire de q ­ ualité. Peu de don- peuvent arriver à l’école avec un vrai retard nées étant disponibles sur les programmes par rapport à leurs ­ condisciples. Les coûts d’éducation de la petite enfance (EPE) mis en 2 0   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région SCHÉMA 10  Dans la région MENA, les inscriptions dans l’enseignement préscolaire sont inférieures à celles de nombreuses autres régions Tendances des taux bruts de scolarisation dans l’enseignement préscolaire, 1976, 1996 et 2016 100 80 79 73 74 60 59 60 Pourcentage 50 49 40 31 33 28 30 22 20 18 13 15 14 15 14 11 9 9 0 Asie de l’Est et Amérique latine Moyen-Orient et Afrique Europe et Asie du Sud Monde Paci que et Caraïbes Afrique du Nord subsaharienne Asie centrale 1976 1996 2016 Source : Banque mondiale, base de données des statistiques de l’éducation (EdStats - http://datatopics.worldbank.org/education/), fondée sur les données de l’Institut de statistique de l’UNESCO. SCHÉMA 11  Fortes différences dans les taux de scolarisation dans l’enseignement préscolaire de la région MENA Taux bruts de scolarisation dans l’enseignement préscolaire 100 86 82 79 80 68 60 Pourcentage 57 55 54 60 51 50 44 40 35 31 30 25 20 7 6 2 0 ) rie 6) we 01) ) ) eïn 6) ) ) ) sie 6) 6) EN 17) ab arab 16) 6) 6) ) ép 3) 6) s u 016 Qa 016 16 16 16 15 ien 017 1 1 1 rd 201 ou 201 01 1 01 20 0 20 20 20 20 0 20 0 0 0 (2 (2 (2 (2 (2 ép A (2 (2 2 (2 . (2 s( r( ( ( ( ( ( e( e s uti ( an ït an a ue oc ie te ne ta ni z an di Ga ar Lib Om iq gé o ni ,R hr ib M M Ko am Tu Al Ba et en e yr Dj . Jo sa ab isl ie m ie ,R ar an Yé p. ab te ts Ré rd ar Ar ira yp sjo n, p. Ém Ég Ira Ré Ci Source : Tous les pays excepté la Jordanie : base de données EdStats de la Banque mondiale (http://datatopics.worldbank.org/education/), fondée sur les données de l’Institut de statistique de l­’UNESCO. Jordanie : Queen Rania Center du ministère jordanien de l’Éducation, données fournies en août 2018. Note : Les données concernent la dernière année disponible entre 2011 et 2017. œuvre dans les pays de la région MENA, il est respectifs. En s’appuyant dans leurs contextes ­ difficile de déterminer si les services existants sur des données probantes rigoureuses, ils sont de bonne q ­ ualité. Les pouvoirs publics peuvent prendre des décisions éclairées sur le devraient s’attacher à mesurer les résultats test pilote et l’expansion des programmes pour le développement de l’enfant et les envi- d’apprentissage ­précoce. ronnements d’apprentissage précoce afin L’expansion de l’enseignement préscolaire d’identifier les facteurs de qualité de l’EPE obligatoire en Argentine dans les années 1990 A p e r ç u g é n é r a l    21 est un bon exemple de la manière dont un social et émotionnel en participant à des acti- pays a réussi à accroître le rendement de l’ap- vités de développement avec leur ­ famille. prentissage des élèves dans les premières Lire, jouer, regarder des livres d’images, années (antérieure à la troisième ­ année). Une chanter des chansons, e ­ tc. sont des activités étude a révélé qu’en Argentine, l’ajout d’une qui aident les enfants à grandir et à année d’enseignement préscolaire a amélioré apprendre, qui ont démontré leur lien positif les scores moyens aux tests de la troisième avec les scores aux tests cognitifs des jeunes année de 8 % par rapport à la moyenne enfants et qui favorisent la préparation à (Berlinski, Galiani et Gertler, 2009). Les pays l’école (El-Kogali et Krafft, 2015). Diverses de la région MENA offrent également des interventions se sont avérées efficaces et exemples d’excellence dans l’amélioration applicables à plus grande échelle pour aider l’EPE. Par exemple, dans les de la qualité de ­ les parents à s’impliquer auprès de leurs Émirats arabes unis, l’universalisation de enfants et à promouvoir leur ­ développement. ­ l’enseignement préscolaire figure parmi les Le projet Better Parenting en Jordanie a principaux indicateurs clés de performance mobilisé les parents et les communautés – y de l’ambitieux agenda national Vision 2021. compris les imams – pour les sensibiliser à Le pays est en bonne voie d’atteindre l’objec- une meilleure éducation ­ p arentale. En tif de scolarisation de 95 % de ses enfants Turquie, un programme ciblant les mères dans l’enseignement préscolaire d’ici 2021, visait les interactions parents-enfant et a une augmentation de plus de 30 points de donné des cours sur la discipline ­ positive. Au pourcentage depuis les années 1990 (voir Brésil, des visites à domicile et des ateliers encadré 3). impliquant les mères ont donné des résultats Les enfants développent également leurs positifs. La sensibilisation à l’aide de diffé- ­ compétences et comportements socioémo- rents médias, tels que la radio, la télévision et tionnels au cours des premières années la presse écrite, pour communiquer sur le ­ préscolaires. Leurs attitudes sont façonnées DPE peut aider à réduire la discipline violente par leur environnement à la maison et à et à promouvoir le développement des l’école, et par leurs interactions avec leurs enfants (Eickmann et c­ oll., 2003 ; Kagitcibasi, parents, frères et sœurs, et e ­ nseignants. Les Sunar, et Bekman, 2001 ; Naudeau et ­ coll., enfants se développent sur les plans cognitif, 2011, cité dans El-Kogali et Krafft, 2015). ENCADRÉ 3 Priorité à l’éducation de la petite enfance dans les Émirats arabes unis Les Émirats arabes unis, dont un des objectifs natio- l’enseignement préscolaire, et il est bien parti pour naux est de mettre en place un système éducatif de ­’atteindre. En 2016, le taux brut de scolarisation l premier ordre, élargissent l’accès à l’enseignement dans l’enseignement préscolaire était de 82 % dans les préscolaire afin que tous les enfants bénéficient d’une Émirats arabes ­ unis. Le pays se situe donc en tête de base solide pour l’apprentissage dès leur plus jeune la région MENA pour la scolarisation préscolaire et âge. Dans le cadre de son ambitieux agenda natio- ­ affiche une nette amélioration par rapport aux taux de nal Vision 2021, le pays s’est fixé comme objectif moins de 30 % dans les années 70 et de 60 % dans les pour 2021 un taux de scolarisation de 95 % dans années 90. ­ ttp://www.rwadubai.com/media/2578­/uae-national-agenda.pdf ; Sources : Agenda national des Émirats arabes unis et Vision 2021 des Émirats arabes unis, présentation, h Banque mondiale, base de données des statistiques de l’éducation ­(Edstats). 2 2   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région Acquérir des compétences fondamentales au qu’ils étaient presque tous efficaces, et que cours des trois premières années d’études beaucoup étaient très rentables (Graham et De nombreux enfants de la région MENA Kelly, 2018). Plusieurs pays de la région prenant un mauvais départ dans l’enseigne- MENA ont déployé des efforts concertés pour ment formel parce qu’ils n’ont pas acquis de aborder la littératie au cours des premières compétences en prélecture, il est essentiel années ­ d’études. Le test pilote d’interventions que les premières années d’école mettent au cours de la petite enfance et des premières l’accent sur ces importantes compétences années primaires pour identifier celles qui fondamentales. Les compétences de base en ­ réussissent à dynamiser les compétences de lecture, écriture, numératie et socioémotion- base des enfants est une stratégie efficace pour nelles constituent les fondements de l’ap- maximiser l’utilisation de ressources ­ limitées. prentissage tout au long de la vie de l’enfant Mesurer le rendement du développement de et à l’âge ­ adulte. Les enfants qui n’en dis- la petite enfance à l’aide d’évaluations de la posent pas risquent de rester à la traîne, de littératie et de la numératie dans les premières décrocher des études, et de ne pas acquérir années primaires peut mieux éclairer les les compétences plus avancées que le marché moteurs clés de l’apprentissage précoce et du travail requiert de plus en plus aider à cerner les lacunes dans le développe- a ujourd’hui. Enfin, si les enfants ne pos- ­ ment précoce des compétences fondamentales sèdent pas les compétences de base qui ­clés. devraient être développées au cours des pre- Pour améliorer la préparation des enfants à mières années d’études, ils ne peuvent profi- l’apprentissage dans la région MENA, les ter des avantages que leur éducation pourrait politiques éducatives pourraient aligner l’en- leur ­offrir. seignement préscolaire sur l’enseignement pri- De nombreux enfants de la région MENA maire afin d’assurer aux jeunes enfants une ne savent toujours ni lire ni compter après transition s ­ ouple. L’entrée dans des classes deux ou trois années ­ d’école. L’évaluation des primaires où est pratiquée une philosophie compétences fondamentales en lecture éducative (ou une langue d’instruction) diffé- (EGRA) a révélé qu’en Irak, au Maroc et en rente peut représenter une transition difficile République du Yémen, plus d’un enfant de pour les jeunes e ­ nfants. Le passage d’un deuxième année sur trois était incapable de apprentissage fondé sur le jeu, collaboratif et lire un seul mot d’un texte ­ simple. En troi- centré sur l’enfant – souvent dans la langue sième année, cette proportion avait chuté, maternelle de celui-ci – à un enseignement tra- mais encore plus d’un enfant sur six était ditionnel centré sur l’enseignant – souvent en incapable de lire un seul mot d’un texte simple arabe moderne standard (AMS) – peut saper après plus de deux années complètes d’études les effets positifs des programmes d’EPE, (Baromètre de la lecture dans les premières même les plus ­ efficaces. Il est donc important années de l’Agence américaine pour le déve- d’aligner les styles d’enseignement préscolaire loppement international – ­ U SAID). Au et primaire, en mettant l’accent sur des tech- Koweït, au Maroc et en Arabie saoudite, niques tant d’enseignement que d’apprentis- moins de 50 % des élèves de quatrième année sage adaptées au d ­ éveloppement. Par possédaient les connaissances mathématiques exemple, les Émirats arabes unis sont en train de base mesurées par l’enquête TIMSS de d’aligner les première et deuxième années pri- 2015, alors que, dans tous les pays partici- maires avec les deux années de maternelle, pants, 93 % des élèves de quatrième année les afin de créer un cycle holistique d’EPE cou- maîtrisaient (Martin et c ­ oll., 2016 ; Mullis et vrant tous les enfants de 0 à 8­ ans. La ­ coll., 2016, 2017). Finlande, la Nouvelle-Zélande et divers pays Les interventions visant la lecture dans les de l’OCDE ont entrepris des efforts similaires premières années peuvent créer une différence pour aligner l’éducation de la petite enfance et ­ importante. L’examen de 18 programmes de l’apprentissage dans les premières années lecture dans les premières années a révélé primaires (OCDE, 2012b ; 2017­ ­ c). A p e r ç u g é n é r a l    23 Sélectionner, préparer, soutenir, d’établissement vient en deuxième position autonomiser et motiver des (Jensen, Downing et Clark, 2017a ; enseignants et chefs d’établissement Leithwood, Harris et Hopkins, 2008 ; efficaces Leithwood et Mascall, 2008). Les enseignants et chefs d’établissement effi- Sélectionner et soutenir les meilleurs caces ont un impact profond sur l’apprentis- enseignants et chefs d’établissement sage des élèves et leurs aspirations éducatives Il est primordial que les systèmes éducatifs professionnelles. Les enseignants efficaces et ­ recrutent, forment et soutiennent les hommes sont ceux qui maîtrisent à la fois la pédago- et les femmes les plus susceptibles de devenir gie et les matières qu’ils enseignent, qui des enseignants et directeurs d’établissement adaptent et rénovent leurs pratiques d’ensei- ­ efficaces. Ces systèmes doivent également gnement pour encourager l’esprit critique prévoir un développement continu des car- des élèves, et qui soutiennent l’apprentissage rières et un perfectionnement professionnel des élèves avec différents styles d’apprentis- pour veiller à ce que les meilleurs enseignants sage (Hightower et ­ coll., 2011 ; Metzler et restent dans les classes et à ce que les classes Woessmann, 2012 ; OCDE, 2012­ a ). Les et les écoles offrent les pratiques d’enseigne- chefs d’établissement ont un effet indirect, ment et les environnements d’apprentissage mais puissant sur le rendement des élèves à les plus modernes et les plus ­ efficaces. travers leurs interactions avec les enseignants Attirer et sélectionner des candidats haute- et leur contribution à la culture scolaire ment qualifiés pour participer à des pro- (Pont, Nusche et Moorman, 2008 ; Witziers grammes de formation initiale des enseignants et Kruger, 2003). Des données prouvent que est la première étape d’un processus à long l’efficacité des enseignants est le facteur sco- terme de constitution d’un corps enseignant laire le plus important influençant le rende- efficace (voir encadré 4). L’expérience interna- ment des élèves (Darling-Hammond, 2000 ; tionale souligne l’importance d’établir des Hanushek, 2005 ; Mourshed, Chijioke et normes élevées pour s’assurer que les meil- B a r b e r, 2 0 1 0 ) , e t q u e l a d i r e c t i o n leurs candidats soient sélectionnés pour les ENCADRÉ 4 Attirer les meilleurs étudiants vers l’enseignement dépend de l’adéquation des politiques et programmes L’attraction et la rétention des meilleurs étudiants dans mais leurs salaires augmentent de manière relative- la profession d’enseignant dépendent de politiques et ment modeste au fil du t ­ emps. Après 15 ans, ils ne programmes tels que les bourses d’études et le soutien peuvent espérer gagner que 1,2 à 1,5 fois leurs salaires pour les frais de scolarité, les possibilités de progres- initiaux (Banque mondiale, 2015e). Ces barèmes sala- sion et de croissance dans la carrière d’enseignant, le riaux comprimés de la carrière d’enseignant dans la caractère concurrentiel des salaires, et d’autres avan- région MENA peut avoir un effet négatif sur l’attrait tages tels que l’aide au logement (Banque mondiale, de la profession pour les candidats ­ t alentueux. En 2013­ d). De plus, il est essentiel d’attirer les candidats pareil cas, des politiques visant la compression sala- souhaitant faire de l’enseignement leur profession plu- riale pourraient être fondamentales pour améliorer tôt que l’utiliser comme billet d’accès à un emploi dans l’enseignement. Consciente de ce fait, la qualité de ­ le secteur ­ public. la Jordanie a entrepris une réforme visant à décom- Dans certains pays de la région MENA, les ensei- primer le barème des traitements des enseignants gnants bénéficient de formules initiales compétitives, (Banque mondiale, 2016­ a). 2 4   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région programmes de formation initiale des ensei- La mise en place d’une direction d’établis- gnants et aient une possibilité raisonnable sement efficace commence par la sélection et d’être embauchés après l’obtention du la préparation de nouveaux chefs d’établisse- diplôme (Bruns et Luque, 2015 ; Barber et ment compétents et bien f ­ ormés. La plupart Mourshed, 2007). Dans la plupart des pays des pays de la région MENA utilisent divers de la région MENA, le processus de sélection critères pour sélectionner les chefs d’établis- pour la formation initiale des enseignants sement et, comme pour les enseignants, l’ac- dépend des résultats aux examens de fin cent est souvent mis sur les qualifications d’études secondaires (Banque mondiale, universitaires et l’expérience pédagogique 2015­ b). Les résultats requis pour l’admission (Mullis et c ­ oll., 2016). 9 À Oman, par dans le secteur de l’éducation sont plus faibles exemple, les chefs d’établissement sont choi- que dans d’autres d ­ omaines. En Égypte, par sis en fonction de leur ancienneté et de leur exemple, la note à l’examen national de fin de expérience dans l’enseignement et la gestion l’enseignement secondaire exigée pour l’ad- des c­ lasses. À Bahreïn, les chefs d’établisse- mission dans les filières d’enseignement et de ment potentiels doivent avoir de l’expérience littérature est fixée entre 75 et 85, alors qu’elle en tant qu’enseignants, conseillers ou spécia- est de 80 à 88 pour les filières scientifiques et listes de l­’éducation. Certains chefs d’établis- mathématiques et de 96 à 98 pour les filières sement d’Oman et de l’Arabie saoudite ont médicales (Banque mondiale, 2010). Même si des diplômes en direction pédagogique en les résultats aux tests sont nécessaires, ils ne plus de leurs qualifications ­ d’enseignement. constituent pas une base suffisante pour la Au Liban, les programmes de formation à la sélection. D’autres critères, tels que la créati- ­ direction d’établissement sont la principale vité, l’implication dans les questions d’éduca- voie de préparation pour devenir chef tion, et l’aptitude à bien travailler avec les d’établissement. Les chefs d’établissement ­ autres, sont des caractéristiques importantes à doivent réussir un entretien et suivre un pro- prendre en ­ considération. gramme de formation d’un an au leadership De nombreux pays de la région MENA et à la ­supervision. L’Égypte a des exigences élèvent les exigences de qualifications pour professionnelles rigoureuses : tous les chefs l’accès à la profession d’enseignant en d’établissement doivent avoir une expérience demandant un diplôme de baccalauréat, de minimum 15 ans dans l’enseignement et voire, dans certains cas, un diplôme de d’au moins cinq ans dans ­ l’administration. ­ maîtrise. La plupart des pays de la région Les candidats au poste de chef d’établisse- MENA n’utilisent toutefois pas des critères ment doivent être titulaires d’un diplôme de et processus de recrutement visant au-delà l’enseignement supérieur et doivent suivre des études universitaires pour évaluer les une formation ­ spécifique. Ils doivent égale- connaissances et les compétences pédago- ment réussir un examen écrit, réaliser avec giques et autres des ­ candidats. Un diplôme succès un stage supervisé et participer à un d’enseignement devrait impliquer une solide programme d’initiation et de mentorat connaissance de la matière à enseigner ainsi (Mullis et ­ coll., 2016). que les compétences pédagogiques néces- Lorsque les diplômes ne reflètent pas cor- saires pour transmettre efficacement ce rectement les compétences – l’une des quatre contenu tout en relevant des défis d’appren- tensions existant dans la région MENA –, le tissage particuliers (Loughran, Berry et risque est élevé de ne pas sélectionner les Mulhall, 2012 ; Shulman et Shulman, 2004 ; enseignants et chefs d’établissement les plus Thames et Ball, 2010). Seuls quatre des dix qualifiés. Cela peut compromettre l’apprentis- ­ pays de la région MENA ayant participé à sage des ­ élèves. Dans de nombreux systèmes l’enquête TIMSS 2015 exigeaient que les d’éducation développés, des processus rigou- candidats enseignants réussissent des exa- reux permettent de sélectionner aux postes mens de qualification pour être sélectionnés d’enseignant les diplômés les plus perfor- (Mullis et ­coll., 2016). mants des programmes de formation initiale, A p e r ç u g é n é r a l    25 qui doivent souvent détenir des certificats ou compétences des autres et crée des possibilités ­ l icences. Quelques-uns des systèmes de de mentorat et de partage des pratiques licences les plus anciens et les mieux établis se modèles (Angrist et Lavy, 2001 ; Borko, trouvent aux États-Unis, où les licences d’en- 2004 ; Darling-Hammond et c ­ oll., 2017). Les seignement des États garantissent un ensemble pays très performants de l’Asie de l’Est et cohérent de normes, avec un certain niveau de d’ailleurs ont, depuis des décennies, adopté compétence pédagogique reconnu par toutes des approches collaboratives de perfectionne- les ­écoles. Plusieurs pays de la région MENA ment professionnel, avec des résultats positifs commencent à étudier l’introduction d’exi- (Evans et Popova, 2015 ; Banque mondiale, gences en matière de licence et de certification 2018a ; Yoon et ­ coll., 2007). La technologie des enseignants en tant que mécanisme pour et les médias sociaux peuvent être de puis- élever et maintenir les ­normes. sants outils de promotion de l’apprentissage Les besoins de la technologie, de la entre pairs et de collaboration entre les recherche et du marché du travail évoluant enseignants. De nombreux enseignants de la ­ rapidement, les enseignants et