92914 République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables Revue des Dépenses Publiques du Burundi OctobrE 2014 B République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables OctobRE 2014 Banque mondiale Cover Design and Text Layout:Duina Reyes Gérer Bakovic République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: les compromis pour promouvoir des réformes durables i Tous droits réservés Cette publication a été réalisée par le personnel de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement/Banque mondiale. Les observations, interprétations et conclusions qu’elle contient ne reflètent pas nécessairement l’option du Conseil d’administration de la banque mondiale ou des pays qu’il représente. La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données contenues dans cet ouvrage. Les frontières, les couleurs, les dénominations et toute autre information figurant sur les cartes de la présente publication n’impliquent de la part de la Banque mondiale aucun jugement quant au statut juridique d’un territoire quelconque et ne signifient nullement que l’institution reconnait ou accepte ces frontières. Droits et licences Le contenu de la présente publication fait l’objet d’un dépôt légal. La reproduction ou la transmission d’une partie ou de l’intégralité de cette publication peuvent constituer une violation de la législation en vigueur. La Banque internationale pour la reconstruction et le développement/Banque mondiale encourage la diffusion de ses travaux, et en règle générale, accorde rapidement l’autorisation d’en reproduire des extraits. Pour obtenir l’autorisation de reproduire des extraits de la présente publication, veuillez adresser une demande en fournissant tous les renseignements nécessaires à l’adresse suivante : Copyright Clearance Center, Inc., 222 Rosewood Drive, Danvers, MA 09123, Etats Unis ; téléphone : 978-750- 8400 ; télécopie : 978-750-4470 Pour tout autre renseignement sur les droits et licences, y compris les droits dérivés, veuillez-vous adresser au service suivant :Office of the Publisher, The World Bank, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433 Etats-Unis ; télécopie : 202-522-2422 ; e-mail : pubrights@worldbank.org. Photo en couverture : Une réunion collinaire dans la commune de Rutegama au Burundi. Photographie de la Banque mondiale Plan de couverture : Duina Reyes-Bakovic République du Burundi Revue des Dépenses Publiques Décentralisation Fiscale et Gouvernance Locale ii Remerciements L e rapport sur la décentralisation fiscale Ntihirageza (Directeur général, Ministère du et la gouvernance locale au Burundi fait Développement Communal), M. Thérence partie d’une série d’études de politiques Mbonabuca (Directeur général, Ministère de programmatiques développée par la Banque l’Intérieur), M. Firmin Sindayihebura (Directeur mondiale pour aider le gouvernement dans des finances communales, Ministère de ses efforts pour promouvoir une croissance l’Intérieur), Mme Spes-Caritas Njebarikanuye accélérée et inclusive, améliorer l’accès aux (Directrice générale du FONIC), M. Nicolas services de base, et de renforcer la transparence Ndayishimiye (Directeur général, ISTEEBU), M. et la redevabilité dans l’utilisation des ressour- Domitien Ndihokubwayo (Commissaire général, ces publiques. Même si le Gouvernement du Office Burundais des Recettes), et M. Kieran Burundi est le principal bénéficiaire de l’analyse, Holmes (ancien Commissaire général, Office les études sont destinées à un large public, Burundais des Recettes). notamment les membres de la communauté des bailleurs de fonds, les chefs d’entreprises, L’équipe tient également à mettre en exergue le les représentants de groupes de la société civile temps considérable et le volume d’information et d’autres acteurs engagés dans l’économie du fournis par les membres des administrations Burundi. communales à travers tout le pays, notamment les administrateurs et membres du personnel Le rapport a été élaboré conjointement avec communal qui ont travaillé étroitement avec les autorités du Burundi. L’équipe du projet l’équipe dans la production des données pour de la Banque mondiale souhaite exprimer sa ce rapport. Ce rapport n’aurait pas été possible reconnaissance à ses interlocuteurs communaux sans la généreuse contribution financière pour cette fructueuse collaboration. Plus de l’Agence suisse pour le développement et précisément, l’équipe tient à remercier Son la coopération (DDC), et l’Agence allemande Excellence M. Dieudonné Giteruzi (Ministre du de coopération internationale (GIZ). Enfin, Développement Communal), Son Excellence M. le groupe de travail des bailleurs de fonds Jean-Claude Ndihokubwayo (ancien Ministre du composé de la DDC, la GIZ, l’Union européenne, Développement Communal), Son Excellence M. et la Coopération technique belge (CTB) qui Edouard Nduwimana (Ministre de l’Intérieur), a apporté un soutien précieux et ses apports Honorable Innocent Nkurunziza (Senateur), techniques à chaque étape de l’analyse. ainsi que Honorable Aimé Nkurunziza (Deputé à l’Assemblée Nationale), M. Hilaire L’équipe de projet de la Banque a été dirigée Ntakuwundi (Ancien Secrétaire permanent, par Marco Larizza (chef de projet, spécialiste Ministère du Développement Communal), principal du secteur public et gouvernance) et M. Sindakira Lazare (Secrétaire permanent, comprenait Leanne Michelle Bayer (chef de projet Ministère du Développement Communal), Mme adjoint, spécialiste principale du développement Immaculée Bigirimana (Secrétaire permanent, social), Professeur François Vaillancourt Ministère des Finances et de la Planification du (consultant international, décentralisation Développement économique), M. Jean Marie fiscale et finances publiques), Professeur Julien République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables iii Nimubona (consultant local, gouvernance et L’équipe souhaite aussi remercier les trois développement institutionnel), Thea Hilhorst collègues qui ont fourni des commentaires (spécialiste principale en gouvernance foncière), lors du processus d’approbation du rapport Sadia Afolabi (consultante international), Lydie préliminaire, notamment: Robert Ebel (senior Ahodehou (assistante de projet), et Pacifique fellow, Urban Institute - Brookings Tax Ndoricimpa (assistant de projet). Policy Center), Enrique Pantoja (spécialiste principal de l’administration foncière), et Le chapitre 2 du rapport portant sur la Hélène Grandvoinnet (spécialiste en chef du décentralisation fiscale a été discuté avec développement social). des experts du groupe thématique de la décentralisation et des finances infranationales. La supervision et l’orientation technique Des commentaires précieux ont été reçus de générale ont été assurées par Albert Zeufack Jonas Frank (spécialiste principal du secteur (responsable secteur), Jacques Morisset public), Vivek Srivastava (spécialiste principal (économiste en chef et chef de secteur) et du secteur public), Jamie Boex (senior fellow, Chiara Bronchi (chef du groupe de la gestion du Urban Institute), Serdar Yilmaz (économiste secteur public et de la gouvernance). L’équipe principal), Anne- Lucie Levebfre (spécialiste tient également à remercier Philippe Dongier principale du secteur public), et Balakrishna (directeur pays) et Rachidi Radji (représentant Menon Parameswaran (spécialiste principal du résident), dont les conseils et l’appui chaleureux développement social). Le chapitre 3 portant ont été extrêmement utiles pour faire avancer le sur l’administration foncière décentralisée, a été processus de préparation et entamer un dialogue discuté avec des experts du secteur, qui ont fourni fructueux avec les autorités burundaises. des informations utiles et des commentaires afin d’améliorer la qualité de l’analyse, notamment: L’équipe de travail est seule responsable de André Teyssier (spécialiste principal de toute erreur ou omission. l’administration foncière), Caroline Plançon (spécialiste principale de la politique foncière), Washington, DC et Enrique Pantoja (spécialiste principal de l’administration foncière). Octobre 23, 2014 iv Table des matières Remerciements............................................................................................................. iii Abréviations et Acronymes ........................................................................................... 1 Résumé Exécutif.............................................................................................................3 Les questions politiques clés à l’étude ................................................................................................................................ 6 Principaux messages : les questions multisectorielles............................................................................................. 11 Chapitre 1. Comprendre le contexte de la décentralisation au Burundi.....................14 Introduction : Le contexte politique et macroéconomique..................................................................................... 14 1.1 Présentation du processus de décentralisation depuis la fin du conflit ................................................. 17 1.2 La décision de décentraliser : comprendre les principales motivations ................................................ 20 1.3 La conception institutionnelle : identifier les acteurs clés . .......................................................................... 21 1.4 La conception institutionnelle : promouvoir l’engagement des citoyens afin de renforcer les relations État-société ............................................................................................................................................... 25 1.5 Les entraves à l’avancée du programme des réformes : comprendre les contraintes institutionnelles et les motivations politiques . .................................................................................................. 29 1.5.1 Les contraintes institutionnelles . .................................................................................................................. 30 1.5.2 Les motivations politiques................................................................................................................................. 32 1.5.3 Les motivations bureaucratiques .................................................................................................................. 34 1.6 Recommandations pour le dialogue politique : « débloquer » le programme de réformes.......... 34 Chapitre 2. La décentralisation budgétaire contexte, questions liées au politiques publiques et possibilités de changement...................................................35 Résumé des principaux arguments et constats clés .................................................................................................. 35 2.1 État des lieux de la décentralisation budgétaire actuelle............................................................................... 38 2.2 La gestion de la décentralisation budgétaire malgré les contraintes financières : les questions politiques clés......................................................................................................................................... 45 2.2.1 Question politique N°1 : le nombre de communes au Burundi est-il optimal ?..................... 45 2.2.2 Question politique N°2 : quelles responsabilités fonctionnelles devraient être assignées aux communes ? .................................................................................................................... 49 2.2.3 Question politique N°3 : comment les communes peuvent-elles augmenter leurs propres recettes ? .................................................................................................................................... 50 2.2.4 Question politique N°4 : comment établir un dispositif de transfert pour les dépenses courantes des financements destinés à la lutte contre la pauvreté en complément du FONIC ?.................................................................................................................................... 53 2.2.5 Quelles sont les implications potentielles des recettes de l’exploitation minière dans les finances des communes ? .............................................................................................................. 56 2.3 Les futures réformes de décentralisation au Burundi :options possibles et recommandations.............................................................................................................................................................. 63 Chapitre 3. La gouvernance foncière décentralisée : défis et opportunités.............. 67 Résumé des principaux arguments et constats clés................................................................................................... 67 3.1 La rareté des terres et l’insécurité foncière : facteurs de conflit au Burundi........................................ 68 République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables v 3.2 Contexte : les types de propriété et le dispositif institutionnel .................................................................. 72 3.3 La promotion de la réforme de la gouvernance foncière : argumentaire et objectifs de la politique. ........................................................................................................................................................................... 75 3.4 Le pilotage de la gestion foncière décentralisée : résultats et défis . ........................................................ 80 3.5 Pour aller de l’avant : les actions nécessaires pour avancer la réforme foncière au Burundi...... 90 3.5.1 Les priorités de la réforme à court terme (1 à 3 ans) ........................................................................ 91 3.5.2 Les priorités de la réforme à moyen terme (3 à 5 ans)....................................................................... 93 Chapitre 4. Promouvoir la redevabilité sociale par la décentralisation : ................................................................................................... 94 la voix des citoyenss. Résumé des principaux arguments et constats clés .................................................................................................. 94 4.1 Redevabilité sociale et gouvernance locale : leur lien et leur importance.............................................. 96 4.2 Cadre analytique, données et méthodologie......................................................................................................... 98 4.3 L’analyse empirique : les constats clés...................................................................................................................101 4.3.1 Les obstacles à la participation à l’échelon local.................................................................................101 4.3.2 La préparation des Plans de développement communal ...............................................................103 4.3.3 La préparation et l’exécution du budget . ...............................................................................................104 4.3.4 Les transferts effectués par le pouvoir central : le cas du FONIC. ................................................106 4.3.5 La perception de l’impôt..................................................................................................................................106 4.3.6 Le suivi de la mise en œuvre du projet : étude de cas à partir des communes de Makebuko et Rutegama — l’expérience des opérations de DCC de la Banque mondiale au Burundi.......................................................................................................................111 4.4 Recommandations . .......................................................................................................................................................116 4.4.1 Soutenir une stratégie de communication globale.............................................................................116 4.4.2 Augmenter les efforts d’information à la fois parmi les citoyens et les responsables élus. ...........................................................................................................................................................................116 4.4.3 Soutenir les acteurs de la société civile en tant qu’élément articulant les citoyens de la collectivité locale et les représentants communaux...............................................................117 4.4.4 Harmoniser la collecte de l’impôt entre les communes ..................................................................118 4.4.5 Soutenir la concertation et la participation des citoyens dans le cadre actuel de la décentralisation . ................................................................................................................................................118 Références ................................................................................................................. 119 ANNEXES ..................................................................................................................125 Annexe 1. Découpage du Territoire Communal: Information Supplémentaire . ...... 127 Annexe 2. Liste des personnes consultées pendant la phase de préparation de l’étude . .................................................................................................................131 Annexe 3. Rapport de Synthese de l’atelier de validation du Rapport .................... 135 Liste des figures Figure 1-1 : Un aperçu de la gouvernance au Burundi, Données de 2012................................................................ 15 Figure 1-2 : Chronologie du processus de décentralisation au Burundi, 2000–2015......................................... 19 Figure 1-3 : Organigramme du Gouvernement et de l’administration décentralisée.......................................... 23 Figure 1-4 : Les opportunités d’engagement aux différents niveaux du processus de décentralisation du Burundi........................................................................................................................................................... 28 Figure 2-1 : La composition du secteur public local dans 15 pays, 2010–12 (%)................................................. 40 vi Figure 2-2 : Recettes communales en pourcentage des recettes totales du Gouvernement, Burundi : 2001, 2005 et 2010 ....................................................................................................................................................... 41 Figure 2-3 : Les recettes locales en part des recettes publiques totales dans 22 pays africains : 2006-2008. ............................................................................................................................................................................................... 42 Figure 2-4 : Recettes fiscales des communes, par quintile, 2012.................................................................................. 42 Figure 2-5 : Dépenses fiscales des Communes, par Quintile, 2012.............................................................................. 42 Figure 2-6 : Taux de Pauvreté (%) Communes du Burundi par quintile, 2008...................................................... 43 Figure 2-7 : Projection des transferts aux communes rurales per capita, selon l’hypothèse de la formule d’allocation .......................................................................................................................................................................... 