82522 Banque mondiale Pleins feux sur les inégalités Le défi pour la Chine : la montée des inégalités Terry Sicular E Figure 1 Inégalité des revenus en Chine, 1981–2012 n mars 2013, avant de céder son poste à son successeur, le premier ministre chinois Wen Jiabao a présenté sa dernière évaluation de l’état de la société chinoise au Congrès national populaire. Son ver- dict : il reste beaucoup à faire pour honorer l’enga- gement pris par le gouvernement de réduire les inégalités de revenu, le développement chinois est « déséquilibré » et le pays a encore de nombreux problèmes à régler à cet égard dans le domaine économique et social (New York Times 2013). La Chine vient d’achever une décennie sous la houlette de l’ancien président Hu Jintao et de Wen, l’ancien premier ministre. Pendant la période 2003-2013, le pays a mené une politique de promotion d’une « société harmonieuse » fondée sur une croissance équitable, grâce à un vaste Sources : Coefficients de Gini calculés par Ravallion et Chen (2007) pour les années 1986 à 2001, programme de mesures visant à réduire les iné- Gustafsson et al. (2008) pour 2002 et le Bureau national de statistique pour les années 2003 à 2013. galités et à protéger les groupes économiquement vulnérables. Ces mesures comprenaient notamment les subventions menter jusqu’en 2008, lorsqu’il a atteint un pic de 0,49. Depuis lors, agricoles, les transferts liés à la protection sociale, les réductions il a légèrement diminué tout en restant nettement supérieur à 0,451. d’impôts ciblées, les augmentations du salaire minimum et l’accrois- Avec un coefficient de Gini proche de 0,5, l’inégalité des revenus sement des dépenses consacrées à la lutte contre la pauvreté. en Chine est du même ordre de grandeur que dans des pays Mais en dépit de ces mesures, l’inégalité des revenus en Chine est d’Amérique latine qui présentent un niveau relativement élevé restée obstinément élevée au cours des dernières années. Comme d’inégalités, comme le Mexique (0,51), le Nicaragua (0,52) et le l’indique la figure 1, le coefficient de Gini (un indice d’inégalité qui Pérou (0,48), bien qu’elle demeure inférieure au niveau enregistré varie entre 0, représentant l’égalité parfaite et 1, l’inégalité parfaite) au Brésil et au Honduras (0,56–0,57)2. La Chine figure à présent a augmenté de 0,3 environ au début des années 80 à plus de 0,45 au parmi les 25 % de pays les moins égalitaires3. Très peu de pays début des années 2000. Après 2000, le coefficient a continué d’aug- asiatiques se trouvent dans ce groupe. Comment donc expliquer les inégalités en Chine ? Les données L’auteur est professeur d’économie à l’Université de Western Ontario. recueillies récemment dans le cadre du Projet sur le revenu des mé- Le présent article s’inspire des résultats du Projet sur le revenu des nages en Chine (China Household Income Project - CHIP) apportent ménages en Chine (China Household Income Project - CHIP), un projet des éléments de réponse. Lancé à la fin des années 80, le projet CHIP de recherche internationale en collaboration. On trouvera une analyse est une initiative de collaboration internationale visant à suivre l’évo- plus détaillée de l’inégalité des revenus et de la pauvreté, fondée sur les données d’enquête du projet CHIP, dans l’ouvrage intitulé Rising lution des revenus, de la pauvreté et des inégalités en Chine. Une Inequality in China: Challenges to a Harmonious Society, publié par série d’enquêtes a été réalisée auprès des ménages chinois à travers Shi Li, Hiroshi Sato et Terry Sicular. le pays afin de recueillir des informations sur les revenus et des va- Département Réduction de la pauvreté et équité : : www.worldbank.org/poverty : : Volume 2, Numéro 2 : : août 2013 riables connexes. Bien que l’enquête la plus Figure 2 Revenu par habitant des ménages, par décile, 2002 et 2007 récente porte sur l’année 2007, elle fournit les données nationales les plus à jour au niveau des ménages. Un nouvel ouvrage publié par Li, Sato et Sicular (2013) utilise ces données pour analyser en profondeur le profil et l’évolution de l’inégalité des revenus. Le présent article, qui s’inspire des conclusions de cet ouvrage, examine trois principales sources d’inégalité en Chine : 1. Les inégalités en Chine ne sont pas imputables à la stagnation ou la diminution du revenu des pauvres, mais à une augmen- tation plus rapide du revenu des groupes plus riches. 2. Les inégalités en Chine sont étroite- ment liées aux disparités entre les revenus urbains et ruraux. 3. Les revenus tirés de la propriété privée sont une source nouvelle et potentiellement durable des inégalités. Le revenu des riches augmente plus vite que celui des pauvres La persistance de fortes inégalités en Chine ne traduit pas une détérioration du Source : Calculs basés sur les données du projet CHIP. niveau de vie des pauvres. Entre 2002 et 2007, années pour lesquelles des données CHIP sont disponibles, le revenu par habitant des ménages des 6 % par an, contre seulement 1 % par an dans les deux déciles supé- déciles inférieurs de la distribution des revenus a fortement augmen- rieurs (figure 3). Par comparaison, le coefficient de Gini de la Chine té (figure 2)4. Durant cette période de cinq ans, le revenu a augmenté a augmenté de près de 10 % entre 2000 et 2010. Cette augmentation de près