chefs d’établis- région MENA utilisent des groupes sur sement doivent être capables d’actualiser Facebook ou WhatsApp pour échanger des régulièrement leurs connaissances et i nformations. De plus, les leçons sur des ­ compétences. Des programmes intensifs de ­ plateformes telles que Nafham, la version perfectionnement professionnel axés sur le arabe de la Khan Academy, aident non seule- contenu peuvent améliorer les connaissances ment les élèves à apprendre, mais également des enseignants dans leur matière et leur apti- les enseignants à donner cours de manière tude à utiliser ces connaissances dans leur ­efficace. enseignement (NCEE, 2016­ b ). Les pro- Le perfectionnement professionnel est éga- grammes de perfectionnement professionnel lement important pour les chefs d’établisse- du personnel enseignant devraient se concen- ment en poste depuis longtemps, parce que trer sur le contenu et sur l’amélioration des leur rôle et les exigences de la scolarité évo- compétences pédagogiques afin que les ensei- luent au fil du temps (Jensen et c ­ oll., 2017a ; gnants puissent transmettre efficacement le OCDE, 2012­ a). Bien que le perfectionnement contenu à tous les types d’élèves (Loughran, professionnel des chefs d’établissement doive Berry et Mulhall, 2012 ; Shulman et Shulman, être adapté au contexte et aux besoins locaux, 2004 ; Thames et Ball, 2010). Des pro- de nombreux systèmes très performants ont grammes de formation très efficaces quelques éléments de base en commun (Jensen enseignent la pédagogie propre à une matière – et ­coll., 2017a ; Banque mondiale, 2018e), comme la façon de donner efficacement un notamment le fait de structurer le perfection- cours de mathématiques – et comprennent des nement de la direction autour d’une vision visites de suivi au cours desquelles les forma- pour l’école, dont le chef d’établissement gère teurs observent et soutiennent les enseignants et supervise la mise en ­ œuvre. Il s’agit égale- dans leur classe (Darling-Hammond et c ­ oll., ment de relier le perfectionnement de la direc- 2009). Certains pays de la région MENA ont tion d’établissement aux problèmes pratiques mis en place des programmes prometteurs de à l’aide d’un apprentissage de l’action dans un perfectionnement professionnel pour les environnement scolaire réel avec l’appui de ­enseignants. ­mentors. De plus, les programmes de direc- Le perfectionnement professionnel est le tion d’établissement devraient développer la plus efficace pour modifier la pratique en résilience des dirigeants, leur esprit critique et classe lorsque les enseignants travaillent de leur aptitude à adapter les pratiques aux nou- manière collaborative (Brown, Smith et Stein, situations. Dans les systèmes hautement velles ­ 1995 ; Darling-Hammond et c ­ oll., 2017 ; performants, les chefs d’établissement sont Evans et Popova, 2015 ; Yoon et ­ coll., 2007). souvent des dirigeants pédagogiques (voir La collaboration permet aux enseignants de encadré 5). Enfin, les programmes de perfec- tirer mutuellement profit des connaissances et tionnement de la direction devraient se 2 6   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région ENCADRÉ 5 Les chefs d’établissement doivent également agir en tant que dirigeants pédagogiques Les chefs d’établissement sont aussi des dirigeants compétences des chefs d’établissement vers les ensei- pédagogiques qui peuvent guider, orienter et surveil- gnants, l’investissement dans la transformation de ler les pratiques liées à la pédagogie et au programme tous les chefs d’établissement en dirigeants pédago- d’enseignement (Jensen et ­ c oll., 2017a ; OCDE, giques est l’une des mesures les plus efficaces qu’un 2016a ; 2016­ b ). La direction pédagogique encou- pays puisse prendre pour améliorer l’apprentissage rage un environnement scolaire mettant davantage des ­é lèves. Dans les pays de la région MENA, une l’accent sur la réussite scolaire, ce qui, à son tour, telle conversion des chefs d’établissement peut amé- améliore l’apprentissage des ­ élèves. Par exemple, un liorer les pratiques pédagogiques et l’apprentissage rendement moyen plus élevé en mathématiques est des ­élèves. La réussite de ce changement dépend de associé aux rapports des chefs d’établissement fai- la qualité de la sélection des chefs d’établissement et sant état d’une plus grande importance accordée à du soutien qui leur est fourni, ainsi que du mélange la réussite scolaire (Mullis et ­ c oll., 2016). Compte d’autonomie et de redevabilité dont ils bénéficient tenu du degré et de l’importance des transferts de pour s’acquitter de leurs ­fonctions. poursuivre tout au long de la carrière d’un Comme mentionné précédemment, la prise dirigeant en adoptant une approche systéma- de décision décentralisée exige des capaci- tique et globale couvrant toute la carrière et tés, des ressources et des mécanismes de système. l’ensemble du ­ redevabilité. Enfin, les systèmes scolaires de ­ la région MENA doivent trouver un équi- Affecter les meilleurs enseignants là où ils libre entre autonomie et redevabilité, qui sont le plus nécessaires soutiendra le mieux l’apprentissage et four- Dans la plupart des systèmes très perfor- nira aux écoles les ressources et la flexibilité mants, les décisions de recrutement des nécessaires pour fixer et atteindre d’ambi- enseignants sont prises au niveau de l’école tieux objectifs d’apprentissage des ­ élèves. (Bruns et Luque, 2015 ; Barber et Mourshed, La présence d’un nombre correct d’ensei- 2007), ce qui permet une meilleure adéqua- gnants qualifiés dans les classes est une condi- tion entre les caractéristiques des ensei- tion préalable fondamentale à ­ l’apprentissage. gnants et les besoins pédagogiques identifiés Dans certains pays de la région MENA, les par ­l ’établissement. Par contre, dans les classes sont tellement peuplées qu’un ensei- pays de la région MENA, le recrutement et gnement efficace y est ­ difficile. Parmi les parti- l’affectation des enseignants du système cipants à l’enquête TIMSS, c’est en Égypte, en public se font généralement au niveau cen- Jordanie et au Maroc que l’on trouve cer- tral et relèvent généralement de la responsa- taines des classes les plus surchargées, tandis bilité d’un ministère de la Fonction que la taille des classes dans les pays du publique. Ce système a été un défi majeur ­ Conseil de coopération du Golfe (CCG) cor- pour l’amélioration des performances, étant respond généralement à la moyenne interna- donné que les écoles n’ont pas l’autonomie tionale des participants à l’enquête TIMSS et nécessaire pour recruter de bons enseignants aux moyennes de l’Asie de l’Est, même si elles ou licencier ceux qui sont peu ­performants. sont supérieures à celles de pays tels que La gestion des performances devient alors l’Australie et la Suède (Mullis et ­ coll., 2016). un long processus bureaucratique, limitant Même dans les pays où les enseignants en fin de compte l’apprentissage des élèves sont recrutés et affectés en nombre suffisant, ainsi que la motivation des ­ e nseignants. ils ne sont souvent pas utilisés e ­ fficacement. A p e r ç u g é n é r a l    27 Dans la région MENA, un faible nombre L’absentéisme des enseignants est un pro- d’heures de travail des enseignants est courant blème chronique des systèmes scolaires de la (voir schéma 12). En 2010, seule la moitié des région ­ M ENA. Parmi ceux participant à économies de la région MENA exigeaient de l’enquête TIMSS 2015, une moyenne de leurs enseignants des heures de travail compa- 16 % des élèves de huitième année était rables à celles des pays les plus performants inscrite dans des écoles dont les chefs d’éta- ­ (Banque mondiale, 2015­ b). L’Égypte et la blissement considéraient l’absentéisme des Tunisie s’inscrivaient dans la fourchette des enseignants comme un « problème grave » pays les plus performants tels que le Japon, la (schéma 13). Le problème est particulière- Nouvelle-Zélande et la ­ Corée. D’autres, tels ment aigu au Maroc (affectant 28 % des que la Jordanie, le Djibouti, la République du élèves), suivi par l’Arabie saoudite, Oman et Yémen, la Cisjordanie et Gaza, se situaient l’Égypte. À titre de comparaison, seuls 4 % ­ nettement en deçà du seuil de 1 200 heures de des élèves de huitième année des pays travail par an pour les enseignants du membres de l’OCDE étaient inscrits dans des ­ primaire. Au Liban, les heures de travail exi- écoles ayant de graves problèmes d’absen- gées des enseignants du primaire et du secon- téisme des e­ nseignants. De même, de faibles daire étaient inférieures de plus de la moitié à niveaux étaient enregistrés en République celles observées dans les pays les plus islamique d’Iran (2 %) et dans les Émirats ­performants. arabes unis (7­ %). SCHÉMA 12  Les heures de travail exigées des enseignants de la région MENA sont nettement inférieures à celles des pays les plus performants Temps d’enseignement et de travail réglementaire exigé des enseignants du primaire dans certaines économies de la région MENA (2010) et de l’OCDE (2007) 2 500 120 100 93 100 2 000 83 Nombre d’heures par an 80 1 500 67 67 Pourcentage 57 60 54 53 52 1 000 39 40 500 20 0 0 n de te sie d ie i an en a ut az po Su an yp Lib m lan o ni tG Ja ib rd du Ég Yé Tu Zé Dj ee Jo e - ré lle i an Co e rd uv sjo No Ci Autres heures de travail Temps d’enseignement Temps d’enseignement (% du total des heures de travail) Source : Banque mondiale, 2015­b. Note : OCDE = Organisation de coopération et de développement ­économiques. 2 8   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région SCHÉMA 13  L’absentéisme des enseignants est généralisé dans toute la région MENA Pourcentage des élèves de huitième année fréquentant des écoles dont les chefs d’établissement déclarent que l’absentéisme des enseignants est un « problème grave », TIMSS 2015 30 28 25 23 Pourcentage des élèves 22 20 20 16 16 15 15 14 13 12 10 9 7 5 4 2 0 oc te an e ït A r eïn an ie E is DE ue ta CD ab we EN un an di ar Om Lib iq OC Qa hr ar ou nO M rd M Ko am es Ba p. Jo sa ab No , ré isl ie ar p. te ab ts ré yp Ar ira n, Ég Ém Ira Source : Tendances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences de l’IEA – TIMSS (2015). Note : OCDE = Organisation de coopération et de développement ­économiques; TIMSS = Trends in International Mathematics and Science Study (Ten- dances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences). Encourager les pratiques pédagogiques Murnane et Ganimian, 2014). Dans l’en- maximisant le potentiel de l’enfant semble des études, les interventions pédago- giques (y compris l’apprentissage assisté par L’enseignement et l’apprentissage sont des ordinateur) qui adaptent l’enseignement aux activités complexes présentant de multiples niveaux de compétences des élèves se sont ­ facettes. Les enfants arrivent à l’école avec classées parmi les moyens les plus efficaces toutes sortes d’antécédents, d’expériences de d’améliorer l’apprentissage des élèves dans les vie et de caractéristiques i ­ndividuelles. Les pays à revenu faible et ­ intermédiaire. enseignants interagissent avec les enfants de Lorsque la capacité d’enseignement des multiples façons parce qu’ils ont eux aussi enseignants est faible, des programmes péda- toutes sortes d’antécédents, d’expériences de gogiques structurés peuvent être ­ efficaces. Ils ­ ’enseignement. L’expérience vie et de styles d comprennent généralement des cours de for- des élèves en classe repose sur les décisions que mation pour les enseignants et du matériel les enseignants prennent quant à la manière de didactique pour à la fois les enseignants et les délivrer le programme s ­ colaire. La façon dont ­ élèves. En plus d’améliorer la qualité de l’en- les enseignants se préparent et s’impliquent seignement d’un sujet, les programmes péda- avec des élèves dotés d’aptitudes différentes a gogiques structurés peuvent modifier la une incidence sur l’apprentissage de leurs pratique en vigueur dans la classe parce qu’ils élèves. L’enseignement adapté au bon niveau – ­ intègrent des activités d’apprentissage et une ou enseignement adaptatif – est important formation ­ pédagogique. Une évaluation de pour soutenir l’apprentissage des élèves (Evans 420 analyses scientifiques d’interventions et Popova, 2015) (voir encadré 6). Entre 2013 éducatives dans des pays à revenu faible et et 2015, au moins six méta-analyses systéma- intermédiaire a constaté que les interventions tiques ont examiné les interventions amélio- pédagogiques structurées avaient les effets rant le rendement de l’apprentissage dans les positifs les plus significatifs et les plus pays à revenu faible et intermédiaire (Conn, constants sur le rendement de l’apprentissage 2014 ; Glewwe et ­ c oll., 2013 ; Kremer, des ­ élèves. Bien qu’aucune des interventions Brannen et Glennerster, 2013 ; Krishnaratne, pédagogiques structurées examinées n’ait eu White et Carpenter, 2013 ; McEwan, 2015 ; A p e r ç u g é n é r a l    29 ENCADRÉ 6 L’enseignement adaptatif est bénéfique pour les élèves Différents modèles d’enseignement tiennent compte le redoublement et le regroupement des aptitudes des différences d’aptitudes des élèves, allant du au sein d’une année ­ d’études. Le redoublement, qui regroupement des élèves par aptitude en classe pen- est pratiqué dans certains pays de la région MENA, dant une partie de la journée scolaire ou après l’école oblige les élèves qui ne réussissent pas les examens (Banerjee, 2012) jusqu’à l’application de tests de de fin d’année à redoubler l’année scolaire au lieu de sélection aux élèves en début d’année scolaire pour passer en classe supérieure avec leurs pairs (OCDE, identifier leurs aptitudes et cibler le soutien en con- 2016­ a ). Le regroupement des aptitudes consiste à séquence (OCDE, 2011­ b). En Finlande et au Canada, placer les élèves d’une même année d’études dans un soutien personnalisé complet est offert à tous des classes en fonction de leurs résultats précédents, les élèves éprouvant des difficultés avec les niveaux afin que les classes soient homogènes du point de d’apprentissage attendus, en particulier pendant vue des niveaux d ­ ’apprentissage. Une méta-analyse les années primaires (Banque mondiale, 2018­ e ). de 100 années de recherche sur le regroupement Des données suggèrent que ces interventions ciblées des aptitudes a révélé qu’une telle opération ne prof- et ces leçons de rattrapage sont plus efficaces que itait, en fait, pas aux élèves (Steenbergen-Hu, Makel d’autres modèles d’enseignement adaptatif, tels que et Olszewski-Kubilius, 2016). lieu dans les pays de la région MENA, cer- tradition et modernité se manifeste de diffé- taines ont été mises en œuvre dans des pays manières. La première est de savoir si rentes ­ ayant obtenu des résultats similaires aux l’instruction doit être délivrée en arabe enquêtes TIMSS et PISA, tels que le Chili, le moderne standard (AMS), également appelé Costa Rica et l’Afrique du Sud (Snilstveit et arabe c­ lassique. L’AMS diffère de la langue autres, 2015). Un ensemble comprenant des parlée au quotidien dans chacun des pays leçons toutes préparées et un encadrement des arabophones de la région ­ MENA. Parce que enseignants peut aider à surmonter les déficits l’AMS est la langue dans laquelle le Coran a de compétences de ces derniers dans les sys- été révélé et écrit, il a été considéré comme tèmes éducatifs peu performants (Mourshed, sacré et n’a pas changé avec le temps, tandis Chijioke et Barber, 2010). Cette importante que la langue quotidienne des sociétés a évo- intervention peut se poursuivre à court et lué, creusant un large fossé entre les deux moyen terme jusqu’à ce que les compétences langues. En conséquence, lorsque les enfants ­ professionnelles des enseignants soient plus rentrent à l’école et sont confrontés à l’arabe ­développées. classique, ils doivent l’apprendre presque comme une nouvelle l ­angue. Ils ont ensuite des difficultés à acquérir les compétences de Aborder la question de la langue base en lecture et écriture et peuvent ressen- d’instruction tir une forte insécurité linguistique en raison Une des principales questions affectant l’ap- de leur manque de familiarité avec l’AMS ­LdI). prentissage est la langue d’instruction ( (Maamouri, 1998). Les recherches ont Elle est normalement déterminée par la démontré que les élèves de la région MENA culture, l’histoire, et les tendances écono- peuvent être considérés comme désavantagés miques et politiques du m ­ oment. Depuis des du point de vue linguistique, car ils doivent décennies, le choix de la langue à utiliser apprendre l’AMS comme s’il s’agissait d’une pour l’instruction constitue un défi majeur deuxième langue (Bouhlila, 2011 ; Ibrahim dans la région MENA, où la tension entre et Aharon-Peretz, 2005 ; Salmi, 1987). 3 0   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région Avant de pouvoir apprendre dans une compétences de base, l’intervention a fourni langue d’instruction, les élèves doivent aux enseignants dix jours de formation et connaître un minimum de c ­ elle-ci. Dans d’accompagnement sur site supplémentaire toutes les langues, un seuil minimal de voca- sur la façon d’aborder la r ­ emédiation. Grâce à bulaire doit être atteint pour comprendre un cela, non seulement le nombre des élèves peu simple. Par exemple, pour comprendre texte ­ performants a diminué, mais les établisse- un texte en anglais, les élèves doivent ments scolaires ont également constaté une connaître au moins 5 000 mots ­ d’anglais. En augmentation du nombre des élèves ayant de général, les enfants entrent à l’école avec un très bons résultats (Gove, Brombacher et vocabulaire de 4 000 à 6 000 mots dans leur Ward-Brent, 2017). langue m ­ aternelle. En moyenne, ils peuvent La deuxième difficulté associée à la langue apprendre quatre mots de vocabulaire d’une d’instruction est la multitude de langues utili- deuxième langue d’instruction par ­ heure. Il sées dans certains pays de la région ­ MENA. faut donc au moins 1 000 heures d’apprentis- En Algérie et au Maroc par exemple, une part sage supplémentaires pour acquérir un voca- importante de la population parle le tama- bulaire suffisant pour commencer à apprendre zight (berbère) ; l’Irak et la Syrie comptent des dans une deuxième langue (van Ginkel, communautés kurdes ; et à Djibouti, certaines 2014). Si les élèves ne réussissent pas à acqué- communautés parlent le somali et ­ l’afar. Le rir une compréhension orale et écrite de choix de la langue à utiliser devient souvent l’AMS au début de l’école primaire, leurs une question plus politique que technique études futures se limiteront à mémoriser et dans la mesure où la langue est étroitement régurgiter des informations sans parvenir à en associée à la culture et à l’identité des p ­ euples. faire une ­ synthèse. Lorsque les enseignants Parce qu’ils s’identifient à l’islam, de nom- eux-mêmes ne se sentent pas à l’aise pour breux pays de la région MENA soutiennent enseigner en AMS, le problème ne peut que l’usage de l’arabe classique – la langue du ­s’aggraver. Coran – en tant que langue d’instruction, Certains pays de la région MENA ont même lorsque d’importantes minorités sont abordé le problème de l’AMS (de la double non arabophones, comme c’est le cas en langue) en élaborant un matériel pédagogique Algérie, en Irak et au M­ aroc. Les communau- et en fournissant un soutien supplémentaire tés non arabophones exercent toutefois d’im- au cours des premières années d ­ ’école. Par portantes pressions en faveur de l’utilisation exemple, un programme introduit par de leur langue pour l’instruction de leurs l’agence américaine pour le développement ­enfants. international (USAID – United States Agency La troisième difficulté apparaît lorsque les for International Development) et le ministère chances de progression économique et sociale de l’Éducation égyptien s’est avéré prometteur sont plus élevées dans une langue autre que la et est en train d’être étendu à plus grande langue maternelle de ­ l ’élève. L’utilisation échelle. Il comprend huit jours de formation ­ d’une langue étrangère comme langue d’ins- des enseignants en plus de ressources truction est un sujet de discussion dans les pédagogiques. Les élèves de deuxième année ­ pays de la région MENA, avec d’importantes ayant bénéficié d’une intervention de six mois implications pour l’apprentissage (voir ont amélioré leurs performances d’une année