1- Ir De l' ÉVIDENCE empiriqueà la formulation de POLIT Q UES THE WOLD BANK IBR ID Identification des méthodes qui fonctionnent, pour des programmes et politiques plus efficaces Février 2015 HAITI : les Ecoles Privées Peuvent-Elles Aider à Scolariser les Enfants Pauvres ? Dans le monde entier, près de 57 millions d'enfants en âge œuvre une telle stratégie, les spécialistes du développement et de fréquenter l'école primaire n'ont pas la chance d'être les responsables politiques doivent se pencher sur de nombreux scolarisés. Plusieurs facteurs les en empêchent : la pauvreté, des problèmes ; entre autres, comment atteindre la population ciblée problèmes de santé et des ou comment assurer que les écoles conservent leur qualité. établissements surpeuplés La Banque mondiale a travaillé de pair avec les pays pour ou éloignés. Le problème assurer une inscription universelle à l'école primaire, l'un des est ressenti plus Objectifs du Millénaire pour le Développement des Nations fortement en Afrique Unies, pour lequel l'objectif fixé pour 2015 n'a pas été réalisé subsaharienne, où 30 à temps. En Haïti, où la grande majorité des écoles primaires millions d'enfants en ne sont pas publiques et sont payantes, la Banque mondiale âge de fréquenter l'école et d'autres donateurs ont aidé le gouvernement à lancer un primaire ne sont pas programme d'exemption des frais de scolarité, afin d'améliorer scolarisés. Cependant, de le taux de scolarisation. Ce programme verse aux écoles une nombreux pays dans d'autres régions du monde ont également du subvention pour chaque nouvel élève entrant en première année, mal à assurer une inscription universelle à l'école primaire. Dans et leur impose de ne pas faire payer de frais de scolarité à ces certains endroits, les spécialistes de l'éducation et les responsables élèves. La subvention continue à être versée jusqu'en sixième politiques se tournent vers les écoles privées à faibles coûts- année. Une évaluation d'impact a révélé que le programme gérées par des prestataires privés, des groupes confessionnels aide les familles à éduquer leurs enfants gratuitement, tandis ou des organisations non gouvernementales-pour éduquer que le nombre d'enfants qui redoublent a chuté. Tandis que le davantage d'enfants, en particulier lorsque le système public gouvernement d'Haïti continue de développer sa stratégie n'y parvient pas. Afin de rendre ces écoles privées accessibles, pour assurer que tous les enfants aillent à l'école primaire, les les gouvernements versent en général une subvention par élève, résultats de l'évaluation d'impact aident les spécialistes du censée couvrir les frais de scolarité. En contrepartie, les écoles développement et les responsables politiques à comprendre s'engagent à ne rien faire payer aux familles. Avant de mettre en le potentiel et les limites de tels partenariats public-privé. Le système scolaire d'Haïti est dominé par le secteur non public fréquenter l'école primaire n'y étaient pas scolarisés ; ceux qui (dit privé), constitué d'écoles à but lucratif, confessionnelles, ou allaient à l'école étaient bien plus âgés que ce qu'ils n'auraient dirigées par un autre groupe non gouvernemental. Au moment dû être, en partie à cause du fait que les familles interrompent du recensement scolaire effectué il y a un peu plus de dix ans, puis reprennent la scolarisation de leurs enfants en fonction de plus de 90 pour cent des écoles primaires étaient non publiques, l'état de leurs finances. et accueillaient plus de 80 pour cent des élèves de primaire. En 2006, le gouvernement d'Haïti et la Banque mondiale La plupart de ces écoles étaient payantes. Leur coût moyen, ont développé un programme destiné à améliorer le taux de d'environ 80 $ par an sans compter les livres, les uniformes et scolarisation en versant des subventions aux écoles payantes le transport, rend l'éducation de base hors de portée pour de pour couvrir les frais des élèves pauvres. Il était logique de faire nombreux enfants. Une enquête réalisée quelques années plus appel à ces écoles : faire en sorte qu'Haïti atteigne l'objectif tard a révélé que la moitié environ des enfants haïtiens en âge de d'enseignement universel ne pouvait vraisemblablement se faire sans l'aide de 90 pour cent des établissements. En