de 50 % dans le décile le plus pauvre, et de près de 60 % était imputable à la forte croissance du revenu des riches conjuguée dans l’avant-dernier décile. L’augmentation des revenus dans ces à une croissance moins rapide – mais en aucun cas lente – du revenu groupes à faible revenu a contribué à un net recul de la pauvreté. En des pauvres. Entre 2002 et 2007, le revenu par habitant des ménages utilisant un seuil de pauvreté de 1,25 dollar par jour en PPA (parité des deux déciles supérieurs a augmenté au rythme record de 14 % de pouvoir d’achat), Li et ses collègues (2013) estiment que le taux par an. Les deux déciles inférieurs ont enregistré une croissance fort de pauvreté en Chine a reculé de 19 % à 8 % entre 2002 et 2007. respectable de 8 à 10 % par an (figure 3). Par conséquent, tous les La forte croissance du revenu des pauvres n’a pas empêché les ménages chinois, riches et pauvres, ont vu leur revenu augmenter écarts de revenu de se creuser parce que le revenu des riches a plus vite que les ménages brésiliens. On pourrait donc faire valoir augmenté encore plus vite. Entre 2002 et 2007, les revenus ont plus que, bien que le profil de croissance des revenus chinois ait creusé que doublé dans les deux déciles supérieurs de la distribution des les inégalités, cette situation est préférable à celle du Brésil. revenus (figure 2). En conséquence, l’écart de revenu entre les déciles les plus riches et les plus pauvres a augmenté, passant de 19/1 à 25/1 Fort écart de revenu entre les et les inégalités se sont creusées dans le pays. ménages urbains et ruraux Les inégalités continuent d’augmenter en Chine alors qu’elles L’écart entre les ménages urbains et ruraux en Chine s’est creusé diminuent dans d’autres régions du monde, notamment en Amérique depuis le début des années 80 (figure 4). En 2002, le revenu moyen latine. Le cas du Brésil permet une comparaison intéressante avec par habitant pour les ménages urbains était plus du triple de celui la Chine. Selon Lustig et al. (2012), le coefficient de Gini du Brésil des ménages ruraux. Depuis, le ratio des revenus urbains aux a diminué de 5 % entre 1998 et 2009 sous le double effet d’une revenus ruraux (le revenu moyen par habitant des ménages urbains croissance robuste du revenu des pauvres et d’une croissance plus divisé par le revenu moyen par habitant des ménages ruraux) est lente de celui des riches. Entre 2001 et 2009, le revenu par habitant resté nettement supérieur à 3,0. Cet écart entre revenus urbains des ménages brésiliens des deux déciles inférieurs a augmenté de 5 à et ruraux est très élevé par rapport aux normes internationales 2 : : août 2013 : : Pleins feux sur les inégalités Figure 3 Courbes de l’incidence de la croissance du revenu ont progressé encore plus vite (11 % en par habitant des ménages, Chine et Brésil prix constants). L’écart est attribuable en partie aux dis- parités entre les salaires urbains et ruraux. La disparité des niveaux de capital humain est particulièrement importante à cet égard (Gustafsson et al. 2008 ; Knight et al. 2013 ; Sicular et al. 2007). Il subsiste des diffé- rences entre villes et campagnes en ce qui concerne les possibilités d’éducation et le niveau d’instruction. Mais la rémunération du travail n’explique pas tout. L’écart entre les revenus urbains et ruraux tient également aux disparités des revenus non salariaux. Les revenus urbains autres que ceux du travail — pensions de retraite, transferts publics et rendement des actifs privés (produit des intérêts et loyer fictif des logements occupés Note : Croissance entre 2002 et 2007 pour la Chine et entre 2001 et 2009 pour le Brésil, en prix constants. par leurs propriétaires) — ont augmenté Source : Figure 2 ; Lustig et al. (2012). rapidement au cours des dernières années. En 2007, les revenus non salariaux repré- (Knight et Song 1999, p. 138 ; voir également Banque mondiale sentaient environ 40 % en moyenne des revenus urbains, contre 2009b). seulement 15 % des revenus ruraux. Ces revenus non salariaux sont L’écart entre les revenus urbains et les revenus ruraux en Chine est liés en grande partie aux politiques gouvernementales qui ont profité un facteur déterminant de l’inégalité des revenus observée au niveau de manière disproportionnée à la population urbaine enregistrée, national ces dernières années. Cet écart contribuait pour 51 % à tels que la privatisation des logements urbains, le régime de retraite l’inégalité générale en 2007, contre 45 % en 2002 (Li et al. 2013). et divers autres types de subventions et programmes d’aide sociale Les disparités entre les revenus urbains et ruraux s’expliquent en (Banque mondiale 2009a). partie par le système d’enregistrement des ménages chinois (Hukou) L’écart entre les revenus urbains et ruraux en Chine a également introduit à l’époque de Mao. Il s’agit d’un système de passeport une dimension régionale qui est difficile à expliquer. Ainsi, le ratio interne qui a été initialement adopté à la fin des années 50 pour des revenus urbains aux revenus ruraux est plus élevé dans l’ouest contrôler les mouvements de population dans le pays, principalement et l’est du pays (3,85 et 3,44 respectivement en 2007). Entre 2002 des zones rurales vers les zones urbaines. Pendant de nombreuses et 2007, sauf dans les grandes villes comme Beijing et