92946 République Démocratique du Congo Rapport de suivi de la situation économique et financière 2014 2ème édition Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale Décembre 2014 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 Table des matières Liste des Abréviations iv Préface v Résumé exécutif vi Première PARTIE Evolutions économiques récentes et contexte SOCIO-politique en rdc. Vers une plus grande mobilisation du potentiel minier pour donner à l’état les moyens de sa souveraineté 1 1. Des performances économiques sur fond de vulnérabilités persistantes 3 1.1. Une forte croissance économique tirée par l’essor du secteur minier 3 1.2. Une politique monétaire qui assure la stabilité des prix et un secteur bancaire qui se développe progressivement 6 1.3. Une balance extérieure qui s’est améliorée mais qui demeure vulnérable aux chocs externes et internes 7 1.4. Une politique budgétaire prudente qui favorise la stabilisation, mais rendue vulnérable en raison d’une faible mobilisation des recettes 9 1.5. Des résultats macro-économiques et financiers dont la soutenabilité sur le long terme est loin d’être assurée 11 2. Que faut-il pour en faire un levier du développement ? Régulation, Gouvernance, et Performance du secteur des ressources naturelles 13 3. Un contexte politique et social marqué par la fragilité et la violence 17 3.1. Des avancées politiques et sécuritaires sur fond de fragilité persistante 17 3.2. Sortir du cycle de la violence et de la fragilité : Démobilisation, Réconciliation et Restauration de la cohésion sociale 19 4. Perspectives d’avenir et risques économiques et politiques 20 DEUXIèME PARTIE LES DEFIS ET LES OPPORTUNITES DE LA RDC A LA LUMIERE DES RESULTATS DE L’ENQUETE DES MENAGES. Infrastructures, Mines, éducation et Santé : Des synergies et des opportunités en attente d’une gestion publique efficace 23 5. Infrastructure routière et activités minières : Déterminants parmi d’autres variables du niveau de vie des ménages 26 5.1. Les transports routiers ont un impact positif sur le bien-être des ménages 26 5.2. Les activités minières : Manne ou Malédiction ? 26 6. Développement humain et accessibilités financières et physiques aux services sociaux 28 6.1. Une dichotomie rural-urbain presque inexistante au niveau des services sociaux de base 28 6.2. L’accessibilité financière, obstacle majeur à l’utilisation des services de santé et de scolarisation 29 6.3. L’accessibilité physique aux infrastructures sociales : Problèmes de disponibilité et de facilité d’accès 29 6.4. La scolarisation comme vecteur de promotion socio-économique 30 7. Les différences liées au genre : Les femmes sont désavantagées en termes de revenus et d’accès aux services médicaux et à l’éducation 32 7.1. Les femmes travaillent presque autant que les hommes mais gagnent beaucoup moins 32 7.2. Une médecine prénatale et natale qui coûte chère et des résultats qui se font attendre 33 7.3. Aller à l’école ou chercher de l’eau et s’occuper de sa famille ? Le dilemme des filles congolaises 34 TROISIèME PARTIE CONCLUSIONS PRINCIPALEs BRISER LE CERCLE VICIEUX DE LA FRAGILITE 37 Bibliographie 39 ii Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale Liste des Graphiques Graphique 1.1. Croissance du PIB réel en RDC et en Afrique subsaharienne (en pourcentage) 3 Graphique 1.2. Composition du PIB et contribution des secteurs principaux à la croissance (en pourcentage du total) en 2010-13 4 Graphique 1.3. Commerce extérieur (Axe de gauche) et balance du compte courant (Axe de droite) de 2009 à 2013 - en pourcentage du PIB 8 Graphique 1.4. Investissements directs étrangers en RDC de 2009 à 2013 (en million de dollars) 8 Graphique 1.5. Evolution du taux de couverture des importations par les réserves en devises étrangères (en semaines) 9 Graphique 1.6. Taux d’exécution du budget dans l’infrastructure et les secteurs sociaux 10 Graphique 2.1. Taux de prélèvement effectifs sur les industries extractives, le secteur minier (Axe de gauche) et le secteur pétrolier (Axe de droite) 13 Graphique 6.1. Composition des catégories de salaires par niveau d’éducation des individus 30 Graphique 6.2. Niveau d’instruction du Chef de ménage et nombre d’années d’études des enfants 31 Graphique 7.1. Répartition des femmes en fonction de grossesse suivie, naissance vivante et milieu d’habitation 33 Liste des TABLEAUX 9 Tableau 1.1 : Evolution du Solde budgétaire entre 2008 et 2013 (en % du PIB) 21 Tableau 4.1 : République Démocratique du Congo – Sélection d’indicateurs économiques Tableau 5.1 : Services fournis par les Mines dans les communes ayant une activité minière - Pourcentage des communes ayant répondu Oui à la question de savoir si les éntreprises 27 minières fournissent le service mentionné Tableau 5.2 : Problèmes causés par les Mines dans les communes ayant une activité minière - Pourcentage des communes ayant répondu Oui à la question de savoir 27 si les Mines ont causé le problème mentionné Tableau 6.1 : Répartition des malades en fonction du type de services médicaux utilisés 28 et du milieu d’habitation Tableau 6.2 : Relation entre éducation et utilisation des services médicaux – Répartition des individus 31 utilisant les services médicaux par niveau d’instruction du Chef de ménage 32 Tableau 7.1 : Répartition des travailleurs par salaire mensuel, sexe et milieux d’habitation 34 Tableau 7.2 : Taux brut de scolarisation par sexe – En fonction du cycle scolaire et du milieu d’habitation Tableau 7.3 : Allocation du temps des élèves du primaire et du secondaire qui étudient et effectuent 35 des tâches domestiques - En fonction du niveau de scolarisation et du genre Liste des ENCADRES 5 Encadré 1.1 : Révision des comptes nationaux par l’Institut National des Statistiques 7 Encadré 1.2 : Résumé des principaux résultats de la dernière mission FSAP de la Banque Mondiale et du FMI 14 Encadré 2.1 : Le Débat autour du Code Minier – Enjeux et orientations 16 Encadré 2.2 : Gouvernance du secteur des ressources naturelles - Mise en place de la matrice de gouvernance 18 Encadré 3.1 : La Propriété de la terre, Enjeux de tous les conflits 25 Encadré 5.1 : L’Enquête 1-2-3 – Principes et Méthodologie iii Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 Liste des Abréviations ADF-NALU Allied Democratic Forces - National Army for the Liberation of Uganda AFEDE Action des Femmes pour le Développement ASS Afrique Subsaharienne BCC Banque Centrale du Congo BM Banque Mondiale BTR Billets de Trésorerie DDR  Désarmement, Démobilisation et Réinsertion FARDC Forces Armées de la République Démocratique du Congo FC Franc Congolais FINDEX Global Financial Inclusion Database FMI Fonds Monétaire International FRPI Front de Résistance Patriotique d’Ituri FSAP Financial Sector Assessment Program ICA Investment Climate Assessment IDE Investissements Directs Etrangers IDH Indice de Développement Humain INS Institut National de la Statistique ITIE Initiative de Transparence dans les Industries Extractives IISS International Institute for Strategic Studies OCHA Office of the Coordination of Humanitarian Affairs OHADA Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires OMD Objectifs du Millénaire pour le Développement PDI Personnes Déplacées Internes PEFA Public Expenditures and Financial Accountability PIB Produit Intérieur Brut PME Petites et Moyennes Entreprises PPTE Pays Pauvres Très Endettés RDC République Démocratique du Congo RNB Revenu National Brut TVA Taxe sur la Valeur Ajoutée WDI World Development Indicators WDR World Development Report iv Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale Préface Le Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière de la Banque Mondiale est une revue des principaux développements économiques en RDC. Pour cette édition, la revue s’étend sur l’année 2013 et la première moitié de 2014. La prochaine édition prévue pour fin 2015 va couvrir l’année 2014 et la première moitié de l’année 2015. Au-delà de la revue des développements économiques, le Rapport présente les principaux résultats des travaux analytiques de la Banque Mondiale en RDC et replace l’ensemble dans un contexte d’évolution de l’économie sur le long terme. Cette édition couvre une variété de sujets, allant des développements des indicateurs macroécono- miques, jusqu’à l’évolution des indicateurs sociaux et de pauvreté. Le Rapport s’adresse à une large audience qui comprend les décideurs, les milieux d’affaires, les différents partenaires locaux et internationaux du développement, les acteurs de la société civile, les milieux académiques, et les praticiens de l’analyse économique et financière. Le Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière est préparé par l’équipe du Département de la Gestion Macroéconomique et Budgétaire de la Banque Mondiale - GMFDR. Le Rapport a été rédigé par une équipe dirigée par Emmanuel Pinto Moreira (Economiste en Chef et Représentant résident a.i), et comprenant Chadi Bou Habib (Economiste Principal), Moise Tshimenga Tshibangu (Economiste Résident), et Franck Adoho (Economiste, Spécialiste de Pauvreté). L’équipe a bébéficié des conseils d’Albert Zeufack (Directeur Sectoriel) et d’Eustache Ouayoro (Directeur des Opérations). Louise Mekonda Engulu (Chargée de Communication), Lucie Lufiauluisu Bobola et Jennifer Ngenyi (Assistantes) ont pris en charge la coordination logistique, l’impression du document et la coordination avec les médias. Les analyses, interprétations, et conclusions exprimées dans le Rapport reflètent le travail de l’équipe en charge de sa rédaction et ne représentent pas nécessairement le point de vue des membres du Conseil d’Administration de la Banque Mondiale ou bien des Gouvernements qu’ils représentent. L’information sur la Banque Mondiale, ses activités en RDC, et les copies électroniques de la présente publication, sont disponibles sur le lien suivant : http://www.banquemondiale.org/fr/country/drc. Pour s’inscrire sur la liste de distribution électronique et recevoir le Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière, veuillez contacter Clara Kisenda Lutambwe (clutambwe@worldbank.org) ou Jennifer Ngenyi (jngenyiwabidia@worldbank.org). Pour les questions et commentaires sur le contenu de la publication, veuillez contactez Emmanuel Pinto Moreira (epintomoreira@worldbank.org). Les requêtes de la part des médias peuvent être adressées à Louise Mekonda Engulu (lengulu@worldbank.org). v Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 Résumé exécutif i. La RDC continue à afficher de forts taux de sociales. En effet, le taux d’exécution du budget croissance grâce notamment au dynamisme n’était que de 56% en 2013 et celui des secteurs retrouvé des activités minières. La croissance sociaux et d’infrastructures était de 36%. Ce a atteint 7,4% en moyenne en 2010-2013 avec taux reste modeste et dénote l’insuffisance de un pic à 8,5% en 2013. La croissance est tirée l’espace budgétaire pour faire face aux défis par le secteur minier qui se serait accru de 10,5% de développement. En somme, un niveau de en moyenne en 2010-2013. Cette dynamique dépenses sur ressources domestiques de 12,5% du secteur minier reflète une augmentation du PIB est bas et ne peut plus être comprimé de la production, avec par exemple une hausse davantage et un niveau de recettes de 13,0% du de la production de cuivre de 52%. Les secteurs PIB est insuffisant. des services et agricole ont aussi enregistré de bonnes performances. L’activité dans ce dernier iv. Une meilleure mobilisation des recettes, secteur permet à la fois d’employer une main renforcée par les programmes des bailleurs, d’œuvre nombreuse et de mettre à la disposition pourrait assurer la soutenabilité macroécono- de la population des produits alimentaires en plus mique sans compromettre les objectifs de grande quantité et à des prix abordables. D’ailleurs, développement. La RDC a tout le potentiel les projets des pôles de croissance initiés par le pour sortir d’un équilibre sous-optimal de Gouvernement et la Banque Mondiale visent à la faible mobilisation des recettes domestiques mise en valeur du potentiel agricole de la RDC et compensée par une dépendance vis-à-vis de à créer des chaînes de valeurs et d’emplois dans l’aide internationale. La solution serait de bâtir sur l’agriculture et les industries agroalimentaires. cette aide pour mettre en place les réformes qui pousseraient le pays vers un nouvel équilibre. Cet ii. Cependant, la croissance dans le secteur équilibre serait caractérisé par une plus grande minier et des ressources naturelles ne se mobilisation des potentialités permettant à la traduit pas par une forte mobilisation des fois : (i) d’assurer un développement économique recettes pour le Gouvernement. En effet, la RDC et social soutenu ; (ii) des investissements se retrouve dans la situation paradoxale où, alors publics croissants dans les infrastructures et que la production minière s’accroit rapidement, les secteurs sociaux ; et (iii) le maintien de la les recettes minières ne semblent pas suivre et stabilité macroéconomique. L’objectif n’est pas les recettes totales de l’Etat se tassent. La RDC a hors d’atteinte car, si la RDC avait maintenu le collecté 13,0% du PIB en recettes domestiques niveau de 14,9% du PIB de recettes en 2013 et en 2013, contre 14,9% en 2012 et 12,5% en avait dépensé autant, elle aurait maintenu un 2011. Les industries extractives ont permis de déficit sur recettes domestiques nul et aurait pu générer 6% du PIB en recettes pour l’Etat en 2011, en même temps accroitre le taux d’exécution soit près de la moitié des recettes totales (ITIE, des dépenses sociales et d’infrastructures jusqu’à 2013). Cependant, ce montant ne représentait 53%. que 14% de la valeur des exportations minières et pétrolières, ce qui est relativement bas v. Une meilleure mobilisation des recettes est compte tenu de la nature rentière des bénéfices nécessaire pour améliorer la capacité de l’Etat dans ces secteurs. Aussi, la TVA a affiché à affronter la fragilité sociale et nationale des résultats mitigés en 2013, avec une collecte de du pays. La fragilité du pays se dessine sur 3,5% du PIB contre 4,5% en 2012. fond de pauvreté et de disparité d’accès aux services sociaux et aux infrastructures. Tous les iii. L’insuffisance des recettes impose un choix indicateurs du développement humain sont à difficile entre réduire les dépenses d’infras- des niveaux très modestes et l’IDH pour 2014 tructure et sociales pour maintenir la stabilité place la RDC au 186ème rang sur 187 pays. Les macroéconomique ou creuser les déficits indicateurs de morbidité illustrent le mieux au prix de la stabilité. Dégager un excédent la situation de désarroi dans laquelle vit la budgétaire de 0,5% du PIB au prix d’un faible population. L’espérance de vie à la naissance ne taux d’exécution du Budget est une source de dépassait pas 50 années en 2013 et le taux de risques importants pour le développement mortalité des femmes à l’accouchement restait de long terme dans un pays qui a des besoins élevé à 540 pour 100.000 naissances en 2010. La vi énormes en infrastructures et en dépenses mortalité infantile se situait à 100 pour 1.000 en Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 2012 (IDH, 2014). Les raisons de cette morbidité recettes par plus de responsabilité sociale. élevée comprennent entre autres la faiblesse des La régulation est aussi indispensable pour infrastructures, le paludisme, l’insuffisance des maintenir l’impact positif de la prospection précautions prises face aux maladies infectieuses artisanale en termes d’emploi et de revenus transmissibles, la malnutrition et les décès liés à tout en limitant ses externalités négatives et sa la grossesse. captation par les milices armées. vi. L’activité minière a un effet ambivalent car vii. L’utilisation des services sociaux dépend de d’une part elle favorise la dépense et l’offre de leur disponibilité, de leurs coûts, et aussi de services sociaux, et d’autre part, elle génère la disponibilité d’autres infrastructures. Les des externalités négatives importantes pour services sociaux coûtent chers à la population les populations. L’activité minière revêt une alors que les résultats restent au mieux modestes. importance particulière en RDC, avec près de En effet, 52% des personnes ayant besoin de 14% des communes au niveau national soins médicaux déclarent que ces soins sont déclarant avoir une activité minière. Près de trop chers. Les frais de scolarité représentent 20% des communes urbaines et semi-urbaines plus de 10% des dépenses non-alimentaires ayant une activité minière déclarent que les des ménages, et cela malgré la gratuité de compagnies minières ont mis en place des l’enseignement primaire. En plus de l’accessibilité services sociaux (école, santé, électricité, eau, financière, l’accessibilité physique constitue une etc.). Dans les zones rurales, où l’activité est autre barrière pour les usagers. Ainsi, plus de plutôt artisanale, la proportion des communes 1% des malades renoncent aux soins en raison bénéficiant de services sociaux n’est que de 4% de la distance et les élèves mettent une heure en moyenne. En parallèle, près de deux tiers pour atteindre leurs écoles. Ces résultats sont un des communes urbaines, 40% des communes exemple sur ce que gagnerait la RDC en termes semi-urbaines et 20% des communes rurales de bien-être en améliorant l’infrastructure rou- déclarent que l’activité minière est source tière et les moyens de transports. Un autre de problèmes (maladies, travail des enfants, exemple sur la synergie entre infrastructures érosion, pollution, conflits, etc.). Ces résultats et secteurs sociaux est illustré par le fait que les soulignent la nécessité pour l’Etat de réguler le filles dans les classes d’âge du secondaire passent secteur de façon à accroitre son impact social 6,8 heures par semaine à chercher l’eau, le et de réduire ses externalités négatives. Cette bois et à faire le marché. Ainsi, une meilleure régulation est importante pour la prospection disponibilité de l’eau courante permettrait aux industrielle et complète la mobilisation des filles de consacrer plus de temps aux études. vii Evolutions économiqueS récentes premiere PARTIE et contexte SOCIo-politique en rdc Vers une grande mobilisation du potentiel minier pour donner à l’état les moyens de sa souveraineté MESSAGES PRINCIPAUX • La croissance économique reste soutenue, tirée par la dynamique du secteur minier. • Une meilleure mobilisation des potentialités du secteur des ressources naturelles permettrait de soutenir le niveau des réserves étrangères et de maintenir la soutenabilité macro-budgétaire. • Cette mobilisation est aussi indispensable pour donner à l’Etat les moyens matériels d’assurer sa souveraineté et le développement du pays ainsi que sa cohésion politique et sociale. 