encadré 7). Les conséquences pour l’équité ­ scolaire entière (Gove, Brombacher et Ward- constituent également un ­ facteur. Dans les Brent, 2017). En Jordanie, l’intervention pré- années 1980, le choix des systèmes d’éduca- voyait une allocation quotidienne de temps tion publics algériens et tunisiens d’abandon- permettant aux élèves peu performants de ner l’enseignement en français au profit de pratiquer les compétences fondamentales en l’AMS a entraîné une plus grande inégalité lecture et en ­mathématiques. En plus d’un dans l’éducation (les élites ont inscrit leurs accent pédagogique supplémentaire sur les enfants dans des écoles privées francophones) A p e r ç u g é n é r a l    31 ENCADRÉ 7 Il est important d’améliorer l’instruction en langue étrangère En Tunisie, en Algérie, et au Maroc, les sciences et les d’enseignement supérieur en anglais a ­ r encontré mathématiques sont enseignées en français au niveau de la résistance (MacL eod et Abou-El-K heir, secondaire. Seuls 30 % des Tunisiens, dont la plupart ­ 2016). Le ­ s ystème tunisien continue d’utiliser deux vivant près de la capitale, maîtrisent toutefois le fran- langues, l’arabe pour les sciences sociales et le fran- çais oral et é ­ crit. En Algérie, les populations urbaines çais pour les STIM (science, technologie, ingénie- parlent couramment le français, mais elles ne sont que m athématiques). Récemment, le ministère de rie et ­ 55 % à le maîtriser en milieu ­ rural. Une dynamique l’Enseignement supérieur de la région du Kurdistan semblable existe au ­ Maroc. Les élèves vivant dans des irakien a commandé une étude sur ses 13 universités zones où le français est moins bien maîtrisé ont un accès anglais. Elle afin d’évaluer l’impact de l’instruction en ­ plus limité à l’enseignement et de moins bons résultats a révélé que 63 % des enseignants étaient satisfaits (Lefevre, 2015). Dans les enquêtes TIMSS 2007 et de leur propre niveau en anglais, et que, en dépit du 2015, les élèves utilisant leur langue maternelle avaient fait que l’anglais était la langue d’instruction offici- de meilleurs résultats que ceux testés dans une langue elle, seuls 30 % d’entre eux parlaient anglais tout le non utilisée à la m ­ aison. Si les mathématiques (ou temps ou presque tout le temps pendant les ­ c ours. toute autre matière) doivent être enseignées dans une L’anglais était utilisé pour les documents écrits et deuxième langue, un soutien adéquat doit être intégré les devoirs, mais les enseignants étaient nombreux à pour apprendre cette ­ langue. déclarer que le niveau d’anglais de leurs élèves était La langue d’instruction a également été contro- insuffisant pour faire des études dans cette langue, versée et problématique au niveau de l’enseignement malgré leurs 12 années d’apprentissage de l’anglais supérieur, soulig nant la nécessité d’améliorer pendant leur scolarité antérieure (Borg, 2015). Quel l’instruction en langue étrangère à tous les ­ n iveaux. que soit le niveau d’études, l’emploi d’une LdI qui La plupart des pays arabes utilisent soit l’anglais, n’est pas la langue maternelle des élèves nécessite soit le français comme LdI pour les mathéma- de former les professeurs, d’offrir des ressources et tiques, l’ingénierie, les sciences médicales et autres des programmes scolaires adéquats, et d’apporter un sciences. Au Qatar, l’expansion rapide d’institutions ­ meilleur soutien aux ­ élèves. au lieu de l’accroissement escompté des com- Utiliser les évaluations pour pétences en arabe c ­ lassique. En outre, les l’apprentissage et pas pour les diplômes élèves qui n’avaient plus appris le français se Les évaluations nationales et internationales sont retrouvés désavantagés dans leur à grande échelle peuvent catalyser une recherche de débouchés économiques, étant réforme de l’enseignement à l’échelon donné que les postes à hauts revenus conti- ­ politique. Elles sont souvent utilisées pour nuaient d’exiger la maîtrise du français mesurer et surveiller l’apprentissage des (Benrabah, 2007 ; Lefevre, 2015). Vu l’écart élèves en suivant les tendances de celui-ci au entre l’arabe parlé et l’arabe moderne stan- sein d’un pays, en mesurant ce qu’ont appris dard, il est essentiel de résoudre la question de les élèves par rapport aux objectifs éducatifs, la langue d­ ’instruction. À cause du lien étroit et en fournissant des points de comparaison entre la langue, la religion et l’identité natio- avec d’autres ­ p ays. Les pays de la région nale, il est difficile d’émettre une recomman- MENA participent de plus en plus à des éva- dation au niveau ­ régional. Ce phénomène est luations internationales à grande échelle des certes régional, mais il se manifeste de maintes élèves (voir tableau 2). De plus, ils effectuent façons différentes selon les ­ p ays. Une également davantage d’évaluations natio- approche spécifique doit donc être adoptée nales, qui présentent l’avantage de saisir les pour chaque ­ pays. 3 2    Ambitions e t aspir ations d'une région TABLEAU 2  Les évaluations nationales et internationales à grande échelle sont apparues dans la région MENA depuis 2007 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 Algérie ◦• ◽ Bahreïn • • ◊ ◊ ◦•◊ ◊ ◊ ◊ ◦• ▴ ◦• Djibouti × + Égypte, ­ Rép. arabe • ◊ •◊ ◊ ×◊ ◊ × × × • ▴ ◦◊ Iran, ­ Rép. islamique ◦• • ▴ ◦• ▴ ◦• ♦ ◦•▴ ◦• ▴ ◦• Irak ×+ ◊ Jordanie • • ◽ • ◽ • ◽×+ ×+ ◦•◽ ◽ •◊ Koweït ◦• ▴ ▴ ◦• ◦ ◦• ▴ ◦• Liban • • ♦ • •◽♦ × ◊ ×◽ • Libye Maroc • ▴ ◦• ▴ ◦• ◊ ◦ • ▴× + ◦• ▴◊ ◽ ◦• Oman ◊ • ◦•▴ ◦• ▴ ◦• Qatar ◽▴ ◦• ◽ ◦•▴ ◽ ◦•◽ ▴ ◽ ◦• Arabie saoudite • • ◦•▴ ◦•◊ ▴◊ ◽◊ ◦•×◊ Rép. arabe syrienne ­ • • Tunisie • ◦•◽ ◽ ◦• ◽ ◦• ◽ ◽ Émirats arabes unis ◽a ◦•▴ ◽ ◦•◽ ▴ ◽ ◦• Cisjordanie et Gaza • ◊ • • × × Yémen, ­Rép. ◊ ◦ ◊ ◦ ◦× ◦  TIMSS quatrième année    •  TIMSS huitième année    ♦  TIMSS Advancedb  ▴  PIRLS quatrième année    ◽  PISA    ×  EGRA    +  EGMA    ◊  Évaluation nationale ou autre Sources : Compilé par la Banque mondiale sur la base d’informations reçues des équipes de travail des pays et d’organisations internationales ­d’évaluation. Note : Le tableau inclut des pays participants pour lesquels les résultats n’ont pas été rapportés en raison de l’échantillonnage ou pour d’autres ­raisons. EGMA = Early Grade Mathematics Assessment (Évaluation des compétences ­fondamentales en mathématiques) ; EGRA = Early Grade Reading Assessment (Évaluation des compétences fondamentales en lecture) ; PIRLS = Programme international de recherche en lecture scolaire ; PISA = Programme i­nternational pour le suivi des acquis des élèves ; TIMSS = Trends in International Mathematics and Science Study (Tendances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les ­sciences). a. Pour les Émirats arabes unis, les résultats de PISA 2009 sont ceux rapportés dans « PISA 2009­+ ». Dubaï a participé en 2009 ; tandis que les autres émirats ont participé en 2010. b. TIMSS Advanced évalue les connaissances et compétences avancées en mathématiques et en physique des étudiants en dernière année du secondaire, orientation scientifique. TIMSS Advanced a été fait en 1995, 2008 et 2015. A p e r ç u g é n é r a l    33 progrès de l’apprentissage directement liés à les études, avec parfois un effet négatif sur des aspects des objectifs éducatifs, des pro- les pratiques p­ édagogiques. Les élèves liba- grammes scolaires et des politiques éduca- nais sont testés en classe tous les mois, tives nationales (voir tableau 2). passent deux examens par an, et participent Les examens publics peuvent générer de à des épreuves nationales à la fin des neu- puissantes incitations au changement au vième et douzième ­ années. En Jordanie et niveau des établissements scolaires, des pro- en République islamique d’Iran, les élèves fesseurs et des ­élèves. Toutefois, utilisés de peuvent passer au niveau supérieur à condi- façon inappropriée, ils peuvent renforcer des tion de ne pas échouer dans plus de trois formes d’apprentissage superficielles, et les matières aux examens de fin ­ d’année. Ces évaluations en classe peuvent absorber un examens, ou évaluations sommatives, ont temps précieux d’instruction, sans pour pour objectif de mesurer si les élèves maî- autant améliorer l’apprentissage des ­ élèves. trisent le contenu ­requis. Ils orientent égale- Dans de nombreux pays de la région MENA, ment les élèves vers des parcours s ­ colaires. l’apprentissage des élèves n’est évalué qu’au Le fait qu’ils revêtent des enjeux élevés cours d’examens de fin d’année à enjeu très pousse souvent les enseignants à mettre élevé, généralement utilisés pour autoriser ou l’accent sur la mémorisation en vue des exa- non le passage des élèves en classe s ­ upérieure. mens plutôt que sur les compétences en Des retours d’information plus réguliers sur résolution de problèmes (Akar, 2016 ; les progrès de l’apprentissage pourraient être Shuayb, 2012). Le système marocain d’exa- utiles aux élèves et à leurs e­ nseignants. En mens à chaque niveau vise à orienter les outre, les évaluations à enjeux élevés étudiants vers des parcours scolaires et pro- entraînent souvent des incitations perverses fessionnels, et présente ainsi le risque d’invi- affectant négativement le comportement des ter les enseignants à utiliser des méthodes enseignants, des élèves et des parents et limi- pédagogiques plus didactiques que dialo- tant le rendement de ­l’apprentissage. giques (Akar, 2016 ; IEA, 2015 ; Shuayb, En même temps, dans la région MENA, 2012). les examens à enjeux élevés renforcent l’ac- Reconnaissant les risques qui leur sont cent mis sur l’obtention de diplômes plutôt associés, plusieurs pays de la région MENA que sur l’acquisition de ­compétences. Étant ont réduit l’accent mis sur les examens à donné qu’ils sont l’unique élément détermi- enjeux élevés, en particulier dans les pre- nant le passage d’un élève dans l’enseigne- mières a­ nnées. La Jordanie, le Koweït et le ment supérieur, les examens à enjeux élevés Liban ont supprimé les examens à enjeux éle- visent plus l’apprentissage, en particulier vés restreignant la progression entre les pre- dans les dernières années de l’enseignement ­ nnées. Les responsables de mière et troisième a secondaire, que l’acquisition de compé- l’enseignement du Koweït ont remarqué que tences plus larges et de la capacité d’ap- ce changement représentait une sérieuse prendre à ­apprendre. En outre, les examens réduction de la dépendance du système éduca- à enjeux élevés du secondaire mettent habi- tif aux ­examens. Leur exemple peut guider tuellement en avant la mémorisation et l’ap- d’autres pays de la région MENA vers des plication de procédures, menant ainsi au réformes destinées à veiller à ce que les exa- bachotage, au soutien scolaire privé et à mens à enjeux élevés soient limités, ne créent l’apprentissage par ­ cœur. En Égypte, 53 % pas d’incitations perverses pour les ensei- des étudiants ont recours au soutien scolaire gnants et les élèves, et testent des capacités de privé, et 10 % supplémentaires paient pour réflexion ­supérieures. participer à des groupes d’étude (Assaad et Récemment, des pays d’Asie du Sud-Est Krafft, 2015). obtenant traditionnellement des scores éle- Même dans les années inférieures, les vés aux évaluations PISA et TIMSS ont examens de fin d’année influencent les essayé de réduire les tests à enjeux élevés chances de progression des enfants à travers dans l’enseignement secondaire supérieur en 3 4    Ambitions e t aspir ations d'une région introduisant des mesures d’évaluation plus rappellent et appliquent les connaissances axées sur les processus et plus centrées sur nouvellement ­acquises. élèves. Par exemple, dans un effort pour les ­ Bien que les enseignants de la région éliminer l’enseignement en vue de l’examen MENA évaluent régulièrement les élèves, ces et pour soutenir les réformes du programme évaluations en classe sont rarement alignées scolaire basées sur les compétences du sur les résultats de l’apprentissage des élèves XXIe siècle visant à apprendre à apprendre, ou utilisées pour adapter l’instruction le Japon a proposé, en 2014, un test d’éva- aux besoins d’apprentissage des ­ élèves. Les luation des aptitudes scolaires des candidats enseignants de plus de 70 % des élèves de la potentiels à l’université, un examen alterna- région MENA ayant participé à l’enquête tif à mettre en œuvre à partir de 2019. TIMSS 2015 déclaraient avoir mis un accent L’examen accordera moins d’importance à particulier sur le suivi des progrès des élèves la mémorisation par cœur et privilégiera la en mathématiques à l’aide du travail continu capacité de réflexion, l’expression et le rai- des élèves ou de tests en classe (Mullis et c ­ oll., sonnement des é ­ lèves. Le format du nou- 2016). Toutefois, dans l’ensemble des pays veau test comprend un questionnaire écrit de la région MENA, les évaluations en classe (Kimura et Tatsuno, 2017). sont rarement utilisées pour adapter la péda- Dans un effort similaire pour promouvoir gogie ou fournir aux élèves un retour d’infor- l’apprentissage des élèves, la Corée a mis en mation s ­ ignificatif. En Jordanie par exemple, œuvre, en 2016, un semestre sans examen à seul un enseignant sur quatre déclarait utiliser travers tout le pays, après l’avoir testé à titre les évaluations en classe pour planifier ses pilote pendant deux ans (Cheng, 2017). Afin leçons (Rabie et ­ coll., 2017). Ce manquement que les élèves du secondaire inférieur puissent limite la capacité potentielle des évaluations découvrir leurs rêves et leurs talents sans la en classe à améliorer l’apprentissage des pression des examens de mi-parcours et de fin ­élèves. d’année, la Corée permet aux enseignants d’appliquer le programme scolaire de manière Donner à tous les enfants une chance flexible pendant un s ­ emestre. Cet arrange- équitable d’apprendre ment encourage la participation des élèves à travers la discussion et la pratique et permet Les pays récoltent les fruits de l’enseigne- diverses activités telles que la recherche de ment lorsque tous les enfants apprennent et ­carrières. développent leur capital ­ humain. Les pays de Des preuves irréfutables montrent que les la région MENA ont fait des efforts impres- évaluations formatives en classe – du genre de sionnants pour augmenter la scolarisation, celles utilisées par les enseignants au cours du mais des millions d’enfants ne sont toujours processus d’apprentissage pour modifier leurs pas inscrits à l ­’école. Au cours de l’année activités et approches en fonction de l’appren- scolaire 2014-2015, 14 millions d’enfants de tissage des élèves – peuvent accroître le rende- la région n’allaient pas à l ­’école. Parmi les ment de l’apprentissage en fournissant en non scolarisés, 3,5 millions avaient l’âge de temps voulu aux élèves un retour d’informa- f r é q u e n t e r l e s e c o n d a i r e i n f é r i e u r, tion sur la façon de s’améliorer (Black et 5,2 ­ m illions le primaire, et 5,3 millions Wiliam, 2010 ; Hattie et Timperley, 2007 ; le préprimaire (UNICEF, n ­ .d.). Un large Roediger, Putnam, et Smith, 2011). Les tech- éventail de facteurs est associé à l’exclusion niques d’évaluation en classe peuvent com- scolaire dans la région M ­ ENA. Il comprend prendre des questions et retours d’information le handicap, le travail des enfants, le faible verbaux, des questionnaires écrits, des niveau d’éducation des mères, l’exposition réponses sur des cartes ou des ardoises à aux conflits (voir encadré 8), le mariage des ­ brandir par les élèves pour donner à l’ensei- enfants, le statut de migrant, la vie dans une gnant un instantané en temps réel de la com- région rurale ou isolée, et l’appartenance à préhension dans l’ensemble de la classe, ou un groupe nomade ou à une communauté des activités nécessitant que les élèves se empêchant les enfants de fréquenter l’école A p e r ç u g é n é r a l    35 ENCADRÉ 8 Les conflits dans la région MENA privent d’éducation de nombreux enfants La région MENA accueille plus d'un quart des per- d’école rencontrent d’énormes obstacles pour avoir sonnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays accès aux services ­ éducatifs. Parmi les enfants syriens (PDI) du monde ­ entier. En mai 2018, la République réfugiés, 46 % ne fréquentent pas l’école (officielle ou du Yémen comptait environ 2 millions de PDI, l’Irak non) au Liban, 36 % en Jordanie, et 37 % en Turquie plus ou moins 2 millions, et la Libye quelque 0,2 (Conférence de Bruxelles, 2019). million (OIM, 2018 ; HCR, 2018c ; OCHA, 2018). Indépendamment de la recherche d’une solution Bien qu’il y ait peu de données fiables sur les taux de politique aux conflits en Syrie et en République du scolarisation de ce groupe, les PDI sont généralement Yémen, davantage doit être fait pour que l’éducation confrontés à des difficultés majeures pour accéder de la génération des jeunes réfugiés et enfants dépla- aux services ­ éducatifs. Des estimations approxima- cés ne soit pas ­ n égligée. Cela implique un soutien tives situent le taux de scolarisation des PDI à seule- international aux pays d’accueil des réfugiés, aux ment 28 % dans la République du Yémen et à environ pays en conflit, et aux pays sortant d’un conflit pour 52 % en Irak (ministère de l’Éducation, République l’extension de leurs infrastructures scolaires et la du Yémen, 2017 ; UNICEF, 2017). Les taux de sco- fourniture des ressources nécessaires à l’enseignement larisation sont rarement ventilés par niveau d’études, et à ­ l’apprentissage. Il est également important d’aider mais ils sont probablement nettement plus faibles à mettre en place des environnements d’apprentissage dans le secondaire supérieur et l’enseignement ter- sûrs et de fournir une aide financière aux familles tiaire que dans l’enseignement fondamental, et sans déplacées et ­ r éfugiées. Des programmes doivent doute similaires à ceux des r ­ éfugiés. En Syrie et dans permettre aux étudiants réfugiés d’avoir accès à les pays d’accueil, 7,7 millions d’enfants syriens en âge l’enseignement ­supérieur. pour des raisons culturelles ou religieuses le manque de personnel de soutien, tel que (ISU et UNICEF, 2014). les psychologues scolaires, les interprètes en Les politiques d’intégration impliquent langue des signes, les orthophonistes et que les élèves présentant des handicaps phy- logopèdes, et les physiothérapeutes et ergo- siques, des difficultés d’apprentissage, et thérapeutes, restent toutefois un problème d’autres besoins éducatifs spéciaux fré- (Alkhateeb et Hadidi, 2015). quentent de plus en l’école aux côtés de leurs p ­ airs. Les personnes handicapées sont Se préoccuper des écarts d’apprentissage et estimées à 53 millions dans la région soutenir les élèves les plus faibles MENA, et pourtant l’offre de services d’en- Bien que les niveaux moyens de performance seignement spécial y est encore limitée dans des élèves aux évaluations internationales la plupart des pays (Alkhateeb et Hadidi, soient faibles dans la région MENA, ils 2015). Ce déficit est la conséquence d’un varient largement à l’intérieur de chaque financement limité, d’installations insuffi- pays. Contrairement à la situation dans de ­ santes, du manque d’enseignants qualifiés, nombreux pays avancés, tels que le Canada, ou d’attitudes négatives à l’égard du handi- l’Estonie, la Finlande et le Japon, où la rela- cap et de l’enseignement ­ spécial. Plusieurs tion entre les scores aux tests et le statut pays de la région MENA, tels que la socioéconomique est généralement faible, Jordanie, le Koweït, le Qatar, l’Arabie saou- dans la région MENA, les écarts d’apprentis- dite et les Émirats arabes unis, ont élaboré sage sont importants entre les élèves de des règlements et politiques pour créer des niveaux socioéconomiques différents environnements sans obstacle accessibles (OCDE, 2016­ a). La situation économique, aux élèves vivant avec un h ­ andicap. sociale et culturelle du ménage des élèves de L’inadéquation des installations scolaires et 15 ans est fortement corrélée à des 3 6   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région différences de performance, comme l’in- Certains pays de la région MENA sont diquent les résultats de PISA 2015. Au en train de combler l’écart entre leurs Liban, cet écart est équivalent à une diffé- élèves les plus forts et les plus faibles, rence de plus de deux années complètes de tandis que dans d’autres, il semble se ­ scolarité. De plus, les neuf pays de la région creuser (voir