Shanghai, ce années, les Chinois qui souhaitaient changer de lieu de résidence ratio a augmenté de 43 % dans l’est, contre 27 % dans le centre du devaient demander l’autorisation de l’administration compétente, et pays et seulement 3 % dans l’ouest (Li et al. 2013). La raison de ces les autorisations étaient rigoureusement contrôlées. Depuis le milieu disparités régionales mérite d’être examinée de plus près. des années 90, le système Hukou a fait l’objet d’une série de réformes qui ont conduit à un assouplissement des restrictions à la mobilité L’accès à la propriété privée est géographique et à l’accélération de l’exode rural. De fait, les gains une nouvelle source d’inégalités des travailleurs migrants sont aujourd’hui une importante source de À l’époque de Mao, la propriété privée était interdite. Dans les revenus dans les zones rurales, où ils contribuent à la croissance des années 80, le pays a fait les premiers pas vers l’accès à la propriété revenus ruraux et à l’atténuation de l’écart entre les revenus urbains privée de certains biens tels que le bétail, les véhicules et le matériel et ruraux. Néanmoins, les travailleurs migrants ruraux se heurtent utilisé par les entreprises familiales. Dans les années 90, de nou- encore à des obstacles à leur réinstallation permanente, tels que la velles mesures ont élargi l’accès à la propriété privée d’autres actifs, discrimination dans le domaine du travail, le coût élevé du logement notamment les logements urbains. La privatisation du marché de ces et la difficulté d’accès aux services publics comme l’éducation et les logements, entamée dans les années 90, s’est en principe achevée en soins de santé. C’est pourquoi les migrations des campagnes vers les 2005. D’autres mesures ont été prises pour promouvoir le déve- villes sont généralement temporaires ou de courte durée. loppement du marché de l’immobilier urbain, tant résidentiel que Au cours des dernières années, ce n’est pas la stagnation des commercial. À la même époque, le gouvernement a commencé à revenus ruraux qui a creusé l’écart de revenus mais le bond en avant encourager le développement des marchés financiers et des marchés des revenus urbains. Entre 2002 et 2007, les revenus ruraux ont aug- des valeurs nationaux, et a autorisé la création d’entreprises privées. menté de plus de 7 % en moyenne par an, mais les revenus urbains Ces transformations ont permis la création de nouveaux mécanismes Pleins feux sur les inégalités : : août 2013 : : 3 Figure 4 Ratio des revenus urbains aux revenus uniquement sur la croissance macroéconomique ruraux en Chine, 1985–2012 pour accroître le revenu des pauvres. L’utilisation des ressources publiques pour les programmes de redis- 3,50 tribution risque de demander des choix politiques plus difficiles. La Chine a mis en place une gamme relativement 3,00 large de mesures de protection sociale et de lutte contre la pauvreté, essentiellement dans le cadre de la politique nationale de promotion d’une « société 2,50 harmonieuse ». Diverses études réalisées par la Banque mondiale et d’autres institutions montrent 2,00 cependant qu’il y a des améliorations à apporter dans la mise en œuvre, le ciblage et la conception de ces programmes (Banque mondiale 2009a, Li et al. 1,50 2013). Ces améliorations pourraient aider la Chine à améliorer la répartition des revenus même en période de ralentissement macroéconomique. 1,00 Il y a cependant des limites à ce que les poli- tiques de redistribution des revenus peuvent faire pour réduire les inégalités s’il subsiste des forces Source : Bureau national de statistique, 2012. qui aggravent les sources d’inégalité ou en créent de nouvelles. Deux de ces facteurs sont les disparités d’épargne et d’accumulation de richesse par les ménages chinois, entre revenus urbains et ruraux et les inégalités liées aux revenus des qui ont rapidement accédé à la propriété. Vers le milieu des années actifs. L’écart entre les revenus urbains et ruraux en Chine reflète les 90, peu de ménages chinois possédaient leurs propres logements : conséquences à long terme des institutions et politiques passées et 10 années seulement plus tard, plus de 90 % des ménages étaient présentes qui ont créé des conditions inégales d’accès à l’éducation, propriétaires immobiliers (Sato et al. 2013). à l’emploi, aux actifs et aux prestations sociales pour les citadins La propriété privée est une source de revenus pour les ménages, et les ruraux. La Chine a récemment annoncé une nouvelle poli- sous la forme d’intérêts, de dividendes, de loyers et de plus-values. tique d’urbanisation accélérée afin d’accroître le pourcentage de la En raison de l’insuffisance des données et de la sous-déclaration de population qui vit dans des villes. Cette nouvelle politique d’urbani- ces formes de revenu dans l’enquête, il est difficile de déterminer sation ne semble toutefois pas prendre en compte les causes sous- exactement leur ampleur et leur répartition. Les chiffres dispo- jacentes de l’écart entre les revenus urbains et ruraux. Le nouveau nibles montrent cependant que les revenus des actifs ont fortement programme d’urbanisation risque de remplacer les disparités entre augmenté. Par exemple, Sato et al. (2013) indiquent que la part des les populations urbaines et rurales par des disparités au sein même revenus