1 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 1. La gestion macroéconomique prudente et se reflète aucunement au niveau de la mobilisation des les réformes structurelles continuent à avoir un recettes issues du secteur minier, et des secteurs des impact positif sur la performance économique ressources naturelles en général, qui restent en deçà de la République Démocratique du Congo. Depuis des potentialités. Au-delà de l’impact sur la stabilisation 2011, le Gouvernement de la RDC poursuit une macroéconomique, une meilleure mobilisation des politique de stabilisation avec contrôle des déficits recettes du secteur des ressources naturelles est publics et réduction de l’inflation. Cette politique a indispensable dans un pays fragile faisant face à de permis de ramener le déficit budgétaire à des niveaux nombreux problèmes de développement. historiquement bas et même de dégager un excédent budgétaire intérieur de 0,2% du PIB en moyenne entre 3. Les développements politiques et sociaux 2010 et 2013. Aussi, l’inflation a décéléré tombant à illustrent la fragilité de la RDC qui, pour être 0,8% en 2013. Cependant, bien que bénéfique, cette surmontée, nécessite beaucoup d’efforts de stabilisation reste vulnérable en raison d’un faible développement soutenus sur le long terme. Le niveau de revenus intérieurs ne dépassant pas 13,0% sous-développement et le manque d’opportunités du PIB en 2013 et des réserves en devises de moins de sont sources de frustrations et de tensions sociales deux mois d’importations de biens et services. et politiques se traduisant en conflits, qui à leur tour nourrissent la fragilité. Briser ce cercle vicieux exige 2. La croissance est tirée par le secteur minier, du Gouvernement un engagement ferme en faveur mais ne se traduit pas par une mobilisation de du développement équitable pour tous les congolais, revenu adéquate pour subvenir aux besoins de mais aussi de se doter des moyens pour soutenir un développement de la RDC. La croissance économique tel engagement sur le long terme. Cette soutenabilité de la RDC a atteint 7,4% en moyenne par an au cours ne peut être obtenue avec l’aide internationale seule- des quatre dernières années et le secteur des industries ment mais requiert une mobilisation plus efficace de extractives serait responsable d’au moins 20% de cette l’avantage comparatif du pays, à savoir ses richesses croissance. Rien qu’en 2013, la production de cuivre a naturelles. fait un bond de 52%. Cependant, cette performance ne 2 Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 1. Des performances économiques sur fond de vulnérabilités persistantes 1.1. Une forte croissance économique tirée par l’essor du secteur minier 4. La forte croissance économique observée en grâce à l’entrée en production des gros investissements 2010-2012 a continué en 2013 avec un taux de lancés au cours de la décennie précédente. Les données croissance de 8,5% (voir Graphique 1.1). Entre 2010 préliminaires montrent un accroissement de la valeur et 2013, l’économie de la RDC s’est accrue de 7,4% en ajoutée du secteur minier de 28% en 2013, alors que moyenne par an. L’année 2013 a vu une croissance l’indice général de la production minière a augmenté de remarquable du PIB de 8,5%, ce qui place la RDC parmi 17%. La production de cuivre à elle seule a augmenté de les pays performants de l’Afrique Sub-Saharienne. Cette 52%, ce qui permet de largement compenser une baisse bonne performance de l’économie est le fruit d’une des cours de 7,4% observée en 2013. La production reprise des investissements publics et privés, nationaux d’or se serait accrue de 56% alors que les prix auraient et internationaux, dans un environnement de stabilité baissé de 15,5%. La production de zinc se serait accrue macroéconomique retrouvée et de relative stabilité de 18%, de même que pour la production de coltan1, sécuritaire et politique. alors que les prix dans les deux cas auraient baissé de 2,0% et 55,0% respectivement. Le secteur minier est le principal employeur pour 2,1% des travailleurs 5. Un secteur minier en plein essor continue d’être congolais et 3,1% de ceux qui déclarent avoir un emploi le principal moteur de l’économie, et représente secondaire y travaillent. Cependant, dans les communes plus de 20% de la croissance du PIB réel (voir déclarant avoir une activité minière (voir sous-section Graphique 1.2). La valeur ajoutée du secteur minier 5.2 ci-dessous), ces proportions atteignent 15% et 22% s’est accrue de 10,5% en moyenne entre 2010 et 2013 respectivement. Graphique 1.1. Croissance du PIB réel en RDC et en Afrique subsaharienne (en pourcentage) Source : Calculs effectués par les auteurs sur la base des données officielles, des données du FMI et de la base de données de la Banque Mondiale. 1 Le Coltan ou Colombite-Tantalite, est un minerai dont on extrait le tantale. Le tantale est un métal stratégique utilisé dans la fabrication de condensateurs pour les équipements électroniques et entre également dans la fabrication des réacteurs dans l’aéronautique. La RDC dispose des gisements de Coltan parmi les plus riches du monde et qui sont par conséquence facile à exploiter, notamment par les méthodes artisanales. 3 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 Graphique 1.2. Composition du PIB et contribution des secteurs principaux à la croissance (en pourcentage du total) en 2010-13 Source : Calculs effectués par les auteurs sur la base des données officielles, des données du FMI et de la base de données de la Banque Mondiale. 6. La production agricole continue à s’accroitre en collaboration avec la Banque Mondiale vise à et permet à la fois d’améliorer l’alimentation revitaliser le secteur agricole en RDC et à accroitre la de la population et de générer des revenus productivité et l’emploi tout au long de la chaîne de pour les agriculteurs. Bien que la croissance du valeur des filières de production essentielles. En effet, secteur agricole paraisse se limiter à 3,0%, plusieurs le projet se focalise sur la production et l’industrie indicateurs suggèrent une dynamique plus accentuée agroalimentaire de trois produits principaux, à savoir dans ce secteur. En effet, les données disponibles sur le riz, le manioc et l’huile de palme. Le projet qui cible la production agricole montrent une augmentation les provinces du Bas-Congo et de Kinshasa prévoit de des productions de café, huile de palme, et farine bénéficier directement à 50.000 agriculteurs, dont 40% de froment de respectivement 4,8%, 29% et 24%. de femmes, à une trentaine de PME, et à une dizaine L’agriculture continue à employer le plus grand de grandes entreprises. Le bénéficiaire indirect serait nombre de travailleurs, et l’agriculture de subsistance essentiellement la population de Kinshasa qui aurait et d’autoconsommation continue à prévaloir. En alors accès à des denrées alimentaires moins chères effet, aussi bien l’usage des méthodes traditionnelles grâce à de meilleures conditions de transport, de de production que l’enclavement persistant de traitement, et de logistiques. Un autre projet de pôles larges zones du pays empêchent la circulation et la de croissance pour l’Est du pays (BM, 2014) est en commercialisation interne des produits de l’agriculture. préparation et devra aussi contribuer à l’objectif de la A cela s’ajoutent des problèmes endémiques de droits stabilisation de cette partie du pays, tout en s’inspirant de propriété foncière qui entravent le développement largement du projet de l’Ouest. agricole (voir Encadré 3.1). 8. Les secteurs manufacturiers et tertiaires 7. Une approche basée sur les pôles de ont aussi montré un certain dynamisme en croissance2 devrait permettre de générer plus 2013. La croissance du secteur manufacturier d’emplois et stimuler la création de richesse dans aurait atteint 11,4% en moyenne entre 2010 et les provinces avec le développement des industries 2013, avec une performance de 21,4% en 2013. Le agroalimentaires. Le projet des pôles de croissance secteur manufacturier aurait contribué à 29% de la pour l’Ouest (BM, 2013) initié par le Gouvernement croissance entre 2010 et 2013. La composante la plus dynamique des industries manufacturières s’avère être l’industrie agroalimentaire. Le secteur tertiaire, qui 2 Il s’agit en effet de deux projets : le Projet des Pôles de Croissance de l’Ouest (http://www.worldbank.org/projects/P124720/dem-rep- comprend le commerce, les services, les transports, les congo-western-growth-poles?lang=en&tab=overview), lancé en télécommunications et les autres services s’est à son 4 mai 2013, et le Projet des Pôles de Croissance Agricoles de l’Est, en cours de montage depuis Mars 2014. tour accru de 7,1% en moyenne entre 2010 et 2013, Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale alors que sa croissance en 2013 s’est limitée à 4,4%. abouti à une révision à la hausse du PIB de 58% qui Le secteur tertiaire aurait contribué à près de 46% de a affecté tous les secteurs. Cependant, la réévaluation la croissance sur l’ensemble de la période 2010-2013. fut substantielle dans le cas du secteur manufacturier. La composante la plus dynamique du secteur tertiaire Ainsi, d’après les chiffres préliminaires, la part de ce aurait été le commerce, reflétant ainsi la restauration de secteur est passée à 20% dans les nouveaux chiffres l’économie de l’échange et de marché, renforcée par la contre 4% du total dans les anciens, et la croissance stabilisation des prix et des cours de change à partir de moyenne du secteur entre 2010 et 2012 a été révisée 2010-2011. à 8,2% contre 2,9%. En somme, la révision a montré que plus de la moitié de l’activité économique en RDC 9. La plus grande partie de l’activité en RDC est informelle, et le taux atteint un maximum de 96,3% continue à être générée par le secteur informel, tel dans le secteur agricole et forestier, suivi de 51,4% dans que montre la révision des comptes de la nation par le secteur manufacturier, puis des industries extractives l’INS. La version préliminaire de la révision des comptes (50,5%) et du secteur tertiaire (42,5%). Un minimum nationaux complétée par l’INS en 2013 avait pour de 31,6% d’informalité est atteint pour le secteur de objectif à la fois d’utiliser 2005 comme nouvelle année la construction, alors que la distribution de l’eau et de de base à la place de 1987 et de mieux capter le secteur l’électricité apparait comme étant formelle à 100%. informel (voir Encadré 1.1). Le deuxième objectif a Encadré 1.1 : Révision des comptes nationaux par l’Institut National de la Statistique Une nouvelle méthode d’estimation des comptes nationaux a été introduite par l’Institut National de la Statistique (INS), utilisant le Système de la Comptabilité Nationale des Nations Unies de 1993 (SCN 93) en remplacement de celui de 1968 (INS, 2013). Ce nouveau système constitue une amélioration par rapport au système précédent (SCN 68) en termes de valorisation des opérations sur les biens et services, et de prise en compte des activités informelles et de l’autoconsommation des ménages. Ce système introduit des changements dans les modes de classification et permet une meilleure qualité des statistiques. La comparaison entre les comptes nationaux élaborés selon l’ancien système SCN 68 et selon le SCN 93 laisse apparaitre des différences significatives en ce qui concerne le niveau et la répartition du Produit Intérieur Brut (PIB) par branches d’activité économique. Pour l’année de base 2005, le PIB, calculé selon SCN 93, a connu une réévaluation de près de 60% (voir graphique ci-contre). Cette différence, d’après l’INS, est imputable à une meilleure qualité des statistiques et au changement de certains concepts ayant un impact sur le calcul aussi bien de la production que de la formation brute de capital fixe. La part du secteur informel dans le PIB est estimée à 55%. Par ailleurs, la structure du nouveau PIB semble se caractériser maintenant par une prédominance du secteur tertiaire (45% du total), du fait de l’importance du secteur informel dans les activités de service et de commerce. Les parts des secteurs des Industries Manufacturières et des Transports et Télécommunications dans le PIB sont devenues plus importantes avec le SCN 93, traduisant ainsi une meilleure captation du développement que ces secteurs ont connu ces dernières années, alors que la part de l’agriculture est en recul (voir graphique ci-dessus). 5 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 1.2. Une politique monétaire qui développement des dépôts bancaires est entravé par les craintes sur la solvabilité des banques et, surtout, par assure la stabilité des prix et un le risque de voir les dépôts saisis par les autorités sous la secteur bancaire qui se développe pratique de l’« Avis à Tiers Détenteurs » et à la discrétion progressivement des inspecteurs du fisc (FSAP, 2014). 10. L’inflation a continué à ralentir en 2013 et 13. Le secteur bancaire et le marché monétaire et son taux a touché des planchers historiques. L’indice financier sont encore loin de mettre à la disposition des prix à la consommation n’a augmenté que de 0,8% de l’économie les services et ressources nécessaires en moyenne (1,0% en glissement annuel) au cours à son développement. Le secteur bancaire reste loin de l’année 2013. Ce record historique s’inscrit dans la de jouer son rôle dans la mobilisation de l’épargne et continuité de la décélération de l’inflation observée son allocation vers l’économie. Les crédits et dépôts depuis 2010 et contraste avec les taux observés sont concentrés entre les mains d’une minorité. En effet, précédemment, notamment de 46% d’inflation en les entreprises et les ménages font face à de sérieuses 2009. L’indice des prix des produits alimentaires est contraintes pour accéder au crédit. L’enquête Findex resté en ligne avec l’indice général, soulignant que la de 2011 montre que seulement 1,5% des adultes réduction des taux d’inflation a bénéficié à l’ensemble ont pu accéder au crédit bancaire au cours de l’année de la société, notamment les plus pauvres dont précédente, ce qui est bien en dessous de la moyenne l’essentiel de la consommation se concentre sur les régionale de 11,4%. L’enquête d’entreprise (ICA) de produits alimentaires. 