Afin de cibler les écoles accueillant des élèves pauvres, général, les écoles privées n'étaient pas autant fréquentées que le montant de la subvention a été fixé à 90 $ par an, soit un les écoles publiques, et jouissaient d'une plus grande latitude peu plus que les frais de scolarité moyens de l'époque. Ainsi, pour répondre à un accroissement de la demande. Dans le les écoles ayant des frais de scolarité supérieurs, destinées aux cadre du programme, les subventions couvrant les frais de élèves plus aisés, seraient naturellement exclues du programme. scolarité bénéficiaient aux nouveaux élèves âgés de six à huit Le programme a démarré en 2007 dans deux endroits du pays ans qui rentraient pour la première fois en première année. et il a été élargi lors de l'année scolaire 2008-2009. À l'heure Les subventions continueraient ensuite à être versées jusqu'en actuelle, le programme profite à plus de 200 000 élèves dans sixième année, et chaque nouvelle vague d'élèves de première plus de 1100 écoles. année pourrait bénéficier de la même subvention. Évaluation Lorsque le programme a été élargi à cinq nouveaux Les chercheurs ont utilisé les recensements scolaires de « départements » lors de l'année scolaire 2008-2009, les fonds 2011-2012 et 2002-2003 pour identifier les écoles initialement étaient limités et toutes les écoles ne pouvaient pas être in- candidates, à des fins d'évaluation. Ils ont identifié 64 pour clues. Le gouvernement et la Banque mondiale se sont accor- cent des écoles candidates dans le recensement de 2011- dés sur le fait qu'une sélection aléatoire était le moyen le plus 2012, et 55 pour cent d'entre elles ont été identifiées dans équitable de sélectionner 547 écoles parmi les 1034 écoles le premier recensement. Comme aucune donnée initiale n'a éligibles. L'échantillon a été en outre divisé de manière à ce été recueillie au lancement du programme, les chercheurs que dans chaque commune soit sélectionnée au moins une utilisent le recensement de 2002-2003 en guise de point de école (Haïti est constitué de 10 départements administratifs, départ. Les écoles étaient similaires au démarrage, selon des eux-mêmes divisés en communes). Cela a permis de cibler critères d'observation tels que l'infrastructure, le matériel davantage les zones rurales. pédagogique, le personnel et le nombre d'élèves. Résultats Les effectifs ont augmenté dans les écoles ayant reçu 16 élèves en moyenne, tandis que les écoles subventionnées des subventions... en ont gagné 78 en moyenne. Ces chiffres suggèrent que certains élèves ont peut-être changé d'école pour profiter de Le nombre d'élèves des années une à quatre a augmenté l'exemption des frais de scolarité. La forte hausse des effectifs jusqu'à 88 élèves par école participante en moyenne. Cette semble indiquer que le programme attire des enfants qui ne augmentation reflète le fait que les élèves qui ont commencé seraient sinon pas scolarisés, mais l'évaluation ne peut pas à bénéficier du programme en première année sont établir avec certitude s'il s'agit bien de ce phénomène, ou si maintenant en quatrième année et sont toujours exempts de l'augmentation est due à des élèves qui quittent des écoles frais de scolarité, tandis que les élèves rentrés par la suite en payantes. première année bénéficient également du programme. Cependant, l'évaluation n'a pas pu mesurer le ... et le pourcentage des élèves plus âgés que leur pourcentage de ces élèves supplémentaires qui serait allé en cohorte a diminué. école publique en l'absence du programme, ou aurait payé une école privée si nécessaire. Une légère baisse des effectifs L'exemption des frais de scolarité a allégé la charge financière a été constatée dans les écoles témoins-ces écoles ont perdu que représente l'éducation des enfants pour les familles, ce Cette note récapitule les résultats du document de recherche n° 7175 « IncreasingAccess by Waiving Tuition: Evidence From Haiti» (améliorer l'accès à l'éducation en supprimant les frais de scolarité: résultats d'un programme en Haïti), écrit par Melissa A. Adelman, Peter A. Holland, Banque mondiale, janvier 2015. qui a peut-être pu leur permettre d'envoyer leurs enfants à élèves, les écoles devaient donner aux élèves au moins l'école plus régulièrement. En Haïti, les familles