des actifs dans le revenu des ménages a presque doublé en de la population urbaine, entre les groupes favorisés déjà établis et cinq ans, passant de 8 % environ à 15 % entre 2002 et 2007. un nouveau sous-prolétariat composé essentiellement de migrants et Comme dans la plupart des pays, la répartition des revenus des d’anciens ruraux. actifs en Chine est plus inégale que celle des salaires et autres sources L’accès des ménages à la propriété est un phénomène encore nou- de revenu. La croissance des revenus des actifs des Chinois qui veau en Chine. Mais on peut raisonnablement prédire que la richesse possèdent des biens a donc contribué à creuser les inégalités. En des ménages chinois va augmenter progressivement — et de manière utilisant les données CHIP, nous avons établi que les revenus des inégale. Cet aspect de l’inégalité est complexe et sensible sur le plan actifs contribuaient à hauteur de 8 à 10 % à l’inégalité des revenus politique en raison du manque d’équité qui caractérise le processus en Chine en 2002, et à hauteur de 13 à 19 % en 2007. d’accumulation de richesse. Des réformes introduites en temps voulu pour réglementer les marchés financiers et immobiliers, renforcer les Observations finales droits de propriété (notamment ceux des ménages ruraux pauvres), La Chine a évolué d’une économie relativement inégalitaire à une créer un impôt sur les biens fonciers et la richesse et limiter les pos- économie très inégalitaire durant une période de forte croissance sibilités de profits irréguliers et illicites pourraient aider à atténuer les macroéconomique. Cette croissance a contribué à accroître les reve- effets de la croissance de la richesse privée sur l’inégalité. nus de tous les groupes socioéconomiques, tout en fournissant les Les nouveaux dirigeants chinois, le président Xi Jinping et le pre- ressources nécessaires pour les programmes de redistribution et de mier ministre Li Keqiang, se heurtent donc à de nouveaux obstacles à protection sociale. la réduction des inégalités en plus de ceux hérités de leurs prédéces- Cependant, au lendemain de la crise financière mondiale, la Chine seurs. Dans le contexte d’une économie en mutation et de nouvelles est entrée dans une période de croissance ralentie qui pose de nou- sources d’inégalité, des approches nouvelles et innovantes seront veaux défis pour la promotion de l’équité. Elle ne peut plus compter nécessaires pour surmonter ces obstacles. 4 : : août 2013 : : Pleins feux sur les inégalités Notes Knight, John, Terry Sicular et Ximing Yue. 2013. “Educational 1. Les coefficients de Gini indiqués à la figure 1 sont calculés sur la Inequality in China: The Intergenerational Dimension.” Chapitre base des données de revenu du Bureau national chinois de statistique. 4 dans Li Shi, Hiroshi Sato et Terry Sicular (dir. publ.) Rising 2. Les coefficients de Gini des autres pays considérés ici Inequality in China: Challenge to a Harmonious Society. New York: correspondent à 2005 et sont mesurés en revenu des ménages par Cambridge University Press. habitant. Ils sont tirés de la base de données UNU-WIDER WIID2 Li, Shi, Chuliang Luo et Terry Sicular. 2013. “Overview: Income (http://www.wider.unu.edu/research/Database/en_GB/wiid ; Inequality and Poverty in China, 2002-2007.” Chapitre 2 dans site consulté le 12 août 2011). À noter que le Brésil et le Honduras Li Shi, Hiroshi Sato et Terry Sicular (dir. publ.) Rising Inequality sont les deux pays de la liste qui avaient le coefficient le plus élevé in China: Challenge to a Harmonious Society. New York: Cambridge en 2005-2006. University Press. 3. Basé sur les coefficients de Gini par pays calculés par la Li, Shi, Hiroshi Sato et Terry Sicular. 2013. “Introduction: Rising Banque mondiale, http://data.worldbank.org/indicator/SI.POV.GINI/ Inequality in China.” Chapitre premier dans Shi Li, Hiroshi Sato (site consulté le 20 juin 2013). et Terry Sicular (dir. publ.) Rising Inequality in China: Challenges 4. Les estimations des revenus et des inégalités basées sur les to a Harmonious Society. New York: Cambridge University Press. données de l’enquête CHIP utilisent une définition plus complète Li, Shi, Hiroshi Sato et Terry Sicular, (dir. publ.) 2013. Rising Inequality du revenu que celles basées sur les données du Bureau national de in China: Challenges to a Harmonious Society. New York: Cambridge statistique. Les données CHIP sur les revenus comprennent le loyer University Press. fictif des logements occupés par leurs propriétaires et les subventions implicites dans le secteur locatif résidentiel urbain. Lustig, Nora, Luis F. Lopez-Calva et Eduardo Ortiz-Juarez. 2012. “Declining Inequality in Latin America in the 2000s: The Cases of Bibliographie Argentina, Brazil et Mexico,” World Development, 44, 129–141. Banque mondiale. 2009a. From Poor Areas to Poor People: China’s New York Times. 2013. “China’s Wen Warns of Inequality and Vows Evolving Poverty Reduction Agenda, an Assessment of Poverty and to Continue Military Buildup.” Andrew Jacobs et Chris Buckley. Inequality in China. Washington : Banque mondiale. 4 mars. Banque mondiale. 