2010 montre que 73% des entreprises ont répondu que la difficulté d’accès au crédit est une contrainte 11. L’application progressive de politiques moné- majeure à leur développement. Cette proportion est taires crédibles et une gestion budgétaire prudente au-delà de la moyenne de 45% de réponse similaire à ont permis à la RDC de réduire le taux d’inflation. la même question observée pour l’ASS. D’une manière La décélération de l’inflation a coïncidé avec un générale, le taux de bancarisation de la population ralentissement de la croissance de la masse monétaire. reste faible, bien que la situation ait dû changer avec Cette dernière s’est accrue de 18% en 2013, contre la bancarisation des fonctionnaires qui, à fin Décembre 21% en 2012, 23% en 2011 et 31% en 2010. Aussi, la 2013 touchaient déjà 634.973 agents et fonctionnaires réduction du déficit budgétaire et, par conséquence, de l’Etat sur 878.2013. la restriction du financement monétaire des dépenses de l’Etat ont contribué à contenir l’inflation. En effet, le 14. Le cadre légal s’améliore mais reste inadé- stock des créances nettes sur l’Etat de la BCC a reculé de quat, et la faible mise en application des régle- 1,2% du PIB en 2009 à -2,4% en 2013. Cette performance mentations existantes continuent à handicaper souligne une évolution par l’Etat d’une situation le développement du secteur financier en RDC. La d’emprunteur net auprès de la BCC à une situation de classification de la RDC sur l’indicateur « Obtention des créancier net. Dans les faits, ces dépôts nets de l’Etat Prêts » s’est largement améliorée d’après les indicateurs auprès de la BCC correspondent à une stérilisation à « Doing Business 2014 » de la Banque Mondiale. Cette hauteur de 20% de la masse monétaire. En prenant en amélioration est due à l’évolution de la notation sur la compte les dépôts des banques commerciales auprès force des droits légaux4 de 3 à 6 sur une échelle de 12 en de la BCC et les billets de trésorerie (BTR), la stérilisation 2013. Le progrès sur le renforcement des droits légaux en 2013 augmente jusqu’à 30% de la masse monétaire, est dû à plusieurs facteurs, notamment : (i) l’adhésion bien au-dessus des 8,4% observés en 2009. à l’OHADA qui renforce les lois sur les collatéraux et les saisies ; (ii) la transformation du registre des prêts de 12. Le secteur bancaire a continué à se développer la BCC en un bureau de crédit/agence d’information avec accroissement à la fois des crédits et des sur les débiteurs potentiels ; et (iii) des améliorations dépôts. Le crédit au secteur privé a augmenté de 26,5% supplémentaires dans le système d’information de en 2013, un taux sensiblement similaire à celui de 2012 crédits avec la mise en place du premier registre des qui se situait à 25,2%. Aussi, les dépôts des banques ont actifs collatéraux mobiles. Cependant, le bureau de augmenté de 18,5%, contre 30,2% en 2012. Ces dépôts crédit et le registre des collatéraux mobiles ne sont demeurent essentiellement en devises étrangères, pas encore opérationnels. Aussi, le manque d’une avec un taux de dollarisation de 85,8% en 2013, en régulation efficace, notamment à la BCC, constitue léger retrait par rapport à 2012 ou il atteignait 86,7%. Les niveaux des crédits au secteur privé et des dépôts restent très faibles, ne représentant que 5,1% et 9,8% 3 Source : Ministère du Budget, http://www.budget.gouv.cd/etat-des- du PIB respectivement. Le coût du crédit est très élevé, lieux-de-la-bancarisation/ et les intérêts effectifs chargés en 2012 sont estimés à 4 La force des droits légaux mesure la facilité par laquelle les actifs mobilier et immobilier peuvent être utilisés pour mobiliser les fonds, 15% pour les découverts, à 11% pour les crédits à court 6 terme, et à 20% pour les crédits à moyen terme. Le permettant ainsi à un plus grand nombre d’entreprises et d’individus d’accéder au crédit. Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale une source de faiblesse majeure. D’autres éléments non-respect des principes de la supervision bancaire de fragilité résident dans le risque élevé de liquidité, efficace, et l’application limitée des lois et règlements la sous-estimation des crédits non-performants, le déjà en place (voir Encadré 1.2). Encadré 1.2 : Résumé des principaux résultats de la dernière mission FSAP de la Banque Mondiale et du FMI Le FMI et la BM ont conduit une mission FSAP au cours de la deuxième moitié de 2013. Cette mission visait à examiner les forces et les faiblesses du secteur financier de la RDC. Parmi les points forts du secteur, la mission a noté un ratio d’adéquation du capital élevé de 24%, une nouvelle loi bancaire conforme aux meilleures pratiques internationales, une amélioration progressive de la capacité de la BCC à évaluer le risque, et des efforts récents pour accroitre la stabilité financière. Cependant, les analyses du FSAP ont révélé les faiblesses suivantes : (i) les risques de liquidité continuent à être significatifs et sont exacerbés par le cadre règlementaire en place ; (ii) les créances douteuses sont sous- estimées en raison à la fois d’une insuffisance et d’une faible mise en application des réglementations ; et (iii) le crédit est extrêmement concentré ce qui crée un risque significatif si les principaux débiteurs sont confrontés à des difficultés substantielles (les cinq plus gros emprunteurs de chaque banque concentrent à eux seuls un tiers du total du crédit octroyé par le système). Aussi, les statistiques calculées en moyenne pour l’ensemble du secteur masquent les difficultés spécifiques qu’affrontent certaines banques, notamment parmi celles qui sont d’une taille plus petite. Aussi, l’aptitude à gérer les chocs reste limitée : (i) les banques les plus importantes en taille ne dispose pas du soutien externe (forte maison mère étrangère par exemple) qui leur permettrait de tenir des chocs importants ; (ii) la profitabilité reste faible, ce qui limite la capacité des banques à générer des ressources nécessaires pour renforcer leur capital ; et (iii) absence d’un cadre articulé pour la gestion et la résolution des crises, avec notamment l’insuffisance des ressources publiques pour secourir un système fortement dollarisé. Enfin, la supervision bancaire reste faible et la RDC n’est en conformité que sur un seul des 29 principes fondamentaux de la supervision bancaire. La supervision ne fait pas suffisamment d’attention à la compréhension des risques auxquels les institutions font face. La révision de la loi bancaire va permettre de régler une partie des problèmes de règlementation et de supervision. 1.3. Une balance extérieure qui s’est améliorée mais qui demeure vulnérable aux chocs externes et internes 15. La RDC continue à dégager un déficit du En effet, si les importations d’équipements avaient commerce des biens et services extérieur qui gardé leur niveau de 2012, le déficit commercial se va en se réduisant avec la montée en puissance serait transformé en un excédent de 1,8% du PIB. Les des exportations minières (voir Graphique 1.3). La exportations se sont accrues de 16,6% du PIB en 2013, balance du commerce de biens de la RDC a dégagé en notamment grâce à l’accroissement de la production 2013 un léger déficit de 0,15%, en recul par rapport au et donc des volumes de cuivre et d’or exportés de 52% déficit de 0,24% observé en 2012. Le déficit en 2013 et 32% respectivement. La balance des services reste est la conséquence d’une dynamique retrouvée des fortement déficitaire à 5,9% du PIB en 2013, un niveau importations qui ont augmenté de 16,3% en 2013. Cette sensiblement similaire à celui de 2012 (5,7%). En augmentation est en partie tirée par l’accroissement de somme, le déficit de la balance des biens et services se l’importation d’équipements qui a augmenté de 15,6%. situaient à 6,1% du PIB en 2013 (contre 5,9% en 2012). 7 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 Graphique 1.3 : Commerce extérieur (Axe de gauche) Graphique 1.4 : Investissements directs étrangers et balance du compte courant (Axe de droite) en RDC de 2009 à 2013 de 2009 à 2013 - en pourcentage du PIB (en million de dollars) 60 10 50 8 40 6 30 4 20 10 2 0 0 -10 -2 -20 -4 -30 -6 -40 -50 -8 -60 -10 2009 2010 2011 2012 2013 Exportations de biens et services Importations de biens et services Balance du compte courant, transferts inclus Source : Calcul des auteurs sur la base des données du FMI. 16. La combinaison du déficit commercial et PIB en dons en capital et prêts destinés à financer du déficit de la balance des revenus des facteurs des projets de développement dans le pays. Les IDE conduit à une balance du compte courant fortement vont continuer à s’accroitre dans les années à venir, négative (voir Graphique 1.3). En effet, la balance stimulés par l’attrait croissant du secteur des ressources des revenus des facteurs est fortement négative et naturelles en RDC. a enregistré un déficit de 9,3% du PIB. Ce déficit va continuer à s’accroitre car il est lié au rapatriement 18. Grâce aux IDE, les réserves de devises de fonds par les investisseurs étrangers. Or les étrangères se maintiennent et tendent à s’accroitre. investissements réalisés précédemment, notamment Les IDE et les dons en capital ainsi que les prêts ont dans le secteur minier, commencent à produire des permis à la RDC de couvrir le déficit du compte courant revenus substantiels pour les investisseurs, amplifiés et d’augmenter les avoirs extérieurs du pays de 1% du par les règles d’amortissements accélérés prévues par PIB. Cet accroissement des avoirs extérieurs nets s’est la loi. En parallèle, les transferts courants nets, dont la traduit par un accroissement des réserves en devises de quasi-totalité (98%) relève de l’aide internationale, la BCC de 50 millions de dollars US, ce qui a permis de représentaient 5,2% du PIB en 2013 (contre 3,7% en les stabiliser à 7,7 semaines d’importations non liées à 2012). En somme, le déficit du compte courant de la l’aide internationale. Ces réserves assurent une bonne balance des paiements aurait atteint 10,1% du PIB en couverture de la masse monétaire en devises nationales 2013, dont plus de 90% seraient dus au déficit de la (144%), et des dépôts en devises (65%), permettant balance des revenus des facteurs. au secteur bancaire de faire face à la fois aux risques de conversion vers les devises et aux sorties de dépôts 17. Les investissements directs étrangers (IDE) et en devises étrangères. Les avoirs extérieurs nets des le financement public international des projets de banques commerciales ont à leur tour augmenté de développements permettent à la RDC d’éponger 253 millions de dollars US. La stabilisation des réserves son déficit de la balance courante (voir Graphique de la BCC et le renforcement des avoir extérieurs des 1.4). La dynamique des importations d’équipement banques, couplés au contrôle de l’inflation ont permis mentionnée plus haut dénote l’importance à la fois à la RDC de maintenir un taux de change stable, ne des investissements domestiques et étrangers. Les IDE variant que de 915 FC/dollar US à 926 FC/dollar US entre se sont maintenus autour d’une moyenne de 7,5% du fin 2012 et fin 2013, soit une dépréciation faible de la PIB entre 2010 et 2013. En 2013, ces IDE ont permis de monnaie nationale de 1,1%. couvrir 75% du déficit de la balance du compte courant. 8 En plus des IDE, la RDC a reçu l’équivalent de 4,4% du Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale Graphique 1.5. Evolution du taux de couverture des importations par les réserves en devises étrangères (en semaines) Source : Calculs effectués par les auteurs sur la base des données officielles et du FMI. 1.4. Une politique budgétaire prudente qui favorise la stabilisation, mais rendue vulnérable en raison d’une faible mobilisation des recettes 19. La rupture avec la dominance budgétaire et ont été contenues à 12,0% du PIB en 2013 contre la consolidation par le contrôle des dépenses se 11,6% en 2012 et 12,6% en 2011. Dans ce contexte, sont poursuivies en 2013. Le Gouvernement a réussi le Gouvernement a pu maintenir un solde bud­ gétaire à contrôler les dépenses publiques et à éviter tout intérieur positif à 0,5% du PIB en 2013 contre 1,5% financement monétaire du déficit budgétaire par la BCC. en 2012 (0,2% et 1,2% respectivement si on inclut les Ce résultat est la conséquence de la mise en place des paiements d’arriérés). Cependant, le solde budgétaire plans trimestriels de trésorerie qui ont servi de base à global est devenu déficitaire de 1,7% du PIB en 2013 des plafonds aux engagements de dépenses. Ainsi, les après un excèdent de 0,6% en 2012 (-2,0% et 0,3% si on dépenses primaires financées sur ressources internes inclut les paiements d’arriérés). Tableau 1.1 : Evolution du Solde Budgétaire entre 2008 et 2013 (en % du PIB) En % du PIB 2008 2009 2010 2011 2012 2013 Solde Budgétaire Global -1,2 -1,0 4,2 -1,2 0,6 -1,7 Solde Budgétaire Global - Paiments d'Arriérés Inclus -1,7 -1,7 3,4 -1,4 0,3 -2,0 Solde Budgétaire Domestique 0,9 -0,9 1,8 -0,9 1,5 0,5 Solde Budgétaire Domestique - Paiements d'Arriérés Inclus 0,4 -1,5 1,0 -1,1 1,2 0,2 Source : Banque Mondiale, sur la base des données officielles et du FMI. 9 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 20. Les dépenses totales du Gouvernement est due à la réduction des dépenses militaires et de ont augmenté de 13,9% du PIB en 2006 à 19,5% sécurité à la suite de la baisse des tensions à l’Est du en 2012, pour ensuite décliner à 19,1% en 2013. Pays. Toutefois, une préoccupation majeure subsiste Les dépenses publiques ont fortement augmenté quant à la crédibilité du budget de l’Etat telle qu’illustrée depuis 2006 sous l’effet des politiques de lutte contre par son faible taux d’exécution (PEFA, 2012). En effet, le la pauvreté, même si une certaine stagnation est taux d’exécution du Budget n’était que de 56% en 2013, observée à partir de 2011 à la suite du renforcement en légère amélioration par rapport au 55% observé en de la consolidation budgétaire. La part des dépenses 2012. Le taux d’exécution est encore plus faible pour les publiques domestiques en pourcentage du PIB est secteurs sociaux et d’infrastructures et était de 36% en passée de 8,1% en 2006 à 13,2% en 2011, puis à 2013, contre 34% en 2012. Bien qu’en amélioration, ce 12,1% en 2012 et 12,5% en 2013. Les dépenses taux reste modeste face aux grands besoins du pays, et exceptionnelles ont, quant à elle, décliné à près d’1% dénote l’insuffisance de l’espace budgétaire pour faire du PIB en 2013 alors qu’elles avaient atteint le pic de face aux défis de développement. 2,6% en 2011. Cette baisse des dépenses exceptionnelles Graphique 1.6. Taux d’exécution du budget dans l’infrastructure et les secteurs sociaux Source : Banque Mondiale, calculs à partir des données officielles de la RDC. 21. Les recettes intérieures de l’Etat ont reculé de de la taxe (FMI, 2013). La baisse des revenus est aussi 1,9 point de pourcentage du PIB en raison d’une due à l’absence pour 2013 de bonus de signature des mobilisation insuffisante des recettes de la TVA contrats miniers qui avait stimulé les recettes de 1,2% et de ceux des secteurs des ressources naturelles. du PIB en 2012. D’après le dernier rapport publié sur Les recettes domestiques ont atteint 13,0% du PIB en l’Initiative pour la transparence dans les industries 2013 contre 14,9% en 2012. Cette baisse est en partie extractives (ITIE)5, les recettes du secteur extractif due à la faible mobilisation de la taxe sur la valeur (mines et pétroles) auraient atteint 6% du PIB, ou 48% ajoutée (TVA) qui reste en dessous de son potentiel des recettes totales en 2011. Il s’agit ici de tout ce qui attendu (FMI, 2013). En effet, depuis son introduction est collecté de ces secteurs, y compris les impôts sur les en 2012 pour remplacer l’impôt sur le chiffre d’affaires, revenus. Un examen plus détaillé de la composition de la TVA a constitué une part importante dans la structure ces recettes montre que le secteur pétrolier contribue à des recettes du pays. Pour 2013, elle a représenté près de 30% du total, alors que la production pétrolière 27% des recettes domestiques contre 30% en 2012, ce reste modeste et stagnante. qui correspond à 3,5% et 4,5% du PIB respectivement. Cette contreperformance de la TVA serait due essen- tiellement : (i) à la persistance de procédures longues et fastidieuses ; et (ii) à une mauvaise maitrise du 10 10 portefeuille des assujettis qui affecte les recouvrements 5 Voir : http://www.itierdc.com/lire%20pdf.php?valeur=table_ rapport Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 22. L’affaiblissement des recettes et la prédomi- devises, les réserves ne couvrent cependant que nance des dépenses courantes dénotent la fragilité 7,7 semaines d’importations. Une des entraves à de la consolidation budgétaire. La facture de l’ajuste- l’accumulation de ces réserves en devises est les ment budgétaire a été en grande partie supportée transferts de revenus au titre de rémunération des IDE par une progression lente des investissements publics qui, à hauteur de 9,3% du PIB, sont particulièrement et des dépenses sociales qui restent modestes par élevés. rapport aux grands besoins du pays en capital physique et en développement humain. En effet, un examen 25. Face à ces défis, le recours au programme de de la composition des dépenses totales montre que consolidation du FMI ou à l’appui budgétaire des les rémunérations et les achats de biens et services bailleurs, y compris la Banque Mondiale, pourrait représentent respectivement 42% et 27% des dépenses s’avérer nécessaire. Si les tendances actuelles exécutées en 2013. Le premier poste fait partie de la d’insuffisance à la fois des recettes budgétaires et des catégorie des dépenses considérées très rigides à la réserves continuent, la RDC pourrait être amenée à baisse et le second est essentiel au fonctionnement des solliciter l’appui budgétaire du FMI et de la Banque institutions et structures publiques. Dans ces conditions, Mondiale. Cet appui permettra au pays à la fois de le Gouvernement est placé face à des choix difficiles : financer les dépenses sociales et d’investissements et soit il satisfait les besoins sociaux et d’infrastructures et de soutenir les réserves en devises du pays. Cependant, il fragilise la consolidation budgétaire, soit il n’en fait un tel appui ne pourra jamais être perçu comme une rien et maintient les équilibres macroéconomiques solution durable. aux prix du bien-être à long terme de larges franges de la population. Cette dichotomie pourrait disparaitre 26. Une autre option pour la RDC serait si des efforts sont réalisés pour accroitre les recettes, d’assurer une meilleure mobilisation des recettes, notamment en provenance du secteur des ressources notamment celles des secteurs miniers et des naturelles, et maintenir les équilibres budgétaires tout ressources naturelles. Une meilleure mobilisation en finançant le développement à long terme. des recettes des secteurs des ressources naturelles permettra d’améliorer les balances interne et externe, en générant plus de revenus pour l’Etat et en alimentant 1.5. Des résultats macroéconomiques en devises les réserves de la BCC. En effet, la moyenne des recettes sur PIB pour les pays ayant le même et financiers dont la soutenabilité niveau de développement que la RDC est de 15%. La sur le long terme est loin d’être RDC