tableau 3). Un cas marquant MENA ayant participé à l’évaluation parmi les pays participants à TIMSS est TIMSS 2015 des mathématiques en qua- celui des Émirats arabes unis, où les meil- trième année faisaient partie des 13 pays leurs élèves obtiennent des résultats supé- p résentant les plus larges écarts entre les ­ rieurs à ceux des années précédentes et quartiles de performance supérieur et infé- les élèves plus faibles en obtiennent de rieur (voir schéma 14). Une amélioration moins ­ b ons. Des programmes ciblés de la performance là où elle est la plus faible peuvent améliorer la rétention scolaire entraînerait l’augmentation la plus rapide des élèves les plus faibles risquant d’aban- des niveaux globaux ­ d’apprentissage. donner ­l ’école. SCHÉMA 14  La région MENA présente les plus larges écarts de performance entre les élèves les meilleurs et les plus faibles Différence de score entre les 75e et 25e percentiles de performance en mathématiques des élèves de quatrième année, TIMSS 2015 500 653 613 596 450 582 575 576 600 Différence de scores entre les quartiles supérieur et inférieur 569 562 565 540 527 400 517 512 506 504 496 499 500 492 492 465 350 485 446 445 462 462 426 450 Échelle de scores TIMSS 438 300 400 393 372 367 356 377 250 338 321 311 320 300 200 281 161 145 145 150 150 126 134 134 137 140 200 125 111 113 119 88 90 96 100 102 100 77 100 50 0 0 ré s ss Finl . dé e Ca n da at e Au is Ba e ie reïn ba e AU r isl oc ue Jo n ie Ab abe ït Da nis AU p ta a d c ali Du dit tio a e n an ré -B an ar Om na iq an ts Kow Qa s-U ou s u ï, E ,E str h ou ra ys rd M e, am Fr bi Pa sa Ét Co fé ar p. ie, ab ré Ar ira n, Ru Ém Ira 75e percentile 25e percentile Source : Mullis et ­coll., 2016. ­ ays. Les carrés représentent les scores du 75e percentile et les Note : Comprend tous les pays de la région MENA participants (en bleu clair) ainsi que d’autres p cercles ceux du 25e percentile dans les pays c ­ omparés. La ligne horizontale représente la moyenne internationale, qui a été fixée à 500 lors du premier cycle de l’enquête TIMSS. TIMSS = Tendances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences (Trends in International Mathematics and Science ­Study). A p e r ç u g é n é r a l    37 TABLEAU 3  Les écarts de performance entre les élèves se sont à la fois réduits et creusés dans la région MENA Évolution de la performance moyenne à l,enquête TIMSS huitième année, 10e et 90e percentiles, 2011 et 2015 Score moyen Changement dans Pays 2011 2015 Score moyen 10e percentile 90e percentile Mathématiques Bahreïn 409 454 45 72 19 Oman 366 403 37 54 22 Qatar 410 437 27 40 20 Rép. islamique Iran, ­ 415 436 21 20 23 Maroc 371 384 13 20 8 Émirats arabes unis 456 465 9 −4 23 Liban 449 442 −7 −7 −7 Jordanie 406 386 −20 −8 −22 Arabie saoudite 394 368 −26 −13 −35 Sciences Qatar 419 457 38 52 19 Oman 420 455 35 54 19 Maroc 376 393 17 18 16 Bahreïn 452 466 14 12 18 Émirats arabes unis 465 477 12 −3 22 Liban 406 398 −8 −13 −2 Rép. islamique Iran, ­ 474 456 −18 −16 −19 Jordanie 449 426 −23 −15 −21 Arabie saoudite 436 396 -40 -59 -20 Source : Mullis et ­coll., 2016. Faire attention aux garçons parce que leurs SCHÉMA 15  La région MENA présente les plus forts écarts de résultats scolaires sont en train de chuter scores au test entre les sexes Différence en points de scores la plus élevée en science (filles > garçons), TIMSS loin derrière ceux des filles quatrième année, 2015 La région MENA présente les plus larges dis- parités de performance scolaire entre les 79 sexes, et elles sont systématiquement en 80 Di érence en points de scores faveur des ­ filles. Huit des dix pays enregis- 70 trant les plus forts écarts entre les sexes dans 60 l’enquête TIMSS se trouvent dans la région 50 MENA. C’est en Arabie saoudite que l’écart ­ 39 40 est le plus important, les résultats des gar- 32 30 çons y étant nettement inférieurs à ceux des 30 24 filles (voir schéma 15). Les rendements de 20 14 12 11 10 8 8 l’apprentissage étant faibles pour tous les 10 5 élèves de la région MENA, l’écart systéma- 0 tique entre les sexes constitue une crise de Ba e eïn an ït ab ar is de n Bu c ie Ka ède n o t Ira sta we un ar ar at di ar l’apprentissage chez les garçons de la ­ région. Om lan hr lg Su u Q kh M Ko es ao Fin za es Ces écarts se manifestent tôt : dès la deu- bi ts a xième année, les filles surpassent les garçons Ar ira Ém en ­l ecture. En Cisjordanie et à Gaza, par exemple, un écart de 10 points de pourcen- Source : Martin et coll. 2016. Note : La différence entre les filles et les garçons n’était pas statistiquement significative dans la tage sépare les filles (17 %) et les garçons République islamique ­d’Iran. 3 8   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région (27 %) incapables de lire un seul mot d’un leur développement physique, cognitif, texte s­ imple. Sur l’ensemble des 18 pays social et affectif – des conditions préalables ayant participé à l’Évaluation des compé- à la réussite ­scolaire. Par exemple, à seule- tences fondamentales en lecture (EGRA – ment 18 mois, le vocabulaire d’un enfant Early Grade Reading Assessment ) entre reflète la situation socioéconomique de ses 2010 et 2015, c’est dans la région MENA parents (Center on the Developing Child, que l’écart entre les sexes est le plus pro- 2009). À 3 ans, un enfant dont les parents noncé (Baromètre des compétences fonda- ont un diplôme universitaire peut avoir un mentales en lecture de ­ l ’USAID). La vocabulaire trois fois plus riche que celui manifestation précoce des écarts entre les d’un enfant dont les parents n’ont pas ter- sexes dans des compétences fondamentales miné leurs études secondaires (Center on the telles que la littéracie et la numératie sou- Developing Child, 2009). ligne la nécessité de traiter spécifiquement les L’accès à l’éducation préscolaire est très besoins d’apprentissage des garçons dès les inégal suivant les pays de la région M ­ ENA. premières années ­ d’études. En effet, les inter- Par exemple, à Djibouti et en Égypte, un ventions qui ne ciblent pas les garçons et les enfant appartenant au quintile des ménages élèves nécessitant un appui supplémentaire les plus riches a six fois plus de chance de par- peuvent creuser encore davantage l’écart ticiper à un programme de soins et éducation entre les sexes (voir encadré 9). de la petite enfance (SEPE) qu’un enfant issu du quintile le plus pauvre (El-Kogali et Krafft, Consacrer plus de ressources aux enfants 2015). En Irak, en Libye et en Tunisie, les des ménages les plus pauvres enfants du quintile le plus riche ont 17 fois L’inégalité des chances 10 commence dès le plus de chances de participer à un programme plus jeune â ­ ge. C’est pourquoi les efforts SEPE que les enfants du quintile le plus pour y remédier doivent également com- ­ pauvre. Quelles sont les conséquences à court mencer t­ ôt. Les enfants nés dans des circons- et à long terme des inégalités pour le dével- tances non favorables à leur bien-être sont oppement, les soins et l’éducation de la petite plus susceptibles de rester à la traîne en ce enfance ? Lorsque les enfants entrent à l’école qui concerne leur santé, leur nutrition, et primaire, ils sont déjà placés sur des ENCADRÉ 9 Le paradoxe des genres constitue un double défi pour le capital humain dans la région MENA Dans la région MENA, la contre-performance des gar- 15 ans et plus font partie de la population active (base çons est un phénomène d’une ampleur jamais consta- de données des indicateurs du développement dans le ­ onde. Les systèmes éducatifs de tée ailleurs dans le m monde, Banque ­ mondiale). la région MENA ne répondent manifestement pas aux Les inefficacités et les coûts associés à la perte besoins d’apprentissage des ­ garçons. De plus, bien d’apprentissage des garçons sont importants du point que les résultats scolaires des filles y surpassent ceux de vue tant économique que s ­ ocial. D’autre part, la des garçons, la région MENA affiche le taux de par- sous-représentation des femmes sur le marché du tra- ticipation des femmes à la vie active le plus faible de vail, malgré le fait que celles-ci affichent de bien meil- toutes les régions du monde, selon la base de données leurs résultats que les hommes en matière d’appren- des indicateurs du développement dans le monde de tissage depuis la petite enfance jusqu’à l’âge adulte, la Banque ­ mondiale. En moyenne, sur l’ensemble des constitue une sous-utilisation significative du capital pays de la région MENA, seuls 20 % des femmes de ­humain. A p e r ç u g é n é r a l    39 trajectoires d­ ifférentes. Certains enfants dis- aider des pays de la région MENA à faire posent de tout ce dont ils ont besoin pour progresser leurs systèmes éducatifs et à sou- adulte. D’autres réussir à l’école et dans la vie ­ tenir ­l’apprentissage. commencent leur vie scolaire avec un désa- vantage qui aura des effets ultérieurs tout au Les solutions EdTech sont prometteuses long de leur scolarité et ­au-delà. pour la promotion de l’apprentissage Enfin, de profonds écarts de scolarisation Les EdTech – les applications des technolo- existent dans la région MENA, en particulier gies de l’information et de la communication entre les enfants les plus riches et les plus (TIC) visant à améliorer l’éducation – ont ­ pauvres. Au Maroc, par exemple, plus de la connu une croissance rapide dans le ­ monde. moitié des enfants en âge d’enseignement En 2017, les revenus du marché mondial des secondaire inférieur appartenant au quintile EdTech étaient estimés à 17,7 milliards de des ménages les plus pauvres ne vont pas à dollars EU (Business Wire, 2018).11 Plusieurs l’école, contre 6 % dans le quintile le plus facteurs ont alimenté cette croissance : la riche. Des écarts dans les taux d’enfants non ­ reconnaissance de l’importance de l’éduca- scolarisés existent également en fonction du tion pour la croissance économique ; un tas- sexe et de la situation géographique (zones sement ou même un déclin du financement urbaines ou ­ rurales). public de l’éducation, qui ont ainsi laissé de la place à une participation du secteur privé ; et – peut-être le plus important – les efforts Exploiter la technologie pour renforcer pour bousculer ce secteur à l’aide de la tech- l’offre éducative nologie dans l’espoir d’améliorer l’apprentis- La pénétration rapide de la technologie et les sage des élèves et de progresser rapidement innombrables possibilités qu’elle offre dans les classements internationaux de incitent les citoyens et les responsables poli- ­ l’éducation. Dans la région MENA, plusieurs tiques à investir dans les technologies conditions sont actuellement favorables à numériques. Dans l’ensemble de la région ­ une plus large adoption des EdTech, à savoir MENA, trois facteurs sous-jacents maintien- une population jeune, dynamique et férue de dront l’accès à la technologie au premier technologie ; un marché de l’éducation éva- plan : 1) le désir des autorités de se diversifier lué à environ 100 milliards de dollars EU (Al en s’éloignant des économies tributaires du Masah Capital, 2012) ; et une région dont pétrole ; 2) les efforts des entreprises pour les pays consacrent en moyenne environ un rester compétitives à l’échelle mondiale en cinquième de leur budget à l’éducation élargissant leur champ d’action aux techno- (Service d’actualités de Trade Arabia, 2013 ; logies numériques ; et 3) la possibilité offerte Banque mondiale, 2008). Tout cela dénote par la technologie numérique de soutenir un environnement propice aux EdTech et à l’apprentissage pour t ­ous. Un avenir axé sur leur ­croissance. la technologie nécessitera que les enfants Dans la région MENA, de nombreuses soient à l’aise avec celle-ci, et les systèmes plateformes en ligne fournissent des contenus éducatifs doivent les aider à le ­ d evenir. d’apprentissage en a ­ rabe. Une partie du Beaucoup d’autres secteurs ont déjà subi le contenu en langue anglaise de la Khan contrecoup de la rupture technologique, Academy et d’autres plateformes a été tra- mais celui de l’éducation n’a pas sensible- duite en ­ arabe. Des fournisseurs de contenu ment modifié son principal mode de presta- basés dans la région MENA, tels que Nafham, tion au cours des 150 dernières années, ni au ont repris le format de la Khan Academy avec niveau mondial ni dans la région ­ MENA. des contenus originaux utilisant les pro- La technologie offre une occasion unique de grammes scolaires de plusieurs pays de la contribuer à dispenser un enseignement de région, ainsi qu’une production participative qualité d’une façon plus efficiente et ­ efficace. permettant au public de poster des l ­eçons. Intelligemment exploitée, la technologie peut D’autres – tels que l’Université internationale 4 0   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région Talal Abu-Ghazaleh au Liban, Education que les élèves devaient être autorisés à utili- Media Company au Maroc et la Bibliotheca ser les réseaux sociaux en ­classe. En réponse Alexandrina en Égypte – ont créé des conte- à une question demandant si les élèves pour- nus numériques dans différentes ­ langues. raient ou non être autorisés à effectuer une Certaines initiatives permettent également série d’activités informatiques, près de 80 % aux réfugiés qualifiés d’accéder à des cours en des personnes interrogées déclaraient qu’elles ­ ligne. Par exemple, l’université allemande seraient heureuses de voir leurs enfants utili- d’enseignement à distance Fernuniversität ser des « outils web collaboratifs » dans le Hagen permet aux réfugiés qualifiés d’accéder travail en ­classe. Néanmoins, les répondants à tous les cours en ligne et offre une forma- reconnaissaient également que certains linguistique. L’Université Kiron a forgé tion ­ aspects de l’accès à la technologie pourraient un partenariat avec des fournisseurs de for- avoir des effets néfastes sur l’apprentissage mation en ligne ouverte à tous (FLOT) des des ­élèves. États-Unis pour organiser un cours en ligne de deux ans destiné aux réfugiés, leur donnant la Étendre l’infrastructure TIC pour élargir la possibilité d’achever leurs études dans une portée des solutions EdTech université d’accueil en Allemagne (Unangst, Accéder aux solutions et plateformes EdTech 2017). Au Royaume-Uni, le Partnership for nécessite une infrastructure ­TIC. Les pays de Digital Learning and Increased Access la région MENA ont consenti des investisse- (PADILEIA) du Département pour le dévelop- ments considérables dans les infrastructures pement international (DfID) vise à répondre TIC scolaires (Lightfoot, 2011). Les TIC aux besoins d’enseignement supérieur des sont disponibles dans la plupart des écoles de jeunes déplacés en Jordanie et au Liban en la région, avec une moyenne d’environ raison de la crise syrienne, à l’aide de pro- 2,7 ordinateurs pour 10 élèves de huitième grammes universitaires mixtes, comprenant année (voir schéma 16) contre 4 ordinateurs des FLOT, un apprentissage en ligne ciblé et pour la moyenne ­ internationale. Ce chiffre un apprentissage en classe pour les élèves varie toutefois assez fort d’un pays à l’autre, déplacés (SPHEIR, 2017). avec 10,5 ordinateurs pour 10 élèves au Qatar et seulement 1,0 ordinateur pour Tirer parti du vigoureux soutien public à 50 élèves en Iran (Mullis et ­ coll., 2016). l’EdTech dans la région MENA Dans les pays de la région MENA, les Les EdTech sont nécessaires, mais pas familles, les élèves et la communauté en suffisantes pour améliorer le rendement de général appuient fortement une plus grande l’apprentissage des élèves intégration de la technologie numérique dans Les données relatives à l’impact des techno- les salles de classe pour faire évoluer la logies sur l’éducation sont m ­ itigées. Une nature des systèmes d’enseignement et de récente étude menée par le Laboratoire d’ac- ­ formation. Dans une enquête sur les médias tion contre la pauvreté Abdul Latif Jameel sociaux et la réforme de l’enseignement, (J-PAL) du Massachusetts Institute of effectuée dans 13 pays de la région MENA, Technology a évalué plus de 100 interven- la plupart des répondants soutenaient l’utili- tions EdTech et jette un éclairage important sation des TIC en classe (Rapport sur les sur l’utilisation des technologies dans l’édu- médias sociaux arabes, 2013). Parmi les per- cation (Escueta et c ­ oll., 2017). L’étude sou- sonnes interrogées, 84 % estimaient que l’ac- ligne que la connectivité en ligne est une cès universel à Internet devait être la norme condition nécessaire, mais pas suffisante de et que dans les écoles, les enfants devaient l’amélioration du rendement de l’apprentis- pouvoir accéder à Internet sur leurs appareils sage des élèves à l’aide des solutions EdTech personnels. Plus des trois quarts pensaient ­ les plus ­ p rometteuses. Les enseignants que les médias sociaux devaient faire partie doivent être capables d’orienter les élèves à des programmes scolaires, et 61 % croyaient propos de la façon de rechercher des A p e r ç u g é n é r a l    41 SCHÉMA 16  Des ordinateurs sont disponibles dans les écoles de la région MENA, même si la couverture varie considérablement Nombre d’ordinateurs (y compris les tablettes) à la disposition des élèves dans l’école, pour 10 élèves de huitième année, 2015 12 10,5 10 8 7,0 Nombre 6 4 3,3 1,9 1,7 1,6 2 1,4 1,0 0,9 0,3 0,2 0 Qatar Bahreïn Koweït Oman Liban EAU Arabie Jordanie Égypte Maroc Iran saoudite Source : Mullis et ­coll., 2016. ressources en ligne et les amener à devenir salles de classe pourrait être une condition des personnes capables de penser de manière nécessaire, mais pas suffisante, d’une amé- critique et d’organiser, hiérarchiser et synthé- lioration du rendement de l’apprentissage l’information. L’étude propose égale- tiser ­ des élèves à l’aide de solutions ­ EdTech. ment quelques options qui pourraient être Pour assurer l’apprentissage pour tous, appliquées dans les pays de la région MENA une attention particulière doit être portée (voir encadré 10). aux compétences en littératie ­ n umérique. Une récente analyse des résultats PISA Dans de nombreux pays, les jeunes issus de des pays de la région MENA confirme ces milieux aussi bien favorisés que défavorisés ­ conclusions. Le seul accès à la technologie passent à peu près, chaque semaine, le même ne permet pas de résoudre les problèmes liés temps en ­ ligne. Il y a néanmoins des diffé- aux résultats des élèves (McKinsey, 2017). rences significatives dans la façon dont ils L’impact de l’ajout d’un ordinateur supplé- Internet. Même dans les pays déve- utilisent ­ mentaire dans une salle de classe est faible, loppés, où l’accès à Internet est presque égal tandis que la mise en place d’enseignants chez les enfants issus de milieux socioécono- avec des ordinateurs a un plus fort impact miques différents, les élèves issus de milieux positif. La fourniture d’un ordinateur à l’en- ­ défavorisés sont plus susceptibles de discuter seignant de chaque classe est six fois plus ou de jouer à des jeux vidéo que leurs homo- efficace en ce qui concerne les scores PISA logues plus aisés, qui utilisent davantage des élèves que de donner un ordinateur à Internet pour rechercher des informations ou chaque ­élève.12 Même si un meilleur accès lire les nouvelles (Forum économique mon- aux ordinateurs et à Internet peut, en soi, ne dial, 2016). Pour convertir les « opportuni- pas améliorer de façon mesurable les résul- tés en réelles opportunités » (OCDE, 2016d, tats scolaires, il a néanmoins réussi à 3) pour chacun et réduire les inégalités accroître la facilité d’utilisation de la tech- (numériques), les écoles doivent enseigner les nologie et le temps consacré à l’apprentis- compétences en littératie tout en promou- sage de l’usage des appareils n­ umériques. En vant activement la technologie en tant que ce sens, la connectivité en ligne dans les moyen d’améliorer les compétences et 4 2   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région ENCADRÉ 10 Les EdTech offrent des possibilités de faire un bond en avant à l’apprentissage Les programmes d’apprentissage assisté par ordinateur d’inscrire leurs enfants à des programmes de dévelop- (AAO) associent l’apprentissage en face à face dans les pement de la petite enfance ou de regarder les bulle- classes avec des composantes en ligne du programme tins de leurs adolescents, ou prévenant les étudiants ­ scolaire. Ils fonctionnent bien quand ils sont dispen- universitaires