2009b. Rapport sur le développement dans le monde Ravallion, Martin et Shaohua Chen. 2007. “China’s (Uneven) Progress (2009): repenser la géographie économique. Washington : against Poverty.” Journal of Development Economics, 82(1), 1–42. Banque mondiale. Sato, Hiroshi, Terry Sicular et Ximing Yue. 2013. “Housing Bureau national de statistique. Statistiques annuelles. China Statistical Ownership, Incomes, and Inequality in China, 2002–2007,” Yearbook. Beijing: China Statistical Press. Chapitre 3 dans Li Shi, Hiroshi Sato et Terry Sicular (dir. publ.) Gustafsson, Björn, Li Shi et Terry Sicular (dir. publ.), 2008. Income Rising Inequality in China: Challenge to a Harmonious Society. Inequality and Public Policy in China. New York: Cambridge New York: Cambridge University Press. University Press Sicular, Terry, Ximing Yue, Björn Gustafsson et Shi Li. 2007. “The Knight, John et Lina Song. 1999. The Rural-Urban Divide: Economic Urban-Rural Income Gap and Inequality In China,” Review of Disparities and Interactions in China. Oxford: Oxford University Press. Income and Wealth, 53(1), 93–126. Inégalités et troubles civils au Brésil : Entretien avec Ricardo Paes de Barros L e Comité de rédaction de Pleins feux sur les inégalités a récem- a commencé dans le pays en juin 2013. Les revendications portaient dans un ment rencontré Ricardo Paes de Barros, Secrétaire aux actions premier temps sur la réduction du tarif des transports publics, mais elles se stratégiques auprès du ministère brésilien des Affaires straté- sont ensuite élargies à diverses autres revendications envers l’État. On trouvera giques. Spécialiste des questions liées à la pauvreté et aux inéga- ci-après un résumé de l’entretien, qui examine quelques-unes des raisons de ces lités, il a participé de près à l’élaboration de programmes sociaux manifestations, ainsi que la situation actuelle du Brésil sur le plan du dévelop- phares du Brésil, notamment Bolsa Familia, le programme national de trans- pement, de l’égalité et de la politique sociale. ferts monétaires conditionnels. La revue Foreign Policy a récemment considéré Pleins feux sur les inégalités (PF) : À votre avis, quelle est la Paes de Barros comme l’une des « 500 personnalités les plus influentes de la principale raison des récentes manifestations au Brésil ? planète ». De nombreuses questions ont été abordées durant cet entretien de Ricardo Paes de Barros (PB) : Il est important de reconnaître deux heures, mais dans le contexte de la vague de protestation populaire qui qu’il n’y a pas de réponse claire et simple à cette question, parce que Pleins feux sur les inégalités : : août 2013 : : 5 personne ne sait au juste. C’est une énigme pour tout le monde, ni le à se dire que la répartition des dépenses publiques n’est pas exactement gouvernement ni l’opposition ne s’y attendait. Aucun indicateur écono- ce qu’ils souhaitent. Si l’on examine de près la situation, on peut consta- mique ou social n’aurait pu prédire ce niveau de mécontentement. Ces ter que la population demande une allocation différente des ressources. troubles sont en fait surprenants dans un pays qui affiche un taux de L’autre facteur déterminant est que la Coupe du monde a attiré l’atten- chômage relativement faible, un recul de la pauvreté et une réduction tion sur l’allocation des dépenses publiques. Et les gens se demandent des inégalités. pourquoi le Brésil consacre autant d’argent à la préparation de la Coupe Cela ne veut pas dire que les conditions économiques et sociales du monde alors qu’il manque de ressources pour l’éducation, la santé, sont parfaites au Brésil. Les niveaux de pauvreté et des inégalités restent la sécurité du public et les transports. Pourquoi investissons-nous élevés, mais ils diminuent. Par exemple, le taux de mortalité infantile est davantage dans la construction de routes pour desservir les stades plutôt encore très élevé — deux décès pour mille — mais le Brésil est l’un des que les lieux de travail ? Bien que les investissements dans la Coupe du cinq pays au monde où ce taux diminue le plus vite. monde soient essentiellement privés, il se pourrait que la récente Coupe Cela étant, de récents sondages d’opinion ont révélé l’insatisfaction des confédérations ait fait naître des idées dans l’esprit des gens, qui ne croissante du public à l’égard de la qualité des services publics. À noter s’interrogent pas tant sur la qualité des services que sur le mode d’alloca- que l’opinion publique sur la qualité de ces services évolue de manière tion des deniers publics. beaucoup plus radicale que la qualité effective des services. En d’autres Mais ce ne sont que des conjectures, et tout ce qu’on sait, c’est termes, la satisfaction à l’égard de la qualité des services diminue rapi- qu’un mouvement se dessine. Peut-être les Brésiliens souhaitent-ils dement alors que les mesures effectives de la qualité témoignent d’une une trajectoire de développement légèrement différente, ou bien amélioration. un changement radical. Peut-être souhaitent-ils une plus grande Je pense que c’est l’une des raisons les plus fondamentales et les plus représentation et une modification des dépenses publiques. Mais directes des manifestations. Il s’agit purement et simplement d’un chan- le message n’est pas clair à ce stade, et il faut se garder de lui donner gement de perception — et non pas d’une détérioration de la qualité et un sens qu’il n’a pas. de l’exigence d’un retour aux niveaux de qualité antérieurs. Les attentes PF : Comment le gouvernement