avait atteint ce niveau en 2012, avec des recettes assurée intérieures de 14,9% du PIB. Or si le pays avait réussi à maintenir ce niveau de recettes en 2013, soit 1,9% du 23. La détérioration lente de l’excédent budgé- PIB au-dessus du niveau actuel, il aurait pu accroitre ses taire vers un déficit souligne la fragilité à long terme dépenses entre 2012 et 2013 de 31% au lieu de 12% des finances publiques. Les limites de la consolidation tout en maintenant un déficit zéro. Si l’on suppose que par le contrôle des dépenses sont désormais appa- la dépense supplémentaire aurait été dans les secteurs rentes, aussi bien sur les plans macroéconomique sociaux et l’infrastructure, le taux d’exécution de que structurel. En effet, sur le plan macroéconomique, ces derniers aurait atteint 53% au lieu de 36%6. En un niveau de dépenses sur ressources domestiques parallèle, si la RDC visait à atteindre le niveau standard de 12,5% du PIB est bas et ne peut davantage être de réserves, estimé à au moins trois mois d’importations comprimé. Sur le plan structurel, dégager un excédent par le FMI, il lui aurait fallu avoir des réserves en devises budgétaire de 0,5% du PIB (0,2% si on inclut les en 2013 supérieure de 950 millions de dollars US$ paiements d’arriérés) doit être mis en parallèle avec (équivalents à 3,2% du PIB) à leur niveau actuel. les objectifs de développement de long terme du pays et de ses besoins en infrastructures et en dépenses 27. Les programmes avec les institutions interna- sociales. En effet, cet excèdent budgétaire se fait au prix tionales et les bailleurs auraient un impact durable d’une compression des dépenses alors que le niveau de s’ils soutiennent les mesures favorisant une meil- recettes de 13,0% du PIB est bas, notamment compte leure mobilisation des recettes intérieures. En effet, si tenu de l’importance des richesses naturelles. l’appui budgétaire décrit dans le paragraphe 25 s’inscrit dans le cadre d’un programme à moyen terme pour 24. Les réserves en devises restent à des niveaux atteindre les objectifs résumés dans le paragraphe 26, bas notamment pour un pays dollarisé, ce qui est alors son impact pourrait être durable. En effet, la RDC a aussi une source de vulnérabilité sur le long terme. tout le potentiel pour sortir d’un équilibre sous-optimal La RDC a réussi à améliorer son niveau de réserves en de faible mobilisation des recettes des secteurs des devises, mais ces dernières restent modestes. Ainsi, bien qu’assurant une bonne couverture de la masse monétaire en devises nationales et des dépôts en 6 Source : Calculs des équipes de la Banque mondiale sur base des données officielles et du FMI. 11 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 ressources naturelles compensé par une dépendance par une plus grande mobilisation des potentialités des vis-à-vis de l’aide internationale. La solution pourrait secteurs des ressources naturelles permettant à la fois être de bâtir sur cette aide internationale pour mettre en (i) d’assurer un développement économique et social place les réformes de fond dans le secteur des ressources soutenu ; (ii) des investissements publics croissants naturelles qui permettraient au pays d’atteindre un dans les infrastructures et les secteurs sociaux ; et (iii) le nouvel équilibre. Ce nouvel équilibre serait caractérisé maintien de la stabilité macroéconomique. 12 12 Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 2. Que faut-il pour en faire un levier du développement ? Régulation, Gouvernance et Performance du secteur des ressources naturelles 28. L’absence de mobilisation soutenue des reve- que les recettes collectées des industries extractives par nus issus des secteurs des ressources naturelles l’Etat se chiffraient à 1,4 milliards de dollars US en 2011 contraste avec la dynamique de ces secteurs et (6% du PIB). La même année, les exportations de pétrole reflète des problèmes structurels de fond. La hausse et de produits miniers atteignaient 41% du PIB. Ainsi, des cours des matières premières depuis 2006 a stimulé les prélèvements pour le compte des caisses de l’Etat les IDE dans le secteur minier et la production minière sur les secteurs miniers et pétrolier auraient au mieux s’est considérablement accélérée. Les exportations atteint 14% de la valeur de l’ensemble de la production minières ont plus que doublé entre 2009 et 2013. En exportée, ce qui est relativement bas compte tenu de 2013, la production du cuivre a augmenté de 52% la nature rentière des bénéfices dans ces secteurs. Un par rapport à 2012, et les exportations de cuivre ont examen plus détaillé montre que les recettes publiques représenté 63% des exportations nationales en 2013 du secteur pétrolier représentaient 55% de la valeur des contre 52% en 2012, et cela malgré une légère baisse exportations pétrolières alors que les recettes publiques de 7% des prix internationaux du cuivre. Cependant, du secteur minier ne représentaient que 10,6% de la la contribution aux recettes publiques de toutes les valeur des exportations minières (voir Graphique 2.1). ressources minières, qui représentent avec le pétrole Le prélèvement effectif sur le secteur minier continue près de 98% des exportations du pays et 32% du à progresser, mais la comparaison avec le prélèvement PIB, demeure encore insuffisante face au défi du effectif dans le secteur pétrolier montre qu’il reste bien développement du pays. Le dernier rapport ITIE montre de chemin à faire. Graphique 2.1. Taux de prélèvement effectifs sur les industries extractives, le secteur minier (Axe de gauche) et le secteur pétrolier (Axe de droite) Secteur Pétrolier Secteur Minier Industries Extractives Source : Calculs des auteurs sur la base des données ITIE (déclarations des entreprises) et des données du FMI. 13 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 Encadré 2.1 : Le Débat autour du Code Minier – Enjeux et orientations Le secteur minier est réglementé par l’ordonnance loi du 11 juillet 2002 portant Code minier7, et complété par un décret d’application du 26 mars 2003 portant Règlement minier. Dix ans après sa mise en application, le Code minier congolais fait aujourd’hui l’objet de discussions pour sa révision. En dépit des grandes avancées observées dans son application, certaines dimensions de ce code peuvent être améliorées pour à la fois s’assurer de leur conformité aux nouvelles exigences constitutionnelles et aussi permettre une meilleure contribution de ces ressources au développement socioéconomique du pays. Le Code actuel prévoit un régime transparent d’octroi de titres miniers ainsi qu’un régime fiscal et douanier accordant d’importants avantages aux investisseurs. Les discussions en cours sur l’avant-projet de loi devant modifier et compléter le Code Minier de 2002 ont impliqué le Gouvernement, la corporation des opérateurs miniers, les organismes publics et privés ainsi que les autorités coutumières. Elles portent sur : (i) l’éligibilité aux droits miniers et de carrières ; (ii) les droits miniers et de carrières octroyés et la durée de validité des périmètres miniers couverts par ces droits ; (iii) la responsabilité sociale et environnementale des entreprises minières vis-à-vis des communautés locales ; (iv) l’assiette de la redevance minière ; (v) les taux de certains droits, redevances et taxes dus à l’Etat ; (vi) la problématique de l’exploitation artisanale, etc. La plupart des révisions proposées par les autorités nationales visent à maximiser les ressources que l’Etat entend tirer du secteur minier. Les recettes publiques générées par l’industrie minière comprennent le Pas de porte (ou bonus de signature), les dividendes résultant de la participation de l’Etat, les droits superficiaires, les redevances minières, les taxes et droits de douane et les impôts sur les bénéfices. A travers ces révisions, les autorités s’attendent notamment au relèvement des redevances sur quelques produits clés, à l’instauration de taxes exceptionnelles sur les bénéfices, au relèvement de la participation de l’État dans les projets miniers, ainsi qu’à la réduction en dessous de dix ans de la durée de la clause de stabilité qui protège les investisseurs des évolutions réglementaires et fiscales. A ce jour, des points de divergence persistent car les sociétés minières et la fédération des entreprises au Congo cherchent à atténuer les changements qui portent sur les taux applicables dans le régime fiscal, douanier et de change, ainsi que sur la clause de stabilité. Les préoccupations des investisseurs sont exacerbées par les autres défis auxquels ils sont confrontés en RDC, notamment l’instabilité politique et le manque d’infrastructures adéquates. Ces investisseurs préviennent contre le risque d’alourdissement des formalités d’obtention de droits miniers et des activités minières, et contre des prélèvements fiscaux qui deviendraient dissuasifs à l’investissement dans le secteur minier et donc compromettraient la croissance de ce secteur. 29. S’agissant de la prospection industrielle, entreprises minières de reporter leurs déficits ordinaires une grande partie du problème résiderait dans ainsi que leurs amortissements réputés différés en les dispositions du code minier qui seraient trop période déficitaire sur une période allant jusqu’à cinq favorables aux investisseurs. Le nouveau Code ans. Dans la mesure où la plupart des vastes projets minier promulgué en 2002 (voir Encadré 2.1), et miniers n’ont commencé à investir fortement qu’au complété par un Règlement Minier en 2003, a permis cours de cinq dernières années, ces dispositions ont d’améliorer la réglementation du secteur minier et a entrainé de manière générale un manque à gagner contribué à la relance de la production dans ce secteur. sur les recettes publiques. Ainsi, le taux de prélèvement Cependant, la répartition équitable des retombées effectif devrait normalement augmenter au cours des investissements miniers croissants se fait tou- des années à venir au fur et à mesure que les projets jours attendre. Ainsi, les dispositions du code sont complètent leurs périodes d’amortissement accéléré. avantageuses aux investisseurs et tendent à largement atténuer les retombées fiscales du secteur pendant 30. Une autre partie du problème serait due les premières années de développement du projet. A à l’incapacité de la RDC à mettre en application titre d’exemple, les entreprises peuvent amortir dès les dispositions de ce même code minier. Les la première année jusqu’à 60% de leurs dépenses capacités techniques des administrations fiscales à d’investissement. Il y a aussi la possibilité pour les contrôler et confronter les déclarations fiscales à la 14 14 7 Voir : http://mines-rdc.cd/fr/index.php?option=com_content&view=article&id=76 Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale valeur réelle des produits extraits sont limitées. Des est à ce jour l’employeur le plus important du secteur, compétences géologiques et des moyens matériels mais malheureusement avec un impact faible sur les sont indispensables pour mieux encadrer les recettes de revenus budgétaires. La prospection artisanale est l’Etat issues des opérations minières et pétrolières. En essentiellement informelle et les comptes nationaux outre, des conventions parallèles sont souvent signées révisées estiment à 50,5 % la part de l’informel dans avec des opérateurs miniers en dehors du code et créent les industries extractives. Cependant, si les revenus un dualisme du système fiscal avec des conséquences des mineurs artisanaux sont bien au-dessus des autres sur les recettes à recouvrer. Aussi, les dispositions secteurs dans les zones rurales, tels que l’emploi agricole, légales quant au maintien, par les détenteurs des titres, leurs conditions de travail sont pourtant déplorables, de 40% des recettes d’exportation dans le système et le travail des enfants est fréquent sur de nombreux bancaire national ne sont pas souvent respectées. sites (voir Chapitre suivant). A l’Est du pays, les activités Ces dispositions sont fréquemment contournées par d’exploitation minière sont parfois captées par des des montages légaux et des systèmes de facturations groupes armés, contribuant ainsi au financement de internes, occasionnant ainsi une déperdition de leurs activités et à la persistance des conflits dans les capitaux et de devises pour le pays. En conséquence, territoires riches en ressources minérales. non seulement le pays ne trouve pas son compte en termes de recettes fiscales, mais le déficit du compte 33. En somme, les ressources naturelles en courant se trouve aggravé par un solde négatif des général et le secteur minier en particulier ne sont revenus des facteurs atteignant 9,3% en 2013, contre pas utilisés comme il se doit pour promouvoir la 4,4% en 2010. croissance et le développement de la RDC. La hausse des investissements industriels dans le secteur minier 31. Une dernière partie du problème serait due n’est pas de nature à accroitre l’emploi formel. En effet, à la faible gouvernance et transparence du secteur la prospection industrielle est à forte intensité de capital et au poids des intérêts établis. En dépit d’un avec des retombées faibles en termes d’emploi, mais engagement fort pour l’amélioration de la gouvernance l’augmentation de la production qu’elle a engendrée ne des industries extractives, cette dernière reste encore s’est pas accompagnée d’une hausse substantielle des une préoccupation de taille empêchant la RDC de tirer recettes de l’Etat. Ainsi, le secteur des hydrocarbures, avec profit des énormes potentialités de ses ressources une production stagnante à de faibles niveaux depuis naturelles. Les conclusions des rapports produits plus de 30 ans, contribue légèrement moins aux recettes par des organisations indépendantes telles qu’Africa de l’Etat que le secteur minier. En parallèle, la prospection Progress Panel et Global Witness, soulignent souvent artisanale est de nature à générer des emplois et des des cas d’opacité et de sous-estimation des prix des revenus pour les communautés locales. Rendue possible actifs tant miniers que pétroliers lors de leur cession à grâce aux caractéristiques géologiques de la RDC avec des compagnies offshore8. Ces rapports soulignent la accès facile aux filons dans certaines régions, cette nécessité d’améliorer la gouvernance et la transparence prospection est cependant souvent captée par les milices dans la gestion des ressources naturelles en RDC. A ce armées et s’opère dans des conditions pénibles pour problème, il y a aussi celui de la gouvernance et de la les prospecteurs. Quelle que soit la forme que prend la redevabilité des entreprises minières du portefeuille de prospection minière, la préservation de l’intérêt de l’Etat l’Etat qui ont été transformées en sociétés commerciales et de la population exige une plus grande implication du et qui, à ce jour, ne semblent pas contribuer à l’amé- Gouvernement pour assurer la bonne gouvernance du lioration des recettes de l’Etat. secteur. Cette gouvernance doit être observée à tous les stades, à savoir : (i) l’octroi des titres ; (ii) la régulation 32. Par ailleurs, alors que la prospection des activités avec imposition de normes de sécurité artisanale a le potentiel de générer de l’emploi et et de santé sur le lieu de travail ; (iii) la protection des des revenus pour les communautés locales, elle prospecteurs contre les groupes armés ; (iv) la mise en est souvent captée par les groupes armées. En application de la responsabilité sociale des entreprises dehors des entreprises minières de taille grande ou vis-à-vis des communautés avoisinantes ; (v) la collecte moyenne, une part importante du secteur minier de des recettes ; et (vi) l’utilisation des revenus tirés de ces la RDC demeure artisanale. La prospection artisanale secteurs pour des projets durables. 