56 Figure 2-8 : Le Fonds d’investissement FONIC, 2010–2012............................................................................................ 56 Figure 2-9 : Les mines en activité. ................................................................................................................................................. 57 Figure 2-10 : Les activités d’exploration minière, indiquées par concessions ...................................................... 58 Figure 3-1 : La densité démographique des communes, par quintile ...................................................................... 69 Figure 3-2 : Les recettes du SFC au fil du temps (2011-2013)....................................................................................... 86 Figure 4-1 : Les éléments clés de la redevabilité sociale : cadre conceptuel. ........................................................... 99 Figure 4-2 : Affichage public du budget communal...........................................................................................................106 Figure 4-3 : Recettes de la commune de Rutegama, réelles et projetées (2010–2013)...................................108 Figure 4-4 : Recettes de la commune de Makebuko, réelles et projetées (2010–2013)..................................109 Figure 4-5 : Comparaison des efforts de perception des recettes entre Makubeko et Rutegama (2010–2013).........................................................................................................................................................................................109 Figure A1-1 : Distance de marche, 16 communes, Burundi 2013 – commune ordonnées par superficie croissante.........................................................................................................................................................................128 Figure A1-2 : Temps de marche, 16 communes, Burundi, 2013 – communes ordonnées par superficie croissante.........................................................................................................................................................................128 Liste des tableaux Recommandations sur les politiques de réformes à entreprendre ............................................................................ 13 Tableau 1-1 : Données relatives à la taille des communes, Provinces rurales, Burundi, 2008....................... 21 Tableau 2-1 : Résumé budgétaire du FONIC, 2013 et 2014............................................................................................. 45 Tableau 2-2 : Nombre de gouvernements locaux (échelon le plus bas) et population moyenne dans 17 pays africains, 2006–2008............................................................................................................................................. 46 Tableau 2-3 : Les arrondissements dans le monde : les forces et les faiblesses dans trois domaines. ........ 49 Tableau 2-4 : Un exemple de formule de transfert première génération : le Kenya............................................. 53 Tableau 2-5 : Une simulation du partage des recettes uniquement avec les régions productrices ............ 63 Tableau 2 6 : Simulation du partage des recettes avec les régions productrices et non productrices . ..... 63 Tableau 3-1 : La fréquence des conflits fonciers, selon la localisation des ménages et le mode d’acquisition de terre.......................................................................................................................................................................... 70 Tableau 3-2 : Risques perçus relatifs aux droits fonciers, classés par type de ménage et par source......... 74 Tableau 3-3 : L’acquisition de terrains dans les zones rurales, ..................................................................................... 79 classée par mode et type de ménage ......................................................................................................................................... 79 Tableau 3-4 : Estimation du délai de certification nécessaire avec l’enregistrement à la demande . ....... 84 Tableau 3-5 : Terrains enregistrés et certificats délivrés par le SFC de la Province de Ngozi (Pilote SDC) ............................................................................................................................................................................................ 87 Tableau 3-6 : Coûts d’un enregistrement initial (à la demande) pour 8 SFC .......................................................... 87 Tableau 4-1 : Liste des communes où ont été organisés les groupes de discussion..........................................100 Tableau 4-2 : Liste des communes où des données supplémentaires ont été recueillies au-delà des groupes de discussion. ............................................................................................................................................................100 République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables vii Tableau A1-1 : Characteristics des communes enquêtées en août 2013.................................................................127 Tableau A2-1 Gouvernement du Burundi...............................................................................................................................131 Tableau A2-3 Personnel de la Banque mondiale.................................................................................................................133 Liste des encadrés Encadré 1-1. La législation clé ....................................................................................................................................................... 18 Encadré 1-2. Dispositions juridiques de régulation du système de « tutelle »...................................................... 25 Encadré 1-3. Les procédures actuelles de la décentralisation au Burundi.............................................................. 27 Encadré 1-4. Les ministères sectoriels impliqués dans le processus de décentralisation................................ 31 Encadré 2-1. L’évaluation des inconvénients et avantages d’une réduction du nombre de communes : analyse empirique sans modification des services................................................................................... 48 Encadré 2-2. Établir un dispositif de transfert pour les communes équitable et transparent : proposition avec simulations. ........................................................................................................................................................ 54 Encadré 2-3. Scénario 1 : Partage des recettes de l’exploitation minière avec les régions productrices ........................................................................................................................................................................................... 61 Encadré 2-4. Scénario 2 : Partage des recettes de l’exploitation minière avec les régions productrices et non productrices ................................................................................................................................................ 62 Encadré 3-1. L’égalité des sexes et la propriété foncière : les enseignements de l’Éthiopie et du Rwanda.......................................................................................................................................................................................... 71 Encadré 3-2. La gouvernance foncière : definition............................................................................................................... 75 Encadré 3-3. La gestion foncière décentralisée : l’expérience de Madagascar....................................................... 78 Encadré 3-4. La sécurisation des droits fonciers au Burundi : pourquoi est-elle importante ?..................... 80 Encadré 3-5. Principes du processus de premier enregistrement .............................................................................. 82 Encadré 4-1. L’évaluation de la performance des communes par le GdB ..............................................................105 Encadré 4-2. La budgétisation participative (BP) dans le Sud-Kivu, RDC : soutenir la décentralisation et donner le pouvoir aux citoyens de participer au processus de budgétisation grâce aux TICB ....................................................................................................................................................................................110 Encadré 4-3. Équilibrer les besoins à court terme avec des objectifs à long terme: résultats sur le développement (DCC) les projets axés sur la communauté du rapport de l’IEG 2013 sur ...........................112 viii Abréviations et Acronymes ABELO Association Burundaise des Élus Locaux ADLP Association pour le Développement et la Lutte contre la Pauvreté BM Banque mondiale CCDC Comité Communal du Développement Communautaire CDC Conseil de Développement Collinaire CEM Country Economic Memorandum (Mémorandum Économique sur le pays) CF Certificat foncier CNDD-FDD Conseil National Pour la Défense de la Démocratie–Forces pour la Défense de la Démocratie CIOPD Comité Interministeriel d’Orientation et de Pilotage de la Décentralisation CNTB Commission Nationale des Terres et Autres Biens CSLP Cadre Stratégique de Croissance et de la Lutte contre la Pauvreté CTB Coopération Technique Belge DCC Développement Conduit par les Communautés DGAT Direction Générale de l’Aménagement du Territoire DGF Dotation Générale des Finances DGU Direction Générale de l’Urbanisme DPND Document de Politique Nationale de Décentralisation DSRP Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté DTF Direction des Titres Fonciers EI Évaluation d’Impact ESW Economic and Sector Work (Études Économiques et Sectorielles) FAO Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture FBu Franc Burundais FIDA Fonds International de Développement Agricole FNL Forces nationales de libération FONIC Fonds National d’Investissement Communal FRODEBU Front pour la Démocratie au Burundi GdB Gouvernement du Burundi GIZ Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (Agence Allemande de Coopération Internationale) ICG International Crisis Group IDM Indicateur de Développement dans le monde IGEBU Institut Géographique du Burundi République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 1 ISTEEBU Institut de Statistiques et d’Études Économiques du Burundi MEEATU Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme OAG Observatoire de l’Action Gouvernementale OBR Office Burundais des Recettes ODA Aide publique au développement ODM Objectifs de Développement du Millénaire OGR Opération Groupée de Reconnaissance ONG Organisations Non gouvernementales OSC Organisation de la Société Civile PB Participatory Budgeting PCDC Plan Communal de Développement Communautaire PDC Plans de Développement Communal LPF Lettre de Politique foncière PIB Produit Intérieur Brut PNF Programme National Foncier PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement PPCDR Parti pour la Paix, la démocratie, la Réconciliation et la Reconstruction PRADECS Projet d’Appui au Développement Communautaire et Social PRODEMA Projet de Productivité et de Développement des Marchés Agricoles RDC République Démocratique du Congo RDM Rapport sur le Développement dans le monde REGIDESO Régie de Production et de Distribution d’Eau et d’Electricité RS Redevabilité Sociale SAP Stratégie d’Aide Pays (Country Assistance Strategy) SDC Agence Suisse pour le Développement et la Coopération SDN Stratégie de Décentralisation Nationale SDV Social Development (Développement social) SEGOM World Bank Oil, Gas and Mining Unit (Division Hydrocarbures et mines de la Banque mondiale) SFC Service Foncier Communal SP Secrétaire Permanent SPN Stratégie politique nationale SRDI Société Régionale de Développement de l’Imbo TVA Taxe sur la valeur ajoutée UE Union Européenne UPRONA Union pour le Progrès national WBI World Bank Insitute (Institut de la Banque mondiale) 2 Résumé Exécutif Argumentaire et objectifs de paix ont été signés par les parties qui s’opposaient politiquement. Dans le contexte 1. En dépit des importantes avancées de l’Accord de paix d’Arusha, un consensus a accomplies depuis la fin du conflit, le émergé parmi les décideurs politiques nationaux Burundi reste confronté à d’importants et internationaux selon lequel l’exclusion et les obstacles pour son développement. Avant privations subies par l’ensemble de la population le conflit, le pourcentage de personnes vivant rurale étaient un des facteurs de la guerre. La sous le seuil de pauvreté était de 36,4 % (1990). décentralisation (associée à des mécanismes Il a augmenté au cours du conflit, passant à de partage des pouvoirs interethniques inscrits 68 % (en 1998). Lors de la dernière enquête dans la constitution de 2005) est apparue auprès des ménages, ce chiffre était encore comme une stratégie clé pour une ouverture à important : 67 % de la population vivaient la participation citoyenne au développement sous le seuil de pauvreté en 2006.1 Bien que local, à l’amélioration de l’accès aux services de les résultats en matière d’éducation et de santé base et, ce faisant, au renforcement du contrat se soient nettement améliorés (l’espérance de social entre l’État et ses citoyens.2 Comme dans vie est passée de 43 ans en 2000 à 50,4 ans en d’autres pays de la région, la décentralisation 2011), l’accès aux services et infrastructures est également perçue comme un moyen de base tels que l’eau potable et l’électricité d’améliorer les capacités institutionnelles de demeure limité (par exemple, moins de 3 % de l’État postcolonial affaibli et d’évoluer vers une la population a accès à l’électricité). De plus, la société plus ouverte.3 forte densité et la croissance démographique, avec environ 90 % de la population vivant en 3. Depuis 2005, le Gouvernement du zone rurale, augmentent la concurrence face à Burundi s’est lancé dans un programme de faibles ressources, en particulier foncières. de décentralisation dans le but de En conséquence, le Burundi reste mal classé renforcer la cohésion sociale, d’améliorer (178e sur 187 pays en 2013) pour l’Indice de la gouvernance locale et de promouvoir développement humain du PNUD et n’atteindra l’accès aux infrastructures et services de probablement pas la plupart des ODM d’ici 2015. 2  L’objectif principal de la décentralisation au Burundi est d’« 2. Compte tenu d’un héritage historique aider les communes à devenir la fondation du développement et de conflit, le renforcement des institutions décentraliser les institutions gouvernementales. Le Gouvernement transférera les ressources aux communes pour qu’elles puissent nationales et décentralisées sont une planifier des projets de développement dans des domaines tels priorité nationale pour améliorer stabilité que l’éducation, la santé publique, les routes et la fourniture en et prestation de services. En 2000, les accords eau. Pour transférer ces moyens de développement, il faut éviter l’injustice » (Accord d’Arusha, 2000: 171). 3 Le contenu et l’orientation de ce débat politique n’est pas typique du Burundi et ressemble aux expériences dans l’histoire 1 Les résultats de la dernière enquête sur la pauvreté des d’autres États fragiles ou post-conflit, tels que la Sierra Leone ménages seront disponibles fin 2014 et fourniront des données (Larizza et Glynn, 2013) et la République démocratique du Congo actualisées sur la pauvreté. (Keefer 2011). République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 3 base. Depuis la promulgation d’une nouvelle 5. La faiblesse du système fiscal constitution et l’installation d’un gouvernement communal, associée à la faible mobilisation démocratiquement élu en août 2005, le des recettes fiscales locales et des transferts Gouvernement a fait d’importantes avancées non existants (courants) ou faibles (capital) sur la voie du progrès, révisant le Code électoral en provenance du budget national menace avant les élections communales et adoptant par la viabilité financière des communes, qui la suite une Loi communale pour réglementer le luttent déjà pour faire face à leurs frais principal niveau d’entités dévolues à l’échelon de fonctionnement. En 2012, les recettes municipal, soit 129 communes (dont 116 hors communales totales ont atteint environ 16 de la capitale et donc essentiellement rurales). milliards BIF, avec près de 25 % pour la ville de Ces communes sont ensuite divisées en zones Bujumbura (Mairie) et une deuxième plus grande (unités administratives déconcentrées) et part de 5 % pour Gitega.4 Les recettes moyennes collines, qui comportent un conseil élu mais qui annuelles d’une commune hors Bujumbura sont n’ont ni autonomie ni budget. Le processus de de 103 millions BIF, l’équivalent de 68 000 $US, décentralisation politique a été lancé également soit moins d’1 $ per capita. Dans l’ensemble, les lors des premières élections communales de recettes communales restent faibles et en déclin, juin 2005. L’engagement du Gouvernement atteignant 2,7 % du total des recettes intérieures dans les réformes de la décentralisation a en 2010. Les ressources permettant de financer été renforcé par l’adoption d’une « Lettre de les Plans de développement communal sont politique nationale de décentralisation et de donc largement insuffisantes. En conséquence, développement communautaire » (2007) et la les infrastructures sociales disponibles, ainsi publication d’une nouvelle Stratégie nationale que l’entretien et le fonctionnement des lieux de décentralisation en 2009. de prestation de services (cliniques, écoles 4. Depuis 2010, la décentralisation primaires et secondaires, bornes de distribution au Burundi est confrontée à de nombreux d’eau) demeurent limités, reduisant leur défis, et plusieurs problèmes doivent encore capacité à répondre aux besoins des citoyens et être réglés avant de pouvoir poursuivre le à améliorer l’accès aux services sociaux. programme des réformes. L’année 2010 marque l’introduction de quelques amendements à la Loi 6. Compte tenu de la fragilité budgétaire communale de 2005, et peu de progrès ont été du pays et de sa vulnérabilité structurelle faits depuis en termes de décentralisation. La loi face aux chocs extérieurs, le Gouvernement sur les nouvelles responsabilités des communes central a peu de marge de manœuvre doit encore être adoptée, le Parlement ayant pour améliorer la viabilité budgétaire rejeté le texte actuel compte tenu du manque des communes. Comme l’indique le rapport d’informations sur les implications financières récent de la Revue des dépenses publiques (c’est-à-dire le montant des transferts financiers (RDP 2013), le Gouvernement continue à lutter vers les communes nécessaire pour la mise en pour créer une marge budgétaire et réduire le place des nouvelles compétences dévolues). Une niveau actuellement élevé de sa dette. Bien que loi distincte sur les finances communales fait le Gouvernement doive limiter l’augmentation actuellement l’objet d’une discussion et n’a pas des dépenses actuelles en termes réels, à moins encore été soumise au Parlement, tandis que la d’introduire des mesures en faveur de nouvelles loi sur le service public territorial n’est guère recettes, il aura des difficultés à réduire son plus avancée, et que celle portant révision du déficit. Avec de telles contraintes structurelles, rôle des Administrateurs locaux est en attente. Enfin, la loi portant révision du statut juridique de Bujumbura-Mairie fait également l’objet de 4 Données fournies par la Direction des finances communales, discussions. Ministère de l’Intérieur. 