devrait-il donc répondre : en de la population ont incroyablement augmenté : on est passé d’une recentrant son action sur la fourniture de biens « purement » situation dans laquelle les attentes étaient stables — les gens étaient publics (justice, application des lois, logistique, etc.) au lieu des heureux — à une situation dans laquelle les attentes ont fait un bond biens privés (santé, éducation, transferts) ? en avant du jour au lendemain et ce qui semblait satisfaisant jusqu’ici PB : Un pays sans inégalités peut se concentrer sur la fourniture de biens ne suffit plus aujourd’hui. et services purement publics. En théorie, si les chances sont les mêmes PF : À quoi tient ce changement de perception ? pour tous, l’État n’a pas besoin de se soucier des questions de redistribu- PB : Un facteur déterminant est le fait que l’augmentation des reve- tion, il peut s’occuper de fournir des biens et services purement publics. nus et la croissance économique ont permis à 40 millions de pauvres Tout le monde en profitera sur un pied d’égalité. Mais dans un pays où il de rejoindre les rangs de la classe moyenne au Brésil. Lorsqu’un aussi existe de fortes inégalités, comme le Brésil, la priorité doit être de réduire grand nombre de pauvres passent dans la classe moyenne, leurs priorités ces inégalités. changent soudainement — l’important pour eux n’est plus seulement de Que signifie réduire les inégalités ? Cela veut dire qu’il faut améliorer survivre. En très peu de temps, 40 millions de personnes sont entrées sur la situation des pauvres plus rapidement que celle des riches. Pour ce le marché du travail officiel, paient des impôts — et se demandent main- faire, il faut une politique sociale qui privilégie les pauvres au lieu de tenant à quoi sert l’argent des contribuables. Avant, ces gens n’avaient s’appliquer à tout le monde de façon égale. Autrement dit, la politique pas le temps de réfléchir à ces questions, ils n’avaient aucune idée de ce sociale ne vise pas à fournir des biens purement publics, mais des biens qu’ils versaient à l’État, ils vivaient au jour le jour et se demandaient s’ils privés financés avec des fonds publics — comme l’éducation, la santé, auraient le lendemain de quoi se nourrir ou acheter leur ticket d’autobus. les transferts, etc. — pour les plus démunis. C’est ce qu’a fait le Brésil, Parallèlement à ces 40 millions de personnes qui entrent dans la classe avec d’excellents résultats. Nous avons investi relativement plus dans moyenne, vous avez 30 millions de personnes qui représentent les 15 % les biens privés financés par l’État qui ciblent les pauvres que dans les les plus riches de la population et dont le revenu n’augmente guère. La biens purement publics, qui profiteraient surtout aux non-pauvres. Il réduction des inégalités est une médaille à deux faces. Pour réduire les n’est donc pas très surprenant que la population d’un pays où la classe inégalités, il faut un taux de croissance inégal. Si les revenus augmentent moyenne est en plein essor commence à réclamer une amélioration des au même rythme dans chaque tranche de revenus, vous ne réduisez pas services de transport et de la sécurité, autrement dit, davantage de biens les inégalités. Pour cela, il faut que les revenus des pauvres augmentent publics typiques. plus vite que ceux des riches. Au Brésil, les revenus des 15 % les plus Je pense que le Brésil a décidé de prendre les questions d’inégalité et riches ont augmenté, mais beaucoup moins rapidement que la moyenne de pauvreté au sérieux, et donc de se concentrer sur les pauvres. L ’une nationale. Cela signifie que pour la première fois dans l’histoire du pays, des raisons pour lesquelles le pays a réussi à réduire les inégalités est les 15 % de Brésiliens les plus riches se rapprochent progressivement qu’il a décidé de faire passer les besoins des pauvres avant toute autre de la classe moyenne. Ils sont donc également moins satisfaits et se chose. Le slogan du Brésil est aujourd’hui « Un pays riche est un pays demandent de plus en plus comment s’utilise le produit des impôts sans pauvreté ». qu’ils paient. À première vue, il semble paradoxal qu’une telle politique soit politi- Bien que les choix budgétaires de l’État n’aient guère changé au cours quement viable dans un pays qui compte moins de 10 % d’analphabètes des dix ou vingt dernières années, 70 millions de Brésiliens commencent et seulement 20 % de pauvres. Cependant, même si cela ne sert pas leur 6 : : août 2013 : : Pleins feux sur les inégalités propre intérêt, de nombreux Brésiliens appartenant à tous les groupes l’État de Pernambuco, dans le nord-est du Brésil. Il m’a dit : « Vous vous socioéconomiques croient en ce slogan. souvenez que nous avons élargi l’accès des familles aux services de gar- derie d’enfants l’année dernière ? Cela a eu un impact très positif : PF : Mais comme vous l’avez dit, le Brésil a une classe moyenne les parents étaient contents, et les entreprises étaient contentes parce en plein essor, avec de nouvelles valeurs et de nouvelles que les employés n’avaient pas à se soucier de leurs enfants et pouvaient attentes envers l’État. À votre avis, quelles sont ces arriver à l’heure au travail. Mais maintenant je fais autre chose ». Il est nouvelles valeurs ? déjà passé à autre chose. Il n’y a rien de mieux qu’un maire