qu’il est temps d’introduire leur dossier sés aux élèves dans des environnements structurés en pour un prêt étudiant (Economist, 2017 ; Escueta et ligne et en classe, dans lesquels les enseignants sont coll., 2017 ; Pugatch et Wilson, 2018). ­ formés à faciliter avec compétence cette i­nteraction. En Les manuels numériques sont interactifs et rendent fait, l’AAO aide l’élève à apprendre grâce à une com- possibles des expériences d’apprentissage uniques binaison d’expériences scolaires supervisées en dehors pour les é­ lèves. À une extrémité du spectre, on trouve de son domicile et de contenus fournis en ligne, avec dans la région MENA les applications mobiles offrant un certain contrôle du temps, du lieu, du parcours ou des bibliothèques en ligne interactives, telles que du rythme de l’élève (Horn et Staker, 2011). Dans cet Rawy Kids en Égypte ou le lecteur de livre Kitabi au apprentissage mixte, les expériences en classe et en L iban. À l’autre extrémité, se retrouvent celles qui ­ ligne sont adaptées pour se renforcer mutuellement utilisent le divertissement et le jeu pour encourager (Horn et Staker, 2012). l’apprentissage, comme Sho’lah et Loujee, un jouet Les interventions comportementales basées sur la arabe « intelligent » visant l’apprentissage par le jeu technologie (« nudging ») s’appuient sur des réflexions (Arab News, 2016). Récemment, deux jeux basés sur tirées de l’économie ­comportementale. Elles s’avèrent une application pour smartphone se sont avérés effi- efficaces dans une grande variété d’environnements caces pour améliorer les compétences élémentaires en éducatifs (Escueta et ­ c oll., 2017). Le « nudge » ou lecture dans une Syrie déchirée par les conflits : Antura coup de pouce présente des choix à des bénéficiaires et les lettres et Nourris le monstre, qui ont tous deux sans changer véritablement les coûts de ces ­ c hoix. affiché un rendement positif de l’apprentissage aux En général, ces coups de pouce atteignent les utilisa- évaluations initiales de l’impact et ont été primés au teurs à l’aide de messages texte, rappelant aux parents concours EduApp4Syria 2017 (Comings, 2018). connaissances, y compris le fait de se tenir au La meilleure approche consisterait à entre- courant des marchés de l’emploi ­ potentiels. prendre des réformes multisystémiques fai- sant correspondre l’offre éducative et la demande de c ­ ompétences. Elle implique des Accroître la demande de réformes économiques visant à permettre une compétences meilleure adéquation entre les compétences requises sur le marché du travail et celles Des réformes supplémentaires sont transmises par l’éducation et recherchées par nécessaires pour que l’éducation réalise élèves. Elle comprend égale- les parents et les ­ son potentiel ment des mesures destinées à corriger les dis- Pour réaliser tout son potentiel, l’éducation torsions du secteur de l’éducation et ­au-delà. doit fournir aux élèves des compétences Elle peut, par exemple, aborder les signaux et répondant aux besoins économiques et incitations issus du marché du travail, tout en sociaux de chaque ­pays. Un renforcement de mettant en œuvre des réformes au sein du l’offre éducative rapprocherait l’éducation secteur de ­l’éducation. Sans une réorganisa- de la réalisation de son potentiel, mais tion du marché du travail accroissant la constituerait une approche de deuxième demande de compétences, la contribution du choix laissant inexploitée la majeure partie secteur de l’éducation à des objectifs tels que de ce potentiel (Rodrik, 2008). la diversification économique ne sera pas A p e r ç u g é n é r a l    43 pleinement ­ r éalisée. En outre, sans des SCHÉMA 17  La région MENA a besoin d’une logique de la réformes de la fonction publique permettant compétence le recrutement, la motivation et l’autonomi- sation des meilleurs enseignants, la profes- Système éducatif Forte offre sion enseignante restera dévalorisée et Forte demande de compétences de compétences l’apprentissage c­ ompromis. Il est donc impor- tant de comprendre comment le secteur de l’éducation interagit avec l’environnement Employeurs économique, social et politique pour pro- privés Forte demande duire les résultats escomptés et mettre en de compétences œuvre des politiques relevant les défis tant du Jeunes and Employeurs familles publics système éducatif que du marché du ­ travail. Améliorer l’envoi des signaux relatifs aux compétences Source : Adapté de Assaad, Krafft et Salehi-Isfahani (2018). Les distorsions du marché du travail des pays de la région MENA ont conduit à mettre l’ac- cent sur les qualifications plutôt que sur les lois du travail y rendent extrêmement diffi- c ompétences. Pour que la région MENA ­ cile le licenciement des employés (Banque abandonne la logique du diplôme au profit de mondiale, 2013­ a). Ce facteur est dissuasif celle de la compétence, les employeurs doivent pour le secteur privé, et les employeurs envoyer des signaux forts aux jeunes et aux sont, par conséquent, moins susceptibles familles quant aux types de compétences dont d’embaucher à l’issue d’une période d’essai ils ont b­ esoin. Ces jeunes et leurs familles visant à mieux connaître les compétences doivent à leur tour exiger du système éducatif d’un candidat, une pratique courante dans qu’il délivre les compétences en ­question. Le d’autres parties du m ­ onde. Combiné à l’ab- système éducatif doit alors répondre en four- sence d’informations sur la qualité ou la nissant l’ensemble des compétences requises productivité des diplômés, cet effet dissuasif et en communiquant à propos des compé- explique pourquoi les entreprises ont ten- tences acquises (voir schéma 17). dance à embaucher à travers leurs réseaux Les employeurs de la région MENA ne ­sociaux. communiquent (signalent) toutefois pas effi- Plutôt que les compétences, ce sont les rela- cacement les compétences dont ils ont besoin tions personnelles qui dictent les résultats au système éducatif ou aux élèves et ­ parents. obtenus sur le marché du travail de la région Cette médiocre communication est exacerbée MENA, réduisant ainsi encore davantage la par le fait que dans la plupart des pays, un demande de ­ compétences. Un sondage Gallup nombre disproportionné d’entreprises du mené dans 16 économies de la région MENA secteur privé sont des microentreprises, qui a conclu qu’en moyenne, 70 % des répon- n’ont pas la capacité d’envoyer efficacement dants étaient d’accord avec le fait que des des signaux aux systèmes éducatifs de la relations personnelles sont essentielles pour région (Assaad, Krafft et Salehi-Isfahani, trouver un emploi (voir schéma 18). Les 2018). Elles ne sont pas non plus bien placées familles et élèves manquent également d’inci- pour recevoir les signaux du système ­éducatif. tation à mettre l’accent sur les compétences ; Actuellement, les signaux concernent essenti- sur le marché du travail, les compétences ellement les diplômes (voir encadré 11). mesurables acquises à l’aide de l’éducation sont nettement moins récompensées, quand S’attaquer aux politiques du travail rigides elles le sont, que l’origine sociale ou les Dans la région MENA, des politiques du diplômes (Assaad, Krafft et Salehi-Isfahani, travail rigides limitent également la 2018 ; Krafft et Assaad, 2016 ; Krishnan et demande de ­ compétences. Par exemple, les ­coll., 2016). 4 4   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région ENCADRÉ 11 Dans l’éducation, les signaux parlent des compétences Les pays de la région MENA n’appliquent pas une diplômés du secondaire disposent de moins de moyens logique de la ­ c ompétence. Les États du Golfe sont d’envoyer des signaux sur leurs capacités, même si le confrontés à des écarts de compétences, de coût de la rendement financier de la capacité augmente forte- main-d’œuvre et de mobilité entre les travailleurs natio- ment avec l’expérience (Arcidiacono, Bayer et Hizmo, naux et ­immigrés. Les décideurs politiques y discutent 2010). de la nécessité d’une réforme fondamentale du système Dans la région MENA, les scores aux tests ne des ­compétences. Par exemple, sur les 23 000 nou- semblent actuellement pas fournir des informations veaux demandeurs d’emploi annuels du Koweït, envi- adéquates sur la capacité (Assaad, Krafft et Salehi-­ ron 10 000 seraient incapables de trouver un emploi Isfahani, 2018). En plus de rendre les scores aux tests convenable. Le placement de ces demandeurs d’emploi ­ plus significatifs (en mesurant plus efficacement les nécessiterait soit que la demande de main-d’œuvre compétences), des modifications de la politique du augmente (que les employeurs recherchent davantage travail fourniraient aux employeurs l’information de travailleurs appartenant aux types actuellement et la flexibilité dont ils ont besoin, par exemple en produits par le système éducatif) soit que des réformes encourageant les périodes d’essai avant l’embauche à éducatives fassent mieux correspondre les compétences long ­terme. Ensemble, ces pratiques enverraient aux avec les besoins du marché du travail (Hertog, 2016). employeurs un signal plus précis sur les compétences L’envoi de signaux est le processus à l’aide duquel des ­diplômés. une partie révèle certaines informations sur elle-même Les signaux envoyés par les employeurs aux à une autre p­ artie. Par exemple, sur le marché du tra- élèves et aux institutions éducatives sont également vail, les employeurs ne connaissent pas d’emblée les ­ i mportants. Les enquêtes nationales auprès des capacités productives de leurs nouvelles ­ recrues. Une employeurs, accompagnées d’une forte médiatisa- des principales manières dont les candidats peuvent tion de leurs rapports et résultats, pourraient être une signaler leurs aptitudes est l’éducation (Arcidiacono, manière d’envoyer des signaux sur les compétences Bayer et Hizmo, 2010 ; Spence, 1973). Aux États- dont les employeurs ont b ­ esoin. Les « career acad- Unis, le curriculum vitae des diplômés universitaires emies » ou d’autres modèles de partenariats entre contient des informations sur les diplômes, les spécia- l’école et les employeurs peuvent fournir aux élèves les lisations et les résultats aux t­ ests. Celles-ci agissent informations dont ils ont besoin sur les emplois et les comme des signaux de la capacité et accroissent la compétences. Les partenariats facilitant les stages, le ­ probabilité que les diplômés universitaires soient mentorat et d’autres expériences informatives peuvent payés conformément à leurs ­ aptitudes. La plupart des être efficaces (Lerman, 2013). Des réformes efficaces, telles que celles l’ancienneté et le niveau d’études (Meng, menées en Chine, abordent à la fois les poli- Shen et Xue, 2013). À la fin des années 1970, tiques du travail rigides et les défis spéci- la Chine a mis en œuvre avec succès de nom- fiques à l’éducation, qui contribuent à la breuses réformes économiques, incluant le médiocrité des compétences et des s ­ ignaux. fait d’accorder plus de flexibilité salariale Auparavant, en Chine, les réglementations aux entreprises et d’introduire un système strictes, le manque de concurrence et l’im- d’embauche de la main-d’œuvre abandon- possibilité de licencier les travailleurs impro- nant l’emploi à vie et donnant aux entre- ductifs entraînaient une faible productivité prises d’État le droit de licencier des (Morrison, 2011). Dans le cadre de l’écono- ­ travailleurs. À la suite de la première confé- mie planifiée, les travailleurs avaient un rence nationale de la Chine sur l’emploi de emploi garanti à vie et étaient assignés à un 1980, les entreprises ont obtenu plus d’auto- poste dont leur employeur ne pouvait les nomie d’embauche et les demandeurs d’em- chasser, avec des salaires déterminés par ploi plus d’autonomie dans la recherche A p e r ç u g é n é r a l    45 SCHÉMA 18  Des relations personnelles (wasta) sont essentielles pour l’obtention d’un emploi dans la région MENA Pourcentage réagissant à la déclaration que des relations personnelles sont essentielles pour l’obtention d’un emploi 100 10 90 12 20 18 19 20 21 23 23 26 19 27 32 33 80 23 29 30 22 28 70 19 24 60 Pourcentage 50 90 85 40 79 79 79 78 76 75 75 73 72 71 68 68 67 66 65 64 30 63 62 58 20 10 0 ie eïn ït oc en sie te es rie an is an ie ti sa za de ite on rie ye r k ta Ira we ou un an an yp or Ga Lib ar Lib ud m gé Sy lan oud gi ni Qa hr ib m rd rit M Ko Ég Yé , ré Tu es Al So Ba et Dj Co Jo au ab ie M ie ar an ab ts rd ali Ar ira sjo m Ém Ci So D'accord Pas d'accord Source : Sondage Gallup, 2013. d’emploi, notamment dans le secteur privé autonomiser les meilleurs ­ e nseignants. (Brooks et Tao, 2003). La flexibilité des Aucun système éducatif ne connaîtra le suc- salaires, y compris la mise en place de primes, cès à moins de fournir des incitations (finan- a été graduellement accrue, et la part des cières ou professionnelles) significatives à primes dans le salaire total a augmenté dans l’effort des enseignants (Banque mondiale, l’ensemble des entreprises de 2 % de la masse 2018­ e). Les données sur les effets des incita- salariale en 1978 à 16 % en 1997, incitant tions financières destinées aux enseignants effectivement les employés à obtenir de bons sont mitigées, mais l’incitation profession- résultats (Brooks et Tao, 2003). Depuis nelle semble, elle, détenir le pouvoir d’amé- 1997, les revenus ont presque doublé (Meng, liorer le rendement de l’apprentissage des Shen et Xue, 2013). Pendant ce temps, les é lèves. Les systèmes de rémunération au ­ réformes ont entraîné des rendements plus mérite peuvent être justifiés dans certains élevés de la scolarisation (Zhang et ­ c oll., contextes, mais les données internationales 2005). Les élèves sont davantage motivés à montrent clairement que des incitations acquérir des compétences leur permettant de professionnelles bien choisies ont un poten- gagner des salaires plus élevés fondés sur ces grand. La progression à tra- tiel encore plus ­ compétences et sur leur productivité plutôt vers les échelons de carrière et d’autres que sur leurs diplômes ­scolaires. formes de reconnaissance des enseignants ont eu des effets motivants considérables Réformer la fonction publique pour attirer dans plusieurs pays très ­ performants. Ces les meilleurs enseignants systèmes utilisent des processus d’évalua- L’accroissement de la demande de compé- tion pour identifier le talent et la réussite tences requiert des réformes de la fonction (Darling-Hammond et ­ coll., 2017 ; Liang, p u b l i q u e p o u r r e c r u t e r, r e t e n i r e t Kidwai et Zhang, 2016). 4 6   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région Dans la plupart des pays de la région licencier les enseignants peu performants ou MENA, la carrière des enseignants dépend absents de manière ­ chronique. En revanche, essentiellement des années de service plutôt de nombreux pays de l’OCDE (Danemark, que de la performance (Banque mondiale, États-Unis, Irlande, Nouvelle-Zélande, Pays- 2012). Des efforts plus importants sont requis Bas, Royaume-Uni, Slovénie et Suisse) pour réformer intégralement les systèmes accordent aux chefs d’établissement un rôle d’incitation des enseignants, afin de promou- considérable en matière d’embauche et de voir un enseignement et un apprentissage de licenciement des enseignants (voir schéma 19). qualité et d’offrir des carrières g ­ ratifiantes. Sur les six pays de la région MENA qui Ces types d’initiatives peuvent exiger une ont participé à l’enquête PISA 2015, les trois réforme des règles et règlements de la fonction ayant obtenu les meilleurs scores en mathéma- publique pour soutenir les systèmes d’incita- tiques (Liban, Qatar et Émirats arabes unis) tion et de ­ r edevabilité. Par exemple, à accordent aux chefs d’établissement un certain Shanghai, les enseignants peuvent progresser niveau de responsabilité dans la gouvernance professionnellement à travers un système de scolaire semblable à celui des pays de l’OCDE, classement à cinq niveaux (Liang, Kidwai et même si davantage d’études sont nécessaires Zhang, 2016 ; Banque mondiale, 2018­ b). pour déterminer si la corrélation entre la gou- L’Australie, le Canada et Singapour ont des vernance scolaire et les performances des échelons de carrière similaires pour récom- élèves est une relation de cause à ­ effet. penser les connaissances, compétences et Des efforts sont en cours dans certains contributions des enseignants (NCEE, 2016). pays de la région MENA pour améliorer le On peut trouver, dans le monde entier, des leadership scolaire, mais le processus est ­lent. exemples utiles de parcours enrichissants et En Tunisie, les chefs d’établissement primaire flexibles des chefs d’établissement s­ colaire. Par n’ont que peu accès aux ressources fi­ nancières. exemple, en Belgique flamande, un ancien chef Même si la loi leur impose explicitement d’établissement peut prendre la tête d’une d’orienter les enseignants à propos du pro- communauté d’écoles collaborant sur des gramme scolaire et des tâches liées à l’ensei- questions telles que l’orientation profession- gnement, en pratique, cette responsabilité est nelle des élèves, l’offre de cours, et l’enseigne- souvent confiée à des conseillers pédagogiques ment destiné aux élèves ayant des besoins et des inspecteurs effectuant des visites spéciaux (Pont, Nusche et Moorman, 2008). ­ périodiques. Les chefs d’établissement de la L’Angleterre a créé un cadre de renforcement Tunisie n’ont pas non plus le pouvoir de sélec- du leadership qui fournit un parcours de pro- tionner ou de licencier les enseignants de leurs grammes et de normes s’étendant tout au long écoles. De même, ils n’ont pas l’autorité de ­ de la carrière des chefs d’établissement, avec récompenser les bonnes p ­ erformances. des possibilités de soutien des chefs d’établisse- Consciente de ces questions de gouvernance ment par des directeurs expérimentés (Pont et dans l’enseignement primaire, la Tunisie a ­ coll., 2008). À Shanghai, la carrière des chefs conçu un projet visant à autonomiser les chefs d’établissement comprend quatre ­ échelons d’établissement et à renforcer la gestion des correspondant aux performances profession- écoles, qui sera mis en œuvre dans les années nelles (Jensen, Downing et Clark, 2017b ; à venir (Banque mondiale, 2018­ c). Liang, Kidwai et Zhang, 2016 ; NCEE, 2016). Dans la région MENA, l’autorité des chefs Aligner les programmes scolaires sur les d’établissement est relativement limitée en compétences demandées matière de détermination des besoins de res- sources, élaboration du budget et gestion du Les programmes scolaires officiels déter- personnel (Banque mondiale, 2015­ b). La plu- minent ce que les systèmes éducatifs cherchent part des chefs d’établissement public de la à transmettre à leurs ­ élèves. Idéalement, ils région MENA n’ont pas le pouvoir de sélec- doivent refléter les compétences préparant les tionner les enseignants pour leurs écoles ou de élèves à la vie sociale et économique, et toutes A p e r ç u g é n é r a l    47 SCHÉMA 19  Dans la région MENA, les chefs d’établissement ont moins d’autorité que ceux des pays de l’OCDE Pourcentage des élèves scolarisés dans des établissements dont le directeur exerce une responsabilité importante Octroyer des allocations budgétaires au sein de l’école Approuver l’admission des élèves Dé nir les politiques disciplinaires destinées aux élèves Embaucher les enseignants Décider des cours à o rir Dé nir les politiques d’évaluation des élèves Licencier les enseignants Élaborer le budget de l’école Choisir les manuels scolaires Choisir le contenu des cours Déterminer les augmentations de salaire des enseignants Déterminer les salaires de départ des enseignants 0 10 20 30 40 50 60 70 80 Moyenne OCDE Moyenne MENA Source : OCDE, 2016­a. Note : OCDE = Organisation de coopération et de développement ­économiques. les réformes devraient veiller à ce que les Partout dans le monde, les réformes des acquis des élèves soient en adéquation avec les programmes s’orientent vers une expression compétences dont ils ont ­ besoin. En fait, les des acquis sous la forme de compétences et programmes scolaires sont le lieu où devraient abandonnent la définition du contenu scolaire se rencontrer les multiples sphères de la en termes de matières à enseigner (UNESCO, société, le marché du travail et le système 2017­ b ). Cette transition représente un ­ éducatif. Les programmes devraient refléter la