4 les implications financières de la législation des conflits et à la promotion de l’investissement proposée doivent être considérées avec soin. Les local. autres possibilités dont débattent actuellement les décideurs politiques, y compris la proposition 8. Pour éviter une duplication de de réduire le nombre de communes, sont l’analyse précédente,5 la présente étude également associées à des risques potentiels. est hautement sélective et organisée en Le Gouvernement est conscient de la nécessité quatre chapitres thématiques. Le chapitre de tels compromis et a sollicité l’aide de la 1 fournit un instantané du contexte politique Banque et d’un groupe de bailleurs de fonds et macroéconomique du Burundi et examine pour bénéficier d’une assistance dans les l’évolution du processus de décentralisation. Il efforts menés. Il s’agit d’identifier les options s’agira de mieux appréhender les dynamiques possibles pour gérer le processus de réforme institutionnelles, politiques et bureaucratiques et améliorer la durabilité du système actuel à qui ont influencé le parcours historique de la moyen terme dans des conditions de fragilité décentralisation et produit les résultats observés macro-budgétaire. aujourd’hui. Le chapitre 2 est une investigation systématique de l’état de la décentralisation 7. En réponse à la demande spécifique du budgétaire du pays et identifie les questions Gouvernement, la présente étude s’attache politiques clés devant être considérées pour à fournir des recommandations politiques garantir la durabilité à moyen terme du concrètes pour aider le Gouvernement du processus de réforme tout en répondant aux Burundi à améliorer la durabilité financière besoins financiers à court terme des communes. et institutionnelle du processus des réformes Le chapitre 3, quant à lui, fournit une analyse de la décentralisation, tout en donnant aux approfondie des services clés d’enrégistrements communes les moyens de répondre aux fonciers des communes. Il discute des défis demandes de la population et de fournir de et opportunités liés aux efforts actuels de meilleurs services. Cette étude se penchera déploiement de cet accès aux services fonciers plus précisément sur deux principaux défis : (i) sur les 116 communes rurales et Bujumbura. Le comment mettre en place un cadre budgétaire chapitre 4 offre une perspective sur la nature des intergouvernemental transparent, prévisible et relations État-citoyens dans un effort pour mieux durable afin de satisfaire les besoins financiers comprendre comment améliorer la concertation des communes et améliorer l’accès aux avec les citoyens dans le processus de prise de services de base en prenant en considération décision et mettre les communesdevant leur les contraintes budgétaires macro ; et (ii) responsabilités en matière de prestation des comment promouvoir des stratégies efficaces services de base. pour accroître la participation citoyenne à la gouvernance locale, ainsi que d’autres 9. Le rapport est tiré des résultats mesures de responsabilité sociale. Les deux provenant d’entretiens, du travail sur le sujets sont au cœur de la stratégie nationale terrain et de groupes de discussion qualitatifs, de décentralisation. Ce rapport examinera également les implications sectorielles de ces défis au niveau macro, à travers l’étude de 5 Une grande quantité d’analyses et de services de conseils ont cas des expériences récemment menées de récemment été menés par le Gouvernement et d’autres bailleurs décentralisation des services d’administration actifs dans le secteur de la décentralisation, notamment : (i) une revue portant sur “the Senate and the Politics of Decentralization in foncière. (Code foncier de 2011). Cette Burundi” (le Sénat et la politique de décentralisation au Burundi) ; analyse approfondie de la sécurité foncière est (ii) une étude récente financée par la Suisse sur la durabilité extrêmement intéressante au niveau politique budgétaire des municipalités (sur un petit échantillon de communes) et les possibilités de réformes de la décentralisation en ce qu’elle concerne un domaine de prestation efficaces ; (iii) une récente étude financée par le PNUD sur le de service pouvant contribuer à la prévention FONIC. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 5 associés à des données administratives dans les campagnes et renforcer ainsi la stabilité existantes, ainsi qu’à des sources secondaires politique. La promotion de la décentralisation traitant de la décentralisation au Burundi. est aussi apparue comme une stratégie de Les recherches sur le terrain ont été menées règlement des conflits dans le contexte élargi dans 16 communes (représentant toutes les du programme de construction de la paix provinces à l’exception de Bujumbura). Une : une source clé d’insatisfaction populaire équipe multisectorielle a préparé le rapport en avant la guerre était la marginalisation des étroite coordination avec les représentants du communautés rurales et la centralisation du Gouvernement et conjointement avec un groupe pouvoir économique et politique entre les mains de bailleurs clés actifs dans le secteur. des élites urbaines. Les questions politiques clés à 12. L’amélioration et l’encouragement l’étude des interactions État-citoyens ont également émergé comme un objectif politique clair Comprendre le contexte du processus du nouveau processus de décentralisation. de décentralisation Comme le détaille la nouvelle politique de 10. À la fin du conflit, l’Accord de paix décentralisation du Gouvernement (2009), d’Arusha et la Constitution de 2005 ont les citoyens ne sont plus considérés comme jeté les bases politiques des réformes des « sujets » mais des « partenaires » de la de décentralisation. En 2005, la Loi gouvernance. Selon ce nouveau cadre, il existe communale et le Code électoral ont confirmé une division claire des responsabilités entre l’engagement du Gouvernement central à le conseil communal, l’Administrateur et le ouvrir la voie d’une participation plus directe conseil de colline, ainsi qu’un équilibre entre et d’une responsabilisation au niveau local. les opportunités de participation et celles d’une La loi reconnaît les communes comme entités plus grande communication. En pratique, les autonomes et décentralisées gérées par les faits montrent que plusieurs facteurs agissent membres du conseil communal. Elle reconnaît comme des contraintes majeures entravant la également le pouvoir décisionnel et délibératoire mobilisation la participation réelle des citoyens des communes en leur permettant d’adopter des et la responsabilité des administrateurs. mesures économiques et financières, y compris la préparation du budget communal et du Plan 13. Comme remarqué précédemment, Communal de Développement Communautaire malgré des objectifs ambitieux, depuis 2010, (PCDC). Le Code électoral de 2005 – réaménagé peu de progrès ont été faits sur la voie d’une en 2009 - a instauré le nombre de membres du décentralisation efficace dans le pays. conseil communal devant être élus par suffrage • Au niveau institutionnel, l’absence de vision universel direct au sein de chaque commune stratégique se reflète dans un processus et a réglementé l’élection de l’administrateur législatif fractionné. Plusieurs acteurs au communal parmi les conseillers (par sein et à l’extérieur du Gouvernement (des scrutin secret) et sa nomination par décret membres du Parlement, des acteurs locaux présidentiel. et des organisations de la société civile) 11. Dans une large mesure, la déplorent une approche fragmentaire conception de la décentralisation au des initiatives en matière de législation, Burundi a répondu aux préoccupations ce qui, à son tour, rend difficile la politiques du Gouvernement central et de compréhension par les décideurs politi- la classe dirigeante. Cette dernière a perçu la ques nationaux d’une orientation globale décentralisation comme une bonne opportunité du programme de décentralisation. De d’instaurer et de maintenir un contrôle politique plus, la concurrence continuelle entre les 6 ministères du Gouvernement central et changer de manière significative. Il existe les vice-présidences quant au leadership toutefois des opportunités de déblocage politique de la réforme provoque des des contraintes institutionnelles majeures. blocages et des impasses qui se renforcent Ceci implique la nécessité pour les partenaires mutuellement au cours du processus du développement de réviser leurs attentes d’analyse et d’adoption des textes de loi. à la baisse et de fixer des objectifs de soutien réalistes. Ceci étant dit, il serait peut-être • En termes de motivations politiques, la possible (et important stratégiquement) de classe dirigeante continue de percevoir concentrer les efforts sur le traitement des la décentralisation comme l’occasion contraintes institutionnelles qui pourraient d’instaurer son pouvoir et son contrôle ne pas nécessairement refléter une stratégie au niveau local, résistant ainsi, à partir du politique bien définie mais plutôt l’effet non pouvoir central, aux efforts entrepris pour désiré d’une mauvaise coordination des accroître l’autonomie administrative et ministères. Tout particulièrement : (i) des efforts financière des communes. En particulier, des sont nécessaires pour atteindre un consensus incertitudes découlant des aléas politiques sur l’orientation stratégique des réformes ; (ii) (comme la crise du début 2014) suggèrent une visions cohérente doit être élaborée comme que la décentralisation réelle pose certains fondement d’un cadre juridique et institutionnel risques que le Gouvernement pourrait ne pas global coordonné ; et (iii) un décret présidentiel être prêt à courir à court terme, probable- devrait clarifier le pouvoir et les compétences du ment pas avant que les résultats des élections comité directeur (CIOPD) afin de mieux signaler de 2015 ne clarifient les coalitions de partis la volonté politique et la vision à long terme du qui seront au pouvoir des administrations Gouvernement en matière de décentralisation. locales. La gestion de la décentralisation • En termes de motivations bureaucratiques, budgétaire : contexte, questions parmi les fonctionnaires, les perspectives politiques et changements possibles de décentralisation engendrent des craintes relatives à la sécurité et à la 15. Malgré son importance, la localisation de l’emploi. Ceux-ci sont en effet décentralisation budgétaire représente particulièrement réticents à quitter leur jusqu’à présent le maillon le plus faible poste de fonctionnaire pour rejoindre une du cadre de décentralisation. Un système administration locale sans avoir l’assurance de transferts adéquats destinés aux dépenses de conserver leur statut en intégralité. De courantes reste à définir : à ce jour, il n’existe plus, la plupart d’entre eux n’ont aucune aucun mécanisme en place qui garantisse intention d’être en poste en dehors des aux communes des transferts équitables et principaux centres urbains et semblent tout transparents pour les dépenses courantes. Ceci à fait réservés à l’idée de devoir rendre des est inhabituel, les inégalités territoriales rendant comptes à des élus locaux moins instruits. un tel mécanisme nécessaire dans la plupart Ceci participe à son tour aux difficultés des pays au monde et, dans le cas du Burundi, dans la mise à disposition de ressources la distribution inégale des ressources pourrait humaines (déjà rares) et renforce l’idée contribuer aux inégalités intercommunales. Pour que les communes ne sont pas préparées à les dépenses en capital, le FONIC apporte une assumer leurs nouveaux mandats. aide relative au moyen d’un transfert identique qui ne prend pas en compte les besoins ou les 14. L’analyse suggère, du moins à court capacités fiscales des communes. terme et jusqu’aux élections nationales, que les motivations politiques et bureaucrati- 16. En l’absence d’un système de ques clés ne sont guère susceptibles de transfert intergouvernemental prévisible et République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 7 transparent, la plupart des communes luttent des communes. Toutefois, ses implications sur pour conserver leur viabilité budgétaire les ressources financières et humaines n’ont pas et financer leurs frais de fonctionnement été évaluées. même les plus basiques. La diversité socioéconomique des communes (en termes de 19. En général, les pratiques de taille et de potentiel économique) représente un perception des recettes sont faibles, et de autre défi technique à la distribution équitable nettes améliorations sont possibles. Le cadre des ressources publiques sur le territoire juridique doit être mis à jour afin de garantir national, dans un contexte où les recettes locales un ajustement des recettes locales en fonction ne représentent qu’une petite part (2,7 %) des de l’inflation. Simultanément, des efforts recettes publiques totales et restent largement sont nécessaires pour renforcer le système concentrées à Bujumbura (qui génère elle seule d’administration des impôts locaux, améliorer 25 % du total des recettes locales). le respect des obligations fiscales et renforcer le lien entre une perception des recettes améliorée 17. Compte tenu de la répartition des et de meilleurs services pour les citoyens. La responsabilités fonctionnelles existantes, collaboration avec l’OBR devrait être favorisée l’organisation territoriale actuelle au afin de partager les informations sur les Burundi est raisonnable, et il n’est contribuables, conformément à l’expérience nullement nécessaire de réduire le nombre récente d’autres pays tels que le Rwanda, et / ou de communes. De plus, le regroupement utiliser l’OBR pour percevoir les impôts destinés de communes en tant que tel ne pallie pas aux communes. nécessairement le manque de ressources et les enquêtes montrent qu’il pourrait limiter l’accès 20. L’introduction d’un dispositif de aux services. Comparé aux autres pays d’Afrique, transfert récurrent destiné aux dépenses le Burundi, et ses 116 communes rurales, avec est appropriée. Le degré de déconcentration une population moyenne de 90 000, n’est pas et de dévolution souhaitable au Burundi n’est une aberration. Les communes fournissant pas clair. Il s’agit d’un petit pays caractérisé principalement des services peu techniques par une langue commune à tous, et non divisé (un fort contenu technique est associé avec des géographiquement entre groupes de dialectes ou services tels que le traitement des eaux usées ou d’ethnies différents. Les nombreuses motivations le compost, par exemple) ou qui n’ont pas des habituelles pour la dévolution ne sont donc pas coûts fixes très élevés (services similaires), rien pertinentes. Il reste cependant nécessaire de ne semble justifier une politique de consolidation traiter les inégalités entre les communes et le nationale. Le statut juridique des communes de besoin de davantage de ressources, en particulier Bujumbura devrait néanmoins être clarifié. compte tenu du fait que d’importants services de base sont désormais dévolus aux communes. 18. Les responsabilités générales Par exemple, la généralisation du Service dévolues aux communes devraient être Foncier Communal (voir chapitre 3), nécessite clarifiées, compte tenu des modifications des ressources financières que la facturation potentielles avant la finalisation de de frais ne suffit pas à fournir. L’augmentation modalités de financement plus solides. escomptée des transferts de capitaux du FONIC L’absence d’un mandat clair et précis réduit les créera également une plus grande demande possibilités pour les communes de jouer un rôle pour les dépenses courantes qui resteront non clé dans l’amélioration de la prestation locale couvertes. des services. Le texte de loi sur les compétences communales actuellement en préparation est 21. Compte tenu de l’augmentation une avancée en termes de réponse à l’incertitude attendue des activités d’extraction minière et d’amélioration de la viabilité institutionnelle à grande échelle et de leur concentration 8 géographique, il pourrait être important de les plus élevées d’Afrique (276 habitants / considérer des modalités de partage de leurs kilomètre carré [km2] en moyenne) ; 90 % de la revenus entre les provinces et les communes. population vit dans des zones rurales. La densité L’opportunité existe d’intégrer à la fois la démographique varie largement d’une région à décentralisation et l’exploitation minière par l’autre, surtout lorsqu’on en exclut Bujumbura- un mécanisme qui : (i) compense les communes Mairie.7 La quantité de terres arables était ayant des activités liées à l’exploitation minière estimée à 35,8 % et celle des terres cultivées pour la dégradation de l’environnement, (ii) à 15,6 % en 2011 (en augmentation, comparé épargne des recettes issues de l’exploitation au 14 % de 2000). L’agriculture constitue le des ressources pour les générations futures, et principal moyen de subsistance de la plupart (iii) partage certaines de ces recettes entre les des ménages en zone rurale faisant de la terre communes productrices et non productrices. la principale ressource économique pour la majorité de la population démunie. La décentralisation de l’administration foncière comme 24. L’association d’une demande accrue, instrument de sécurisation des droits d’une raréfaction des terres et de droits fonciers : défis et opportunités fonciers peu clairs constitue un obstacle à la stabilité et est un facteur de conflit au niveau 22. Avec l’Accord de Paix et de local. De plus, les règlements des conflits Réconciliation d’Arusha signé en 2000, la représentent un coût élevé pour les personnes restitution des terres et la réforme de la impliquées dans les conflits fonciers. Les gouvernance foncière se sont avérées des représentants des communessont fréquemment priorités clés dans les efforts déployés pour sollicités par les parties impliquées pour traiter des racines du conflit. L’Accord d’Arusha agir en tant que médiateurs de ces conflits.8 proposait un ensemble de mesures liées à (i) Une meilleure administration foncière peut la restitution de terres aux citoyens touchés contribuer à réduire le fardeau pesant sur des par les conflits violents, et (ii) la réforme de la ressources humaines limitées en atténuant les gouvernance foncière. Compte tenu du grand conflits et en accélérant leur règlement. nombre de réfugiés et de personnes déplacées internes au Burundi, il n’est pas surprenant que 25. Avec l’approbation du nouveau les questions foncières soient un élément clé Code foncier (2011), le certificat foncier de l’Accord d’Arusha et un axe des programmes a été introduit comme un mode alternatif post-conflit initiés par les bailleurs de fonds et les d’enregistrement des droits fonciers en ONG pour favoriser la médiation et le règlement zone rurale. Les investissements se font des conflits. Avec l’établissement de la CNTB pour améliorer les capacités et renforcer le en 2006,6 une procédure de restitution des système d’administration foncière (archives, terres aux réfugiés et personnes déplacées a été numérisation, formation, etc.), important dans élaborée, alors que la réforme de la gouvernance les zones urbaines où 60 % des propriétés foncière et la révision du Code foncier de 1986 pourraient être informelles. La capacité globale ont pris davantage de temps à se concrétiser et commencent à peine (ICG 2013). 7  Bujumbura, la seule grande ville, a moins d’un million 23. Pays montagneux enclavé, le Burundi d’habitants, ce qui en fait une ville relativelent petite pourun pays possède une des densités démographiques d’une population de près de 10 millions d’habitants. La deuxième ville du pays, Gitega, a moins de 50 000 habitants. 