dynamique PB : L ’expérience montre que les valeurs de la classe moyenne ont ten- et intelligent qui a des échanges quotidiens avec les membres de la dance à emprunter à la fois aux valeurs des riches et à celles des pauvres. communauté pour savoir quels sont les problèmes à régler et les C’est un groupe intermédiaire qui a des vues « à mi-chemin ». Qui est changements à apporter aux programmes. le plus réfractaire aux impôts ? Les riches y sont les plus opposés, les Mais il y a des choses que le maire ne pourra pas voir en parcourant pauvres y sont les moins hostiles, et la classe moyenne se situe entre les simplement les rues de sa ville. Certains problèmes environnementaux deux. Qui pense que les services publics sont de mauvaise qualité ? Les sont ignorés parce que personne ne veut les voir. Il y a peut-être une pauvres pensent que leur qualité est carrément mauvaise, les riches pen- usine qui pollue, mais comme elle crée des emplois et stimule l’éco- sent qu’elle laisse à désirer, et l’opinion de la classe moyenne se trouve nomie locale, personne ne veut reconnaître les aspects négatifs. C’est entre les deux. Jusqu’à présent, rien n’indique que la classe moyenne pourquoi il est également important d’utiliser des données objectives et va révolutionner, moderniser ou refondre les valeurs de la société des observations empiriques. Dans le cas de Petrolina, le maire tire parti brésilienne. de ces informations empiriques. Par exemple, il utilise les données de Mais naturellement, avec l’essor de la classe moyenne, les besoins et recensement pour déterminer l’ampleur des problèmes à régler. aspirations du Brésilien moyen sont en train de changer, et cela pose Autrement dit, les informations empiriques sont utiles et parfois d’énormes défis pour l’action à mener par les pouvoirs publics. Comment même irremplaçables. Mais vous n’élaborerez jamais un programme adapter les politiques à ces changements ? Je pense qu’une politique public entièrement fondé sur des données empiriques qui ne sont sou- améliorée est une politique qui ne cible plus exclusivement les pauvres vent pas disponibles à temps ou sont incomplètes. L ’idée est de recueillir mais tient également compte des besoins de la nouvelle classe moyenne. le plus d’informations possible tout en en restant à l’écoute du terrain. Le gouvernement en est très conscient. C’est pourquoi le nouveau slogan du Brésil sera désormais « La fin de la pauvreté n’était qu’un début ». PF : Comment faire pour mieux évaluer les politiques En ce qui concerne les politiques publiques au Brésil, cela signifie publiques au Brésil ? généralement « Comment gérer la réussite ? ». La réussite d’une poli- PB : Le Brésil est un pays qui évalue bien les politiques publiques. Nous tique publique marque aussi son arrêt de mort. Par exemple, si vous avons les institutions, l’argent et la demande nécessaires pour évaluer trouvez un médicament efficace contre une maladie, qui peut donc être les résultats, qu’il s’agisse du travail accompli par les responsables des guérie, vous n’avez plus besoin de ce médicament. C’est la même chose programmes — ministres, secrétaires d’État, gouverneurs et maires — ici, le Brésil est parvenu à faire reculer la pauvreté, mais c’est précisé- ou des programmes proprement dits. Ce qui manque au Brésil, c’est une ment pourquoi l’ancienne politique sociale a perdu de sa pertinence. La institution chargée non pas d’évaluer les résultats — tâche qu’il vaut question qui se pose alors est de savoir comment faire en sorte que les mieux confier au secteur privé, aux universités et aux organisations non politiques publiques continuent de régler les problèmes. La réponse est gouvernementales — mais de coordonner tout le processus d’évalua- qu’il faut continuer d’adapter les politiques publiques à mesure qu’elles tion, de déterminer quelles évaluations sont valables et lesquelles ne produisent les résultats visés. Si vous avez une nouvelle classe moyenne, le sont pas, et de rendre ces informations publiques, d’établir une liste vous devez adapter l’action des pouvoirs publics pour répondre à ses d’évaluateurs agréés éventuellement assortie d’une liste d’institutions qui besoins. Il faut constamment intégrer une nouvelle perspective dans recherchent des évaluateurs, etc. De cette façon, si vous avez besoin de l’élaboration des politiques dans tous les domaines, qu’il s’agisse du faire évaluer un programme social, cet organisme pourrait recommander système d’administration de la justice, de la sécurité du public ou des un évaluateur mais aussi fournir une analyse de l’évaluation. transports publics. Dans la pratique, cet effort pourrait être mené par la Cour fédérale des Il va de soi que dans la pratique les solutions ne sont pas aussi simples. comptes du Brésil (Tribunal de Contas da União), l’Institut de recherche Pour refondre la politique sociale, il faut prendre en compte d’autres économique appliquée (Instituto de Pesquisa Econômica Aplicada) ou un facteurs. Comment mieux cibler ces programmes tout en optimisant organisme public autonome. L ’essentiel est d’avoir un organisme public les chances de recouvrer les coûts ? Comment modifier les partenariats qui réglemente, guide et finance le processus d’évaluation, mais n’effectue public-privé de façon à pouvoir financer ou fournir ces