accroissement de la demande de compétences, transition d’une logique du diplôme à une car l’attention passe de l’acquisition de don- logique de la ­ compétence. Les systèmes sont nées factuelles à ce que les élèves sont capables en phase lorsque les programmes scolaires de faire de leur apprentissage – autrement dit, officiels tiennent compte des compétences aux compétences que les élèves ont acquises recherchées par la société et le marché du grâce au processus ­ éducatif. travail. Inversement, lorsque les programmes ­ Les programmes scolaires des systèmes officiels sont dépassés et déconnectés de la éducatifs de l’ensemble de la région MENA réalité, les acquis des élèves ne correspondent reflètent la croyance que l’enseignement plus aux attentes de la société et des doit fournir des contenus académiques, ­employeurs. préparer la main-d’œuvre et contribuer au ­ 4 8   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région développement social et ­ civique. Au cours physique, intellectuel et émotionnel et les des dernières décennies, de récentes réformes prépare à l ­’avenir. Les objectifs du Maroc ont ajouté aux programmes scolaires, par mettent l’accent sur l’acquisition de la exemple, des compétences de la vie courante, langue, le développement des compétences des langues étrangères, des approches de sociales appropriées, la compréhension des résolution des problèmes et davantage affaires civiques, et la préparation des élèves de sciences, mathématiques et technologies à leurs futures carrières (UNESCO, 2011). de l’information (Alayan, Rohde et Dhouib, Toutefois, même si dans la région MENA 2012). Dans les pays de la région MENA, le le discours législatif reflète une approche discours législatif sur les compétences que les moderne de l’éducation, du matériel éducatif élèves doivent acquérir à l’école sont en adé- et des approches pédagogiques, beaucoup de quation avec les compétences du ­ XXIe siècle. classes restent traditionnelles et déconnectées La plupart mettent l’accent sur la maîtrise de de la vie quotidienne des élèves (Bouhlila, l’arabe et des langues étrangères, la sensibili- 2011). La matière est présentée comme un sation aux droits de l’homme, le désir ensemble de faits et de processus à mémoriser, de ­c oopération internationale, la prise et d’une manière n’encourageant pas la de conscience des questions environnemen- réflexion et l’apprentissage a ­ utonomes. Les tales et de conservation, la pensée critique et connexions entre la théorie et la pratique les compétences en r ­ echerche. Par exemple, restent inexplorées, tout comme les liens entre la législation relative à l’éducation de l’Ara- le passé et le présent (Alrebh et Al-Mabuk, bie saoudite déclare que les élèves doivent 2016). En plus du médiocre apprentissage qui avoir les compétences et connaissances néces- en résulte, le manque de pertinence pour la saires pour contribuer à la société économi- vie réelle fait que les élèves sont moins intéres- quement et culturellement et pour renforcer sés et moins préparés au monde extérieur à leurs c­ ommunautés. Le document du pro- l’école. La pertinence est un aspect particuliè- ­ gramme scolaire des Émirats arabes unis rement important des programmes étroite- déclare que le système éducatif forme les ment liés au milieu du travail (voir élèves en vue de leur développement encadré 12). ENCADRÉ 12 Réformer l’enseignement professionnel Dans certains pays de la région MENA, les filières d’enseignement professionnel (Oxford Business d’enseignement professionnel se développent et Group, 2017), et il existe un intérêt dans d’autres comprennent l’éducation religieuse, technique, pays de la région pour un meilleur fonctionnement de industrielle, agricole et ­c ommerciale. L’Algérie a l’enseignement professionnel au profit des élèves et du récemment connu un accroissement des inscriptions marché du ­ travail. dans l’enseignement ­ professionnel. Le pays a établi L’enseignement professionnel est plus efficace un partenariat avec des entreprises publiques et pri- employeurs. En lorsque les écoles collaborent avec les ­ vées pour créer des programmes dans la construction, Égypte, les écoles professionnelles n’ont ni des instal- les travaux publics, l’électricité, l’agriculture et le lations adéquates ni des occasions d’apprentissage tourisme (Oxford Business Group, 2015). Bahreïn a pratique (Krafft, 2013). L’enseignement professionnel commencé à introduire l’apprentissage en 2007-2008. n’a pas non plus réussi à s’adapter de manière appro- Après la révolution de 2011, le ministère tunisien de priée aux emplois disponibles, et sa structure pour- l’Éducation a entrepris d’élaborer un plan de réforme rait être trop rigide et échouer à donner aux élèves des qui comprendra la restructuration de ses filières bases suffisantes pour ­ l’emploi. A p e r ç u g é n é r a l    49 Sur le plan international, les économies les progrès accomplis au niveau du pays, des adoptent une variété d’approches pour créer élèves. écoles et des ­ et mettre en œuvre des programmes scolaires basés sur les compétences ou les ­ aptitudes. Reconnaître l’importance du contexte Dans les écoles publiques des États-Unis, les pour l’apprentissage et les compétences systèmes fondés sur les compétences utilisent des normes d’apprentissage nationales pour La mise en œuvre de réformes éducatives déterminer les attentes académiques et défi- dans la région MENA à travers un renforce- nir la « maîtrise » dans un cours, une matière ment de l’offre éducative et un accroissement ou un niveau scolaire (même si d’autres de la demande de compétences ne produira ensembles de normes peuvent également être pas les mêmes résultats dans tous les utilisés, notamment des normes développées ­ contextes. Il existe différents modèles pour par les districts, les écoles ou des organisa- transformer ­ l’éducation. La Finlande et la tions spécialistes du ­domaine). Plusieurs sys- Corée ont toutes deux obtenu les meilleurs tèmes éducatifs d’Asie de l’Est obtenant des résultats dans l’enquête PISA 2015, un signe scores élevés (RAS de Hong Kong – Chine ; de solide a ­ pprentissage. Et pourtant, ces Japon ; Corée et Singapour) ont commencé à deux systèmes éducatifs sont très différents légiférer et à mettre en œuvre des pro- (voir encadré 13). grammes scolaires basés sur les compétences Les pays de la région MENA doivent pour aider les élèves à acquérir des compé- déployer des efforts de réforme fondés sur ce tences du XXIe siècle en réduisant le poids qui est faisable du point de vue éducatif, éco- relatif de l’enseignement centré sur les nomique et s ­ ocial. Leur succès dépendra de la ­ m atières. Parmi ces économies, certaines, compréhension des contraintes existantes telles que la Corée, préfèrent maintenir un (Rodrik, 2008). Par exemple, des pays tels que plus grand contrôle et prescrivent le pro- la Jordanie et le Liban sont confrontés à un gramme scolaire, tandis que d’autres, telles large afflux de réfugiés de la guerre civile en que le Japon, fixent des orientations géné- Syrie, si bien que toute réforme de leurs sys- rales et accordent aux écoles et aux ensei- tèmes éducatifs doit prendre en compte la gnants une plus grande autonomie dans le nécessité d’accueillir des enfants réfugiés dans développement de leurs programmes (Asia le système et les contraintes qui en r ­ ésultent. Society et OCDE, 2018 ; Cheng, 2017 ; Un autre exemple est le cas où la coordination Lune, 2007). entre le secteur éducatif et le marché du travail Quelques pays de la région MENA ont est irréalisable et que l’information requise récemment commencé à explorer l’apprentis- pour fournir les compétences professionnelles compétences. À l’aide de son sage fondé sur les ­ souhaitées n’est pas ­ disponible. En pareil cas, programme intégré de réforme de l’éducation, le système éducatif peut, en attendant mieux, le Koweït transforme ses programmes scolaires mettre l’accent sur les compétences fondamen- et ses méthodes pédagogiques et d ­ ’évaluation. tales dans les ­écoles. Lorsqu’une coordination Cette approche est centrée sur l’élève, met l’ac- entre le secteur éducatif et le marché du travail cent sur les connaissances appliquées et prend est possible, le système scolaire peut mettre en compte différentes aptitudes l’accent sur le développement de compétences d’apprentissage. Un cadre national a été éla- ­ professionnelles plus ciblées, étant donné que boré pour les programmes scolaires par des les enseignants savent de quelles compétences professionnels locaux de l’enseignement, en les employeurs ont ­ besoin. Les conditions per- même temps que des normes scolaires pour mettant ou entravant la réussite d’un pro- tous les niveaux et ­matières. Des manuels fon- gramme sont un aspect crucial du succès des dés sur les compétences, conformes aux nou- ­réformes. velles normes sont en cours d’élaboration, ainsi La façon dont les reformes sont conçues, qu’une évaluation nationale destinée à estimer introduites, et mises en œuvre dans un pays 5 0   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région ENCADRÉ 13 La Finlande et la République de Corée appliquent des modèles différents, mais efficaces Les systèmes éducatifs de la Finlande et de la tiellement les mêmes dans l’ensemble du pays (Mor- République de Corée sont très efficaces et perfor- gan, 2016). Les écoles finlandaises offrent des services mants, et pourtant ils diffèrent ­ p rofondément. Le d’aide sociale et un soutien scolaire gratuit précoce système coréen est connu pour être rigoureux et axé aux élèves qui en ont besoin en lecture, écriture ou sur les évaluations, tandis que celui de la Finlande mathématiques (Morgan, 2014 ; 2016), ce qui aide est plus accommodant, plus flexible et sans éva- à réduire les inégalités préexistantes entre les élèves, luations normalisées obligatoires, à l’exception des pour leur permettre ­ d’apprendre. examens d’entrée à l’université (Darling-Hammond, De plus, les deux pays investissent dans la forma- Wei, et Andree, 2010). Un élève coréen du secon- tion d’enseignants ­ accomplis. En Finlande, l’enseigne- daire passe en moyenne 10 heures par jour à l’école ment est une profession très respectée, souvent perçue et est soumis à une très forte pression de la part de comme plus importante que la médecine ou le ­ d roit. sa famille pour obtenir de bons résultats (Ellinger et La Finlande n’admet dans ses programmes de forma- Beckham, 1997). En revanche, la Finlande permet tion des enseignants que les étudiants faisant partie aux élèves de suivre les cours à leur propre cadence des 10 % les m ­ eilleurs. Les enseignants sortent bien au cours de leurs dernières années de scolarité, leur préparés d’un programme intensif de cinq ans, qui permettant ainsi de mieux apprendre la matière avec leur permet de disposer de plus d’autonomie pour moins de stress et à leur rythme (Morgan 2014). enseigner de la façon leur paraissant la plus efficace Aucun de ces systèmes n’est le « bon » système édu- (Morgan, 2014). Le programme comprend toute une catif : tous deux sont performants et encouragent série de formations, impliquant notamment d’obser- ­l’apprentissage. ver des enseignants dans leurs classes, de donner des En dépit de leurs environnements différents, ils leçons aux élèves, et de préparer les étudiants à deve- présentent néanmoins quelques très nettes ­similarités. nir des chercheurs et des p­ rofessionnels. En Corée, les Les deux pays se sont engagés à offrir aux élèves des enseignants doivent suivre 90 heures de perfectionne- chances égales ­d’apprentissage. En Corée, les ensei- ment professionnel tous les trois ans pour améliorer gnants changent d’établissement scolaire tous les cinq leur manière ­ d’enseigner. Un programme de perfec- ou sept ans, multipliant ainsi les occasions que les tionnement professionnel coréen délivre un certificat enseignants exceptionnels s’occupent d’élèves défavo- avancé, qui entraîne souvent une augmentation de risés (Morgan, 2016). L’enquête PISA a révélé qu’en salaire et parfois une promotion (Darling-Hammond, Finlande, les opportunités d’apprentissage sont essen- Wei et Andree, 2010). donné détermine également leur r ­ éussite. Au moins dans des contextes défavorisés où les Mexique par exemple, les réformes ont été parents sont moins en mesure de participer introduites après d’importantes négociations (Carr-Hill, Rolleston et Schendel, 2016). De avec les syndicats enseignants, ce qui a permis même, les programmes de développement de de les mettre en œuvre avec ­ s uccès. En la petite enfance présentent un énorme poten- Tunisie, le processus de réforme est devenu tiel d’amélioration du rendement de l’appren- conflictuel et a fini par être bloqué (Grindle, tissage, mais sont inefficaces lorsque la qualité 2004 ; Kingdon et ­ coll., 2014 ; Banque mon- des programmes est faible (Bouguen et c ­ oll., diale, 2018­c). 2013 ; Jung et Hasan, 2014 ; Temple et L’efficacité des différentes options de poli- Reynolds, 2007) ou lorsque les populations tiques dépend souvent de l’existence de condi- les plus à risque ne peuvent en bénéficier tions ­c onnexes. Par exemple, la prise de (Karoly, 2017). décision au niveau des établissements sco- Des ressources suffisantes et une laires peut être efficace pour améliorer le ren- approche soutenue maintenant le cap dement de l’apprentissage, mais peut l’être jusqu’au bout, tout en suivant en A p e r ç u g é n é r a l    51 permanence les résultats, sont également les parents à inscrire leurs enfants dans des ­important. Au Maroc, un manque de finan- programmes de DPE (Escueta et c ­ oll., cement adéquat a été un grand obstacle à la 2017 ; Pugatch et Wilson, 2018). réalisation des objectifs de la réforme de Une autre approche pour influencer les l’éducation entre 2005 et 2009 (Commission normes consiste à identifier des champions au européenne, 2010). Une rotation élevée des sein de groupes sociaux, pour mener ou cadres supérieurs des ministères de l’Éduca- démontrer le changement, tirant ainsi profit tion et des principaux administrateurs de l’influence sociale pour modifier les com- ralentit également les efforts de r ­ éforme. portements (Banque mondiale, 2015­ d ). Entre 2010 et 2017, la Jordanie a connu six L’initiative égyptienne Teachers First (les ministres de l’enseignement supérieur, enseignants d’abord), qui a mis au point un l’Égypte sept, et le Liban quatre – dont programme de perfectionnement profession- aucun n’a occupé son poste pendant plus de nel à partir du Référentiel de compétences trois ­ans.13. Récemment, de fortes rotations pour les enseignants de l’UNESCO, constitue du personnel des ministères de l’Éducation un bon ­ exemple. En 2018, elle avait enrôlé ont également été observées au Koweït, au 10 000 enseignants dans huit gouvernorats Maroc et en Arabie ­ saoudite. (Teachers First, 2018). Elle forme des équipes d’innovation dans les établissements pour aider les enseignants à adopter une pédagogie S’attaquer aux normes sociales qui moderne dans leurs ­ classes. Teachers First freinent l’éducation cherche également à transformer le système Pour modifier substantiellement leurs d’évaluation des enseignants afin d’identifier ­ systèmes éducatifs, les pays doivent s’atta- les changements de comportement au fil du quer aux normes sociales inefficaces qui temps, l’apprenant prenant une part plus empêchent les ­ r éformes. Faire évoluer les active dans le processus d’apprentissage et normes sociales n’est pas facile, mais pas d’évaluation (Teachers First, 2018). non plus ­ impossible. Sensibiliser aux coûts ou à l’inefficacité de certaines normes, ou Promouvoir la tolérance à l’aide de aux bénéfices que la société pourrait tirer l’éducation des réformes peut aider à faire évoluer les mentalités. Toutefois, un tel effort doit être ­ Les perspectives de paix et de stabilité dans fondé sur des preuves tangibles sans lien la région MENA seront déterminées par la avec un quelconque discours politique ou capacité de ses citoyens à coexister avec idéologique, et se concentrer sur des des personnes de nationalités, origines eth- réformes réelles et importantes, et non sur niques et religions ­différentes. L’éducation des changements mineurs dans les poli- est un des principaux moyens de création tiques (Khemani, 2017). Modifier les lois d’une culture de paix (UNESCO, 1999). peut également induire une évolution des Elle peut aider à promouvoir la tolérance ­ normes. Par exemple, les lois sur le port de en renforçant les connaissances et les la ceinture de sécurité ont fait évoluer la ­ compétences de raisonnement et en rédui- norme sociale relative à la sécurité ­routière. sant les injustices (Coenders et Scheepers, Cependant, il ne suffit pas d’adopter des 2003). lois, elles doivent être strictement appli- Dans la région MENA, les niveaux quées et e­ ncouragées. Cela dit, une réaction d’études plus élevés sont généralement asso- comportementale à des mesures incitatives ciés à une plus grande tolérance envers les à court terme peut faire évoluer à plus long personnes issues d’horizons différents terme les comportements et les normes (schéma 20). En Algérie, en Irak, en Jordanie, sociales (Banque mondiale, 2015­ d). À titre au Liban, au Maroc, en Cisjordanie et à Gaza, d’exemple, des messages texte peuvent être et en Tunisie, des niveaux d’instruction plus utilisés comme coup de pouce pour inciter élevés correspondent à une plus grande 5 2   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région SCHÉMA 20  La tolérance est associée à l’éducation, mais l’intolérance est élevée même parmi les personnes instruites de la région MENA Pourcentage de répondants qui n'aimeraient pas avoir comme voisins « des gens d'une religion différente », par plus haut niveau d'études atteint 70 60 50 Pourcentage 40 30 20 10 0 Algérie Bahreïn Irak Jordanie Liban Libye Maroc Cisjordanie Qatar Tunisie et Gaza Aucune instruction formelle Primaire complet Secondaire complet Diplôme universitaire Source : Inglehart et ­coll., 2014. tolérance vis-à-vis des personnes ayant une l’orientation politique, des interactions religion ­ différente. Toutefois, l’association sociales, des expériences historiques et de la entre le niveau d’études et les valeurs sociales dynamique du marché du ­ travail. Les pro- est plus faible dans la région MENA que dans grammes scolaires favorisant les compétences le reste du monde (Diwan, 2016). non cognitives ou de « savoir-être » (ainsi que Même les personnes les plus instruites de la cognitives) et les pratiques pédagogiques région MENA affichent des niveaux d’intolé- encourageant l’esprit critique, la discussion, le rance identiques ou supérieurs à ceux des raisonnement et le travail d’équipe peuvent autres régions du m ­ onde. Par exemple, 34 % promouvoir une plus grande ­ tolérance. À l’in- des répondants issus de la région MENA à la verse, les programmes scolaires traditionnels World Values Survey (l’enquête sur les valeurs lourds de contenus obsolètes et de concepts dans le monde) de 2014 déclaraient ne pas définis de manière étroite, et privilégiant la aimer avoir pour voisins des immigrants ou mémorisation des connaissances, le contrôle des travailleurs étrangers (Inglehart et ­ coll., et la discipline peuvent former des esprits 2014). Ce taux est trois fois plus élevé que fermés. Au Rwanda, l’éducation a été une ­ celui observé dans les pays développés partie importante d’une approche systémique (12­ %). De plus, 32 % des répondants de la holistique visant à faire évoluer les attitudes région n’aimaient pas avoir des voisins d’une pour plus de tolérance et moins de violence autre r­ eligion. Ce taux est le plus élevé de (voir encadré 14). ceux de toutes les régions, et est presque huit Compte tenu des conflits auxquels est fois supérieur à celui des pays ­ développés. confrontée la région MENA depuis près de Donc, même si l’éducation contribue à une dix ans, l’éducation a un rôle important à plus grande tolérance, ses effets peuvent large- jouer dans la promotion de la paix et de la ment dépendre de ce qui est enseigné et de la stabilité ­ sociale. Elle ne peut toutefois pas le façon d’enseigner dans les classes, ainsi que de faire ­seule. L’amélioration des conditions A p e r ç u g é n é r a l    53 ENCADRÉ 14 Au Rwanda, l’éducation a joué un rôle dans la consolidation de la paix L’éducation peut être un point de départ essentiel pour patience et du temps parce qu’il fallait s’entendre sur la lutte contre les facteurs de c ­ onflit. Le Rwanda a la langue, les valeurs, l’accès des filles à l’éducation, reconnu l’éducation comme « l’outil de transformation et l’attention à porter aux enfants ayant des besoins sociale positive permettant de réduire la probabilité particuliers. Pour accroître leur impact, les respon- ­ d’un retour à la ­ violence. » Les écoles sont devenues le sables de l’éducation ont recherché l’appui de pro- terrain commun où les parents pouvaient se rencontrer, grammes complémentaires sociaux et de santé qui rétablir la confiance et chercher un objectif ­ partagé. ont amélioré l’expérience éducative des e ­ nfants. En Afin de développer des politiques éducatives abordant bref, la mise en œuvre de ces accords a nécessité une explicitement la cohésion sociale, et de contribuer à appropriation collective, de la confiance et du temps la réconciliation nationale, les programmes scolaires pour se ­ développer. Une plus grande autorité sur la ont été modifiés pour mettre l’accent sur « une culture mise en œuvre a été accordée aux établissements et de paix » et promouvoir des valeurs nationales posi- aux districts, assortie d’une redevabilité et d’une effi- tives, la justice, la tolérance, le respect, la solidarité et cacité opérationnelle accrues, d’une gestion plus réac- la ­ démocratie. La réforme des programmes scolaires et tive et plus efficace, et d’un renforcement continu des l’élimination des barrières sociales ont demandé de la ­capacités. Source : Banque mondiale (2013­b). politiques et économiques est également Dans tous les pays, l’enseignement fait essentielle à la paix et à la stabilité de la l’objet d’un dialogue national ­ permanent. ­ région. Cela exige l’alignement de plusieurs Dans la région MENA, ce dialogue national systèmes ainsi qu’un engagement social et doit être canalisé vers une vision unifiée pre- large. politique plus ­ nant en compte les quatre tensions freinant l’éducation, les normes sociales qui les défi- nissent, et le contexte ­ local. Une vision parta- Un nouveau pacte pour gée doit également prendre en compte les priorités de développement des pays, leurs l’éducation possibilités économiques, leurs réalités et leurs Les objectifs des parties prenantes pour ressources, de sorte que l’ensemble des objec- l’éducation reflètent la multitude de rôles atteignable. tifs soit réaliste et ­ que celle-ci peut jouer dans l’économie et la Pour atteindre cette vision unifiée, une ­ s ociété. De nombreuses parties prenantes volonté politique est ­ essentielle. De plus, les ont une perception partagée des objectifs de intérêts d’un large éventail de parties prenantes base tels que la littératie, mais au-delà de – enseignants, chefs d’établissement, inspec- cela, les groupes ont des avis différents sur teurs, politiciens, collectivités, employeurs et les buts de l ­’enseignement. Le manque élèves – doivent être conciliés au sein d’une d’unanimité des parties concernées autour puissante ­ alliance. Cet effort nécessite un lea- des objectifs de l’éducation constitue un dership fort et une redevabilité p ­ artagée. Il obstacle ­ m ajeur. L’éducation devient un requiert également de mettre en phase les « champ de bataille » (Purpel et Shapiro, investissements et les ressources avec les prio- 1995, 60) où les différentes parties concer- rités de la v­ ision. Les systèmes éducatifs très nées se battent à la recherche d’une hégé- performants – tels que ceux du Japon, de la monie ­idéologique. Corée, et de Singapour – sont des champions 5 4   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région des pactes éducatifs forts, soulignant le rôle Concilier les intérêts dans une vision d’une vision unifiée pour l’éducation au sein unifiée pour l’éducation de toutes les parties p­ renantes. Cette vision Un nouveau pacte et une vision partagée inclut des réformes logiques et cohérentes pour nécessitent de mettre en phase la volonté atteindre une croissance économique axée sur politique et les multiples intérêts de la le capital humain (Wong, 2017). société. Des normes comportementales per- ­ verses et une polarisation idéologique Les dirigeants nationaux doivent mener peuvent empêcher certains pays de fournir le changement des biens publics (Banque mondiale, La volonté politique et le leadership sont 2016b). De plus, l’existence au sein de la essentiels pour mobiliser la région MENA société de groupes adoptant des normes autour d’un nouveau pacte pour ­ l’éducation. strictes de non-coopération peut également Le leadership politique peut amorcer une bloquer les réformes (Khemani, 2017 ; évolution des normes comportementales en Banque mondiale, 2015­ d). Certains groupes faveur d’une réforme de l’éducation entravent les réformes qu’ils perçoivent (Acemoglu et Jackson, 2015). En tant que comme limitant leur pouvoir ou leur apti- champions des réformes éducatives, les lea- tude à tirer des avantages (Khemani, 2017 ; ders nationaux du Japon, de la Corée et de Kingdon et ­ c oll., 2014). Citons, par Singapour ont fait de l’éducation une prio- exemple, les enseignants bénéficiant de l’in- rité nationale dotée d’une vision et d’objec- dustrie du soutien scolaire ­ privé. Ce groupe tifs clairs, et ont entretenu un consensus au peut essayer de faire obstruction à toute sein des parties prenantes (Banque mondiale, réforme du système d’évaluation qui com- 2018­ e). Les politiques se sont appuyées sur promettrait les revenus supplémentaires la prise de conscience qu’une harmonisation issus des cours privés qu’ils donnent à des intersectorielle des politiques est indispen- élèves préparant les examens ­ nationaux. Tel sable à la réalisation complète du potentiel pourrait également être le cas de syndicats de ­l’éducation. Elles ont réussi à promouvoir d’enseignants ne souhaitant pas des une vision commune de l’éducation à laquelle réformes obligeant les enseignants à prester les parents peuvent aspirer pour l’avenir de plus d’heures ou à modifier significative- leurs enfants (Banque mondiale, 2018e) ainsi ment leurs ­ p ratiques. La résistance aux qu’une responsabilité partagée de toutes les réformes peut être motivée non seulement parties prenantes dans les résultats scolaires par l’intérêt personnel, mais aussi par la (Wong, 2017). pression exercée par les pairs pour se La région MENA a connu bon nombre de conformer aux normes et aux attentes d’un grands dirigeants dont le charisme et la vision groupe tel qu’un syndicat d’enseignants ont mené à des progrès r ­ emarquables. Par (Khemani, 2017 ; Banque mondiale, exemple, le professeur égyptien Taha 2015­d). Hussein, devenu aveugle dans sa tendre L’expérience a montré que les réformes enfance, a été un des penseurs les plus émi- peuvent réussir si la volonté politique de nents de son temps et a laissé sa marque sur les mettre en œuvre est ­forte. Ceci signifie que une nation tout entière (Cachia, 2014). les hommes et femmes politiques et les Ministre de l’Éducation au début des groupes d’intérêt doivent s’abstenir d’utiliser années 1950, il a travaillé à l’expansion mas- l’éducation comme un moyen de soutenir sive de l’enseignement public et à la suppres- leurs vues ­politiques. Une étape importante sion des frais de s ­ colarité. Considérant que vers l’harmonisation de la volonté politique et l’éducation est essentielle à l’existence des intérêts des parties prenantes dans une humaine, il est l’auteur de la célèbre affirma- réforme de l’éducation consiste à limiter le tion : « l’éducation est comme l’eau et l’air » nombre des décideurs politiques ayant le pou- (Cook et El-Refaee, 2017). voir de bloquer des réformes au profit de leurs A p e r ç u g é n é r a l    55 propres intérêts politiques, et à les amener à Le président égyptien a lui aussi récem- rejoindre les autres intervenants en insistant ment utilisé les médias et des conférences sur les valeurs communes (Acosta et Haddad, pour rallier des soutiens aux réformes éduca- 2014) – voir encadré 15. tives. Il a prôné et soutenu des réformes Pour rallier un appui à la réforme de l’en- majeures visant à élever le niveau du système seignement en 2008, la Première ministre éducatif, à abandonner le traditionnel appren- ­ australienne a élaboré des stratégies d’infor- tissage par cœur, les examens à enjeux élevés mation claires impliquant les médias et un système ancré dans une « logique du ­ d’actualités. Elle les a personnellement infor- diplôme » au profit d’un système plus centré més à l’avance de ses nouvelles propositions, sur l’apprentissage et les ­ compétences. Il a en utilisant des histoires évoquant des écoles organisé des conférences sur la jeunesse et et des élèves afin d’humaniser le récit entou- l’éducation pour rallier l’appui du public aux rant la r­ éforme. Elle a également communi- réformes, en montrant aux parents et aux qué avec le milieu des affaires au cours de élèves les avantages de ces réformes pour « déjeuners de travail » mettant en évidence la eux personnellement et pour la société et rentabilisation des réformes (Bruns et l’économie en ­général. Il a annoncé que 2019 Schneider, 2016). Lorsqu’il était porte-parole, serait l’année de l’enseignement ( Egyptian le ministre de l’Éducation de l’Ontario Gazette, 2018). (Canada) a régulièrement rendu visite aux écoles et aux conseils scolaires dans toute la Partager la redevabilité pour produire province, passant ainsi du temps avec environ des résultats 6 000 enseignants, élèves et parents pour les encourager à participer au dialogue sur les La redevabilité est essentielle à l’améliora- politiques et établir une relation de confiance ­’apprentissage. Il est toutefois extrê- tion de l (OCDE, 2011­b). mement difficile d’identifier qui est redevable ENCADRÉ 15 Le Pérou a réussi à harmoniser les intérêts Grâce à une volonté politique et à une harmonisa- non gouvernementales en vue de renforcer un unique tion des intérêts des parties prenantes, le Pérou a objectif – placer la malnutrition infantile au cœur de réussi à réduire le taux de retard de croissance chez la lutte des pouvoirs publics contre la p ­ auvreté. Au les enfants de moins de 5 ans, en seulement six ­ ans. cours de la campagne présidentielle de 2006, tous les Il y est parvenu en limitant le nombre de décideurs candidats se sont engagés à réduire la malnutrition politiques disposant d’un pouvoir de ­ véto. Ceux-ci de 5 points de pourcentage chez les enfants de moins ont été amenés à rapprocher leurs points de vue de 5 ans, dans un délai de 5 ans (5×5×5). Une fois de ceux des autres parties concernées grâce à un élu, le président péruvien a renouvelé son engagement ensemble de valeurs ­ communes. Les parties intéres- public et fixé l’objectif d’une réduction de 9 points de sées se sont fédérées autour d’une plateforme poli- pourcentage et obtenu l’appui du Premier ministre, tique commune et d’une coalition de plaidoyer, la du ministre de la Femme et du Développement social, Children’s Malnutrition Initiative (l’initiative contre ainsi que des gouverneurs r ­ égionaux. Entre 2005 et la malnutrition ­ infantile). Celle-ci a été mise en place 2011, le Pérou a réduit le retard de croissance de pour réunir les parties prenantes gouvernementales et 10 points de ­ pourcentage. Source : Acosta et Haddad (2014). 5 6   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région pour le rendement de l’apprentissage en administrateurs scolaires a donné lieu à des raison des différents acteurs interagissant ­ approches et structures diverses, qui ont tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du système rendu difficiles l’évaluation et la comparaison éducatif pour produire les r ­ésultats. de l’apprentissage entre les municipalités Habituellement, les éducateurs, en particu- (Burns, Köster et Fuster, 2016). De plus, lier les enseignants, sont au cœur de la rede- lorsque les canaux de redevabilité ne sont pas ­ lèves. Même si vabilité pour les résultats des é clairs, le blâme peut être rejeté sur n’importe en raison de leur interaction directe avec les quels fournisseurs de services, sans que les élèves, les enseignants jouent un rôle crucial citoyens soient capables de déterminer qui est dans l’apprentissage, les décideurs politiques, responsable (UNESCO, 2017­ a). Sans une les chefs d’établissement et les parents, entre définition claire des rôles et responsabilités, autres, occupent également une place impor- même des mécanismes de redevabilité bien tante dans l’obtention des résultats s ­ colaires. conçus peuvent é ­ chouer. Par exemple, le suivi En conséquence, la redevabilité dans l’éduca- parental à l’école peut s’avérer contre-produc- tion ne peut être limitée à un individu ou à tif si l’implication des parents devient trop un groupe de personnes (UNESCO, 2017a ; intrusive et ne laisse pas assez d’autonomie Banque mondiale, 2004). aux enseignants (Banque mondiale, 2008). Dans un nouveau pacte éducatif pour la D’un autre côté, si les écoles ne comprennent région MENA, la redevabilité doit s’étendre et ne reconnaissent pas le rôle des parents au-delà du système ­ éducatif. Il doit exister de dans le système éducatif, elles peuvent se multiples mécanismes de redevabilité, permet- montrer insensibles à leurs initiatives et sug- tant aux citoyens de demander des comptes gestions ­légitimes. aux pouvoirs publics, aux décideurs poli- En tant que fournisseurs des services édu- tiques de tenir les établissements scolaires catifs, les enseignants ont la responsabilité du pour redevables, et aux chefs d’établissement suivi et de l’évaluation des progrès de leurs de considérer les enseignants comme élèves et d’en informer régulièrement les responsables. Toutefois, si le système dans son ­ parents. Les enseignants doivent également ­ ensemble n’est pas harmonisé, des conflits et suivre un perfectionnement professionnel distorsions vont apparaître entre les parties ­ continu. Les chefs d’établissement ont la res- concernées à différents niveaux (Burns, Köster ponsabilité de créer un environnement sco- et Fuster, 2016). L’orientation du système vers laire propice à l’apprentissage et de s’assurer une plus grande redevabilité implique que que les enseignants appliquent de bonnes toutes les parties concernées travaillent méthodes d’apprentissage en les autonomi- ensemble en suivant une vision commune de sant et en les ­suivant. Les décideurs politiques l’enseignement et partagent la responsabilité ont la responsabilité globale de fournir une de ­ l ’apprentissage. Ces parties prenantes vision et une stratégie et de mettre au point, (décideurs politiques, chefs d’établissement, mener, et soutenir la mise en œuvre des poli- enseignants, parents, employeurs, et élèves) tiques éducatives ; d’élaborer des programmes doivent commencer par se considérer comme scolaires et des normes ; de mettre en place redevables de l’apprentissage, tout en récla- des systèmes nationaux d’information per- mant des comptes aux ­ autres. Pour que les mettant un suivi efficace de l’apprentissage ; pays de la région MENA recueillent tous les et d’allouer des ressources (humaines, phy- avantages de l’éducation, la responsabilité et siques et financières) aux niveaux régional et la redevabilité doivent être collectivement ­national. partagées (voir schéma 21). Les parents sont responsables de l’éduca- Pour que les systèmes de redevabilité fonc- tion de leurs enfants et de créer un environne- tionnent, les rôles et responsabilités des diffé- ment familial ­ favorable. Ils ont également rents acteurs doivent être clairement définis et pour responsabilité de participer aux activités ­ compris. Par exemple, en Suède, une mau- de l’école et de suivre l’apprentissage de leur vaise compréhension des nouveaux rôles des enfant de manière individuelle et collective au A p e r ç u g é n é r a l    57 SCHÉMA 21  L’apprentissage est une responsabilité collective, et chacun est redevable Décideurs politiques Parents • Redevables pour la fourniture de la vision, du leadership • Redevables pour l’envoi de leurs enfants à l’école et et de la stratégie du système éducatif en vue de pour leur permettre de terminer leurs études. promouvoir l’apprentissage et les compétences • Responsables de la mise en place d’un environnement • Responsables des programmes scolaires, des normes Employeurs propice à l’apprentissage à la maison, de leur et du développement des évaluations, ainsi que de la • Responsables de l’envoi aux systèmes éducatifs participation aux activités scolaires et de la recherche gestion e cace et e ciente des ressources et aux parents de bons signaux sur les d’un retour d’information sur l’apprentissage de l’élève. (matérielles, nancières, humaines, et du partage compétences requises. • Responsables de demander des comptes sur de l’information). • Redevables pour la récompense des l’apprentissage aux décideurs politiques, aux compétences plutôt que des diplômes. établissements scolaires et aux enseignants en exigeant Chefs d’établissement • Redevables pour la mise en place d’un des enseignants quali es, des programmes scolaires environnement scolaire propice à l’apprentissage pertinents, et des environnements scolaires sûrs. Marché du travail (sûr, bien-équipé, bien-connecté, etc.) Société civile • Responsables de la surveillance, du soutien, • Responsable d’exiger une communication transparente de l’autonomisation des enseignants pour sur les intrants et les résultats éducatifs. l’apprentissage, et de les tenir pour redevables. Pouvoirs publics et Parents et société fournisseurs Enseignants civile de services éducatifs • Redevables des progrès de l’apprentissage des élèves dans leurs classes. • Responsables du suivi des progrès des élèves. L'apprentissage • Responsables de la participation au Médias perfectionnement professionnel continu • Redevables de rendre compte d’une et de tenir les responsables politiques et information factuelle et de corriger les Élèves Médias a rmations mensongères. chefs d’établissement pour redevables. • Responsables du partage des • Responsables d’o rir une plateforme aux informations relatives aux progrès de décideurs politiques et autres parties Élèves l’élève avec ses parents. • Responsables d’être apprenants actifs et curieux prenantes pour partager l’information et • Responsables d’exiger la redevabilité et des promouvoir une plus grande transparence compétences des établissements scolaires, des sur les politiques éducatives et autres enseignants et des décideurs politiques informations relatives à l’enseignement. • Responsables d’utiliser la technologie et les médias • Responsables de di user des nouvelles sociaux pour échanger des connaissances et correctement basées sur des preuves et l’apprentissage et de s’organiser d’une manière constructive des données. Source : Banque mondiale sein des associations de p ­ arents. Les parents d ­ ’apprentissage. Dans de nombreux cas, ils doivent également considérer le système édu- peuvent avoir un meilleur accès que leurs catif (les décideurs politiques, les établisse- parents à l’information sur les compétences et ments scolaires et les enseignants) comme les connaissances mondiales, et peuvent les redevable de l’apprentissage de leurs enfants exiger de leur système ­ éducatif. Les élèves et exiger des professeurs qualifiés, un pro- peuvent également s’organiser eux-mêmes gramme scolaire adéquat, et un environne- pour soutenir leurs écoles et demander des ment d’apprentissage s ­ ûr. Les employeurs ont comptes aux fournisseurs de services et aux également une responsabilité dans le proces- ­enseignants. d’apprentissage. Ils doivent signaler aux sus ­ Les médias jouent un rôle important dans parents, aux élèves, et au système éducatif les la demande de comptes aux parties prenantes compétences recherchées sur le marché du ­ omplexes. et dans l’explication de questions c travail. Enfin, les élèves sont également res- ­ Les médias sociaux sont de plus en plus une ponsables de leur apprentissage ; ils ne source majeure d’information dans le monde doivent pas se contenter d’en être des bénéfi- et dans les pays de la région MENA, en parti- passifs. Grâce à leur accès croissant ciaires ­ culier chez les j­eunes. Ils peuvent servir de aux médias sociaux, les élèves peuvent profi- plateforme pour les décideurs politiques sou- ter d’énormes volumes de ressources