8  Le maire (Administrateur communal) de Ngozi a estimé qu’elle passait deux jours par semaine en moyenne dans la médiation de 6 Avec le soutien financier du Fonds des Nations unies pour la conflits souvent causés par des différends fonciers (interview, juin consolidation de la paix. 2013). République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 9 demeure toutefois insuffisante pour desservir dépendant des frais facturés à l’utilisateur les zones rurales, où sévissent la plupart des dans un système basé sur la demande. Au lieu conflits fonciers et qui font l’objet des politiques de cela, un transfert récurrent aux communes publiques dans le domaine. Pour régler ce pourrait être considéré afin de couvrir les problème, la Lettre de Politique foncière (PF dépenses courantes des services communaux 2010) et Code foncier (2011) ont introduit d’enregistrement foncier, tandis que les coûts l’établissement de services d’administration d’installation pourraient être pris en charge par foncière décentralisés, les Services Fonciers les bailleurs (lorsqu’ils sont présents) et / ou Communaux (SFC) pour l’enregistrement des couverts par une dotation ponctuelle du FONIC.9 droits fonciers existants, des transactions Une augmentation des ressources financières foncières et de toute autre modification. des communes devrait prendre en compte leur localisation et topographie, deux facteurs ayant 26. L’établissement des SFC est coordonné un impact sur les coûts d’un bureau communal par une unité gouvernementale spécifique d’enregistrement foncier. et est largement financé par les bailleurs de fonds. Cette innovation en termes de service est 28. Les plans de déploiement de services le fruit du travail de plusieurs programmes de fonciers décentralisés nécessitent la mise bailleurs ayant œuvré en étroite collaboration à disposition de statistiques fiables et avec l’Unité de coordination du programme régulières et de données administratives foncier national, organe interministériel au afin d’effectuer un suivi des résultats et des sein du MEEATU (Ministère de l’Eau, de l’Envi- processus. Présentement, il y a peu de suivi ronnement, de l’Aménagement du Territoire en termes de production, de coûts, de qualité et de l’Urbanisme). Le but des programmes etc., et les données foncières sont éparpillées et pilotes était de concevoir et tester des systèmes non agrégées au niveau central. La supervision de services fonciers d’enregistrement des se montre irrégulière, tandis que l’évaluation droits fonciers qui soient fiables, transparents, des avancées et les enseignements semblent accessibles et légaux. Les premiers programmes dépendre des initiatives des bailleurs de pilotes ont démarré en 2007, essentiellement fonds, pour l’auto-évaluation comme pour les soutenus par l’Union européenne (UE) et évaluations externes, qui paraissent également l’agence suisse pour le développement et la manquer de coordination. Le coût par certificat coopération (SDC) dans six localités. pourrait, par exemple, être réduit davantage en optimisant les procédures et en améliorant 27. La prestation de services communaux l’efficacité, mais tout ceci nécessite un suivi d’enregistrement foncier soulève d’impor- régulier, des tests et une comparaison de tantes questions de durabilité et de plusieurs alternatives. financement, renforçant l’argument d’une dotation récurrente pour couvrir les frais La décentralisation comme instrument de fonctionnement des communes. Les 28 de promotion de la redevabilité sociale services fonciers communaux actuellement en 29. Bien que la nature de la relation fonctionnement sont essentiellement financés État-société au Burundi se soit améliorée par des bailleurs. À moins d’une clarification des de façon significative depuis que le aspects de décentralisation de la gouvernance, Gouvernement ait lancé un processus les SFC devront continuer de dépendre des partenaires de développement pour financer leur fonctionnement. En conséquence, le double objectif de production de données 9  À cette fin, la dotation du FONIC serait ciblée de la même façon que les dons précédents l’ont été sur les écoles primaires – les utiles et de réduction des conflits au moyen priorités nationales prenant le pas sur les priorités communales de l’enregistrement foncier serait difficile et d’investissement pendant un an. 10 ambitieux de décentralisation en 2005, les côté du l’État. L’engagement des citoyens dans réalités politiques et l’héritage du conflit le processus de prise de décision local et la par- persistent. Après des décennies de conflits, on ticipation au développement local demeurent observe au Burundi une nette diminution des limités, ce qui constitue une entrave s’il s’agit violences graves. Mais les sources du conflit de profiter des réformes de décentralisation (telles que l’exclusion sociale, économique et comme d’un instrument d’amélioration de politique) demeurent largement intactes. Même la responsabilité et de renforcement de la avec une reconstitution de la cohésion sociale gouvernance locale. Pourtant, compte tenu des dans les communautés locales, la domination obstacles à la participation citoyenne enracinés d’un système néopatrimonial de gouvernance dans la culture, il est recommandé de mettre empêche la réforme de l’État et restreint les iniatialement l’accent sur la redevabilité des améliorations en termes de prestation de acteurs de l’état. services au niveau local. 32. Autre message clé issu des recherches 30. Les réformes politiques récentes ont auprès des groupes de discussion, le créé des opportunités dont les communes besoin de mécanismes plus transparents peuvent se saisir pour jouer un rôle plus et systématiques pour la perception de important dans la construction de la cohé- l‘impôt et la préparation / exécution des sion sociale au niveau local, en particulier budgets communaux de développement. l’élection directe des conseils communaux. Il y a plus précisément une volonté et une Avec le soutien croissant de la Banque ouverture de la part des représentants locaux mondiale (Projet d’appui au développement pour une communication plus efficace auprès communautaire et social, PRADECS) et des citoyens dans le but d’accroître les recettes la communauté élargie des bailleurs de fiscales. D’un autre côté, les citoyens sont fonds, les administrations communales demandeurs d’une plus grande transparence en parviennent de mieux en mieux à gérer la matière de ressources locales et désirent mieux responsabilité des fonds destinés à de petits comprendre l’utilisation des recettes fiscales projets de développement. Ce programme a par les représentants locaux. permis la formulation des premiers plans de développement communal ; l’identification de Principaux messages : sous-projets prioritaires au moyen de réunions les questions multisectorielles communautaires participatives ; la gestion du processus de passation des marchés publics, le Certaines questions multisectorielles sont suivi des sous-projets et la garantie de l’entretien apparues au cours de l’étude comme étant des infrastructures nouvellement construites. essentielles à l’avancement du processus de En facilitant un dialogue ouvert et l’inclusion décentralisation : des groupes vulnérables, ces interventions ont constitué une importante contribution à la Tout d’abord, un lien fort entre l’utilité cohésion sociale et l’atténuation des conflits. d’un processus communal de délivrance de titres de propriété étendu à l’ensemble du 31. En dépit des récents progrès, les rela- pays et le besoin d’un soutien des dépenses tions de responsabilité demeurent faibles, communales par le Gouvernement central. et les citoyens et les communautés ont peu L’importance de la sécurisation des droits d’occasions de s’engager dans les processus fonciers afin de préserver la paix et améliorer de décision et de mettre les communesdevant la sécurité dans le pays (cet aspect est expliqué leurs responsabilités. Plusieurs « points dans le chapitre 3) renforce la notion de « biens d’accès » pour des interventions peuvent publics » des politiques sur la propriété foncière. néanmoins être identifiés, particulièrement du En conséquence, le financement de ces activités République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 11 par le modèle actuel basé sur la facturation consolidée. L’exploitation minière à grande de frais est inapproprié et non pérenne. échelle est souvent perturbatrice pour la vie des L’alternative proposée, un transfert destiné aux communes, impliquant une nouvelle utilisation dépenses courantes (discuté dans le chapitre des terres, une plus grande demande en termes 2), accorderait aux communes les ressources de services communaux et la perception que les nécessaires au fonctionnement des services opportunités et les risques sont inégalement fonciers, tout en liant les dépenses centrales à partagés entre les communautés locales. une priorité nationale essentielle. Sécuriser la délivrance de titres de propriété peut faciliter l’adaptation à l’exploitation Ensuite, il est nécessaire d’améliorer la minière, tandis qu’une plus grande responsabilité responsabilité sociale et la création de sociale et une implication des citoyens dans recettes locales, coordonnées et cohérentes le processus de prise de décision aideront à entre elles. Il est nécessaire d’améliorer les l’acceptation des dépenses communales liées recettes propres des communes au moyen à l’exploitation. Simultanément, des modalités d’un Code fiscal communal actualisé mais la de partage des recettes issues des ressources population communale n’est actuellement naturelles à l’échelon communal réduiront pas convaincue de la pertinence des dépenses la perception d’une injuste exploitation des communales pour son bien-être. Une ressources appartenant à la communauté. modification du Code fiscal devrait donc s’accompagner de changements simultanés Enfin, le besoin de coordination entre les des mécanismes de responsabilité sociale afin ministères et les agences au niveau central, de promouvoir transparence et redevabilité ainsi qu’entre les autorités centrales et en matière d’utilisation des ressources locales, apparaît clairement à la lumière des publiques, dont les recettes fiscales locales. La trois éléments précédents. Pour garantir une recommandation d’afficher les informations prise en compte des préoccupations discutées relatives aux dépenses budgétaires, prévues et ci-dessus qui soit intégrée, cohérente et bien réalisées, dans la langue locale (kirundi) illustre ordonnancée, un mécanisme de coordination cet aspect. solide est nécessaire. C’est un défi de taille pour un pays à faible capacité institutionnelle Troisièmement, la probable augmentation ayant peu de motivations pour promouvoir la des activités d’exploitation minière à coordination interministérielle. Une assistance grande échelle nécessite une meilleure technique ciblée de la communauté des bailleurs sécurité foncière, des finances communales sera cruciale afin de faciliter le processus et renforcées et une responsabilité sociale d’avancer sur la voie des réformes. 12 Recommandations sur les politiques de réformes à entreprendre Objectif Domaine politique Proposition d’actions prioritaires Échéancier 1. Clarifier a. Organisation Régler la question du nombre de communes. À court terme l’orientation territoriale Régler le statut juridique des communes de À moyen stratégique des b. Organisation Bujumbura. terme réformes de la territoriale décentralisation Clarifier les pouvoirs et compétences du CIOPD pour À court terme c. Leadership et promouvoir de solides mécanismes de coordination organisation centrale interministérielle. 2. Créer un a. Les responsabilités Régler les responsabilités fonctionnelles de À court terme système de des communes communes. À court terme financement b. Les recettes Adopter la nouvelle loi sur le financement des intergouverne- À moyen propres des communes. terme mental prévisible communes et transparent Introduire un dispositif de transfert équitable, À moyen c. Transférer transparent et basé sur une formule pour les terme des recettes aux dépenses courantes. communes Intégrer la décentralisation et le développement du d. Développement secteur minier par la conception de modalités de du secteur minier partage des recettes entre les communes. 3. Déployer a. Cadre juridique Adopter le texte de décret sur les certificats fonciers, À court terme le système de pour l’administration pour codifier les résultats issus des programmes À court terme gestion foncière foncière pilotes et harmoniser l’approche entre les décentralisée décentralisée communes. À court terme b. Viabilité financière Introduire un dispositif de transfert pour les À moyen des services fonciers dépenses courantes qui pourrait être utilisé pour terme c. Qualité couvrir les frais de fonctionnement des services À moyen des services fonciers (y compris le personnel des SFC). terme d’administration Développer des procédures normalisées et des foncière fournis par directives pour la supervision, l’orientation et la les communes surveillance des SFC. d. Gestion des Établir des mécanismes institutionnalisés pour ressources humaines le renforcement des capacités et la formation e. Statistiques des des fonctionnaires, conseillers et parties privées données foncières impliquées dans l’administration foncière décentralisée. Établir un système intégré de données foncières utile pour suivre les avancées, informer le dialogue politique et améliorer la responsabilité. À cet égard, la collaboration avec les agences du Gouvernement central (ISTEEBU) devrait être encouragée. 4. Promouvoir la a. Les recettes Harmoniser les modes de perception des impôts et À court terme responsabilité propres des mettre en place une campagne d’information pour À court terme sociale au niveau communes les citoyens et les OSC locales. local À moyen b. Transparence Harmoniser et diffuser des informations budgétaires terme budgétaire simplifiées (planification et exécution) en kirundi. c. Les responsabi- Renforcer les mécanismes de concertation avec les lités des communes citoyens au niveau local. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 13 Chapitre 1 Comprendre le contexte de la décentralisation au Burundi Introduction : 2. En dépit d’importants progrès dans la consolidation de la paix et de la stabilité, Le contexte politique et dont la démobilisation des ex-combattants, macroéconomique la réhabilitation des services de sécurité, une gestion des finances publiques améliorée et 1. Depuis l’Accord de paix d’Arusha en l’établissement de gouvernements locaux 2000, le Burundi a fait de grandes avancées élus, le Burundi demeure un des pays les vers la restauration de la paix et de la plus pauvres et fragiles au monde. Malgré stabilité politique. Cet Accord de paix a mis fin l’amélioration significative, ces dernières années, aux hostilités et contribué à l’instauration d’un des contextes sécuritaire et macroéconomique, processus d’élections démocratiques. Entre la situation reste marquée par des difficultés. 2000 et 2005, le Burundi a renoué avec un Au cours de la dernière décennie, la croissance système multipartiste et un gouvernement économique s’est avérée lente, 3 % en moyenne de transition a partagé le pouvoir entre les les huit premières années, jusqu’à 3,9 % en deux principaux groupes ethniques du pays. 2010 et 4,5 % en 2013. Le produit intérieur Des accords de paix ont été signés avec tous brut du Burundi était de 280 $ per capita en les mouvements rebelles respectivement fin 2013 et demeure largement inférieur au PIB per 2003 (avec CNDD-FDD) et 2007 (avec le FNL). capita de 286 $ avant les crises de 1993. Malgré En février 2005, le pays a approuvé par voie ses ressources naturelles et un vaste réseau de référendaire une nouvelle constitution entérinant fleuves, la croissance économique du pays est le partage du pouvoir et la protection des droits entravée par plusieurs facteurs. Parmi eux, un des minorités. Des élections démocratiques ont manque de diversification, d’infrastructures été organisées en 2005 et 2010. adéquates, un climat des affaires peu favorable 14 et une faible capacité de la Figure 1-1 : Un aperçu de la gouvernance au Burundi, population active. L’augmentation Données de 2012 du coût de la vie, provoquée par une instabilité du prix des carburants Eˆϐ‹…ƒ…‹té et des produits de base, pèse gouvernem considérablement sur la population en–ƒle démunie. De plus, une véritable —”—†‹ pression est exercée sur les terres V‘‹š‡– redevƒ„‹Ž‹té Étƒt de et ressources naturelles du fait dr‘‹– Aˆ”‹“—‡ de la croissance démographique •—„•ƒŠƒ”‹‡‡ (2,6 % en 2011) et de la densité Aˆ”‹…ƒAverƒ‰‡ démographique (300 habitants Q—ƒŽ‹t±†‡Žƒ Control‡†‡Žƒ au kilomètre carré), toutes deux réglemen–ƒ–‹‘ …orrup–‹‘ Pƒy•ƒfƒ‹„le élevées. La rareté des terres et revenue la concurrence pour la propriété S–ƒ„‹Ž‹té ’‘Ž‹–‹“—‡ foncière dans un contexte de faiblesse des droits fonciers est un Source : Indicateurs mondiaux de la gouvernance, 2011. facteur latent continuel de conflit Remarque : centiles (0-100). et de fragilité au niveau local. 3. Le Burundi continue de faire En conséquence, le Burundi reste mal classé face à d’importants obstacles pour son (178e sur 187 pays en 2013) en termes d’Indice développement, et il est peu probable de développement humain du Programme qu’il parvienne à atteindre les Objectifs de des Nations Unies pour le développement et développement du millénaire (ODM). Avant n’atteindra probablement pas la plupart des le conflit, le pourcentage d’individus vivant sous ODM d’ici 2015. le seuil de pauvreté était de 36,4 % (1990). Il 4. La faiblesse des avancées dans a augmenté au cours du conflit, pour atteindre 68 % en 1998. En 2006, (lors de la dernière plusieurs domaines de gouvernance a limité enquête auprès des ménages), ce chiffre était le Gouvernement du Burundi (GdB) dans la encore important : 67 % de la population lutte contre la pauvreté et l’amélioration du vivaient sous le seuil de pauvreté.10 Les résultats développement humain. Les Indicateurs mon- en matière d’éducation et de santé se sont diaux de la gouvernance de 2012 (Figure 1.1) nettement améliorés ces dernières années. donnent un instantané des défis que le Burundi L’espérance de vie est passée de 43 ans en 2000 doit relever. Dans la plupart des domaines de à 50,4 ans en 2011. Mais l’accès aux services et gouvernance, le pays est à la traîne par rapport à infrastructures de base tels que l’eau potable et la moyenne régionale en Afrique. Le Burundi est l’électricité demeure limité (moins de 3 % de la particulièrement mal classé, en figurant parmi population a accès à l’électricité). De plus, les les dix derniers, en matière d’efficacité des fortes densités et croissance démographiques, pouvoirs publics, d’état de droit, de qualité de la avec environ 90 % de la population vivant en règlementation et de contrôle de la corruption. zone rurale, favorisent la concurrence face à Le pays s’en tire cependant relativement de faibles ressources, en particulier foncières. bien dans le domaine de la participation et de la redevabilité, ce qui constitue en soi une importante réussite dans un contexte fragile de post-conflit. Ceci est également cohérent par 10  Les résultats de la dernière enquête auprès des ménages seront disponibles fin 2014, et comportera des chiffres à jour rapport à la performance moyenne des pays à concernant la pauvreté. faible revenu. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 15 5. Une Revue des dépenses publiques de la capitale et donc essentiellement rurales), récente (2013) a souligné la fragilité budgé- les premières élections communales s’étant taire du pays et sa vulnérabilité structurelle tenues en juin 2005.11 face aux chocs extérieurs. Le Burundi est un des pays les plus vulnérables au monde face à 7. En dépit de ces objectifs ambitieux, ces chocs, y compris ceux liés à la fluctuation l’expérience de la décentralisation du du prix des denrées alimentaires et de l’énergie, Burundi s’est heurtée à plusieurs obstacles, ainsi qu’à la variation des flux d’aide. Cette fra- ne parvenant pas à satisfaire les attentes du gilité est exacerbée par plusieurs facteurs in- peuple et à améliorer de façon substantielle térieurs, tels que le manque de transparence les services sociaux de base au niveau local. dans certaines dépenses publiques, le niveau En conséquence, le processus de réforme insti- élevé d’exonérations d’impôts, qui compte tutionnelle s’est déroulé moins rapidement que pour près de 3 % du PIB, et une option limitée dans les autres pays post-conflit de la région d’absorption de tout choc budgétaire en dehors (y compris la Sierra Leone et le Rwanda, entre de l’aide extérieure et / ou d’un financement de autres) qui ont vu d’importantes parts de la Banque centrale du pays. Comme l’indique le leurs ressources publiques et responsabilités rapport, le Gouvernement continuera à lutter transférées aux autorités territoriales. Les pour créer une marge budgétaire et réduire le étu-des précédentes se sont focalisées sur les niveau actuellement élevé de sa dette. Bien que facteurs techniques et structurels en tentant le Gouvernement dût limiter l’augmentation d’identifier les obstacles à une mise en des dépenses actuelles en termes réels, à moins œuvre plus efficace de la décentralisation. d’introduire des mesures en faveur de nouvelles Certains expliquent les retards de transfert recettes, celui-ci aura des difficultés à réduire des compétences par la faiblesse des son déficit. Tandis que le déficit devrait être capacités institutionnelles, arguant du fait largement financé par des prêts concession- que les communes sont tout simplement dans nels extérieurs, l’endettement restera élevé en l’incapacité d’offrir les types de services qui termes de pourcentage du PIB et maintiendra pourraient leur être dévolus sous la nouvelle probablement le pays en situation de « risque législation. D’autres soulignent la faiblesse de élevé de surendettement ». l’assiette fiscale et de la viabilité des communes, qui pénalisent les autorités territoriales en 6. Dans un tel contexte, le GdB s’est termes de ressources nécessaires à la réalisation lancé dans un processus de transformation des économies d’échelle qui leur permettraient potentielle par la décentralisation, dans de fournir biens et services avec davantage le but de renforcer la cohésion sociale, d’efficacité (Nihangaza 2011). D’autres encore d’améliorer la gouvernance locale et de indiquent le manque de clarté dans l’attribution promouvoir l’accès aux infrastructures des responsabilités relatives aux dépenses et de base et la prestation de services de l’absence d’un système efficace de gestion des base. Le processus initié par l’Accord de paix finances publiques (Rapport de l’UE ; Rapport d’Arusha s’est conclu positivement en février du Sénat 2011). 2005 avec la promulgation de la nouvelle constitution et l’installation d’un gouvernement 8. Afin de compléter les précédents démocratiquement élu en août 2005. Le efforts d’analyse, ce chapitre s’intéresse da- gouvernement nouvellement élu a révisé le vantage à l’analyse des principaux moteurs code électoral avant les élections communales et a ensuite adopté une nouvelle loi communale règlementant le principal échelon d’entités 11  En 2005, les premières élections post-guerre ont eu lieu, remportées par le CNDD-FDD. Les autres grands partis étaient décentralisées au niveau communal sous la le FRODEBU et l’UPRONA (Uvin 2008). La population a élu les forme de 129 communes (dont 116 en dehors conseils collinaires, le conseil communal et le parlement national. 16 institutionnels et politiques sous-tendant ont confirmé les efforts du Gouvernement la conception et l’adoption des réformes sur la voie des réformes. Mais la période, de décentralisation au Burundi. À partir marquée par des vagues de violence liées aux d’un document d’information sur l’«Économie tensions ethniques et politiques, s’est soldée politique de la décentralisation », ce chapitre par la guerre. En 1993, le premier Président examine les développements historiques et démocratiquement élu (Melchior Ndadaye) fut récents, et identifie les acteurs et institutions assassiné par de hauts responsables militaires. clés afin de mieux appréhender les principaux Un an fut nécessaire à la formation d’un moteurs de la décentralisation dans le pays, ainsi nouveau gouvernement avant la mort tragique que leur impact sur la « trajectoire » spécifique du nouveau Président (Cyprien Ntaryamira), tué de cette dernière. Ce chapitre s’attache plus dans un accident d’avion à Kigali. Cet événement précisément à présenter le développement a alimenté des vagues croissantes de violences du processus de décentralisation depuis la fin ethniques entre les forces armées burundaises de la guerre civile et à clarifier (i) les raisons et les nombreux groupes armés (rebelles). initiales de l’adoption d’un programme de Exclusion et rivalités interethniques pour le décentralisation, (ii) son mode de conception, contrôle des ressources nationales ont été les (iii) ce qui pourrait l’empêcher d’atteindre les principaux moteurs de la violence et de la guerre objectifs politiques déclarés, et enfin (iv) les (Insight on Conflict, 2010). opportunités de « déblocage » du programme de réformes afin de faire progresser ce processus 10. À la fin du conflit, l’Accord de paix de décentralisation. Cette présentation servira d’Arusha et la Constitution de 2005 ont jeté de contexte à l’analyse de la viabilité budgétaire les bases d’un ambitieux programme de du système actuel (chapitre 2), des opportunités décentralisation, priorité nationale pour et des obstacles rencontrés pour faire de la promotion de la cohésion sociale et des l’enregistrement foncier un service public clé « bénéfices de la paix » destinés à la popu- pour les communautés rurales (chapitre 3) et lation pauvre. L’économie politique de la guerre des stratégies les plus efficaces pour promouvoir civile, profondément enracinée dans les luttes l’engagement des citoyens et la redevabilité politiques interethniques entre élites urbaines sociale par la décentralisation (chapitre 4). d’une part, et entre celles-ci et les populations rurales d’autre part, ont fortement affecté 1.1 Présentation du processus de la mémoire collective de la population, créant décentralisation depuis la fin du des exigences et une pression généralisées auprès du gouvernement post-conflit pour que conflit celui-ci désamorce les tensions en restaurant la 9. Malgré les efforts initiaux pour établir présence de l’État dans les zones rurales. Cette un modèle de gouvernance décentralisé, le nécessité urgente d’offrir les « bénéfices de la programme de décentralisation est demeuré paix » à tout le pays impliquait un renforcement instable dans le pays, compte tenu de simultané des capacités de l’État au niveau l’instabilité politique et de la guerre civile. À central et local. C’est dans ce contexte que le la fin des années 80 et au début des années 90, GdB a lancé le processus de décentralisation plusieurs lois et décrets de décentralisation12 afin d’émanciper les communes pour qu’elles améliorent la gouvernance locale et la cohésion sociale. Considérés par le Burundi comme 12  La loi-décret N° 1/017 de juin 1988 portant transfert de certaines recettes administratives aux communes telle que révisée à ce jour ; la loi-décret N° 1/026 du 21 juillet 1989 portant transfert des taxes foncières perçues sur le territoire du Burundi aux (impôts fonciers) perçu sur le territoire du Burundi aux communes communes et au maire de Bujumbura ; la loi-décret N° 1/027 du et au maire de Bujumbura ; et la loi N° 1/004 du 23 mars 1994 sur 21 juillet 1989 portant transfert de l’impôt sur les revenus locatifs l’organisation générale de l’administration communale. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 17 Encadré 1-1 . La législation clé L’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi stipule (Art. 8, al. 2 IIème Protocole) que : « La commune forme l’unique collectivité territoriale décentralisée » tandis que l’Art. 20, al. 13 dudit Protocole II stipule que les communes et collines sont administrées par des conseils (conseils communaux et conseils collinaires), tous deux élus par suffrage direct. La Constitution de 2005 du Burundi instaure les règles du processus de décentralisation dans son Titre XI « Collectivités locales » en décrivant l’organisation des administrations centrales et locales. Le Titre XI, dans sa section sur les Gouvernements locaux, reconnaît la Commune comme organe décentralisé et déclare que : « la Commune est une entité administrative décentralisée et est divisée en entités désignées par une loi organique. » De plus, la Constitution expose l’organisation de la commune : « La commune doit être administrée par le conseil communal et l’Administrateur communal ». Le Titre XI comprend également une disposition importante (article 267) qui stipule que : « L’État veille au développement harmonieux et équilibré de toutes les communes du pays sur la base de la solidarité nationale », et qui peut être interprétée comme la justification d’une certaine forme de péréquation. Source : Le Sénat et la Politique de décentralisation au Burundi, août 2010 partie IV. priorité nationale, les efforts de construction à 15 en 2009)13 devant être élus par suffrage de la paix dans le pays ont été largement universel direct au sein de chaque commune encouragés par la communauté internationale, et a réglementé l’élection de l’Administrateur avec le soutien technique et financier de communal parmi les conseillers (par scrutin plusieurs bailleurs de fonds pour le lancement secret) et la nomination par décret présidentiel. du processus. 12. En 2007, le Gouvernement a créé le Fonds National d’Investissement Communal 11. La promotion d’un nouveau cadre (FONIC) pour répondre aux problèmes de juridique a confirmé l’engagement du ressource des communes. Le décret instaurant Gouvernement dans le processus de réforme. le FONIC déclare que 15 % du budget national En 2005, la Loi communale et le Code électoral doit être transféré à l’institution pour acheminer ont confirmé l’engagement du Gouvernement des fonds vers la commune, mais aucun central à ouvrir la voie d’une participation plus raisonnement analytique ne semble soutenir ce directe et d’une responsabilisation au niveau pourcentage. Par ailleurs, ce n’est qu’en 2011 que local. La loi reconnaît les communes comme le FONIC a commencé par appuyer les communes entités autonomes et décentralisées gérées sous forme de matériaux pour la construction des écoles fondamentales. En conséquence, les par les membres du conseil communal. Elle budgets communaux sont restés très limités et reconnaît également le pouvoir décisionnel et délibératoire des communes en leur permettant d’adopter des mesures économiques et 13  Le Code électoral a été amendé en 2009 par l’introduction financières, y compris dans la préparation du de plusieurs modifications, notamment la réduction du nombre de budget communal et du Plan Communal de membres du conseil communal de 25 à 15 afin de mieux équilibrer le coût des incitations financières (jetons de présence) accordées Développement Communautaire (PCDC). Le aux membres du conseil, et ce, du fait des maigres ressources financières des communes. Une dimension relative au genre a Code électoral de 2005 a instauré le nombre également été intégrée à la loi révisée, 30 % des 15 membres du de membres du conseil communal (25, ramené conseil devant désormais être des femmes. 18 Figure 1-2 : Chronologie du processus de décentralisation au Burundi, 2000–2015 2005 Nouvelle constitution 2000 2009 2010 1ères élections Accord Amendement 2e élections nationales & de paix au Code nationales & locales d’Arusha électoral locales 2005 2007 2010 2015 Adoption de la Création du Amendement 3e élections Loi communale FONIC à la Loi nationales & et du Code communale locales électoral Remarque : ces événements sont des repères historiques clés ayant influencé le processus de décentralisation au Burundi. les ressources d’investissement proviennent 13. En 2009, une Stratégie nationale essentiellement des dons et des projets des de décentralisation a été approuvée, qui bailleurs de fonds. Du fait en partie du manque fournit les bases du cadre institutionnel de financement par le Gouvernement central, la et règlementaire guidant le processus des mise en œuvre des réformes de décentralisation réformes de décentralisation. Ce cadre a été a également été constamment influencée par le opérationnel la même année, grâce à la création soutien continu, et de plus en plus coordonné, d’un plan d’action de trois ans par le Ministère technique et financier d’acteurs clés de la du Développement Communal. Ce plan d’action communauté internationale, notamment la s’articule autour de cinq volets : (i) renforcement Banque mondiale, l’Union européenne (UE), du cadre juridique de la décentralisation ; l’Agence Allemande de Coopération Inter- (ii) consolidation du cadre institutionnel ; nationale (GIZ) et l’Agence suisse pour le (iii) renforcement des capacités des acteurs développement et la coopération.14 sectoriels et articulation d’une politique de communication ; (iv) efficacité des entités locales dans la promotion du développement 14  Le Développement orienté vers la communauté (CDD) et le économique local, de la lutte contre la pauvreté projet de décentralisation de la Banque, le PRADECS (2007–12) ont été particulièrement clés dans la réponse coordonnée des et de la prestation de services sociaux ; et (v) bailleurs en soutien à la décentralisation, avec un accent sur la décentralisation budgétaire.15 En avril 2012, une prestation des services sociaux, le renforcement des capacités revue globale du processus de décentralisation a des autorités au niveau communal et l’appui à l’élaboration des premiers plans communaux de développement du pays. GIZ été menée afin d’évaluer les réussites du premier apporte son soutien au Ministère du Plan et du Développement plan d’action et de jeter les bases d’un second Communal et à la décentralisation dans les provinces clés, et mène également le processus de réforme du FONIC. La Coopération plan d’action pour 2012-2014. Ce nouveau plan suisse fournit un appui similaire et joue un rôle de leader pour les questions foncières. L’UE, par son projet Gutwara Neza (bonne gouvernance en Kirundi), se concentre sur le renforcement des capacités et l’assistance technique aux autorités communales, 15  République du Burundi, Ministère de la Décentralisation et particulièrement eu égard aux questions de comptabilité, du Développement communal, Document de Politique Nationale de budgétisation et passation des marchés. la Décentralisation du Burundi, Bujumbura, mai 2009. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 19 adopté par le Gouvernement a été entériné dans politique, promouvoir la construction de l’État le Document d’orientation national et propose et enfin, traiter les racines profondes de la des stratégies inédites pour faire progresser la guerre. Mais certaines raisons poussent à croire politique de décentralisation sur les cinq volets que l’intérêt du Gouvernement national dans la identifiés.16 décentralisation fut d’une force comparable, bien qu’influencé par des motivations différentes. 1.2 La décision de décentraliser : 16. Le Gouvernement national semble comprendre les principales avoir perçu la décentralisation comme une motivations bonne occasion de satisfaire à la demande 14. Les arguments standards normatifs populaire tout en établissant et conservant relatifs aux bénéfices d’une décentralisation un contrôle politique dans les campagnes. axée sur les questions liées à l’efficacité de Ceci n’est pas surprenant, puisqu’une source clé la prestation de services. L’idée initiale est que d’insatisfaction populaire avant la guerre tenait la décentralisation, en plaçant les représentants dans la marginalisation des communautés rurales à proximité des gens qu’ils servent, mène à une et la centralisation du pouvoir économique et prestation de services plus adéquate au niveau politique entre les mains des élites urbaines. social, soit parce que les représentants politiques Autre mobile potentiel, la décentralisation locaux sont plus responsables, soit parce comme stratégie de survie politique au niveau qu’ils sont mieux informés des besoins ou des local17 (O’Neill 2003, 2005), ne semble pas préférences des citoyens. Les arguments reliant pertinente dans le contexte du Burundi. Les faits la décentralisation à de meilleures prestations historiques suggèrent que la coalition au pouvoir de services peuvent s’avérer particulièrement lors de l’introduction de la décentralisation n’a convaincants dans des situations de divisions eu aucune crainte de perdre le pouvoir dans interethniques relatives aux politiques à suivre les élections nationales et locales qui suivirent ou aux biens publics à fournir (cf. Robinson (2010) et qu’elle a cru au contraire l’emporter. [2010b: 1–2] ; Bardhan [2002] ; et Eaton, 17. Les évolutions politiques pourraient Kaiser et Smoke [2010] pour un examen de cet affecter la balance des pouvoirs et faire argument). évoluer les motivations du Gouvernement 15. Dans le cas du Burundi cependant, central en matière de décentralisation. le rôle joué par ces arguments standards Au Burundi, comme dans d’autres pays, la normatifs fut probablement marginal et lutte politique est également une lutte pour le de moindre importance que les objectifs contrôle et l’accès aux ressources économiques et à l’entretien d’un réseau de clients jusqu’au politiques. Il est donc probable que les intérêts niveau local. Les événements associés à des politiques des responsables politiques nationaux crises politiques créant des dissensions au dans le Gouvernement de coalition au pouvoir sein de la coalition au pouvoir ou donnant plus aient été plus déterminants dans la décision d’opportunités favorables á l’opposition peuvent gouvernementale de décentraliser. Dans une redessiner le paysage politique au niveau local. certaine mesure, ces intérêts ont pu résulter Ceci pourrait contribuer à expliquer la réticence des pressions des bailleurs de fonds, prônant la décentralisation afin d’améliorer la stabilité 17  Par exemple, O.Neill (2005) montre qu’en Bolivie, le parti au pouvoir, anticipant sa défaite au niveau national, mais confiant 16  République du Burundi, Ministère du Développement dans de meilleurs résultats au niveau des élections locales, a Communal, Plan d’action triennal 2012-2014 de mise en œuvre de introduit ce type d’élections, ainsi qu’une décentralisation des la politique de décentralisation, Bujumbura, septembre 2012. ressources afin de conserver un certain pouvoir et contrôle. 