qui ont du trois manuels scolaires, et elles ne pouvaient pas avoir mal à payer pour l'école retardent souvent la scolarisation de plus de deux classes par niveau qui acceptent des élèves leurs enfants, puis les scolarisent de façon discontinue, au gré subventionnés, afin de limiter les coûts du programme et de l'état de leurs finances. Cela signifie que les enfants sont de répartir les bénéficiaires entre plusieurs écoles. souvent plus âgés que ce qu'ils ne devraient être, par rapport La plupart des écoles ont pu satisfaire au moins à la classe dans laquelle ils sont : en effet, lorsqu'ils retournent certaines conditions, mais celles qui ne les satisfaisaient pas à l'école, ils reviennent dans la classe qu'ils ont abandonné n'étaient pas exclues du programme, car le gouvernement ou celle qu'ils ont manqué. De même, les enfants redoublent n'était pas en mesure de faire respecter ces règles. Presque souvent lorsqu'ils n'ont pas été suffisamment présents à l'école pendant l'année. Dans les écoles ayant droit aux subventions, le pourcentage d'élèves dont l'âge dépasse de deux ans ou plus l'âge correspondant à leur classe, a diminué de 10 points de pourcentage. Il est intéressant de noter que cette diminution a même été observée chez les élèves de cinquième et sixième année, qui pourtant ne pouvaient pas être exemptés de leurs frais de scolarité, car ils étaient déjà scolarisés au démarrage du programme. Les chercheurs ont suggéré que les écoles inclues dans le programme ont peut-être modifié leurs politiques, afin de faire entrer davantage d'enfants à l'école au bon âge. Trois ans plus tard, la plupart des écoles pouvant bénéficier du programme de subvention des frais de scolarité étaient encore ouvertes et formaient des élèves. toutes les écoles participantes n'imposent pas de frais aux D'après le second recensement scolaire, 76 pour cent des parents, maintiennent les effectifs des classes en dessous écoles choisies trois ans plus tôt pour participer au programme de 45 élèves, et possèdent un conseil d'établissement actif. étaient toujours ouvertes. Il a été plus difficile de suivre les Cependant, certaines écoles ne respectent pas au moins une écoles qui ne pouvaient pas être subventionnées. Cinquante des règles du programme. Par exemple, elles fournissent pour cent ont été identifiées dans le recensement, mais les moins de trois manuels scolaires par élève, n'apportent pas autres n'ont pas pu être trouvées. Elles ont peut-être fermé, d'améliorations physiques à l'école, ou ne tiennent pas de ou ont déménagé ou changé de nom, comme c'est souvent registres comptables détaillés. le cas parmi les écoles payantes non confessionnelles en Haïti. Dans tous les cas, il est possible que le fait de pouvoir On pouvait craindre que les écoles surchargent les compter sur le paiement régulier des frais de scolarité-le classes pour recevoir plus d'argent, mais en fait, les versement de subventions par le gouvernement, au départ écoles ont répondu à l'augmentation des effectifs pour les élèves entrant en première année-a aidé les écoles en embauchant plus d'enseignants. Les effectifs du programme à planifier leur avenir et à poursuivre leurs des classes sont donc restés les mêmes. activités sous le même nom et au même endroit. Parmi les écoles participantes, les effectifs des classes sont Les écoles ont également réussi à satisfaire à la restés stables malgré une hausse de l'effectif total, grâce au fait plupart des règles imposées par le programme, liées que les écoles ont embauché un enseignant supplémentaire aux effectifs des classes, aux autorisations et aux en moyenne. Parmi les écoles non subventionnées, une baisse manuels scolaires disponibles. relativement faible des effectifs a provoqué une diminution du nombre d'élèves par classe. Ainsi, après trois ans de mise Le but du programme était d'envoyer davantage d'élèves en oeuvre du programme, les écoles participantes avaient en à l'école primaire, sans se retrouver avec des classes moyenne huit élèves de plus par classe que dans les écoles surpeuplées où les élèves ne puissent pas apprendre. En témoin, sans toutefois dépasser le maximum de 45 élèves par plus de devoir limiter les classes à un maximum de 45 enseignant imposé par le programme. Le programme a probablement