nouveaux pas lui-même l’évaluation car cela pourrait créer des conflits d’intérêts. services ? Idéalement, la nouvelle politique sociale devrait être la plus effi- PF : Cela soulève une question intéressante sur le rôle des cace possible. Cela veut dire que les collectivités et le secteur privé gèrent secteurs public et privé dans la prestation des services sociaux. ces services et que l’État continue de les réglementer et de les financer. À votre avis, quel devrait être le rôle de chacun ? PF : Quelles conditions devraient être réunies pour que le Brésil PB : Notre objectif est de fournir un ensemble de services de qualité. soit en mesure d’adapter plus efficacement sa politique sociale ? Pour cela, il faut des services pleinement intégrés. Autrement dit, il faut PB : Il y a deux impératifs : une évaluation constante de la situation garantir l’égalité d’accès à des services de qualité pour tous — pauvres, économique et sociale au Brésil, et la capacité de changement effectif. riches et classes moyennes. Idéalement, ces services seraient assurés par Par exemple, j’ai récemment rendu visite au maire de Petrolina, dans le secteur privé, payés par le secteur public et certifiés et réglementés par Pleins feux sur les inégalités : : août 2013 : : 7 le secteur public. Ils seraient gratuits pour les pauvres — ou du moins des services publics de qualité uniforme. Par exemple, dans un monde ils seraient remboursés — alors que les riches paieraient l’État pour les où règne la ségrégation, les quartiers riches auraient des écoles de services qu’ils reçoivent. meilleure qualité que les quartiers pauvres. En d’autres termes, si vous Un tel système existe déjà au Brésil, pour les services de garderie voulez assurer une éducation de qualité pour tous, il est plus important d’enfants à Petrolina. Dans ce cas, l’État signe un contrat avec une de transformer la communauté que de transformer l’école. entreprise privée pour construire la garderie. Les travaux sont financés Le principal rôle de l’État en matière de politique sociale n’est donc par un fonds administré par l’État qui est spécifiquement utilisé pour les pas la gestion des services, mais leur conception. Il peut être préférable services d’éducation de base. Ces prestataires privés sont libres de réali- que l’État laisse la gestion des enseignants et des médecins au secteur ser des bénéfices et de répondre à des appels d’offres. Ce type de système privé et s’occupe de savoir ce que veulent les gens, en veillant à recruter est efficace parce que la concurrence garantit des services de qualité. En des organismes capables de satisfaire leurs besoins. En d’autres termes, outre, il peut être facilement élargi du fait que les ressources publiques la conception des programmes sociaux ne peut être confiée au secteur allouées à l’éducation sont basées sur le nombre d’élèves au lieu d’être privé. Le marché devrait servir à déterminer quelles mesures prendre un montant fixe. Par conséquent, le montant des ressources allouées et les prestataires privés peuvent indiquer au gouvernement ce dont ils augmente avec le nombre d’élèves inscrits. ont besoin, mais le rôle du gouvernement est de réglementer le fonc- Mais ce système serait extrêmement difficile à appliquer à plus grande tionnement du marché et d’orienter l’offre et la demande de manière à échelle, non pas tant à cause du modèle utilisé, mais à cause des inéga- atteindre ses objectifs sociaux. lités au Brésil. Pour que les pauvres aient accès aux mêmes services de Cet entretien a eu lieu le 19 juillet 2013 entre Ricardo Paes de Barros qualité que les riches, il faudrait qu’ils ne vivent plus séparément, qu’il et Pedro Olinto, Fernanda Luchine et Maximillian Ashwill, membres de n’y ait plus de quartiers riches et de quartiers pauvres, mais des quartiers l’équipe de rédaction de Pleins feux sur les inégalités. Il a été enregistré en mixtes. Idéalement, ces communautés intégrées seraient un microcosme portugais et transcrit par Fernanda Luchine. Le dialogue qui précède est du Brésil, où chacun recevrait des services de qualité. Ce que je veux la traduction (en anglais) de la conversation par Maximillian Ashwill et dire, c’est qu’il faut une société égalitaire pour assurer l’égalité d’accès à Pedro Olinto. La série Pleins feux sur les inégalités a pour but d’enrichir auteurs et ne coïncident pas nécessairement avec ceux le débat public sur l’équité, l’inégalité des chances et la de la Banque mondiale, de ses Administrateurs ou des pays mobilité socioéconomique. On y trouve des articles rédigés qu’ils représentent. par des membres du personnel de la Banque mondiale ainsi que par des chercheurs et décideurs de la communauté La série Pleins feux sur les inégalités n’est pas protégée par le du développement en général. Les points de vue et interpréta- droit d’auteur et peut être reproduite sous réserve que la source tions exprimés dans les articles n’engagent que leurs soit dûment mentionnée. Comité de rédaction : Pedro Olinto (rédacteur en chef), Maximillian Ashwill (rédacteur senior), Jaime Saavedra, Francisco Ferreira, Luis-Felipe Lopez-Calva, John Newman, Gabriel Demombynes et Anna Reva Rédactrice : Mary Anne Mulligan BANQUE MONDIALE Département Réduction de la pauvreté et équité Réseau Lutte contre la pauvreté et gestion économique (PREM)