20 du Gouvernement à déléguer davantage de également 17 provinces18 accueillant des entités pouvoirs, et son intention de retarder certains déconcentrées des différents ministères et un éléments législatifs liés à la promotion de la gouvernorat au niveau provincial. L’un d’eux, décentralisation budgétaire (voir le chapitre Bujumbura - Mairie est à la fois une province et 2 pour une analyse technique), probablement un organe municipal tenant lieu de commune. jusqu’après les élections de 2015. Le Tableau 1.1 présente les données relatives à la taille des communes par province en dehors 1.3 La conception institutionnelle : de Bujumbura. identifier les acteurs clés 19. Chaque commune comporte un organe 18. L’organisation territoriale du délibératoire (le conseil communal), élu au Burundi comporte deux niveaux. Les 129 suffrage universel direct par les citoyens ; un communes sont formellement divisées en 13 organe exécutif (l’Administrateur commu- communes pour Bujumbura, la capitale et ville nal), élu par suffrage universel indirect par la plus grande du pays, et en 116 communes et parmi les conseillers municipaux ; et des extérieures à Bujumbura. La population de services administratifs fournis par deux Bujumbura est d’environ 650 000 personnes conseillers techniques. Les communes sont (la moyenne des communes comprend 50 000 ensuite divisées en unités administratives, les habitants) tandis que les communes en dehors de Bujumbura ont en moyenne 90 000 habitants en 2014. Les communes de Bujumbura ont 18  Bubanza, Bujumbura Mairie, Bujumbura Rural, Bururi, moins d’autonomie que les autres. Nous les Cankuzo, Cibitoke, Gitega, Karuzi, Kayanza, Kirundo, Makamba, distinguons donc dans notre analyse. Il y a Muramvya, Muyinga, Mwaro, Ngozi, Rutana, Ruyigi. Tableau 1-1 : Données relatives à la taille des communes, Provinces rurales, Burundi, 2008 Provinces Nombre de Zone moyenne Écart type Population Écart type Population Population communes (km²) (km²) moyenne population la plus la plus grande petite Bubanza 5 21 070,2 7 559,8 6 7604,6 14 071,2 55 344 83 678 Bujumbura 11 10 382,2 2 877,8 50 539,4 19 402,8 24 660 78 823 rural Bururi 9 26 608,1 6 028,4 63 779,2 33 824,1 29 685 145 074 Cankuzo 5 37 855,2 13 933,8 45 774,6 9 505,7 32 458 57 322 Cibitoke 6 26 103,7 6 264,4 76 739,2 8 228,6 66 367 88 451 Gitega 11 17 285,8 6 533,5 65 094,9 36 134,2 32 714 155 005 Karuzi 7 20 200,3 3 313,8 62 349,0 16 324,6 41 476 81 938 Kayanza 9 13 145,4 3 698,7 65 045,8 162 61,6 39 633 97 252 Kirundo 7 25 448,4 11 818,3 89 750,9 28 618,6 57 326 145 424 Makamba 6 31 521,3 8 395,4 71 816,5 30 103,1 44 978 112 752 Muramvya 5 13 341,4 4 684,9 58 517,8 15 662,4 41 170 81 257 Muyinga 7 25 679,1 9 296,0 45 231,1 11 637,3 27 954 60 311 Mwaro 6 13 700,0 2 350,7 98 155,7 39 037,9 54 482 151 230 Ngozi 9 15 698,4 4 454,8 73 413,0 20 964,1 57 086 120 557 Rutana 6 30 865,3 12 785,2 55 585,0 19 936,2 35 471 93 365 Ruyigi 7 32 216,3 9 630,7 57 218,6 20 754,0 37 502 99 461 Source : compilation de la Banque mondiale d’après les données de l’IGEBU et de l’ISTEEBU. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 21 « zones » ; il s’agit de groupements de collines En particulier, les conseillers techniques sont dans les zones rurales du pays (quartiers en souvent des enseignants locaux non formés aux zone urbaine). Ces collines sont le regroupement responsabilités d’un conseiller technique. naturel de base au Burundi. Elles comportent un conseil de cinq membres élus directement par la 21. Les communes des provinces population ; le conseiller obtenant le plus grand rurales sont gouvernées par un conseil nombre de voix devient le chef local (chef de communal de 15 membres élu par suffrage colline). Par ailleurs, les conseillers des collines universel direct, sur la base d’une liste de sont des indépendants (ils n’appartiennent à candidats issus des différents partis politiques aucun parti). Ayant pour tâche de représenter (une liste de regroupement approuvée par le leurs résidents et d’exprimer les préoccupations parti) reflétant un équilibre entre les sexes (le de ces derniers, les conseillers ne fournissent minimum de représentation féminine est fixé pas de services publics. Le chef collinaire agit à 30 % par le Code électoral) et un équilibre comme relais administratifs et régulateurs des ethnique au sein de la commune représentée. La conflits sociaux. Commission Électorale Nationale Indépendante peut intervenir a postériori pour garantir 20. L’organigramme actuel des communes l’équilibre ethnique et entre hommes et femmes reflète la faiblesse de leurs capacités insti- du conseil.21 Les membres du conseil ont un tutionnelles. L’organigramme actuel (voir mandat de cinq ans. Une semaine après les Figure 1.3) ne comporte pas de fonctionnaire en élections, le conseil communal nouvellement chef au niveau communal qui serait le directeur élu doit organiser sa première réunion, au cours des opérations de la commune. Cette fonction est de laquelle son président, son vice-président, occupée par l’Administrateur communal,19 qui son secrétaire et l’Administrateur communal est à la fois un représentant élu, le fonctionnaire (c’est-à-dire le maire) sont élus par scrutin en chef local, ainsi qu’un représentant du secret. Le conseil communal régit toutes les Gouvernement dans la commune. Il perçoit un affaires internes des communes, y compris salaire de base de l’administration centrale, ainsi le développement local. Il fixe par exemple le qu’un supplément de la part de la commune. programme de développement communautaire, Deux conseillers techniques sont sélectionnés suit sa mise en œuvre et s’assure de la mise en par le conseil communal parmi les fonctionnaires place d’évaluations. De plus, par sa branche payés et mis à disposition de la commune par administrative, il fait la promotion des postes le Gouvernement.20 Le personnel communal à pourvoir et prend en charge le recrutement payé par les recettes au niveau de la commune du personnel, ainsi que toutes les transactions comprend les chefs de zone, un secrétaire relatives au fonctionnement de la commune. Une communal, un greffier public et un comptable surveillance est exercée sur le conseil dans un communal. Problème souvent mentionné par système de tutelle par les autorités provinciales les membres du Gouvernement, la qualité du (via le Gouverneur) et le Gouvernement (via le personnel est variable selon les communes. Ministère de l’Intérieur). 22. L’Administrateur communal, nommé 19  Loi 1/02 2010 portant sur l’administration communale, art. l’Administrateur dans ce document, est 25 et 30. nommé par décret présidentiel avant de 20  En 2009, le coût des deux conseillers techniques et du maire est déclaré à 420 millions BIF ; p.6 Mécanisme de Transferts Financiers Aux Communes (Fonds National d’Investissement Communal) de Mohamed El-Mensi et Déo Banderembako LDi/ 21  Ainsi qu’un conseiller du groupe Twa si l’un d’eux s’est UNCDF 2009. présenté mais n’a pas été élu. 22 Figure 1-3 : Organigramme du Gouvernement et de l’administration décentralisée Présidence et Vices Présidences Ministères Ministère du Ministère de Citoyens Sectoriels Dév. Communal l’Intérieur Gouverneur Services Provinciaux (Education, Santé, etc.) Conseil Communal Tutelle (15 membres) Comité communal de Dév. Services Administrateur Communal (1) Communautaire Communaux Cadres Conseillers Chef de Zone rural/ Conseil de colline/ Communaux Technique (2) urbaine (1) quartier (5) Comité collinaire de Chef de colline/chef développement de quartier (1) Légende : Désigne le rôle de «tutelle» du ministère de l’Intérieur Désigne le rôle de supervision et la coordination politique du ministère du Développement Communal Désigne les relations (hiérarchiques) de redevabilité Note: Le graphique ci-dessus (figure 1.3) identifie l’architecture institutionnelle de la décentralisation au Burundi. Elle comporte la cartographie de tous les acteurs clés, les institutions, ainsi que les relations entre le gouvernement central, les structures déconcentrées et les autorités décentralisées. Les bords noirs identifient les organismes centraux du gouvernement en charge de la supervision de la politique, de la coordination et de tutelle de l’administration communale. Les bordures rouges identifient les structures déconcentrées de l’administration publique centrale. Les bordures jaunes représentent les acteurs et les institutions décentralisées au niveau communal et collinaire. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 23 prendre ses fonctions22, bien qu’il ou elle En cas d’absence de l’Administrateur, l’un de ces soit élu(e) parmi les conseillers communaux conseillers peut le / la remplacer. par scrutin secret au sein du conseil.23 L’Administrateur est le représentant légal de 24. Le comité communal de la commune et de ses habitants. En tant que développement communautaire (CCDC) fonctionnaire à plein temps et rémunéré par est formé sur une base sectorielle et l’État (salaire de base) avec un supplément comprend des représentants des entités de communal, l’Administrateur est chargé de la gouvernement décentralisé des communes. gestion et de l’administration des communes, Il s’agit d’un organe consultatif composé de l’application des lois et réglementations, de d’individus impliqués dans le développement la sécurité publique, de la gestion du domaine communautaire et établis par le conseil publique et de la préparation et de l’exécution communal sur demande de l’Administrateur. du budget. En termes de développement local, Son rôle est de fournir une expertise la Loi communale assigne à l’Administrateur technique aux autorités locales. Les CCDC sont la tâche de préparation du « Plan Communal généralement impliqués dans la planification du de Développement Communautaire (PCDC) » développement communautaire. et de gestion de son processus de mise en 25. La colline, ou quartier, est l’entité œuvre tout en consultant la population locale. à la base de l’administration territoriale. Il rend régulièrement des comptes au Conseil Semblable au niveau communal, le conseil communal, ainsi qu’à son autorité de tutelle. collinaire / de quartier est soutenu par un Son mandat consiste également en un rapport organe consultatif qui n’est cependant pas annuel sur la gestion de sa commune présenté reconnu par la loi : le Conseil de Développement au conseil communal et au Gouverneur de la collinaire (CDC). Ce dernier est composé de province, publié ensuite, après adoption par le cinq membres du conseil collinaire, ainsi que de conseil communal. L’Administrateur délègue sept personnes sélectionnées par l’assemblée une partie de ses pouvoirs au chef de zone. La générale communale pour leur implication dans zone est un district administratif déconcentrée les activités de développement communautaire entre la commune et les collines / quartiers. et le règlement des conflits. Le CDC a, entre 23. Pour effectuer la gestion des autres, pour mission de participer aux plans de communes, l’Administrateur et le conseil développement communautaires des collines / communal sont aidés par deux conseillers quartiers qui établissent les besoins prioritaires techniques. Ces derniers sont détachés par le pour les collines / quartiers et doivent être gouvernemnent central mais sont des employés intégrés au PCDC. de la commune. Un premier conseiller est chargé du développement local tandis que 26. La province est dirigée par un l’autre est chargédes questions sociales (santé, Gouverneur, soutenu par trois conseillers éducation, aide aux populations démunies, etc.), (nommés par décret) et est chargé de la ainsi que des activités culturelles et sportives. conception, de la coordination et du suivi des activités de développement au niveau provincial. Il exerce également une tutelle administrative et financière sur les communes (voir Encadré 22  La nomination de l’administrateur intervient après considération des équilibres ethniques prévus par la Constitution 1.2). Un comité provincial de développement et la Loi communale (67 % pour l’ethnie Hutu et 33 % pour l’ethnie communautaire (CPDC) a été institué. Présidé Tutsi). par le gouverneur et appuyé par son conseiller 23  La Loi communale indique la marche à suivre au cas où principal, le CPDC est en autre composé par l’Administrateur est démis de ses fonctions ou suspendu par des représentants des communes nommés le Gouvernement central ou les conseillers communaux pour des raisons valables, telles que l’incompétence, la corruption, la par le Ministère de l’Intérieur pour aider mauvaise conduite ou le détournement de fonds. l’administration provinciale en fournissant 24 Encadré 1-2. Dispositions juridiques de régulation du système de « tutelle » Le contrôle des décisions communales (« mise sous contrôle » ou « tutelle ») se reflète déjà dans les Articles 96, 98 et 99 de la Loi communale du 25 janvier 2010. « Le Ministre chargé de l’administration territoriale dans ses attributions, peut annuler toute réglementation ou résolution des autorités communales qui vont au-delà de leur responsabilité, ou sont contraires à la loi ou à l’intérêt général. « Cette annulation doit intervenir dans les trente jours suivant l’information du Ministre sur cette résolution. »24 Par ailleurs, la section 100 de la Loi communale réitère : « Lorsque les communessont dans l’incapacité d’accomplir les tâches qui leur sont conférées par les lois et la réglementation, le Ministre responsable de l’administration territoriale, le Gouverneur provincial ou le maire, peut, après deux avertissements, engager des actions pour les remplacer.25 des conseils sur les questions administratives tentatives précédentes dans l’histoire du pays. et politiques, y compris celles qui sont liées à C’est par exemple le cas du conseil élu localement la décentralisation et au développement des dirigé par un Administrateur, bien qu’il soit communes. désormais élu par et parmi les conseillers eux- mêmes, qui continue à rendre des comptes au 27. Les départements sectoriels tels Gouverneur provincial et à l’autorité centrale.26 que l’agriculture ou l’éducation ont tous D’importantes différences existent cependant. deux des branches décentralisées (direction Elles se rapportent aux visées globales et aux provinciale et direction communale). Leurs aspirations des nouvelles modalités de partage activités dépendent des secteurs. Par exemple, des pouvoirs et sont clairement articulées dans la dans l’éducation, la branche communale Politique nationale de décentralisation adoptée supervise l’éducation primaire (école de en 2009 (Gouvernement du Burundi 2009). base et fondamentale) et joue un rôle dans le Deux aspects clés s’en dégagent. Le premier recrutement des enseignants et la nomination est le changement fondamental dans la culture des principaux, tandis que la branche provinciale politique : les représentants communaux élus et agit davantage comme une interface entre nommés commencent à travailler en partenariat les départements centraux et les branches ouvert avec les citoyens de la collectivité locale communales. Dans les deux cas, ils sont aidés plutôt que d’exercer un contrôle centralisé d’un conseil consultatif.2425 comme par le passé. Ceci est décrit comme une évolution ne nécessitant rien de moins qu’une 1.4 La conception institutionnelle : « révolution silencieuse », un bouleversement promouvoir l’engagement des total des relations traditionnelles (révolution) citoyens afin de renforcer les sans conflit violent (silencieuse).27 relations État-société 28. La première caractéristique dans 26  Cf. OAG (2007), OAG (2010), et Gouvernement de Burundi la conception du nouveau cadre juridique (2009) pour davantage d’informations sur le sujet. a été la promotion d’un partenariat ouvert 27  Comme indiqué dans Gaynor (2011) : « les termes révolution et d’une collaboration entre l’État et les silencieuse, lorsqu’ils ont été cités au cours de la présentation citoyens. L’initiative de décentralisation de des conslusions des recherches ont généré un long débat sur leur signification et pour déterminer si le terme révolution 2005 comporte quelques similitudes avec les était adéquat dans le contexte burundais. Il a été remarqué que c’était l’expression même utilisée par l’État (elle apparaît dans la Politique nationale du Gouvernement) et que l’utilisation de ce mot reflétait l’ampleur des changements de politique, d’attitude 24  Loi communale du 25 janvier 2010, Art. 99, p.25. et de comportement requis dans la façon ouverte, transparente et participative dont les acteurs publics et civils locaux interagissent 25  Ibid p. 26. et gèrent les affaires ». République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 25 [La Décentralisation] favorise une implique désormais le partage du pouvoir « révolution silencieuse » qui engendre décisionnel entre les communes et les citoyens un changement qualitatif de la société. en matière de programmes de développement La Décentralisation exige une nouvelle et d’interventions au sein de leur collectivité culture étatique, un nouvel état d’esprit locale. politico-administratif… Tout le monde, pas seulement les élus locaux comme Le Gouvernement de la République on a tendance à le croire un peu partout, du Burundi a pris l’option politique est acteur de la Décentralisation. de rapprocher les services publics de la population et d’impliquer cette (Gouvernement du Burundi 2009 : 56, emphase de Gaynor [2011]) dernière dans la prise des décisions et le choix des programmes et projets de 29. Un deuxième aspect se distinguant développement de leurs collectivités. de l’éthos, de la politique et de la pratique (Gouvernement du Burundi 2009 : 61, emphase de la décentralisation dans le Burundi de Gaynor [2011]) d’avant-guerre est le rôle actif accordé aux citoyens dans le processus. Le processus de 31. L’appel pour une « révolution décentralisation visant à relier les domaines de silencieuse » des rapports État-citoyens est gouvernance et de développement, les citoyens apparu comme un objectif clair du nouveau ont désormais un rôle à jouer à la fois dans la processus de décentralisation. Comme le détermination des priorités de développement détaille la nouvelle politique de décentralisation et dans la supervision des initiatives de du Gouvernement, celle-ci représente traitement de ces priorités. Selon les textes du aujourd’hui une évolution fondamentale par Gouvernement : rapport aux précédentes tentatives de lance- La Décentralisation vise l’objectif de la ment de ce processus. Une telle transformation participation active de l’ensemble de incarne un changement directionnel : il ne s’agit la population à la définition et à la mise plus d’un pouvoir du sommet vers la base mais en œuvre des politiques de développement de la base vers le sommet. Les citoyens ne sont économique et social de leur localité. plus considérés comme des sujets mais bien Les résultats attendus d’un processus comme des partenaires de la gouvernance, et la de Décentralisation sont d’une part le distinction sociétale entre dirigeant et dirigés développement local et communautaire, ne consiste plus en une gestion des citoyens et d’autre part la démocratie locale et la mais une gestion aux côtés de ces derniers. bonne gouvernance. Ces mutations, clairement exposées dans la politique nationale du Gouvernement de 2009, (Gouvernement du Burundi 2009 : 10, emphase de Gaynor [2011]) ne nécessitent certainement rien de moins que la « révolution silencieuse » appelée dans cette 30. Il s’agit d’une évolution radicale politique. dans l’engagement État-citoyen, qui passe de la consultation à la participation active. 32. La révision des structures et procédures Dans cette politique nationale, l’accent est telles qu’elles sont définies dans la législation mis sur la participation citoyenne, qui ne se de 2005 et 2010, ainsi que dans le Manuel résume pas à la consultation des opinions et de procédures administratives et financières idées des citoyens des collectivités locales publié par le Gouvernement en 2011 et mais compte bien progresser sur la voie d’une présentées dans l’Encadré 1.3, souligne la participation élargie. La participation des volonté actuelle de renforcer les relations État- citoyens dans la gouvernance locale au Burundi société au niveau local. 