contribué à la d'élèves scolarisés et en âge d'aller à l'école primaire) était hausse du taux de scolarisation au niveau national d'environ 50 à 60 pour cent parmi les enfants en âge de en Haïti, observée au cours de la dernière décennie. fréquenter l'école primaire. En 2012, après cinq ans de mise en oeuvre du programme, le taux de scolarisation s'élevait à En Haïti, avant le lancement du programme, le taux net 70 à 80 pour cent. de scolarisation au niveau primaire (c'est-à-dire le nombre Condlusion Tandis que l'on se rapproche d'un enseignement primaire suffisamment élevés pour les empêcher d'envoyer leurs enfants universel, il devient de plus en plus difficile d'atteindre les à l'école, même lorsque celle-ci est « gratuite » par ailleurs. De derniers enfants qui ne sont pas scolarisés. Il va falloir de la plus, de nombreuses communautés, en particulier en milieu créativité pour réussir à envoyer tous les enfants à l'école. Etant rural, n'ont pas d'école située à une distance raisonnable. Il se donné la situation particulière de l'enseignement en Haïti-où peut que plusieurs mesures soient nécessaires pour surmonter peu d'écoles sont gérées par l'Etat-, il a fallu trouver un moyen ces obstacles, comme la construction de nouvelles écoles ou d'impliquer le secteur non public. Choisir de subventionner le versement d'allocations en espèces aux familles. En même les frais de scolarité a permis au gouvernement de s'appuyer temps, il faut contrôler le niveau des écoles, pour garantir sur le réseau d'écoles existant, plutôt que de construire une qu'aller à l'école permette d'apprendre. Le programme mis offre parallèle. Ce type d'approche pourrait être envisagé en place en Haïti aide clairement les familles à éduquer dans des pays où le système scolaire public est très faible, ou leurs jeunes enfants gratuitement, ce qui peut alléger leurs si les écoles ont été détruites par des conflits ou des chocs charges financières et leur permettre de dépenser de l'argent climatiques. Financer des écoles privées en subventionnant pour continuer à scolariser leurs enfants plus âgés. D'autres leurs frais de scolarité peut rendre l'éducation plus accessible évaluations sont nécessaires pour recueillir des données sur aux pauvres, et lier l'argent au respect de certaines normes l'impact de ces programmes sur les écoles non subventionnées, peut garantir que les élèves puissent apprendre. et pour comprendre comment ajuster ces programmes afin Cependant, subventionner les frais de scolarité n'est d'améliorer simultanément l'accès et la qualité de l'éducation. peut-être pas suffisant pour assurer la scolarisation de tous « C'est uniquement lorsque nous aurons réussi à asseoir tous les les enfants en âge de fréquenter l'école primaire. Pour les enfants de ce pays sur les bancs de l'école, que nous serons en mesure familles pauvres, il se peut que les coûts supplémentaires liés d'offrir à tous les haitiens... la possibilité de se construire un avenir à la scolarisation, dont les uniformes et le transport, ainsi que avec respect et dignité. » le coût d'opportunité lié à la main d'œuvre perdue, soient Président Michel Martelly, août 2014, journal Haïti Libre Le Fonds d'évaluation d'impact stratégique, qui appartient au Groupe de la Banque Mondiale, soutient et diffuse les travaux d'évaluation d'impact de projets de développement destinés à lutter contre la pauvreté. L'objectif est de collecter et d'exploiter des données empiriques, afin d'aider les gouvernements et les organismes de développement à concevoir et à mettre en ouvre les politiques les plus appropriées et les plus efficaces pour améliorer les opportunités en matière d'éducation, de santé et d'emploi dans les pays en développement. Pour plus d'informations sur qui nous sommes et ce que nous faisons, voir : http://www.worldbank.org/sief. La série de notes périodiques « De l'Évidence empirique à la formulation de Politiques » est produite par le SIEF avec l'appui généreux du Département du développement international du gouvernement britannique. THE WORLD BANK IBRD 'IDA LA BANQUE MONDIALE, FONDS D'EVALUATION D'IMPACT STRATEGIQUE 1818 H STREET, NW WASHINGTON, DC 20433 Produit par le Fonds d'évaluation d'impact stratégique Éditrice et rédactrice de la série : Aliza Marcus