34. Le Gouvernement a lancé une révision du 8 D’après le rapport 2013 de la Commission Africa Progress Panel, les code minier et la mise en place d’une Matrice de actifs miniers dans les 5 transactions examinées par la Commission furent vendus, en moyenne, au sixième de leur valeur commerciale Gouvernance qui devrait permettre une meilleure potentielle sur le marché, occasionnant un manque à gagner pour mobilisation des recettes (voir Encadré 2.2). Le code le pays d’au moins 1,36 milliard de dollars entre 2010 et 2012. minier de 2002 est protégé par une clause de stabilité Un autre rapport de l’ONG britannique Global Witness de 2014 a indiqué que la RD Congo a conclu en 2012 un accord de rachat de dix ans. Ainsi, depuis 2012, l’opportunité s’est des droits pétroliers d’une société offshore pour un montant ouverte pour les autorités du pays de tirer les leçons probablement des centaines de fois supérieur au prix de 500 000 dollars, payé pour leur acquisition en 2006. de la conception et de la mise en œuvre du code et 15 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 d’apporter des solutions aux problèmes constatés. des ressources naturelles. De plus, des rapports sur Ce chantier viendrait compléter la réforme de la les recettes collectées allant de 2007 à 2011 ont été gouvernance économique à laquelle le Gouvernement produits pour s’inscrire dans les exigences de l’ITIE. congolais s’est engagé. Le Gouvernement est en train de Enfin, les dispositions de l’OHADA, en vigueur en RDC mettre en place une liste d’actions visant à renforcer la depuis septembre 2012, et son adhésion à la Convention transparence et l’efficacité de la gestion des ressources de New-York devraient moderniser le cadre juridique de naturelles. A cet effet, le Gouvernement procède depuis la conduite des affaires et assurer l’accès de la RDC à une 2011 à la publication trimestrielle des recettes issues juridiction d’appel et à l’arbitrage internationaux. Encadré 2.2 : Gouvernance du secteur des ressources naturelles - mise en place de la matrice de gouvernance Le Gouvernement congolais a identifié une série de mesures de gouvernance économique contenues dans une matrice dont la mise en place est suivie de manière conjointe avec la Banque mondiale. Ces mesures visent à améliorer : (i) la responsabilisation et la transparence dans la gestion des ressources naturelles (mines, pétrole et forêt) ; (ii) le climat des affaires ; et (iii) l’efficacité et la qualité des dépenses publiques en RDC. Des progrès ont été accomplis dans la mise en œuvre de cette matrice depuis son adoption en 2011 et sa mise à jour en mai 2013. Il s’agit principalement de la publication de la quasi-totalité des contrats miniers, soit 134 sur 135. Tous les titres octroyés et les recettes collectées dans les secteurs des mines, des forêts et des hydrocarbures, ainsi que les états d’exécution du budget de l’Etat sont, à ce jour, rendus publics en ligne sur les sites officiels du Gouvernement. De plus, l’ITIE a publié son 4ème rapport national pour 2011, couvrant les revenus miniers et pétroliers et les recettes de l’État provenant des industries extractives. Les prochaines étapes de la mise en place de la matrice verront des efforts continus pour achever la réforme des entreprises publiques transformées en société commerciale et adopter des contrats de performance entre l’Etat et les entreprises publiques. En outre, la RDC est devenue membre de l’OHADA depuis juillet 2012, ce qui est une étape importante pour améliorer le climat des affaires dans le pays. Sur le plan des finances publiques, la réforme des marchés publics avance avec la mise place des institutions des marchés publics dans les ministères et autres institutions publiques. La revue de la performance dans la gestion des finances publiques, PEFA 2012 a été réalisée avec le soutien de la Banque mondiale et a contribué à la conception d’un plan d’action pour améliorer la gestion des finances publiques. 16 16 Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 3. Un contexte politique et social marqué par la fragilité et la violence 35. Dans le contexte d’un grand déficit de vaste programme de réforme de la police. L’exécutif s’est développement, le manque de mobilisation des engagé en faveur du renforcement de l’armée et de la revenus des secteurs des ressources naturelles police pour une meilleure protection de la population contribue à la fragilité politique et sociale. Le succès et du pays, et les mesures prises dans ce contexte des FARDC face au M23 reste fragile sans une solution commencent à donner des résultats. Cependant, politique permanente fondée sur des bases sociales et malgré les efforts du Gouvernement pour réformer, économiques solides. Les risques de rechute restent professionnaliser et superviser les services de sécurité, élevés en raison du lien intime entre les tensions les organisations de droit de l’homme continuent à ethniques et les griefs socio-économiques, y compris rapporter des cas d’exactions perpétrés par ces services autour de l’usage et l’appropriation de la terre. Ainsi, contre la population. la stabilisation politique et sécuritaire dépend en grande partie de l’amélioration des conditions de vie 38. Il n’est cependant pas clair que les opérations de la population, à travers : (i) un meilleur accès aux militaires soient suivies d’une solution politique services de bases ; (ii) un meilleur accès à la terre ; et permanente et stable. Les groupes rebelles sont (iii) une restauration des structures des communautés généralement formés le long de lignes de fracture locales. Dans ce contexte, les secteurs des ressources ethniques et plusieurs conflits ont été transposés des naturelles ne paraissent pas jouer un rôle de levier pays voisins vers la RDC. Cependant, au-delà de l’effet de du développement, devenant eux-mêmes sources de débordement transfrontalier, les tensions s’amplifient conflits et de fragilité politique et sociale. Les commu- sur fond de ressentiments socio-économiques notam- nautés locales considèrent souvent les entreprises ment autour de l’usage et de l’appropriation des terres minières comme source de nuisance et de compétition (voir Encadré 3.1). L’Institut International pour les sur les ressources du sol et du sous-sol, et se plaignent Etudes Stratégiques (IISS)9 résume le problème en ces qu’elles génèrent peu ou pas assez d’emplois, de termes : « Le Gouvernement Congolais doit non seulement revenus, et de services. mettre en place des plans sous l’accord de Kampala pour amnistier de nombreux rebelles du M23 (à l’exclusion des chefs les plus importants) et les réintégrer dans l’armée, il doit aussi honorer ses promesses prises dans le Cadre 3.1. Des avancées politiques et Régional pour la Paix, la Sécurité et la Coopération de sécuritaires sur fond de fragilité réformer son appareil de sécurité, désarmer toutes les persistante milices, et promouvoir la démocratie. Améliorer les droits de propriété et du citoyen pour les Tutsi Congolais dans 36. La fin de la guerre dans une grande partie de les provinces de l’Est serait fondamental pour réduire les l’Est de la RDC est une bonne avancée. La déclaration possibilités pour une rébellion future ». de Kampala signée entre le Gouvernement de la RDC et les rebelles du M23 a mis fin à une grande partie 39. Les concertations nationales devraient des opérations militaires à l’Est du pays. Le succès donner un appui politique aux opérations de de FARDC contre le M23 n’élimine cependant pas les démobilisation, réconciliation et reconstruction10. risques de retournement de situation, et d’autres grou- Le but annoncé des concertations nationales est de pes armés aussi bien locaux que transfrontaliers (LRA, renforcer la « cohésion nationale » et de mettre un terme ADF/NALU, FDLR, Raia Mutomboki, Simba, FRPI, Bakata à la crise sociale, politique, et sécuritaire à laquelle le Katanga, divers groupes Mai Mai …) sont toujours actifs pays fait face. Cinq groupes de travail ont planché sur et impliqués dans des attaques contre les villages et les questions économiques, de la bonne gouvernance, dans des violations des droits de l’homme. Les FARDC du désarmement et démobilisation des groupes ont étendu leur campagne pour cibler ces groupes et armés, de la réconciliation et de la décentralisation. la mission des Nations-Unies a renforcé ses capacités militaires en déployant la FIB et du matériel pour le contrôle et la surveillance des frontières à l’Est du pays. 9 Voir : http://www.iiss.org/en/iiss%20voices/blogsections/iiss- voices-2013-1e35/november-2013-1d99/end-of-the-road- for-the-m23-447e 37. Bon nombre de partenaires internationaux 10 Les concertations nationales, qui ont duré un mois avant de contribuent au renforcement de l’appareil sécuri- s’achever le 5 Octobre 2013, ont rassemblé 700 participants de taire de la RDC. Les Etats Unis, l’Angola, la France, la toutes les strates de la société. Etaient cependant absents certains grands personnages de l’opposition comme Etienne Tshisekedi et Belgique et d’autres contribuent à la formation et à l’équipement des FARDC. Le Royaume-Uni soutient un Vital Kamerhe qui ont décidé de boycotter le processus. Les groupes armés actifs dans l’Est étaient exclus sur décision de l’exécutif. 17 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 Les recommandations clés comprennent, entre autres, bre 2013 a vu un engagement solennel de mise en l’établissement d’un Gouvernement de cohésion application de certaines de ces recommandations, nationale, la création d’une commission des droits notamment une amnistie générale, l’inclusion de la de l’homme, la libération des prisonniers politiques, société civile et de l’opposition dans un Gouvernement la réouverture des chaines de télévision proches de de cohésion nationale, et l’imposition d’un quota de l’opposition, et la préparation des élections locales. Le 30% de femmes aux élections. discours du Président de la République du 23 Octo- Encadré 3.1 : La Propriété de la Terre, Enjeux de tous les Conflits Les droits fonciers en RDC sont régis par la loi n° 73-021 du 20 juillet 1973, telle que modifiée et complétée par celle du 18 juillet 198011. Cette loi organise le patrimoine foncier de l’État en domaine public et en domaine privé. Elle précise en son article 53 que « le sol est la propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’État ». Conformément à cette loi, l’Etat Congolais est le seul propriétaire des terres, les personnes privées ou morales ne peuvent détenir sur les terres qu’un droit de jouissance dénommé « concession ». Cependant, la Constitution du 18 février 200612, proclame le droit de souveraineté de l’Etat sur les ressources naturelles en lieu et place du principe de l’appropriation comme il en était dans les constitutions antérieures. Cette souveraineté n’implique pas nécessairement une propriété. Par ailleurs, la Constitution proclame d’une part que la propriété privée est sacrée et que l’Etat doit garantir le droit à la propriété individuelle ou collective, acquise conformément à la loi ou à la coutume et, d’autre part, que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité octroyée dans les conditions fixées par la loi. En l’absence d’une politique nationale d’aménagement du territoire et de planification des utilisations des terres qui pourrait offrir plus de clarté sur la question du statut des terres et des ressources naturelles, l’on observe de plus en plus de conflits d’usage des espaces entre les différents ministères en charge de la gestion de différents aspects du domaine de l’Etat (mines, hydrocarbures, agriculture, foncier, environnement, forêts, etc.). De sorte qu’il n’est pas rare aujourd’hui de retrouver une concession forestière chevaucher avec une concession foncière (généralement emphytéotique) ou une concession forestière chevaucher avec une aire protégée ou une concession minière. Ainsi, différentes lois sectorielles ayant chacune un volet de compétence sur les espaces (les mines, les hydrocarbures, le foncier, les forêts, la faune, la conservation de la nature, les ressources en eau) organisent la gestion du domaine de l’Etat (loi minière, loi forestière, loi foncière, etc.). Il s’impose alors un travail de mise en cohérence de ces lois sectorielles avec les nouvelles dispositions constitutionnelles sus évoquées. 18 18 11 Voir : http://www.droit-afrique.com/images/textes/RDC/RDC%20-%20Foncier%20suretes.pdf 12 Voir : http://democratie.francophonie.org/IMG/pdf/Constitution_de_la_RDC.pdf, articles 9, 34, 67, 122, 123, et 203. Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 3.2. Sortir du cycle de la violence et de la fragilité : Démobilisation, Réconciliation et Restauration de la cohésion sociale 40. La RDC vient de lancer son troisième 42. La démobilisation, l’amélioration des condi- programme de Démobilisation, Désarmement et tions de vie, et la prévention d’une reprise des Réintégration (DDR). Le troisième DDR est censé aider violences sont indispensables pour la résolution à restaurer la paix et la cohésion sociale dans les zones de la question des déplacés, devenue à son affectées par les conflits. Ce troisième programme se tour source d’instabilité. Plus de 2,9 millions de caractérise par : (i) un rejet de l’intégration systématique personnes étaient considérées comme déplacées des anciens rebelles dans l’armée ; (ii) une attention internes (PDI) en 2013, comparé à 2,7 million en 2012 particulière portée à l’amélioration des conditions et à 1,7 million en 2011. En parallèle, l’Office de de vie ; et (iii) une délocalisation des anciens rebelles Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA)15 des loin de leurs régions d’origine pour une période de Nations Unis a recensé environ 430.000 Congolais réhabilitation. Ces nouvelles dispositions sont autant réfugiés hors des frontières de la RDC et plus de 250.000 de leçons tirées des autres entreprises de DDR initiées réfugiés étrangers en RDC. D’après l’Observatoire des entre 2004 et 2011 avec le soutien de la communauté Situations de Déplacement Interne du Conseil Norvégien internationale, y compris la BM. En effet, 209.605 pour les Réfugiés16 : « Les conflits et les épisodes de anciens miliciens ont dû passer par un processus de violence sont les principaux obstacles qui se dressent vérification, desquels 66.814 ont rejoint l’armée, et près devant les PDI à la recherche de solutions durables. de 140.000 furent démobilisés jusqu’en mars 201113. Malgré la reddition des rebelles du M23, d’autres groupes Cependant, beaucoup de combattants démobilisés ont armés poursuivent leurs activités, alimentant l’insécurité repris les armes et le M23 lui-même était en fait une chronique qui règne dans l’Est du pays. Les mauvaises scission des FARDC initiée par d’anciens miliciens ayant conditions de vie, dont l’accès limité aux services de intégré l’armée. base, à la terre et à d’autres moyens de subsistance, et l’effondrement des structures communautaires 41. Le Gouvernement a aussi lancé avec l’aide posent également des problèmes considérables ». Le de la Banque Mondiale le Projet de Reconstruction Gouvernement a mis en place un groupe de travail de l’Est14. L’objectif de ce projet est de développer parlementaire pour rédiger une législation nationale l’accès aux infrastructures économiques et sociales et sur le déplacement interne. Le budget du Plan d’Action d’améliorer les conditions de vie des communautés Humanitaire financé par les bailleurs pour 2013 a vulnérables dans les provinces de l’Est. Ce projet va atteint 893 millions de dollars US dont seulement 69% financer des activités qui vont à la fois promouvoir ont été déboursés. Par ailleurs, les autorités indiquent l’accès aux services de base à travers des actions que l’impunité n’est plus à l’ordre du jour comme le collectives et générer des opportunités d’emploi. Ce confirment les procédures judiciaires à l’encontre de projet aura ainsi trois composantes : (i) le soutien aux certains officiers de l’armée et de la police impliquées communautés ; (ii) l’amélioration des conditions de dans les violations des droits de l’homme. vie et la création d’emplois ; et (iii) le renforcement des capacités, notamment dans la gestion de projets. 15 Voir : http://reliefweb.int/report/democratic-republic-congo/dr- 13 Voir : http://www.worldbank.org/en/results/2013/03/11/ congo-humanitarian-challenges-february-2014 demobilization-and-reintegration-in-the-democratic- 16 Voir : http://www.internal-displacement.org/assets/library/Africa/ republic-of-congo 14 Voir : http://www.worldbank.org/projects/P145196?lang=en Democratic-Republic-of-the-Congo/pdf/201401-af-drc-overview- fr.pdf 19 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 4. Perspectives d’avenir et risques économiques et politiques 43. Grâce au dynamisme du secteur minier, la RDC pourcent des prix du cuivre aboutirait à une baisse de 50 pourrait continuer à enregistrer les mêmes taux de millions de dollars US dans les réserves internationales. croissance élevés observés au cours des dernières années. Le moteur de la croissance restera le secteur 46. La RDC demeure vulnérable à une mobilisation minier et, sur le moyen et long terme, une montée insuffisante des revenus de l’Etat en général et ceux en puissance du secteur agricole. Les investissements en provenance du secteur des ressources naturelles relatifs au secteur minier continueront à augmenter en particulier. Une réduction de la demande et des au cours de la période 2013-2016, donnant un élan prix des matières premières exportées par le pays reste majeur à la production minière et à la croissance du un facteur de risque exogène. Cependant, la faible PIB réel, qui pourrait se maintenir à un taux supérieur mobilisation des revenus et surtout des recettes du à 7%. La part des revenus miniers transférée au secteur des ressources naturelles est essentiellement Gouvernement serait dépensée par le secteur public, endogène. Au-delà de toute argumentation, un ratio de notamment sur les infrastructures et les secteurs 14% entre les recettes de l’Etat en provenance du secteur sociaux. Dans le secteur agricole, les initiatives prises des ressources naturelles et la valeur des exportations pour stimuler l’investissement privé, couplées aux de ces ressources est trop faible. Des recettes domesti- projets de pôles de croissance auraient pour effet ques de 13,0% du PIB sont aussi trop faibles. Dans ce d’accélérer la reprise progressive de la production contexte, la consolidation budgétaire ne peut se faire agricole déjà observée. qu’au prix d’une compression des dépenses, notamment sociales et d’infrastructure. Aussi, la balance externe 44. Le déficit du compte courant risque de s’accen- restera vulnérable et le développement de long terme tuer à cause de l’augmentation des flux sortants de la RDC restera trop dépendant de l’aide externe. Une des revenus des capitaux. Malgré l’amélioration de meilleure mobilisation des recettes domestiques et de la balance commerciale, la détérioration prévue du celle du secteur des ressources naturelles permettra à solde de la balance des