haitant partager des informations et 5 8   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région promouvoir une plus grande transparence des beaucoup plus à l’éducation que de nom- réformes des politiques é ­ ducatives. Les médias breux pays ­ riches. La Tunisie, par exemple, sociaux constituent également un mécanisme dépense 20,6 % de son budget national dans permettant de demander des comptes aux l’éducation, soit près de deux fois la moyenne décideurs politiques et au corps ­ enseignant. de 11,3 % des pays de ­ l’OCDE. Bien que la Ils peuvent également être exploités par des part des dépenses d’éducation soit relative- groupements d’intérêt pour bloquer d’impor- ment élevée dans la région MENA, elle est en tantes réformes et propager de fausses déclin depuis son sommet du début du siècle, ­ informations. Dans des pays de la région passant d’un niveau médian de 20,6 % en MENA tels que l’Égypte, la Jordanie et le 2000 (soit 5,9 % du PIB) à 13 % en 2016 Koweït, des opposants aux réformes éduca- (4 % du ­ PIB).14 Dépenser des montants adé- tives ont lancé de dures campagnes contre quats dans l’éducation est nécessaire, mais celles-ci dans les médias ­ sociaux. Un débat et pas suffisant pour r ­ éussir. La façon dont les des canaux de communication ouverts sont ressources sont utilisées est tout aussi impor- importants pour créer un pacte pour tante, si ce n’est ­plus. l ’apprentissage. Les décideurs politiques ­ Les dépenses doivent être conformes à doivent communiquer avec les parties pre- l’apprentissage. Les pays de la région MENA ­ nantes à travers différents canaux pour dépensent une large part de leurs budgets répondre aux préoccupations, corriger les d’éducation dans les salaires du personnel – informations à l’aide de données probantes, et souvent plus de 90 % de l’ensemble des rallier un soutien collectif en faveur des dépenses récurrentes dans ­ l’éducation. Ce fai- réformes ­éducatives. sant, ils éliminent l’investissement dans Au-delà des médias sociaux, la technologie d’autres intrants importants contribuant à peut également être exploitée pour mettre en l’apprentissage, tels que le matériel pédago- place des systèmes de ­ redevabilité. Plusieurs gique et didactique, le perfectionnement pro- pays sont en train d’installer des tableaux de fessionnel, et la rénovation et l’entretien des bord pour l’éducation afin d’encourager les ­écoles. données ouvertes et de faire un pas en direc- Partout dans le monde, les pays sont tion de l’élaboration de politiques fondées sur confrontés à des compromis au moment de des données ­ probantes. Les pouvoirs publics décider s’ils doivent dépenser leurs maigres égyptiens ont efficacement tiré parti de la ressources pour l’embauche d’enseignants technologie moderne pour promouvoir la supplémentaires ou pour d’autres intrants redevabilité (encadré 16). éducatifs. Investir dans le perfectionnement ­ La société civile a, quant à elle, la respon- professionnel, les conditions de travail, et les sabilité d’exiger une communication transpa- salaires des enseignants actuels et futurs éducatifs. rente sur les intrants et les résultats ­ s’avère souvent plus efficace pour accroître l’apprentissage des élèves que d’employer davantage ­ d’enseignants. Il en va de même Accorder la priorité aux investissements pour des investissements plus importants dans la promotion de l’apprentissage et dans la technologie ou l’utilisation d’assis- des compétences tants enseignants dans les salles de classe Un nouveau pacte pour l’éducation doit (OCDE, 2017­ b). Les investissements dans comprendre un accord sur comment et où les l’embauche d’enseignants supplémentaires ressources sont ­ u tilisées. Pendant des pour réduire la taille des classes peuvent dizaines d’années, les pays de la région avoir un impact sur l’apprentissage, mais MENA ont dépensé une part importante de cette embauche doit cibler les endroits où la leurs revenus dans l’éducation pour satisfaire taille des classes est particulièrement large et la demande de populations grandissantes au constitue un obstacle à ­ l’apprentissage. Une demi-siècle. En fait, la plu- cours du dernier ­ synthèse de plus de 800 méta-analyses des part des pays de la région MENA allouent résultats des élèves a conclu que des A p e r ç u g é n é r a l    59 ENCADRÉ 16 Le secteur éducatif égyptien utilise la technologie pour assurer la redevabilité L’Égypte a entrepris des réformes ambitieuses de la • Améliorer la transparence des évaluations des redevabilité dans le secteur éducatif à l’aide de la tech- élèves, et la confiance des citoyens dans les résultats moderne. Elle améliore la redevabilité à travers nologie ­ des évaluations ; les canaux suivants : • Renforcer la redevabilité des acteurs clés, en per- mettant à la collectivité et aux parents de s’exprimer • Accroître la quantité de données et d’information davantage sur les décisions politiques ; à la disposition des décideurs politiques et du • Créer un meilleur pacte entre le ministère de public, améliorant ainsi la redevabilité en matière l’Éducation et de l’Enseignement technique et les d’allocation des ressources et de prestation des établissements scolaires en améliorant la gestion au services ; niveau des ­ districts. Décideurs politiques Voix • Confiance du public dans un système meilleur et plus Pacte équitable d’obtention de • Tableau de bord pour l’éducation diplômes secondaires • Système d’assurance qualité • Tableau de bord pour Relations de l’éducation redevabilité Fournisseurs • Fournisseur de première ligne (enseignants, Gestion Citoyens chefs d'établissement) • Tableau de bord pour l’éducation • Organisations • Perfectionnement professionnel (ministères, écoles) et système d’intégration des enseignants Pouvoir du client • Confiance du public dans un système meilleur et plus équitable d’obtention de diplômes secondaires • Tableau de bord pour l’éducation Source : Banque mondiale 2018­d. interventions autres que la réduction de la les avantages potentiels (Hanushek, 2011; taille des classes peuvent avoir un meilleur Rivkin, Hanushek et Kain, 2005). rapport coût/accroissement de la perfor- Un investissement suffisant dans l’éduca- mance (Hattie, 2009). Cette conclusion est tion de la petite enfance et dans les premières soutenue par des recherches montrant que le années d’études est également nécessaire pour rendement financier de l’amélioration de l’ef- que les élèves acquièrent les compétences de ficacité des enseignants est supérieur à celui base qui leur permettront d’apprendre de de la diminution de la taille des classes, et manière efficace plus tard au cours de leur suggérant d’affecter les meilleurs enseignants ­ scolarité. Dans les pays de la région MENA, aux classes les plus grandes pour maximiser l’EPE est pourtant le niveau qui a le moins 6 0   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région bénéficié d’investissements, avec des taux de les Pays-Bas avaient déjà introduit des scolarisation proches de ceux de l’Afrique approches proto-BFP dans les années 1970 et subsaharienne et des pays à faible revenu, ont fait passer l’ensemble de leur secteur comme l’indique le peu de données internatio- public à la budgétisation fondée sur les pro- nales d­ isponibles. Aucun pays de la région grammes et la performance en 1999. Un tel MENA ne dépense sur son budget public plus changement déplace la concentration des de 0,4 % de son PIB dans ­ l’EPE. La plupart activités des ministères vers la réalisation de dépensent beaucoup moins (nettement moins leurs agendas stratégiques des politiques que 0,2­ %). En comparaison, un pays moyen ­sectorielles. de l’OCDE investit 0,7 à 0,8 % de son PIB dans l’EPE, et certains pays, tels que la Suède, y investissent jusqu’à 1,3 % de leur P ­ IB. Parce Libérer le potentiel de que les populations jeunes et en croissance l’éducation est possible constante de la région affichent systématique- ment de faibles niveaux de compétences fon- Les pays de la région MENA ne peuvent pro- damentales, l’investissement public dans de fiter de tous les avantages de l’éducation que bons programmes d’apprentissage précoce si un renforcement de l’offre éducative est pour tous les enfants devrait être une priorité combiné à un accroissement de la demande des ­politiques. de compétences et à un pacte social pour Même si les pays de la région MENA ont l ’éducation. Plus précisément, la région ­ dépensé des parts importantes de leurs bud- MENA réalisera le potentiel de l’éducation gets nationaux dans l’éducation, il est impor- si 1) elle accorde la priorité à l’apprentis- tant que les dépenses d’éducation soient sage ; 2) elle se concentre sur les premières maintenues et même accrues dans certains années d’études et que les chances sont équi- ­ pays. De façon tout aussi importante, les tablement réparties, y compris pour les per- dépenses doivent cibler ­ l’apprentissage. Cela sonnes affectées par un conflit ; 3) les nécessite de se concentrer sur les résultats et programmes scolaires sont modernisés et les pas uniquement sur les intrants et ­ extrants. La enseignants autonomisés ; 4) les employeurs budgétisation fondée sur la performance communiquent les compétences dont ils ont (BFP) tente d’introduire directement des besoin ; 5) toutes les parties concernées sont mesures explicites de la performance ou des d’accord sur une vision commune de l’éduca- résultats dans le processus de budgétisation, tion, assument conjointement la responsabi- avec des indicateurs spécifiques pouvant être lité de leurs résultats et rendent des comptes utilisés pour mesurer l’efficacité de l’exécution sur les rôles qui leur sont clairement confiés ; du ­budget. Les ministères de l’Éducation dont et 6) les ressources sont conformes aux les budgets sont fixés dans le cadre d’un sys- priorités. Ces changements nécessiteront un ­ tème de budgétisation fondée sur les résultats effort commun pour aborder les quatre ten- perçoivent des dotations pour obtenir certains sions freinant l’éducation dans les pays de la résultats sectoriels (par exemple, accroître le région ­MENA. taux de scolarisation préprimaire) plutôt que L’amélioration de l’éducation ne relève pas pour financer certains volumes d’intrants (tels uniquement de la responsabilité des ensei- que les salaires ou les coûts ­ d’investissement). gnants, elle implique tous les membres de la En Jordanie, au Maroc, et en Tunisie, les société – les hommes et femmes politiques, les ministères de l’Éducation ont été parmi les entrepreneurs, et les dirigeants communau- premiers à adopter des systèmes nationaux taires et religieux, ainsi que les parents, les de budgétisation fondés sur la performance enseignants, les chefs d’établissement et les (Beschel et Ahern, 2012). En Europe occi- élèves e­ ux-mêmes. La tâche de loin la plus dif- dentale et dans certains autres pays membres ficile est de concilier les points de vue variés et de l’OCDE, les approches de BFP sont utili- souvent opposés, les fortes convictions et sées depuis un certain ­ temps. Par exemple, les intérêts ­ divergents. Mais la chose n’est A p e r ç u g é n é r a l    61 pas ­ impossible. Les pays dotés de systèmes sur la situation de l’éducation dans leur ­ pays. éducatifs très performants ont réussi à rallier La question a reçu 42 235­ réponses. les soutiens autour d’une vision commune et 3. Base de données des statistiques sur l’éduca- d’une responsabilité ­ partagée. tion (EdStats) de la Banque m ­ ondiale. Basé sur les calculs des auteurs établis à partir des Le rôle de la technologie est certain dans la données de 2007 (ou plus près) et de 2016 détermination de la demande d’emploi du (ou ­postérieures). futur, mais son rôle de catalyseur de l’offre 4. Indicateurs du développement dans le monde, présente un vaste potentiel encore inexploité Banque mondiale. dans la r­ égion. En effet, la technologie change 5. La définition de la discipline violente appli- la façon dont les élèves d’aujourd’hui sont quée aux enfants utilisée dans l’enquête en préparés à entrer dans la future population grappes à indicateurs multiples (MICS – active – c’est-à-dire qu’elle influence non seu- Multiple Indicator Cluster Survey) de lement la fin de l’éducation, mais également l’UNICEF est basée sur la discipline exercée les ­moyens. La technologie offre une occasion par n’importe quel membre du ménage au unique d’aider à délivrer un enseignement de cours du dernier mois, et comprend l’agres- sion psychologique (a crié, hurlé, vociféré sur très bonne qualité d’une façon plus efficace et l’enfant ; a traité l’enfant d’idiot, de fainéant ­ efficiente. Intelligemment utilisée, la technolo- ou d’autres noms du même genre) ; la puni- gie peut offrir aux pays de la région MENA tion physique (a secoué l’enfant, donné une une chance de faire progresser rapidement fessée, tapé, donné une claque sur les fesses à leurs systèmes éducatifs et de soutenir main nue, frappé l’enfant sur les fesses ou ail- ­l’apprentissage. leurs sur le corps avec quelque chose comme La région MENA a l’histoire, la culture, et une ceinture, une brosse à cheveux, un bâton les ressources nécessaires pour accéder à un ou tout autre objet dur ; a tapé ou frappé avenir fondé sur une société instruite et une l’enfant sur la main, le bras ou la jambe) ; économie du ­ savoir. Elle a de grandes ambi- et la punition physique grave (a tapé ou tions et ­aspirations. Libérer le potentiel de frappé l’enfant au visage, sur la tête, ou sur les oreilles ; a battu l’enfant avec un objet ; l’éducation est possible, mais nécessitera un a frappé encore et encore aussi fort qu’il le nouveau pacte pour faire de l’éducation non ­pouvait). seulement une priorité, mais aussi une urgence 6. En fait, il se peut que le niveau d’autonomie ­ nationale. Toute la question est de savoir si les ait baissé de 3,1 à 2,9 sur une échelle de dirigeants de la région MENA sont prêts à 5 points, où 5 représente le niveau d’au- mener à bien la mise en œuvre de réformes tonomie le plus ­ élevé. Un facteur contri- des politiques et ont la volonté et la détermi- buant à la baisse du score général d’auto- nation pour le faire ? nomie peut être lié au fait que l’échantillon d’universités participant aux évaluations de 2012 et 2016 n’est pas resté le même Notes (davantage d’institutions publiques des 1. Pour la Banque mondiale, la région systèmes centralisés d’enseignement supé- MENA regroupe les pays et économies sui- rieur ont pris part à l’enquête), rendant vants : Algérie, Arabie saoudite, Bahreïn, ainsi difficile l’évaluation des tendances au Cisjordanie et Gaza, Djibouti, Émirats arabes temps. fil du ­ unis, Irak, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, 7. Sept économies utilisent le mot tarbiya dans Malte, Maroc, Oman, Qatar, République le nom officiel de leur ministère de l’Édu- arabe d’Égypte, République arabe syrienne, cation (l’Algérie, la Cisjordanie et Gaza, République islamique d’Iran, République du l’Irak, le Koweït, le Liban, la Syrie, et la Yémen, et ­ Tunisie. Ce rapport exclut Malte Tunisie) ; trois utilisent taaleem (l’Ara- de l’analyse, car ce pays présente très peu de bie saoudite, la Libye, et le Qatar) ; et similitudes avec le reste de la ­ région. sept utilisent à la fois tarbiya et taaleem 2. Le sondage effectué sur Facebook par la (Bahreïn, l’Égypte, les Émirats arabes Banque mondiale (en arabe et en anglais) a unis, la Jordanie, le Maroc, Oman, et la interrogé les résidents de la région MENA République du ­ Yémen). 6 2   A m b i t i o n s e t aspir ations d'une région 8. Malte fait exception ; le pays fait partie de Bibliographie la région Moyen-Orient et Afrique du Nord dans la classification régionale de la Banque Abi-Mershed, Osama, é ­ d. 2010. Trajectories of ­mondiale. Education in the Arab World : Legacies and 9. L’information présentée dans ce paragraphe ­Challenges. 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Les estimations des revenus mondiaux de Papers in Education 31 (3) : 274-98. l’EdTech varient considérablement selon la Aghion, Philippe, Mathias Dewatripont, Caroline source de cette ­ information. ­ M. Hoxby, Andreu Mas-Colell, et André ­ Sapir. 12. L’analyse a également révélé que les ordi- 2009. “The Governance and Performance of nateurs ont un impact plus important Research Universities: Evidence from Europe dans les pays où la pénétration des TIC and the ­ U.S.”, Document de travail 14851, est ­ faible. La fourniture d’un ordinateur Office national de la recherche économique, à un enseignant dans les pays d’Afrique Cambridge, ­MA. du Nord ayant participé à l’enquête PISA Ahramonline. 2015. ­ h ttp://www.ahram.org.eg​ (Algérie et Tunisie) a fait progresser leurs /­News/131704/4/448902­/‫اياضق‬-‫ءاراو‬/‫ةفسلف‬-‫ةيناجم‬- scores de 24,5­ points. En faire de même ‫ميلعتلا‬-‫ىف‬-‫دهع‬-‫دبع‬-‫رصانلا‬.aspx. dans les deux pays du CCG (Émirats Akar, B ­ . 2016. “Dialogic Pedagogies in Educational arabes unis et Qatar) où la technologie est Settings for Active Citizenship, Social Cohesion plus courante dans les salles de classe, n’a and Peacebuilding in ­ Lebanon.” Education, ajouté que 1,1 point ­ PISA. Citizenship and Social Justice 11 (1): 44–62. 13. 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Nous sommes alignés aux normes recommandées pour l’utilisation du papier, définies par la Green Press ­ Initiative. La majorité de nos livres sont imprimés sur du papier certifié par le Forest Stewardship Council (FSC), contenant presque tous entre 50 et 100 % de matières r ­ecyclées. La fibre recyclée de notre livre est soit non blanchie, soit blanchie selon des procédés entièrement sans chlore (TCF), transformés sans chlore (PCF) ou enrichis sans chlore élémentaire ­(EECF). Obtenez plus d’informations sur la philosophie environnementale de la Banque à l’adresse ­http://www.worldbank.org/corporateresponsibility. L’éducation, qui a été au cœur de l’histoire et des civilisations de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA), a un grand potentiel inexploité pour contribuer au capital humain, bien-être et à la richesse de la région. La région MENA a beaucoup investi dans l’éducation pendant des décennies mais n’a pas su tirer pleinement parti des avantages de ses investissements. Malgré une série de réformes, la région est restée coincé dans un niveau d’apprentissage et de compétences peu élevé. Le rapport Ambitions et aspirations d’une région : un nouveau cadre pour l’éducation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord identifie quatre ensembles de tensions clés qui entravent l’éducation dans la région : qualifications et compétences, discipline et esprit critique, contrôle et autonomie, et tradition et modernité. Ces tensions sont façonnées par la société et se manifestent à l’école et dans la salle de classe. Si rien n’est fait pour y remédier, la région MENA ne pourra pas tirer pleinement profit de son potentiel. Ce rapport propose un nouveau cadre pour l’éducation avec une approche à trois volets qui peut aider à résoudre ces tensions et à libérer le potentiel de l’éducation dans la région MENA : • Un renforcement concerté pour l’apprentissage qui commence tôt pour tous les enfants, peu importe leur origine, avec des enseignants et chefs d’établissements qualifiés et motivés, qui exploitent la technologie à bon escient, utilisent des approches modernes, et évalue régulièrement les progrès des élèves dans leur apprentissage. ­ • Une demande accrue de compétences par toutes les parties prenantes du marché du travail et de la société, qui implique des réformes multisystémiques coordonnées au sein et en dehors du système éducatif. • Un nouveau pacte pour l’éducation au niveau national avec une vision commune et des responsabilités et obligations partagées. L’éducation est l’affaire et la responsabilité de tous et ne concerne pas seulement le secteur de l’éducation. Le cadre de « renforcement, demande, et pacte » offre à la région MENA l’opportunité d’aller de l’avant et de se réapproprier son héritage de région savante, et d’être à la hauteur des ambitions et des aspirations de ses habitants. La situation actuelle dans la région MENA nécessite d’accorder une nouvelle priorité à l’éducation, et pas seulement comme une priorité nationale pour la croissance économique et le développement social, mais comme une urgence nationale pour la stabilité, la paix et la prospérité. SKU 33320