26 Encadré 1-3. Les procédures actuelles de la décentralisation au Burundi Les objectifs et visées élargis détaillés dans le document d’orientation de 2009 sont plus concrètement exprimés dans les textes associés produits au cours des dernières années, notamment la Loi de décentralisation de 2005 et le Manuel de procédures administratives et financières de 2011, tous deux produits par le Gouvernement du Burundi (Gouvernement du Burundi 2005 b, 2011). Voici certaines caractéristiques clés des conseils communaux et collinaires (ou conseils de colline), issues de ces textes associés : Procédures pour les conseils communaux • Le conseil communal comprend 15 membres élus à la représentation proportionnelle à partir de listes de candidats déterminées par les partis. • La cooptation est possible pour atteindre les quotas de partage des pouvoirs, dans la limite de 67 % de tout groupe ethnique ; minimum de 30 % de représentation féminine. • Le rôle du conseil communal est de garantir que les services publics répondent aux besoins de la population (Article 5*). • Le conseil communal se réunit trois fois par an en session ordinaire avec un quorum de 10 membres (Article 10). • Ces sessions sont publiques (Article 19). • Avant le 31 mars de chaque année, l’Administrateur communal présente un rapport d’avancement au conseil. Ce rapport est envoyé au Gouverneur provincial et mis à disposition du public après validation du conseil communal (Article 31). • Les décisions prises au cours des réunions du conseil communal le sont à la majorité simple, par scrutin public ou, pour les questions sensibles, par scrutin secret de tous les membres (Gouvernement du Burundi 2011 : 15). • Une trace écrite des délibérations de chaque réunion est conservée et des extraits de toutes les délibérations sont affichés sur le panneau d’affichage public dans les bureaux communaux (Gouvernement du Burundi 2011 : 15). • Deux fois par an, le conseil organise des sessions d’information ouvertes avec les membres des conseils collinaires et des associations locales. Les participants à ces sessions peuvent poser des questions et proposer des idées et solutions au conseil communal (Article 15). • Le conseil communal est chargé de la nomination d’un comité consultatif (sur proposition de l’Administrateur) afin d’apporter des conseils relatifs aux priorités du plan communal de développement communautaire (PCDC) (Article 38). • L’Administrateur présente un rapport d’avancement bimensuel au conseil communal sur la mise en œuvre du PCDC (Article 39). • Le budget annuel est adopté par le conseil et transmis au Gouverneur pour approbation, au plus tard le 31 octobre (Article 58). • Le transfert des responsabilités s’accompagne d’un transfert des ressources financières et humaines nécessaires pour assumer celles-ci (Articles 77 et 71). Procédures pour les conseils collinaires • Le conseil collinaire comprend cinq membres élus par scrutin uninominal majoritaire. Le candidat remportant le plus de votes est le chef de colline (Article 34). • Le conseil collinaire se réunit trois fois par an après notification du chef de colline (Article 35). • Le rôle du conseil collinaire est… (Article 16) : -- de proposer au conseil communal des actions en faveur du développement et du maintien de la paix ; -- d’agir en médiateur / d’arbitrer les conflits entre voisins ; -- de conseiller le conseil communal sur les projets possibles pour la colline ; -- de suivre la mise en œuvre des activités de la commune dans la colline. • Au minimum trois fois par an, le chef de colline organise une réunion ouverte à tous les résidents de la colline afin d’analyser la situation politique, sociale, économique et sécuritaire de la colline (Article 37). Source : Rapport Trocaire 2011. *Tous les articles cités dans cette partie font référence à des articles de loi pertinents (Gouvernement du Burundi 2005). République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 27 Figure 1-4 : Les opportunités d’engagement aux différents niveaux du processus de décentralisation du Burundi CONSEIL COMMUNAL Budget Annuel (15 Membres) Se réunit 3 fois/an (ouvert au public) Réunion consultative Comité de publique 2 fois/an (le développement public peut poser des (organe consultative questions du conseil) Minutes y compris les decisions sont affichées sur panneaux publics Administrateur Rapport bi-annuel sur Rapport annuel au les plans communaux du conseil dev. Communautaires Conseil Collinaire Chef de conseil de colline (5 membres) Comité de développement Réunions du Conseil 3 fois/an Réunions ouverts au Légende : public 3 fois/an Institutions Mécanisms de redevabilité Mécanisms de participation 28 33. Malgré plusieurs opportunités de cette politique en procédures et pratiques sur responsabilisation et de participation, le terrain dans les communes et les collines ces dispositions juridiques s’avèrent de l’ensemble du pays ? En pratique, les faits insuffisantes pour influencer la pratique suggèrent que plusieurs facteurs contribuent à quotidienne sur le terrain. Le cadre actuel fonctionner comme des contraintes majeures de décentralisation tel qu’il est détaillé dans entravant la mobilisation d’une participation l’Encadré 1.3 offre de nombreuses possibilités réelle des citoyens et la redevabilité envers de supervision et d’engagement des citoyens la population (les principaux facteurs de dans le processus. La Figure 1.4 présente un la situation observée sont analysés dans le tableau clair de ce processus tel qu’il est envisagé chapitre 4). par l’État. Au niveau local, les opportunités de responsabilisation des acteurs communaux 1.5 Les entraves à l’avancée (surlignées en rouge), ainsi que les ouvertures du programme des réformes : à la participation des acteurs civils (surlignées en bleu) existent. En théorie, comme au niveau comprendre les contraintes institutionnel, une structure solide est établie. institutionnelles et les motivations Cependant, ces opportunités ne sont pas politiques exploitées dans la pratique. Par exemple, les deux réunions consultatives présidées par le conseil 34. Depuis 2010, moment de l’introduction communal chaque année et qui se concentrent de quelques amendements à la Loi commu- sur la responsabilisation (en Kirundi, on les nale de 2005, peu de progrès ont été faits appelle littéralement « réunions de redevabili- sur la voie d’une décentralisation réelle au té ») ne suscitent pas une large participation. En Burundi. Le Gouvernement a récemment adopté théorie, le cadre ci-dessous pourrait se montrer des textes importants tels que le Décret portant très efficace pour booster la responsabilisation sur l’intercommunalité ; le Décret portant sur sociale au niveau local. Il existe une division la coopération décentralisée au Burundi ; le claire entre les différents mécanismes du Décret instituant le Comité Interministériel conseil communal, de l’Administrateur et du d’Orientation et de Pilotage de la Décentralisation conseil collinaire, ainsi qu’un équilibre entre les au Burundi et le Comité Technique de Suivi ; opportunités de participation et celles d’une plus le Décret portant Réorganisation du FONIC ; grande communication. La principale question l’Arrêté mettant en place un Comité Technique de digne de réflexion apparaît : comment traduire Suivi du CIOPD. Cependant, de nombreux textes République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 29 juridiques élémentaires à l’appui du processus 1.5.1 Les contraintes institutionnelles de décentralisation restent encore à adopter. La loi sur les responsabilités des communes est en 36. Les facteurs institutionnels sem- attente d’adoption, les parlementaires déplorant blent jouer un rôle clé dans les retards, le manque de transferts aux communes des les hésitations et les contradictions qui ressources, humaines et financières, nécessaires caractérisent le processus de promotion à une mise en pratique adéquate. La loi sur du cadre juridique de la décentralisation. les finances communales n’a pas encore été Au niveau institutionnel, le manque de vision soumise au Parlement (elle est toujours en cours stratégique globale se reflète souvent dans de préparation par le Ministère de l’Intérieur), un processus législatif fractionné. Plusieurs tandis que la loi relative à la fonction publique acteurs au sein et en dehors du Gouvernement territoriale (précisant le statut juridique du (dont le Parlement, les acteurs locaux et les personnel communal) n’est pas davantage organisations de la société civile) déplorent avancée et celle portant révision du rôle de cette « approche fragmentaire » des initiatives l’Administrateur local est également en attente. en matière de législation, ce qui, à son tour, rend Enfin, la loi portant révision du statut juridique difficile la compréhension par les décideurs de Bujumbura - Mairie fait également l’objet de politiques nationaux d’une orientation globale discussions. Par ailleurs, tous ces textes devront du programme de décentralisation. De plus, la être harmonisés et mis en cohérence avec les concurrence continuelle entre les ministères et autres législations régissant le développement les vice-présidences en matière de leadership et la planification au niveau local (Code politique des réformes provoque des blocages et environnemental, Code foncier, Code forestier, des impasses qui se renforcent mutuellement au etc.), ainsi qu’avec la législation régissant les cours du processus d’analyse et d’adoption des entités administratives décentralisées.28 textes de loi. 35. Les contraintes institutionnelles 37. L’architecture institutionnelle du associées aux perceptions d’incertitudes processus de réforme reste à clarifier, ce politiques et bureaucratiques constituent qui perturbe les efforts de clarification du des entraves à de véritables progrès. En effet, leadership politique et la définition des des dynamiques politiques incertaines peuvent responsabilités au sein des ministères. laisser penser que l’introduction et la mise en Depuis 2005, le processus de réforme dépend œuvre des nouvelles dispositions juridiques de départements et de ministères sans cesse pourraient être de véritables risques sur le changeants, ce qui contribue à fragmenter les plan politique par les autorités centrales. Elles plans de réforme et finit par saper la cohérence pourraient en effet contribuer à trop renforcer globale de l’ensemble du processus. Initialement, l’autonomie des communes et réduire leur ce processus dépendait du Ministère de dépendance par rapport au Gouvernement. l’Intérieur et de la Sécurité Publique (2005- Les parties du texte ci-dessous examinent 2007), reconnu ensuite comme Ministère de ces perceptions et détaillent de façon plus l’Intérieur et du Développement communal approfondie les effets qu’un contexte politique (2007-2009). Il s’est ensuite trouvé sous tutelle changeant pourrait avoir sur une refonte du du Ministère du Plan et du Développement cadre institutionel de la décentralisation. Communal (2009-2011), avant d’être confié au Ministère du Développement Communal (2011- 2013). Selon les dernier Décret à ce sujet (N° 28 C’est par exemple le cas de projets de lois initiés par les 100/323 du 27 décembre 2011), la mission Ministères de l’Enseignement et de la Santé et qui ont créé de nouvelles structures locales (districts sanitaires, services de gestion du processus de décentralisation municipaux de l’enseignement). est désormais confiée au Ministère du 30 Encadré 1-4. Les ministères sectoriels impliqués dans le processus de décentralisation -- Le Ministère à la Présidence chargé de la Bonne Gouvernance et de la Privatisation, dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie Nationale pour la Bonne Gouvernance et la Lutte contre la Corruption pour les aspects de contrôle et d’inspection des communes, et le développement de normes afin d’améliorer la gestion et la promotion de l’éthique de bonne gouvernance ; -- Le Ministère de l’Intérieur, par le décret du 27 décembre 2011, Section 1, Art.13, qui assigne le rôle de conception et de mise en œuvre de la politique nationale d’administration territoriale tout en assurant la supervision du processus de décentralisation et le suivi des administrations territoriales, ainsi que tous les services sous sa juridiction, afin de garantir, en collaboration avec les ministères concernés, la coordination des services techniques territoriaux et des services publics décentralisés. -- Le Ministère de la Sécurité Publique, avec une mission d’exécution de la politique nationale de sécurité publique, doit collaborer avec les communautés locales, en particulier parce que la Loi communale stipule que l’Administrateur communal applique, dans les limites territoriales de sa juridiction, le pouvoir de police générale. La loi stipule que l’Administrateur exerce une autorité directe sur les services de police assignés à sa commune. -- Le Ministère des Relations Extérieures et de la Coopération Internationale, qui contribue aux futurs projets de coopération décentralisée. -- Le Ministère des Finances et de la Planification du Développement Économique intervient pour garantir un soutien à la planification conjointe et au financement des projets communaux, particulièrement au moyen du FONIC. -- Le Ministère des Travaux Publics et de l’Équipement impliqué dans la planification et la supervision du développement rural dans le contexte de la conception et de la mise en œuvre de la politique gouvernementale en matière d’infrastructure routière et de logements. -- Le Ministère chargé de l’environnement et de l’aménagement du territoire dans ses responsabilités de gestion directe du Code foncier, du Code de l’environnement et du Code forestier, étapes importantes impliquées dans le transfert de compétences. -- Le Ministère de l’Énergie et des Mines, qui intervient dans la planification et la supervision du développement rural dans le contexte des équipements hydrauliques et électriques. -- Tous les départements ministériels ayant des services déconcentrés, en particulier dans les ministères relatifs à l’agriculture et à l’élevage, à la santé et à l’éducation. Développement Communal.29 Cependant, les l’Intérieur ainsi que les autorités provinciales communes sont appelées a executer les misions (Gouverneur). Cette « redevabilité fragmentée » qui relevent des plusieurs ministeres. En outre, et supervision juxtaposée créent une duplication comme indiqué ci-dessus (para.21 et 22), les des fonctions qui génère à son tour des rivalités communes relèvent de la tutelle du ministère de et une concurrence pour le leadership entre les ministères. Par exemple, tandis que la Stratégie politique nationale (SPN) assigne un rôle majeur au Ministère de la Décentralisation et du 29  Pour réussir cette mission, le Ministère chargé de la Développement Communal,30 en pratique, c’est décentralisation a créé des bureaux, notamment la Direction Générale de la Décentralisation et la Mobilisation pour l’Auto- développement. Ces derniers comportent des directions techniques spécialisées. De plus, le Ministère possède un mécanisme de financement ou de transfert de fonds vers les communes par le 30  Plus précisément, le Ministère a pour mandat de garantir la Fonds National d’Investissement Communal (FONIC), créé en coordination de toutes les activités relatives à la décentralisation, 2007 pour remplacer le Fonds de Développement Communal. le suivi et évaluation du développement des collectivités locales, République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 31 le Ministère de l’Intérieur qui détient le rôle responsabilité éclateé ». Ensuite, le CIOPD n’a clé dans la réglementation de la concurrence pas de réel pouvoir décisionnel, et ses réunions entre les communes en matière d’obtention de se transforment souvent en occasions pour projets de développement local. En particulier, les ministères sectoriels de plaider pour leurs la gestion quotidienne des communes et la intérêts propres. participation aux initiatives de nature politique jadis appelées « travaux de parti » et désormais 1.5.2 Les motivations politiques appelés « travaux communautaires », dépend 39. La décentralisation est perçue par les largement de la relation de l’Administrateur responsables politiques nationaux comme communal avec les membres du Gouvernement. une opportunité pour établir de nouvelles Cette relation est de nature plus politique que positions de pouvoir à la périphérie, qu’ils technique, et est formée de relations partisanes soient élus ou nommés. Comme indiqué plus (voir ci-dessous). haut, dans une culture politique dominée par le 38. Le Comité Interministeriel d’Orienta- favoritisme, la motivation politique d’établir un tion et de Pilotage de la Décentralisation contrôle et un pouvoir au niveau local joue un rôle (CIOPD) ná pas été efficace dans son rôle moteur dans la politisation d’une administration d’organe de coordination et de leadership déconcentrée et décentralisée, particulièrement dans le processus de réforme. La politique eu égard aux figures décisionnaires clés de décentralisation est transversale et implique (Gouverneur, Administrateur, etc.). L’intérêt deux principaux ministères (Intérieur et primordial de l’élite nationale d’utiliser la Développement Communal) tout en étant décentralisation comme système pour établir fractionnée entre plusieurs ministères et conserver un contrôle politique au niveau sectoriels engagés dans le développement local aide à comprendre les caractéristiques local (Encadré 1.3). Elle implique d’une part spécifiques marquant la conception du processus la première Vice-présidence, et d’autre part, de décentralisation, ainsi que la résistance à des la deuxième Vice-présidence. Ceci pose un propositions susceptibles de modifier l’équilibre important problème d’orientation stratégique politique actuel. Les motivations politiques ont globale et sape les efforts de coordination. En influencé et se reflètent particulièrement dans effet, tous les ministères impliqués dans les (i) les choix de loi électorale (système de liste réformes de décentralisation ne résident pas au bloquée à représentation proportionnelle de sein de la même Vice-présidence. Pour régler candidats approuvés par les partis) comme ce problème, le Gouvernement a établi en 2011 moyen de renforcer l’appui électoral et la fidélité le CIOPD par le biais du Document de Politique au leadership du parti au niveau national ; (ii) Nationale de Décentralisation (DPND). Jusqu’à la tendance à récompenser les supporters d’un présent, ce mécanisme n’est pas parvenu à parti par des postes de fonctionnaires au niveau jouer un véritable rôle, et ce, pour au moins provincial ou communal ; (iii) la résistance à deux raisons : tout d’abord, il a été instauré par la modification du statut de l’Administrateur Ordonnance ministérielle pour impliquer des communal ; et (iv) les retards dans l’approbation acteurs de la Présidence et d’autres ministères, des textes de loi sur le transfert de compétences ce qui pose la question d’autorité et de « et de ressources aux communes. i. Le choix des lois électorales régissant les élections locales est susceptible de favoriser les militants du parti aux de développer et mettre en œuvre la politique nationale de développement communautaire, de concevoir et mettre en œuvre dépens de candidats indépendants vis- la politique publique de décentralisation et de développement à-vis du contrôle du bureau national du communal et de contribuer à la mobilisation des ressources pour l’exécution des politiques préconisées, etc. parti. Malgré les élections démocratiques 32 de 2005 et 201031 marquant un tournant dans les communes. Dans l’ensemble, cette dans la décentralisation politique et approche favorise la fidélité politique au émancipant les communes par un pouvoir détriment de la compétence et du mérite, légitime auprès des collectivités locales, et constitue donc une entrave aux capacités les conseillers communaux sont élus par institutionnelles des communes à assumer un système proportionnel sur une liste leurs fonctions. 