revenus des facteurs aurait la fois de maintenir les équilibres macroéconomiques pour résultat de maintenir un déficit élevé du compte et de donner à l’Etat les moyens financiers d’une courant. Les transferts de capitaux étrangers et les IDE, politique de développement souveraine et soutenable. qui continueraient à un rythme d’au moins 3,5 milliards La RDC pourra s’appuyer sur le levier de l’aide externe de dollars par an, vont financer le déficit du compte pour renforcer les moyens financiers domestiques et, courant sur le moyen terme. Mais cette même hausse surtout, les appuyer par des ressources institutionnelles prévue des investissements, notamment dans le sec- et humaines capables de formuler des politiques et de teur minier, aboutirait à des sorties de revenus plus les mettre en application. élevées pour rémunérer les détenteurs des capitaux, maintenant ainsi le déficit du compte courant. La RDC 47. La stabilisation sécuritaire à l’Est semble pourra cependant maintenir le niveau des réserves acquise, mais attend d’être consolidée par des internationales en devises aux alentours de 2,5 milliards actions politiques, économiques, et sociales. La de dollars US ou 9 semaines d’importations. Enfin, les situation sécuritaire s’est considérablement améliorée analyses du FMI montrent que le taux de change réel dans le Nord Kivu vers la fin de 2013. Cependant, la reste globalement en ligne avec les fondamentaux de violence au Katanga semble persister. Toute solution l’économie de la RDC (FMI, 2014). durable exige de traiter à la fois les causes profondes des conflits et leurs conséquences qui les rendent 45. L’accumulation de réserves par la BCC pourrait difficile à résoudre. Les problèmes de l’utilisation de être négativement affectée en cas de hausse des la terre et de ces richesses qui se dessinent sur fond prix internationaux des produits alimentaires, de clivages ethniques ou qui opposent investisseurs ou de baisse des prix des minéraux. La hausse des étrangers et populations locales etc… ne peuvent plus prix internationaux des produits alimentaires pourrait être reportés à l’infini. Le traitement du problème des menacer l’objectif d’inflation à un chiffre fixé par la BCC. déplacés et des séquelles des années de conflits sur La hausse des prix des produits alimentaires et la baisse les communautés et les personnes ne peut non plus des prix des produits minéraux pourraient ralentir, être ajourné. Le Gouvernement est en train d’avancer voir renverser l’accumulation des réserves en devises. sur le désarmement des anciens combattants, tout En fait, les simulations effectuées par les économistes en tirant les leçons des expériences passées. Aussi, le de la Banque Mondiale montrent qu’une hausse d’un Gouvernement avec le soutien de la Banque mondiale pourcent des prix internationaux des produits alimen- a lancé le projet de reconstruction de l’Est. Mais la taires augmenterait l’inflation de 0,23 point, et réduirait situation actuelle du Gouvernement qui gère les affaires les réserves d’un montant de 36 millions de dollars US. courantes depuis fin 2013 n’est pas idéale. En effet, 20 20 De même, toutes choses étant égales, une chute d’un le Gouvernement de cohésion nationale tarde à venir Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale et avec lui la mise en application des recommandations 49. Les défis et les risques auxquels la RDC fait des Concertations Nationales. face se dessinent sur fond de pauvreté élevée et d’indicateurs de développement humain faibles. La 48. Les efforts de réforme déployés pourraient RDC est dans un cycle où la fragilité alimente la fragilité, être entravés par l’opposition de groupes d’intérêt et les indicateurs sociaux du pays soulignent l’ampleur établis. Le Gouvernement a approuvé en 2012 une de la tâche pour le Gouvernement. L’enquête 1-2-3 matrice de gouvernance économique pour montrer finalisée en 2013 vient corroborer cet état des faits avec son engagement à assurer une meilleure transparence, des chiffres et des données récents. En effet, l’enquête une plus grande responsabilisation, et la bonne 1-2-3 donne des informations sur : (i) les conditions gouvernance. Une mise en œuvre satisfaisante de cette de vie et le niveau de dépenses des ménages ; (ii) le matrice pourrait soutenir l’élan des réformes qui, avec le niveau de revenu et les conditions d’activités des ména- temps, parviendrait à affaiblir la résistance des groupes ges ; (iii) les conditions de travail et de performance d’intérêts. Cependant, il y a toujours un risque de voir dans le secteur informel ; (iv) les caractéristiques des l’élan des réformes contré et brisé par ces groupes. Par communes quant aux activités qu’elles abritent et la exemple, le renforcement de la gouvernance et de la disponibilité d’infrastructures et de services sociaux transparence dans les industries extractives marque dans leur périmètre ; et (v) des information spécifiques des progrès certains, mais à un rythme lent et avec des sur l’activité agricole et le monde rural. La deuxième revers. Aussi, la réforme du code minier patine, opposée partie de ce document montre que l’analyse de cette par des groupes d’intérêts aux ramifications multiples enquête permet de dégager des axes d’interventions aux niveaux national et international. Enfin, l’un des où l’impact sera maximal sur le niveau de vie de la sujets les plus débattus est celui de la réglementation population et sur la cohésion du pays sur le long de la cession d’actifs par les entreprises publiques terme. Ainsi, les infrastructures (notamment routières), transformées en SNDP, notamment dans le secteur l’éducation, et la santé sont autant des secteurs où les minier. Or, là aussi, la situation du Gouvernement actuel besoins en développement sont énormes. Cependant, est loin d’être idéale pour la conduite des réformes dont ils constituent aussi un triangle de synergies et le pays a besoin. d’opportunités au centre duquel une action publique capitalisant sur les potentialités du secteur minier pourrait ouvrir des perspectives de développement et de sortie de la fragilité sur le long terme. Tableau 4.1 : République Démocratique du Congo – Sélection d’indicateurs économiques   2008 2009 2010 2011 2012 2013 Prél. Revenu et Croissance Economique             Croissance du PIB (% annuel) 6,2% 2.9% 7,1% 6,9% 7,2% 8,5% Formation Brute de Capital Fixe (% du PIB) 17,9% 14,2% 18,2% 16,5% 20,3% 21,3% Formation Brute de Capital Fixe - Public (% du PIB) 2,1% 3,2% 5,5% 4,4% 6,1% 6,4% Formation Brute de Capital Fixe - Privé (% du PIB) 15,8% 11,0% 12,7% 12,1% 14,2% 14,9% Monnaie et Prix Inflation, Prix à la Consommation (% annuel, en moyenne) 17,3% 46,2% 23,5% 15,5% 2,1% 0,8% Masse Monétaire (% annuel) 55,7% 50,4% 30,8% 23,2% 21,1% 18,1% Taux de Change Nominal (FC/US$, en moyenne) 563,2 816,8 907,0 918,0 918,7 919,5 Finances Publiques Solde Budgétaire Global, Incluant les dons (% du PIB) -1,7% -1,7% 3,4% -1,4% 0,3% -2,0% Solde Budgétaire Intérieur (% du PIB) 0,4% -1,5% 1,0% -1,1% 1,2% 0,2% Recettes Publiques, Excluant les Dons (% du PIB) 11,5% 10,3% 12,1% 12,4% 14,9% 13,0% Dette Publique Extérieure (% du PIB) 80,9% 83,6% 22,4% 19,2% 16,9% 17,4% Comptes Extérieurs Exportations de Biens (fob, milliards US$ courant) 6,6 4,3 8,3 10,0 8,6 10,0 dont Produits Miniers et Pétrole (milliards US$ courant) 6,2 4,1 8,1 9,7 8,4 9,8 Importations de Biens (fob, milliards US$ courant) -6,7 -4,9 -7,5 -9,3 -8,7 -10,1 Solde du Compte Courant (% du PIB) -10,6% -7,8% -4,9% -5,9% -8,0% -10,1% Investissements Directs Etrangers (milliards US$ courant) 1,81 1,19 1,50 1,67 2,17 2,22 Population, Emploi et Pauvreté Population, Total (millions) 58,82 60,49 62,19 63,93 65,71 67,50 Croissance de la Population (annuel %) 2,8% 2,8% 2,8% 2,8% 2,7% 2,7% Espérance de Vie à la Naissance (années) 47,56 47,80 48,07 48,37 48,71 49,96 Pour Mémoire : Indice de Développement Humain 0,307 0,310 0,319 0,323 0,333 0.338 Sources : IDS & WDI Central (2013), Estimations du FMI et Projections & Calculs du personnel de la Banque Mondiale 21 LES DéFIS ET LES OPPORTUNITéS DE LA RDC deuxième PARTIE A LA LUMIèRE DEs RéSULTATS DE L’ENQUêTE DES MéNAGES Infrastructures, Mines, éducation et Santé : des synergies et des opportunités en attente d’une gestion publique efficace MESSAGES PRINCIPAUX • Les synergies entre infrastructures, mines et indicateurs sociaux soulignent la nécessité d’une action publique intégrée pour améliorer les indicateurs du développement humain. • L’infrastructure routière accroit l’accessibilité des communes, y compris aux services sociaux, et permet l’amélioration du niveau de vie, soulignant ainsi l’importance de l’investissement public. • Les mines ont un effet ambivalent : elles permettent une hausse du niveau de vie, mais peuvent générer aussi beaucoup d’externalités négatives, d’où l’importance du rôle régulateur de l’Etat. 23 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 50. Le défi de la restauration de la cohésion 52. L’enquête des ménages de 2012 a permis sociale en RDC se présente dans le contexte d’une d’examiner les indicateurs sociaux et de revenus société affectée par des taux de pauvreté élevés et d’explorer le rôle des activités minières et de la avec d’importants retards de développement. présence d’infrastructures, notamment les routes. La fragilité et la fragmentation sociale de la RDC se L’enquête des ménages de 2012, dite enquête 1-2- dessinent sur fond de pauvreté touchant la plus grande 3, couvre un échantillon de plus de 23.000 ménages partie de la population. Le Revenu National Brut (RNB) et donne ainsi des résultats significatifs aux niveaux par tête calculé selon la méthode Atlas n’a pu dépasser national, provincial, et même au niveau des 26 régions 400 dollars US en 2013, d’après les comptes nationaux prévues par la constitution. Cette enquête révèle les révisés. La population de la RDC, estimée à 67 million caractéristiques socio-économiques de la population d’habitants, est parmi les plus pauvres du monde. et les facteurs derrières ces caractéristiques. Ainsi Plus de 63,7%17 de la population vit en dessous du par exemple, en affectant l’accessibilité aux écoles et seuil de pauvreté et 14% des pauvres de l’Afrique Sub- services médicaux, l’infrastructure routière joue un rôle Saharienne (ASS) vivent en RDC. indirect mais important dans l’évolution des indicateurs sociaux. Aussi, bien que l’activité minière ait un impact 51. Tous les indicateurs du développement positif sur le niveau de vie des ménages, ses retombées humain sont à des niveaux très modestes et l’IDH en termes de bien-être social sont ambivalentes, avec pour 2013 place la RDC au 186ème rang sur 187 pays. beaucoup d’externalités négatives (érosion, travail Ceci est vrai pour les indicateurs de santé, d’éducation, des enfants, etc.) mentionnés par les communautés de morbidité, etc. L’espérance de vie à la naissance est concernées. de 50 années en 2013. En 2012, la mortalité infantile se situait à 100 pour 1.000 et la mortalité pour les 53. L’enquête permet d’identifier quelques enfants de moins de 5 ans était de 146 pour 1.000. Le aspects relatifs à la situation des femmes et de les taux de mortalité des femmes à l’accouchement relier à certaines externalités, notamment celles restait élevé à 540 pour 100.000 naissances en dues à la présence d’infrastructures. L’enquête a mis 2010. Les raisons de cette morbidité élevée sont en exergue les différences liées au genre ainsi que les multiples et comprennent entre autres la faiblesse synergies entre infrastructures et indicateurs sociaux. des infrastructures, l’omniprésence du paludisme, Ainsi, le temps alloué à la scolarisation par les filles l’insuffisance des précautions prises face aux maladies semble être affecté, entre autres, par les corvées d’eau, infectieuses transmissibles, la malnutrition, et les décès elles-mêmes liées à la difficulté d’accès à l’eau courante. liés à la grossesse. Bref, la RDC est loin d’atteindre les Les paragraphes qui suivent vont permettre d’explorer OMD18 et se trouve particulièrement en retard sur les une partie du potentiel de l’enquête 1-2-3 qui ne sera OMD 4, 5, et 619. complètement exploité que dans le cadre d’un travail analytique futur approfondi sur la pauvreté. 17 Source : calculs des équipes de la Banque Mondiale. Ce résultat est très proche de celui de l’INS (63,4%) qui reste sujet à modification. En effet, l’INS note qu’« un rapport d’analyse approfondie de la pauvreté est en préparation dans le cadre de la publication détaillée des résultats sur la pauvreté et la consommation des ménages avec la Banque Mondiale et les autres partenaires. Des ajustements méthodologiques pourraient être faits sur le calcul des agrégats » (INS, 2014, page 100). 18 Voir : http://hdr.undp.org/sites/default/files/Country-Profiles/COD. pdf 24 24 19 Respectivement : Réduire la mortalité infantile, améliorer la santé maternelle, et combattre les maladies. Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale Encadré 5.1 : L’Enquête 1-2-3 – Principes et Méthodologie L’enquête 1-2-3 est une enquête nationale auprès de 23.000 ménages. Elle est scindée en trois phases. La première phase (phase 1) porte sur l’emploi, le chômage et les conditions d’activités des ménages. La deuxième phase (phase 2) consiste à réaliser une enquête spécifique auprès des chefs des unités informelles sur leurs conditions d’activité, leurs performances économiques, leur mode d’insertion dans le tissu productif et leurs perspectives. La troisième phase (phase 3) est une enquête sur la consommation des ménages en vue d’estimer leur niveau de vie, l’importance des activités agricoles et leur impact sur l’environnement. L’objectif principal de l’enquête est de permettre le suivi des conditions de vie des ménages et du fonctionnement du monde du travail. Elle permet d’établir le profil de pauvreté et de mettre à jour les indicateurs des OMD. De façon spécifique, il s’agira de : - Estimer le montant et étudier la répartition des dépenses de consommation des ménages pour évaluer leur niveau de vie ; - Fournir un complément à la comptabilité nationale en établissant les comptes de production et de répar- tition du secteur informel ; - Comprendre les comportements productifs des agents du secteur informel ; - Analyser le mode d’insertion du secteur informel dans le système productif local ; - Réaliser des études sectorielles (santé, éducation, nutrition, secteur informel, etc.). La structure du plan de sondage est adaptée à une enquête auprès des ménages avec un échantillon représentatif au niveau national. Elle comprend deux strates : la première strate, qui comprend les 26 nouvelles provinces ou anciens districts et la deuxième strate qui comprend trois catégories : Ville, Cité et Milieu Rural. Le milieu urbain (Ville et Cité) est subdivisé en quartiers et le milieu rural est subdivisé en secteurs. 25 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 5. Infrastructure routière et activités minières : Déterminants parmi d’autres variables du niveau de vie des ménages 54. La pauvreté a diminué de 71% à 63% mais dans des communes ayant une activité minière, contre les disparités de revenus et de dépenses entre les 18% des ménages les moins riches. Cependant, toutes zones rurales et urbaines persistent. L’enquête 1-2- choses égales par ailleurs, la présence d’une activité 3 montre une baisse de la pauvreté jusqu’à 63,7% en minière dans une commune a peu d’effet sur le niveau 2012, comparé à 71% en 2005. La disparité entre zones de vie de l’ensemble des ménages vivant dans cette rurales et urbaines reste cependant importante. Ainsi, commune. Ainsi, alors que les ménages impliqués dans la dépense moyenne n’est qu’à 67% de la dépense l’activité minière profitent de revenus plus élevés, les nationale en milieu rural, contre 160% en milieu externalités négatives de cette activité tirent vers le bas urbain. En somme, la dépense moyenne en milieu le revenu des autres ménages. urbain est plus que le double de son niveau en milieu rural. La pauvreté en milieu urbain touche 62% de la 57. La cohabitation d’un effet positif sur la dispo- population alors qu’en milieu rural, elle affecte 65% de nibilité d’infrastructures sociales et routières et de la population20. hauts niveaux d’externalités négatives souligne encore plus l’ambivalence des activités minières. Ainsi, 10% des communes ayant une entreprise minière sur leur territoire déclarent que les sociétés minières 5.1. Les transports routiers ont un ont construit des écoles, 9% qu’elles offrent les services impact positif sur le bien-être d’un centre de santé, et 10% qu’elles ont construit des des ménages routes (voir Tableau 5.1). Ces taux sont tous plus élevés en milieu urbain et semi-urbain qu’en milieu rural. Cela 55. La disponibilité de transports routiers affecte serait dû au fait que les activités minières au niveau des positivement le niveau de vie des ménages sous communautés rurales sont plutôt artisanales, mais aussi contrôle des autres variables. Toutes choses égales parce que le poids politique et médiatique des villes et par ailleurs, les dépenses par équivalent-adultes sont cités incite les entreprises minières à y concentrer leurs 24,6% plus élevées pour un ménage vivant dans une actions sociales. Mais plus d’infrastructures sociales communauté accessible par une route praticable en ne conduit pas forcément à de meilleurs résultats toute saison. Ainsi, la disponibilité d’une infrastructure sociaux. Ces derniers peuvent en effet être neutralisés routière est un facteur de promotion du niveau de vie par l’ampleur des externalités négatives de l’activité des ménages, d’où l’importance de l’investissement minière. public dans ce secteur. En effet, la disponibilité des transports facilite non seulement la circulation des individus et des marchandises, mais aussi facilite l’accès des ménages aux services sociaux, comme l’éducation et la santé (voir Section 6 ci-dessous). 5.2. Les activités minières : Manne ou Malédiction ? 56. Les ménages vivant dans les communes du pays disposant d’une activité minière subissent des effets ambivalents sur leur niveau de vie. Les activités minières revêtent une importance particulière en RDC. En effet, 14% des communes de la RDC déclarent avoir une activité minière. Ce taux atteint 19% pour les communautés rurales et souligne une particularité importante du pays, car il est peu probable de trouver un autre cas dans le monde ou une communauté rurale sur cinq déclare avoir une activité minière. Ainsi, 25% des ménages ruraux les plus riches déclarent vivre 26 26 20 Source : op.cité, note No 17, page 33, (INS, 2014). Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale Tableau 5.1 : Services fournis par les Mines dans les communes ayant une activité minière - Pourcentage des communes ayant répondu Oui à la question de savoir si les entreprises minières fournissent le Service mentionné Infrastructure Urbain Semi-Urbain Rural National Ecole 21,4 24,0 3,2 10.2 Centre de santé 21,4 20,0 2,1 8,8 Routes 10,7 20,0 6,4 9,5 Electricité 21,4 28,0 2,1 10,2 Eau 21,4 20,0 4,3 10,2 Maisons 17,9 20,0 5,3 10,2 Autres services 3,6 8,0 0,0 2,0 Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. Tableau 5.2 : Problèmes causés par les Mines dans les communes ayant une activité minière - Pourcentage des communes ayant répondu Oui à la question de savoir si les Mines ont causé le problème mentionné Problèmes Urbain Semi-Urbain Rural National Maladies 67,9 36,0 25,5 35,4 Décès 67,9 32,0 22,3 32,7 Travail des Enfants 78,6 60,0 29,8 44,2 Déperdition Scolaire 82,1 48,0 34,0 45,6 Glissement de Terrain 35,7 36,0 10,6 19,7 Erosion 67,9 36,0 12,8 27,2 Pollution de l'Environnement 71,4 44,0 19,2 33,3 Insécurité 67,9 20,0 16,0 26,5 Prostitution 82,1 64,0 38,3 51,0 Conflit 64,3 24,0 29,8 35,4 Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. 58. L’activité minière génère en effet d’impor- Ces externalités négatives semblent beaucoup plus tantes externalités négatives qui semblent neutra- importantes en milieu urbain qu’en milieu rural où liser, voire dépasser leur impact en terme de le taux de réponses positives est partout largement provision de services sociaux. Les communautés inférieur à la moyenne nationale. L’importance des qui disposent d’activités minières sur leur territoire externalités négatives suggère que l’activité minière affichent un niveau substantiel de nuisances sanitaires accentue les inégalités. Ainsi, les ménages impliqués et sociales causées par ces dernières. En effet, les activités dans l’activité minière seraient mieux lotis, alors que minières sont présentées comme causes de maladies, le reste des ménages se trouverait en train de subir de décès, de travail des enfants, et de déperdition les externalités négatives de cette activité. Ce résultat scolaire par respectivement 35%, 33%, 44% et 46% préliminaire appelle à une analyse approfondie de des communautés. Le Tableau 5.2 ci-dessus résume l’ensemble des effets de l’activité minière sur le bien- l’ensemble des réponses sur la question à propos des être des ménages. problèmes causés par les mines. Ainsi, alors que 10 % des communes déclarent que les mines fournissent des services scolaires (Tableau 5.1), 44% et 45% des communes associent l’activité minière au travail des enfants et à la déperdition scolaire, respectivement. 27 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 6. Développement humain et accessibilités financières et physiques aux services sociaux 6.1. Une dichotomie rural-urbain rural. Cependant, alors que le recours à la médecine moderne est similaire entre villes et campagnes, la presque inexistante au niveau différence réside au niveau du type de médecine des services sociaux de base moderne utilisée. En effet, les ruraux ont beaucoup moins accès aux médecins que les urbains et comptent 59. La dichotomie rural-urbain dans le secteur plus sur les infirmiers. Ainsi, 35% des malades urbains de la santé ne se situe pas au niveau de l’usage ont consulté un médecin contre 12,9% des malades de la médecine moderne ou traditionnelle, mais ruraux (voir Tableau 6.1). Aussi, 70% des malades ruraux au niveau du type de médecine moderne utilisée. ont recours aux centres et postes de santé comme En effet, 89% des malades ayant consulté ont utilisé premier lieu de consultation contre 40% en milieu la médecine moderne et ont été chez un médecin ou urbain. Enfin, 49% des malades urbains ont accès à un un infirmier en milieu urbain et 86% ont fait de même hôpital public ou privé et à une clinique contre 20% des en milieu rural. Seulement 1,3% des personnes ayant malades ruraux. consulté en milieu urbain ont été auprès d’un guéris- seur, un marabout ou un féticheur, et 2,3% en milieu Tableau 6.1 : Répartition des malades en fonction du type de services médicaux utilisés et du milieu d’habitation Personne consultée pour la première fois Urbain Rural National Médecin 34,9 12,9 20,0 Infirmier(ère) 54,3 73,0 67,0 Sage-femme 0,1 0,3 0,2 Agent de santé 1,1 3,1 2,4 Pharmacien 6,0 3,9 4,6 Autre personnel moderne 1,3 3,2 2,6 Guérisseur/tradipraticien 1,3 2,1 1,8 Marabout/féticheur 0,0 0,2 0,1 Autre 1,2 1,4 1,3 Total 100,0 100,0 100,0 Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. 60. La dichotomie urbain-rural n’est pas non plus religieuses, qui gèrent les écoles publiques sous perceptible au niveau de l’éducation primaire, mais convention avec l’Etat, permettant ainsi de maintenir se creuse en faveur du monde urbain avec le niveau le réseau d’écoles sur tout le territoire. Cependant, les d’éducation. Les données de l’enquête 1-2-3 montrent enfants du monde rural sont défavorisés en termes que le taux brut de scolarisation en 2011-2012 dans d’accès au secondaire, et cela est dû à la fois à la le primaire atteignait 109% en milieu urbain et 100% disponibilité du service et à sa charge financière. en milieu rural. Pour le premier cycle du secondaire, ces taux sont de 79% et 57% et pour le dernier cycle du secondaire, ils sont de 74% et 45% respectivement. Ainsi, les différences d’accès à l’éducation primaire sont négligeables voire inexistantes entre milieu urbain et rural. Cela dénote la décentralisation de-facto du 28 28 système éducatif avec l’implication des communautés Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 6.2. L’accessibilité financière, obstacle 6.3. L’accessibilité physique aux majeur à l’utilisation des services infrastructures sociales : Problèmes de santé et de scolarisation de disponibilité et de facilité d’accès 61. La contrainte financière est un obstacle 63. L’accessibilité physique exerce une certaine important qui rend la médecine, aussi bien moderne contrainte à l’usage des services médicaux par les que traditionnelle, hors de portée pour 12% des ménages. L’éloignement de l’infrastructure médicale malades. En effet, 34% des personnes ayant eu un est invoqué comme cause de non-consultation dans problème de santé ont déclaré ne pas avoir consulté un 3,3% des cas au niveau national (1,2% en milieu urbain service de santé, un guérisseur ou un marabout. Parmi et 4,2% en milieu rural). Ainsi, plus de 1% des malades ceux-là, 35% mettent le coût élevé de la consultation congolais n’ont pas d’accès physique aux infrastructures en tête des raisons de non-consultation, avec peu de médicales. Parmi les individus ayant consulté en milieu différence entre le milieu urbain (33%) semi-urbain rural, 25% ont déclaré avoir parcouru plus de 5 km pour (32%) et rural (35%). Parmi les 66% de personnes ayant atteindre le lieu de première consultation, contre 9% consulté, 62% invoque le coût élevé de la consultation en milieu urbain. Les infrastructures médicales existent comme un des principaux problèmes confrontés lors de en moyenne à une distance variant entre 5 km (centre la visite, juste après l’inefficacité du traitement (65%) de santé) et 28 km (hôpital public). En milieu urbain et l’absence de médicament (64%). En somme, entre cette marge est de 3-17 km et en milieu rural elle est de personnes n’ayant pas consulté car le coût est très 8-42 km. Le temps mis pour atteindre ces infrastructures élevé, et celles qui ont trouvé le coût élevé lors de la varie entre 66 minutes (centre de santé) et 148 minutes consultation, les services de santé sont considérés trop (hôpital public) au niveau national. En milieu urbain chers par 52% des malades. cette marge est de 66-115 minutes et en milieu rural elle est de 67-203 minutes22. 62. Malgré la charge financière de l’éducation qui représente une portion importante des dépenses 64. La contrainte d’accessibilité physique parait des ménages, ces derniers consentent à faire des être moins forte dans le cas de la scolarisation, avec sacrifices pour l’enseignement de leurs enfants. cependant un temps de déplacement relativement Les chiffres disponibles montrent que plus de 90% long pour accéder aux écoles. L’éloignement de des individus inscrits dans les écoles et universités de l’infrastructure scolaire est invoquée comme obstacle la RDC paient des frais de scolarité et assimilées, quel à la fréquentation scolaire dans seulement 0,4% des que soit le type de gestion de l’établissement (public cas au niveau national (0,2% en milieu urbain et 0,5% non-conventionné, public conventionné ou privé). Ces en milieu rural). Aussi, la distance moyenne à l’école données suggèrent que, à la différence du cas de la ne semble pas excessive. Ainsi, si nous prenons le cas santé, la très grande majorité des ménages consentent des écoles primaires, la distance moyenne à parcourir à supporter les charges financières nécessaires pour pour atteindre l’école est de 1,6 km au niveau national assurer l’éducation de leurs enfants. Et ces charges (1,1 km en milieu urbain et 2,3 km en milieu rural). sont relativement lourdes pour une population en Cependant, le temps passé pour atteindre l’infrastructure majorité pauvre. En effet, au niveau national, les est trop long, atteignant près d’une heure avec peu de frais scolaires représentent en moyenne 10,3% des variations entre la ville et la campagne23. Ce temps de dépenses non-alimentaires des ménages et 3,8% du transit important souligne à la fois la mauvaise qualité total des dépenses21. Ces ratios augmenteraient de des routes et l’insuffisance et/ou la mauvaise qualité 40% si on ajoute les autres dépenses sur l’éducation, y des moyens de transports. Dans le cas des villes, de compris le transport, l’uniforme et les autres dépenses. sérieux problèmes de circulation semblent être la raison Par conséquent, sur les 24% d’enfants en âge scolaire d’un temps de transit équivalent à celui de la campagne qui n’ont jamais été à l’école ou l’ont abandonnée alors que la distance à parcourir est inférieure de moitié. en 2011/2012, un peu moins de la moitié (soit 11%) Ce résultat est d’autant plus important que les frais de n’ont pas été scolarisés en raison de l’impossibilité de transports scolaires représentent 0,8% des dépenses supporter la charge financière. non-alimentaires des ménages urbains. 22 Source : Calcul des équipes de la Banque Mondiale sur la base des données de l’enquête 1-2-3. Les résultats en intervalles et moyennes sont cohérents avec les calculs plus détaillés effectués 21 Source : Calculs des équipes de la BM, tous cycles confondus. Les par l’INS, page 55 (INS, 2014). mêmes ratios pour l’INS sont respectivement de 5,4% et 1,8%, 23 Source : op.cit., note No 22. Les résultats présentés en moyennes reflétant ainsi une différente méthodologie de calcul de la dépense d’éducation (INS, 2014, page 119). sont cohérents avec les calculs plus détaillés effectués par l’INS, page 54. 29 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 6.4. La scolarisation comme vecteur de promotion socio-économique 65. La scolarisation a un impact important sur dans le cas de la RDC (voir Graphique 6.1). En effet, les le niveau de revenu des individus, et donc sur la données disponibles de l’enquête 1-2-3 montrent que réduction de la pauvreté. La part des diplômés dans 56% des individus qui gagnent un salaire mensuel les catégories de haut revenu est particulièrement de plus de 230.000 FC par mois ont fait des études importante, alors que les individus de faibles revenus supérieures. A l’autre extrême, 70% des individus n’ont généralement pas fait d’études ou se sont arrêtés gagnant moins de 30.000 FC n’ont jamais fait d’études au niveau primaire. Cette réalité est aussi perceptible ou n’ont pas dépassé le primaire. Graphique 6.1 : Composition des catégories de salaires par niveau d’éducation des individus Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. 66. La scolarisation est un phénomène endogène, d’années d’études à leurs enfants est aussi lié au fait à savoir que les enfants vivant dans un ménage que ces mêmes familles ont plus de moyens financiers. où le chef a un niveau d’instruction élevé ont Ainsi, nous retrouvons le poids important en RDC de la plus de chance de faire des études que les autres. charge financière de la scolarisation, qui constitue un L’expérience internationale montre que les enfants obstacle à une plus longue scolarisation notamment nés dans des familles de diplômés ont tendance à des plus pauvres. La scolarisation semble créer un cercle faire plus d’études. La RDC n’échappe pas à cette règle, vertueux ou plus de scolarisation donne à la fois une (voir Graphique 6.2) avec notamment 80% des enfants demande sociale pour encore plus de scolarisation et ayant fait entre 13 et 16 années d’études appartenant aussi plus de moyens financiers pour subvenir à cette à des familles avec un chef de ménage ayant un niveau demande. Le rôle de l’Etat est crucial dans la promotion d’étude secondaire et/ou supérieur. Aussi, 86% des de l’égalité des chances en finançant un enseignement enfants ayant fait des études supérieures appartiennent public de qualité, notamment au profit des plus pauvres. aux mêmes catégories de ménages. Cependant, la plus 30 30 grande capacité des familles de diplômés à assurer plus Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 67. Une plus grande scolarisation semble aussi être de nature financière et influence le recours aux promouvoir un plus grand usage de la médecine services à l’intérieur même de la médecine moderne. moderne, mais le clivage financier semble En effet, ce n’est que lorsque le chef de ménage a l’emporter sur le clivage culturel. Le recours aux effectué des études supérieures que la consultation guérisseurs et féticheurs baisse de 2,5% pour les auprès des médecins l’emporte sur les consultations malades vivant dans un ménage dont le chef est non auprès des infirmiers. Ces ménages sont ceux aussi qui scolarisé ou possède un niveau d’éducation primaire ont les niveaux de revenus les plus élevés. En somme, à 0,3% dans le cas d’un chef de ménage ayant fait des la population possède la culture de l’utilisation de études supérieurs (voir Tableau 6.2). Cependant, le la médecine moderne, mais n’en a pas toujours les clivage reste modeste et souligne que la population moyens, d’où le rôle escompté de l’Etat dans la livraison congolaise est dans sa plus grande majorité adepte de la de services médicaux de qualité. médecine moderne. Le clivage le plus important semble Graphique 6.2 : Niveau d’instruction du Chef de ménage et nombre d’années d’études des enfants Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. Les résultats montrent les mêmes tendances que ceux de l’INS, page 45 (INS, 2014). Les différences sont dues à deux éléments : (i) la prise en considération du nombre d’années d’études des enfants alors que l’INS considère le cycle ; et (ii) la prise en compte de l’ensemble de la population, alors que l’INS se limite aux plus de 25 ans. Tableau 6.2 : Relation entre éducation et utilisation des services médicaux – Répartition des individus utilisant les services médicaux par niveau d’instruction du Chef de ménage Personne consultée Niveau d'éducation du Chef de Ménage pour la première fois Non scolarisé Primaire Secondaire Supérieur Total Médecin 16,2 16,1 20,2 48,3 20,0 Infirmier(ère) 69,2 69,7 67,3 44,4 67,0 Sage-femme 0,2 0,3 0,2 0,0 0,2 Agent de santé 3,0 3,0 2,1 1,2 2,4 Pharmacien 4,7 3,9 5,0 3,4 4,6 Autre personnel moderne 3,0 3,2 2,2 1,2 2,6 Guérisseur/tradipraticien 2,2 2,5 1,5 0,3 1,8 Marabout/féticheur 0,2 0,1 0,2 0,0 0,1 Autre 1,3 1,3 1,4 1,3 1,3 Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. 31 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 7. Les différences liées au genre : Les femmes sont désavantagées en termes de revenus et d’accès aux services médicaux et à l’éducation 7.1. Les femmes travaillent presque autant que les hommes mais gagnent beaucoup moins 68. Les disparités de revenus entre hommes et En milieu rural, l’inégalité est plus atténuée, mais la part femmes sont importantes, notamment en milieu des hommes et femmes qui gagnent moins de 30.000 urbain. Les personnes déclarant travailler consacrent FC est le double de ce qui est observé en milieu urbain. 10 mois par an à leur emploi principal et 35 heures par semaine. Ces moyennes varient très peu entre les hommes et les femmes qui travaillent, les deux 69. L’éducation améliore la rémunération des groupes travaillant 10 mois par an en moyenne et travailleurs, mais l’impact chez les femmes est 36 heures par semaine pour les hommes contre 34 moindre. La rémunération augmente avec le niveau heures pour les femmes24. Cependant, malgré un temps d’éducation, cependant, cela est moins vrai dans le presque identique passé au travail, les disparités de cas des femmes. En effet, alors que 47% des hommes rémunération entre les deux groupes sont importantes, ayant un niveau d’enseignement supérieur perçoivent notamment en milieu urbain. En effet, plus de 63% une rémunération mensuelle de plus de 130.000 FC, ce des femmes déclarent un salaire mensuel de moins ratio n’est que de 38% dans le cas des femmes. Aussi, de 30.000 FC contre 43% des hommes. Cette inégalité 39% des hommes ayant un niveau d’enseignement est plus forte en milieu urbain ou la part des femmes supérieur gagnent plus de 150.000 FC contre seulement qui gagnent moins de 30.000 FC parmi les femmes qui 32% des femmes. travaillent est presque le double de la part des hommes. Tableau 7.1 : Répartition des travailleurs par salaire mensuel, sexe et milieux d’habitation Urbain Rural National Tranche de salaire mensuel (en FC) Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Total Moins de 30.000 22,8 45,0 55,9 70,6 43,3 62,9 53,5 [30.000 ; 80.000] 32,0 32,2 33,2 26,1 32,7 27,9 30,2 [80.000 ; 130 000] 16,0 10,1 7,4 2,6 10,7 4,8 7,7 [130.000 ; 150.000] 7,3 4,4 2,2 0,5 4,1 1,7 2,8 [150.000 ; 180.000] 5,8 2,1 0,3 0,1 2,4 0,7 1,5 [180.000 ; 230.000] 5,3 2,9 0,5 0,1 2,3 0,9 1,6 Plus de 230.000 10,8 3,3 0,4 0,0 4,4 1,0 2,6 Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. Les résultats montrent les mêmes tendances que ceux de l’INS, page 72 (INS, 2014), notamment s’agissant de l’écart rural-urbain et homme-femme. La différence principale tient au fait que les équipes de la BM ont fait le calcul en fonction des tranches de salaires mensuelles alors que l’INS a calculé des salaires moyens et médians. 24 Source : Calculs des équipes de la Banque Mondiale sur la base des données de l’enquête 1-2-3. Les résultats en moyenne sont 32 32 similaires à ceux présentés en temps médian par l’INS, page 69 (INS, 2014). Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale 7.2. Une médecine prénatale et natale qui coûte chère et des résultats qui se font attendre 70. Une proportion relativement importante des 71. La grossesse et l’accouchement occasionnent femmes congolaises déclarent ne pas avoir été des charges financières considérables pour les suivies lors de leur grossesse. Au niveau national, ménages congolais. Les ménages congolais soutien- 17% des femmes déclarent ne pas avoir été suivies nent des frais considérables pour le suivi de la grossesse pendant la grossesse. Cette proportion atteint 20% et l’accouchement. En effet, au niveau national, le suivi dans le monde rural et 22% chez les femmes n’ayant d’une grossesse représente 8% de la dépense annuel pas fait d’études. Un examen plus détaillé montre moyenne et 21% de la dépense non-alimentaire. que 52% des grossesses qui n’ont pas été suivi Cependant, les ménages sont loin d’y retrouver leur n’ont pas abouti à une naissance vivante, contre compte car 1/5 des grossesses suivies, et donc occasion- 20% des grossesses qui ont été suivies, et cela avec nant des frais médicaux, n’aboutissent pas à des peu de différence entre les milieux rural et urbain naissances vivantes. Aussi, ces montants élevés des (voir Graphique 7.1). La proportion des grossesses dépenses jouent certainement un rôle important dans n’aboutissant pas à une naissance atteint 25% au le fait que 17% des femmes n’ont pas eu recours à un niveau national. suivi pendant leur grossesse. Enfin, l’accouchement représente une charge importante pour les ménages avec 12% du total des dépenses totales et 33% des dépenses non-alimentaires25. Graphique 7.1 : Répartition des femmes en fonction de grossesse suivie, naissance vivante et milieu d’habitation Naissance non vivante Naissance vivante Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. 25 Source : Calculs des équipes de la Banque Mondiale sur la base des données de l’enquête 1-2-3. 33 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 7.3. Aller à l’école ou chercher de l’eau 74. L’allocation du temps des filles montrent que les activités ménagères et d’autres activités et s’occuper de sa famille ? de support à la famille, s’effectuent au détriment Le dilemme des filles congolaises de la scolarisation. Mêmes scolarisées, les filles sont désavantagées par rapport aux garçons, surtout au 72. L’écart du taux de scolarisation entre les filles secondaire (voir Tableau 7.3). En effet, pour les élèves et les garçons se creuse après le primaire, et l’effet du primaire qui étudient et effectuent des tâches de la dichotomie urbain-rural semble important au domestiques, les garçons allouent 66% de leur temps niveau du secondaire. Les données de l’enquête 1-2- aux études contre 63% pour les filles. L’écart se creuse 3 montrent un taux brut de scolarisation au primaire au secondaire car les garçons continuent à allouer 63% similaire entre les filles et les garçons en milieu urbain. de leur temps aux études contre seulement 56% pour L’écart entre les deux sexes se creuse en milieu rural les filles. et avec l’avancement dans le cycle d’étude, comme le montre le Tableau 7.2. En effet non seulement le taux 75. La diversion du temps au détriment des de scolarisation des filles au secondaire en monde rural études pour subvenir aux besoins en eau est un est inférieur à celui des garçons, mais l’écart est encore exemple éloquent de l’impact des déficiences plus important en comparaison avec les filles vivant en d’infrastructure sur les indicateurs sociaux. En milieu urbain. effet, une fille du primaire consacre 15% de son temps pour chercher de l’eau, et une fille du secondaire 73. L’accessibilité financière continue à être une consacre 16% de son temps pour cette même activité. raison fondamentale de la non-scolarisation des Pour les garçons, ces ratios sont de 14% et 13% filles, mais la grossesse et le mariage deviennent respectivement. Les différences en nombre d’heures une raison d’abandon pour les filles du secondaire. sont plus frappantes. Ainsi, une fille du secondaire Un examen de près du profil des filles en âge scolaire qui consacre 6,8 heures par semaine à chercher de l’eau, lors de l’enquête ont déclaré avoir abandonné l’école du bois et à faire le marché, alors qu’un garçon passe en 2011/2012 montre que 49% ont abandonné pour 2 heures de moins par semaine à effectuer les mêmes des raisons financières. Cependant, 33% des filles qui tâches. En effet, la corvée d’eau diminuerait le temps de étaient en âge scolaire du deuxième cycle du secondaire scolarisation de 5% à 10% pour les filles au primaire et en 2011/2012 ont abandonné l’école pour cause de au secondaire. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, grossesse ou de mariage. Ainsi, les raisons culturelles un meilleur accès des ménages à l’eau courante peut et sociales contribuent fortement à l’abandon de l’école contribuer à l’amélioration des indicateurs du secteur par les filles, notamment dans le secondaire, alors de l’enseignement et à l’équité du secteur en faveur des que dans le cas des garçons, les raisons financières et filles. économiques continuent à prévaloir26. Tableau 7.2 : Taux Brut de Scolarisation par Sexe – En fonction du cycle Scolaire et du Milieu d’Habitation27 Urbain Rural National Taux Brut de Scolarisation en 2011-2012 Garçons Filles Garçons Filles Garçons Filles Primaire 109 109 103 97 105 101 Premier Cycle du Secondaire 82 75 69 44 74 57 Dernier Cycle du Secondaire 79 69 59 30 67 47 Source : Calculs des équipes de la Banque Mondiale sur la base des données de l’enquête 1-2-3. Les chiffres sont proches et les tendances sont similaires à ceux présentés par l’INS, page 41 (INS, 2014). Les différences sont dues au fait que les équipes de la BM ont considéré les deux cycles du secondaire séparément et à l’utilisation de pondérations différentes. 27 Sources : calcul des équipes de la Banque Mondiale sur la base des données de l’enquête 1-2-3. Les chiffres sont proches et les tendances sont similaires à ceux présentés par l’INS, page 41 (INS, 2014). Les différences sont dues au fait que les équipes de la BM ont considéré les deux cycles du secondaire séparément et à l’utilisation de pondérations différentes. 27 Source : calcul des équipes de la Banque Mondiale sur la base des données de l’enquête 1-2-3. Les chiffres sont proches et les 26 Source : op.cité, note No 22. Les résultats sont comparables à ceux tendances sont similaires à ceux présentés par l’INS, page 41 (INS, de l’INS, page 43. Les équipes de la BM se sont focalisés sur les filles 2014). Les différences sont dues au fait que les équipes de la BM ont 34 34 qui étaient en âge scolaire en 2011/2012, et plus particulièrement sur celles en âge scolaire du deuxième cycle du secondaire. considéré les deux cycles du secondaire séparément et à l’utilisation de pondérations différentes. Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale Tableau 7.3 : Allocation du temps des élèves du primaire et du secondaire qui étudient et effectuent des tâches domestiques - En fonction du niveau de scolarisation et du genre National Garçons Filles Allocation du Temps Prim. Secon. Prim. Secon. Prim. Secon. Temps alloués aux études scolaires 64,0 59,4 65,7 63,3 62,5 55,9 Temps alloués aux tâches domestiques, dont : 36,0 40,6 34,3 36,7 37,5 44,1 • Travaux domestiques dans sa propre maison, 16,2 18,5 14,5 15,5 17,7 21,2 sans rémunération • Chercher de L'eau ou du bois, faire le marché 14,9 14,7 14,3 13,3 15,4 15,9 pour son ménage • Construction de sa propre maison 1,9 2,9 2,2 3,0 1,7 2,7 • Prestation de services gratuits à sa communauté 3,0 4,6 3,3 4,9 2,7 4,2 Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 Source : Calculs de l’équipe de la BM sur la base des données de l’enquête 1-2-3. 76. Il existe une causalité importante entre Aussi, la stratégie nationale de lutte contre les violences la violence contre les femmes et le temps et la basées sur le genre notait en 2009 que « les femmes, les distance à parcourir pour trouver l’eau. En plus de jeunes et petites filles parcourent de longues distances la perte d’heure de scolarisation que provoquent les pour des corvées d’eau et de bois de chauffage et/ tâches ménagères et les corvées d’eau, ces dernières ou pour des marchés, traversant des espaces isolés et conduisent à une plus grande exposition des filles aux insécurisés ». Enfin, l’ONG OBJECTIF O conclut pour l’ASS agressions et à l’augmentation de la violence contre que : « donner accès à l’eau potable par l’installation de les femmes. L’enquête 1-2-3 ne permet pas de mesurer structures d’approvisionnement (tels que les puits, les cette causalité entre corvée d’eau et exposition aux pompes, etc.), c’est améliorer le quotidien et la condition agressions, néanmoins plusieurs rapports officiels et des femmes en contribuant à l’acquisition de leur des ONG la confirment. En effet, l’ONG Congolaise AFEDE indépendance et en leur offrant des perspectives d’ave- dans son rapport 2007-2008 appelait à se mobiliser nir »29. Ainsi, pour la RDC, investir dans le secteur de « … afin d’améliorer les conditions de vie des femmes, des l’eau est aussi un investissement dans la scolarisation, filles et des petites filles qui sont la proie des agressions la sécurité et le bien-être des filles. sexuelles lors de la corvée de l’eau ... »28. 28 Voir : http://www.afede.net/ 29 Voir : http://www.objectifo.org/leau-ressource-des-femmes/ 35 CONCLUSIONS PRINCIPALES troisième PARTIE Briser le cercle vicieux de la fragilité 37 Rapport de Suivi de la Situation Economique et Financière 2ème édition - Décembre 2014 77. Les défis qu’affronte la RDC sont de nature 80. La mobilisation des recettes des secteurs structurelle et couvrent un large spectre de domaines des ressources naturelles est indispensable économiques et sociaux interdépendants. La RDC se pour financer le développement à long terme trouve confrontée à des problèmes de compétition pour et maintenir la stabilité macroéconomique. La l’utilisation des richesses du sol et du sous-sol qui sont stabilité macroéconomique est un acquis auquel le devenus sources de fragilité et de conflits sur fond de Gouvernement s’attache à juste titre. En effet, l’Histoire pauvreté et de grands retards dans le développement. de la RDC montre le coût économique que peuvent La fragilité est devenue un phénomène autoentretenu engendrer des déséquilibres macroéconomiques d’une ou les griefs suscitent des violences qui génèrent grande ampleur. Cependant, contrôler les déficits en d’autres griefs, notamment liés aux déplacements, qui compressant les dépenses sociales et d’infrastructure deviennent à leur tour source de nouvelles violences. aurait des conséquences néfastes sur le long terme. Aussi, miser sur l’aide internationale ne peut qu’être 78. Briser le cercle vicieux exige une présence de transitoire par définition. La solution pour la RDC l’Etat, sous forme sécuritaire, mais aussi pour créer réside dans une meilleure mobilisation des recettes des opportunités de développement durable pour domestiques, notamment celles provenant du secteur la population. La résolution des problèmes de fragilité des ressources naturelles. Cette mobilisation ne peut se endémique ne peut se faire sans l’intervention de l’Etat, et faire sans une réforme du cadre légale et institutionnel cette intervention exige : (i) la définition d’une stratégie du secteur des ressources naturelles. de développement de long terme avec des objectifs clairs sur les court, moyen, et long termes ; (ii) la mise 81. La RDC dispose des ressources potentielles en place des institutions nécessaires pour la conduite de pour son développement, et le soutien interna- la stratégie et l’atteinte des objectifs ; et (iii) la mise à la tional ne devrait être qu’un catalyseur permettant disposition du Gouvernement des ressources humaines d’initier les politiques nécessaires. Les ressources et matérielles pour faire fonctionner les institutions et naturelles et l’activité minière, aussi bien aux niveaux financer les programmes de développements. macroéconomique que microéconomique, artisanal et industriel, sont des sources de promotion économique 79. Pour maximiser l’impact de l’intervention de et sociale. L’extraction industrielle devrait mettre des l’Etat, il convient de regarder les indicateurs sociaux recettes importantes à la disposition de l’Etat pour et de revenus qui montrent les pistes optimales financer ses programmes de développement. La d’intervention. La récente enquête 1-2-3 est riche prospection artisanale pourrait être source d’emplois en enseignement. En effet, elle montre que l’activité et de revenus pour la population locale et devrait minière artisanale est répandue en RDC et qu’elle a un dynamiser l’économie locale. L’éducation, la santé, impact positif sur l’emploi. Cependant, les externalités et l’infrastructure sont des conditions nécessaires négatives sont importantes et exigent l’intervention de pour relancer une dynamique positive de croissance l’Etat en termes de régulation pour maximiser les effets et de développement. A ce niveau, l’engagement positifs pour les communes ayant des activités minières. du Gouvernement est crucial. Les bailleurs de fonds L’enquête montre aussi que l’enseignement et la santé peuvent jouer le rôle de catalyseur pour la mise en coûtent chers à la population. Les résultats des OMD place des programmes et former les structures capables restent toutefois faibles, ce qui suggère non seulement de les mener à bien sur le long terme. Ceci est vrai pour la nécessité de plus de financement public, mais aussi les infrastructures et les secteurs sociaux, mais aussi d’une meilleure utilisation de ces financements pour pour d’autres projets tels les pôles de croissance et la fournir des services de qualité à la population. Enfin, reconstruction de l’Est.  l’enquête montre que les infrastructures exercent un rôle positif sur les indicateurs sociaux. Ainsi, de meilleures routes faciliteraient à la fois l’accès aux services médicaux et aux écoles. Aussi, les corvées d’eau, dues à l’absence d’eau courante, réduisent le taux de participation scolaire, notamment des filles. 38 38 Renforcer l’Etat et Transformer la Richesse Minière en Vecteur de Croissance, de Développement et de Cohésion Nationale Bibliographie Africa Progress Panel, Equity in Extractives : Stewarding Africa’s Natural Resources for All, Africa Progress Report, 2013. Action des Femmes pour le Développement, Rapports des Activités 2007-2008. Banque Centrale du Congo, Direction Générale de la Politique Monétaire et des Opérations Bancaires, Direction de la Recherche et des Statistiques, « Condensé Hebdomadaire d’Informations Statistiques », No 12/2014, Kinshasa, le 21 Mars 2014. Banque Centrale du Congo, Direction Générale de la Politique Monétaire et des Opérations Bancaires, Direction de la Recherche et des Statistiques, « Bulletin Mensuel D’Informations Statistiques », Février 2014. 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