32 bloquée de candidats présentés par un parti politique. Les études menées au moyen de 40. La résistance à la modification du groupes de discussion ont confirmé que statut de l’Administrateur local illustre ce mécanisme tend à produire une nette bien cela. Comme nous l’avons vu ci-dessus, politisation des élites locales, puisque la l’Administrateur communal est actuellement sélection des candidats est contrôlée par le coincé entre le statut d’un représentant élu bureau national du parti, ce qui favorise les et celui de gestionnaire de la commune, un militants capables de mobiliser des votes fonctionnaire représentant le pouvoir central, plutôt que des candidats indépendants tandis que la commune n’a pas d’équivalent en faisant campagne sur des questions de termes de directeur des opérations. De plus, développement local. Cela risque à terme l’Administrateur fait l’objet du contrôle du d’entraver la responsabilisation électorale conseil communal et agit sous la supervision de envers la population en réduisant les l’autorité provinciale, le Gouverneur (l’autorité motivations des responsables politiques de tutelle), qui représente les intérêts du locaux à répondre aux besoins de la Gouvernement. La proximité politique entre population. les deux niveaux d’autorité influe sur les allégeances au parti de l’Administrateur, qui ii. La gestion des ressources humaines peut agir dans l’intérêt du Gouverneur plutôt est politisée, ce qui sape les capacités que dans celui de la commune.33 Il n’est donc institutionnelles des acteurs publics pas surprenant que les exigences exprimées locaux. Comme indiqué plus haut, les par plusieurs groupes d’intérêt (dont ABELO partis politiques considèrent encore que et des représentants des collectivités locales) les représentants élus localement (les pour modifier le statut de l’Administrateur et en agronomes communaux, les enseignants, faire un élu (au suffrage universel direct) aient les principaux et les inspecteurs des été bloquées. Selon certains observateurs, on écoles primaires, les infirmiers, etc.) craint que cette proposition, qui accorderait à sont des intermédiaires efficaces pour l’Administrateur une légitimité et un contrôle mobiliser les électeurs. Dans ce cadre, élargis pour exercer ses pouvoirs, n’ouvre la voie les demandes de transfert exprimées par les représentants communaux sont traitées comme une récompense à des 32  Le manque de capacités techniques est non seulement le supporters politiques plutôt que comme résultat de choix politiques calculés, mais il semble également moyen d’initier une véritable politique être le sous-produit de la faiblesse du capital humain dans les de redéploiement de gestionnaires communautés rurales. Les partenaires techniques et financiers soutiennent le Gouvernement sur cette question, y compris par compétents de l’administration publique l’établissement d’un Centre National de Formation des Acteurs Locaux. Mais une meilleure coordination avec l’École nationale d’administration (ENA) et d’autres institutions spécialisées dans la formation des fonctionnaires semble un besoin urgent. 31  Les élections de 2010 sont caractérisées par un taux de 33  Ceci explique pourquoi, par exemple, même après changement élevé des élites locales, ce qui va à contrecourant l’abrogation par le nouveau manuel de procédures administratives des efforts de renforcement des capacités soutenus par plusieurs et financières de la « taxe » de 2 % par les autorités provinciales initiatives financées par des bailleurs et a contribué à l’érosion de sur les budgets communaux, que certains Gouverneurs aient compétences précédemment acquises en matière de planification continué à bénéficier de cette pratique sur la base de l’affiliation et de gestion du développement. politique de leurs Administrateurs communaux. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 33 à une plus grande autonomie des communes par s’explique pas seulement par la complexité de la rapport au pouvoir central. question mais également par la nature politique inhérente à l’avancée des réformes. Dans cette 1.5.3 Les motivations bureaucratiques perspective, les fréquentes modifications et 41. Parmi les fonctionnaires, les les amendements du cadre juridique depuis perspectives de décentralisation engendrent le début des années 199034 reflètent ainsi la des craintes relatives à la sécurité et à la difficulté de parvenir à un consensus, parmi localisation de l’emploi. Les fonctionnaires les décisionnaires, sur l’orientation stratégique sont particulièrement réticents à quitter globale de réformes ayant des conséquences leur poste de fonctionnaire pour rejoindre politiques et institutionnelles importantes. une administration locale sans garantie de conserver leur statut en intégralité (si le 44. Une vision cohérente doit être pouvoir central garantit la sécurité de l’emploi, développée comme fondement d’un cadre cela ne sera peut-être pas le cas au niveau de institutionnel et juridique coordonné et la plupart des communes rurales, selon leur global. Suite à près d’une décennie d’efforts, il situation budgétaire). De plus, la plupart des est à présent clair que l’approche sectorielle du fonctionnaires n’ont aucune intention de prendre pilotage des réformes de décentralisation par un poste hors des principaux centres urbains deux ministères n’est pas aussi performante que et semblent particulièrement réticents à l’idée souhaité. Ceci est dû à la nature transversale de devoir rendre des comptes à des directeurs de la décentralisation, ainsi qu’à l’absence de locaux moins instruits. mécanisme de règlement des conflits pour résoudre les rivalités interministérielles ou 1.6 Recommandations pour le contourner les résistances sectorielles et faire progresser la décentralisation. Il apparaît tout dialogue politique : « débloquer » aussi clairement que la décentralisation ne peut le programme de réformes plus être présentée comme une série de textes 42. L’analyse exposée ci-dessus suggère, ou d’actions isolées, tel que ce fut récemment le du moins à court terme et jusqu’aux cas « législation fragmentaire ». Une approche élections nationales, que les motivations globale et systémique devrait comprendre un politiques et bureaucratiques clés ne sont cadre juridique solide régissant la réforme. guère susceptibles de changer de manière Ces textes de loi devraient être cohérents et significative. Ceci implique la nécessité pour harmonisés avec les lois existantes en matière les partenaires du développement de réviser de décentralisation. leurs attentes à la baisse et de fixer des objectifs 45. Le décret présidentiel devrait clarifier de soutien réalistes. Ceci étant dit, il serait peut- les pouvoirs et compétences du comité être possible (et important stratégiquement) de concentrer les efforts sur le traitement directeur (CIOPD), afin de mieux signaler la des contraintes institutionnelles. Celles-ci volonté politique et la vision à long terme du pourraient ne pas nécessairement refléter une Gouvernement en matière de décentralisation. stratégie politique bien définie mais plutôt Le CIOPD pourrait être placé sous la supervision l’effet non désiré d’une mauvaise coordination de la deuxième Vice-présidence. Le CIOPD des ministères. devrait alors adopter un plan d’action et faire un rapport régulier sur ses avancées (un par 43. Des efforts sont encore nécessaires semestre) au chef du Gouvernement. pour parvenir à un consensus sur l’orientation stratégique des réformes. Comme évoqué plus haut, le temps nécessaire pour parvenir à un 34  La liste des textes législatifs (décrets et promulgations de consensus sur le cadre de la décentralisation ne réglementations) est disponible auprès de l’auteur sur demande. 34 Chapitre 2 La décentralisation budgétaire contexte, questions liées au politiques publiques et possibilités de changement Résumé des principaux mécanisme nécessaire dans la plupart des pays du monde, et, dans le cas du Burundi, la arguments et constats clés distribution inégale des ressources pourrait 1. Malgré son importance, la contribuer à l’accroissement des inégalités décentralisation budgétaire représente territoriales. Pour les dépenses en capital, le jusqu’à présent le maillon le plus faible du Fonds National d’Investissement Communal cadre de décentralisation. Un système de (FONIC) fournit un appui au moyen d’un transfert adéquat des dépenses courantes reste transfert identique par commune, qui ne prend à définir : à ce jour, il n’existe au Burundi35 aucun pas en compte leur capacité contributive ou mécanisme en place qui garantisse des transferts leurs besoins. De plus, tandis que les mécanis- équitables et transparents pour les dépenses mes d’incitations existent dans la formule courantes des communes36. Ceci est inhabituel, d’allocation du FONIC, ils ne sont pas appliqués, les inégalités territoriales rendant ce type de compte tenu des limites de l’enveloppe disponible. 2. En l’absence d’un système de 35  Mécanisme de Transferts Financiers Aux Communes (Fonds transfert intergouvernemental prévisible National d’Investissement Communal) Mohamed El-Mensi Déo Banderembako, 2009 UNCDF. et transparent, la plupart des communes luttent pour conserver leur viabilité 36  Au Burundi les communes vivent seulement de leurs ressources propres ; il n’existe pas de ressources transférées ni par le budgétaire et financer leurs frais de Gouvernement, ni par les Bailleurs de fonds. Les communes collectent fonctionnement même les plus basiques. La leurs ressources en appliquant en particulier l’OM N°530/540/312 diversité socioéconomique des communes (en du 04/08/1997 portant sur les taxes des communes. ÉTUDE SUR LA VIABILTÉ INSTITUTIONNELLE ET FINANCIÈRE DES COMMUNES termes de taille et de potentiel économique) RURALES AU BURUNDI, p. 39. représente un défi technique pour une République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 35 distribution équitable des ressources publiques fonctionnelles existantes, l’organisation sur le territoire national, dans un contexte territoriale actuelle au Burundi est raison- où les recettes locales ne constituent que 2,7 nable, et il n’est nullement nécessaire de % des recettes totales de l’État et demeurent réduire le nombre de communes. De plus, largement concentrées à Bujumbura (25 % du le fait de regrouper des communes ne pallie total des recettes locales). Les recettes moyennes pas forcément le manque de ressources, et annuelles d’une commune hors Bujumbura les résultats d’enquêtes montrent que cela sont de 103 millions BIF, l’équivalent de 68 000 peut même engendrer des coûts en termes $US, soit moins d’ $1 per capita. Les ressources d’accessibilité des services pour la population. permettant de financer l’exécution des Plans Comparé aux autres pays d’Afrique, le Burundi communaux de développement (PCD) sont donc et ses 116 communes rurales, avec une largement insuffisantes. En conséquence, les population moyenne de 90 000, n’est pas infrastructures sociales disponibles, ainsi que les une aberration statistique. Les communes ressources pour l’entretien et le fonctionnement fournissant principalement des services qui de ces établissements (cliniques de santé, écoles nécessitent une proximité avec les résidents primaires et secondaires, points d’eau) restent mais qui sont peu techniques (un fort contenu limités et ne permettent pas de satisfaire aux technique est associé avec des services tels que besoins des citoyens et d’améliorer l’accès aux le traitement des eaux usées ou le compost, par services sociaux. exemple) ou n’ont pas des coûts fixes très élevés (services similaires), rien ne semble justifier une 3. Compte tenu de la fragilité budgétaire politique de consolidation nationale. Le statut du pays et de sa vulnérabilité structurelle juridique des communes de Bujumbura devrait face aux chocs extérieurs, le Gouvernement a néanmoins être clarifié. peu de marge de manœuvre pour améliorer la viabilité budgétaire des communes. Avec 5. Question politique N°2 : les respon- de telles contraintes structurelles, les implica- sabilités générales dévolues aux communes tions financières de la législation proposée, devraient être éclaircies, compte tenu prônant l’augmentation des responsabilités des modifications potentielles avant la fonctionnelles des communes, doivent être finalisation de modalités de financement examinées avec soin. Le Gouvernement est plus solides. La proposition d’un transfert conscient de la nécessité de tels compromis des compétences (texte de loi) devrait et a sollicité l’aide de la Banque et d’un être accompagnée d’une évaluation lisible groupe de bailleurs de fonds pour bénéficier des ressources financières et humaines d’une assistance technique et identifier les nécessaires. Ces responsabilités actuelles options possibles de gestion du processus de comprennent l’entretien des routes communales, décentralisation budgétaire. Il s’agit aussi de la délivrance de documents officiels pour les déterminer les actions politiques requises résidents ; la préparation des plans communaux pour améliorer la durabilité du système actuel de développement ; l’organisation des activités à moyen terme dans des conditions de fragilité sportives et culturelles ; et un rôle dans macro-budgétaire. Plus précisément, ce chapitre l’éducation, la santé et les services sociaux au cherche à dresser le bilan de la décentralisation niveau local. Cette approche est moins précise budgétaire au Burundi et à traiter directement que dans d’autres pays où les communes ont d’une série de cinq questions politiques clés soit une liste définie de responsabilités soit une soulevée par les parties prenantes nationales et compétence générale dans les affaires locales.37 qui sont actuellement au centre du débat public sur la décentralisation budgétaire dans le pays. 37  L’Article 5 déclare que la commune est responsable des « 4. Question politique N°1 : compte intérêts locaux de la population de son ressort. Elle assure les tenu de la répartition des responsabilités services publics répondant aux besoins de cette population et 36 L’absence d’un mandat clair et précis réduit la exemple, la généralisation du service foncier possibilité pour les communes de jouer un rôle communal (voir chapitre 3), nécessite des clé dans l’amélioration de la prestation locale ressources financières que la facturation de des services. Le nouveau texte actuellement frais ne suffit pas à fournir. L’augmentation en préparation est une avancée en termes de escomptée des transferts de capitaux du FONIC réponse à cette incertitude et d’amélioration créera également une plus grande demande de la viabilité institutionnelle des communes. pour les dépenses courantes qui resteront non Il peut cependant également représenter un couvertes. Une proposition est actuellement en piège potentiel, les implications en termes de discussion mais qui ne précise pas les critères ressources financières et humaines n’ayant pas d’allocation. Les simulations présentées dans ce été évaluées de façon adéquate. chapitre suggèrent qu’un système de transferts récurrents plus équitable est tout à fait possible 6. Question politique N°3 : en moyenne, les sources de recettes des communes et approprié, et produirait en moyenne une couvrent à peine les responsabilités qui augmentation de 45 % des recettes totales des leur incombent. Le cadre juridique de la communes. perception des taxes locales doit être mis 8. Question politique N°5 : compte tenu à jour afin de garantir un ajustement des de l’augmentation attendue des activités recettes locales en fonction de l’inflation. d’exploitation minière à grande échelle Simultanément, des efforts sont nécessaires et de leur concentration géographique, pour renforcer le système d’administration il pourrait être important de considérer des impôts locaux, améliorer le respect des des modalités de partage de leurs recettes obligations fiscales et renforcer le lien entre une entre toutes les communes. L’opportunité collecte des recettes améliorée et de meilleurs existe d’intégrer à la fois la décentralisation et services pour les citoyens. La collaboration avec l’exploitation minière par un mécanisme qui : l’Office Burundais des Recettes devrait être (i) compense les communes ayant des activités favorisée afin de partager les informations sur les contribuables, conformément à l’expérience récente d’autres pays tels que le Rwanda, et / ou utiliser l’OBR pour percevoir les impôts destinés aux communes. 7. Question politique N°4 : contrairement à certains de ses voisins de la région, les communes n’ont reçu aucun transfert des finances centrales pour financer les dépenses courantes, ce qui indique le besoin d’un dispositif de transfert pour de type de financement. L’absence d’un tel dispositif est inhabituelle, les inégalités territoriales le rendant nécessaire dans la plupart des pays au monde, et a des implications majeures dans l’efficacité des services fournis par les communes. Par qui ne relèvent pas, par leur nature, leur importance ou par détermination de la loi, de la responsabilité directe de l’État ». Dans un sens, ceci est une compétence générale limitée régie par un principe de subsidiarité non clarifié. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 37 liées à l’exploitation minière pour la dégradation Les responsabilités pour le fonctionnement de l’environnement, (ii) épargne des recettes des communes au Burundi sont fixées dans la tirées de l’exploitation des ressources pour les Loi sur l’administration communale (Loi 1/02 générations futures, et (iii) partage certaines de 2010). La plupart concernent des services ces recettes entre les communes productrices et publics qui ne sont pas fournis à l’échelle non productrices, suivant différents scénarios. nationale ou ne sont pas affectés par la législation au Gouvernement. Cependant, cette 2.1 État des lieux de la loi ne désigne pas précisément les fonctions et décentralisation budgétaire responsabilités. L’Article 76 énumère plutôt les actuelle éléments couverts par les dépenses à l’échelle communale : salaires, dépenses courantes, plans de développement, coûts d’entretien des Nota Bene : infrastructures appartenant à la commune, Le manque de données entrave l’étendue annuités des prêts, élimination des eaux usées de l’analyse. Il est important de noter qu’il et des déchets, aide aux populations indigentes n’existe pas de données fiscales globales et dépenses liées au transfert de compétences. actualisées sur les communes au Burundi. Les Articles 91-95 citent l’entretien des routes Concernant les années précédentes (2000- communales. De plus, par la description des 2010), l’équipe a été en mesure d’obtenir responsabilités incombant aux deux plus hauts des données de l’ISTEEBU pour presque fonctionnaires, les conseillers techniques, on toutes les communes. Mais pour les années en déduit logiquement que les communes récentes, soient les données n’existent préparent également les documents officiels pas, tel dans le cas de l’année 2011 ou (tels que les certificats de naissance, Article 51), quand elles sont sous forme électronique, le plan communal de développement (PCDC; sont soient partielles tant en termes de Article 52), font la promotion des activités couverture géographique et en terme de sportives et culturelles et jouent un rôle dans couverture détaillée. L’équipe en travaillant l’éducation, la santé et les services sociaux en étroite collaboration avec l’Observatoire (Article 53). Ce manque généralisé de détail sur les finances communales, - située au sein du cadre juridique présente des avantages et du ministère de l’Intérieur et opérationnel des inconvénients : tandis qu’en principe, une sous le projet Neza Gtwara financé par attribution élargie des compétences relatives l’UE - a collecté des données pour un grand aux affaires locales permet aux communes nombre (100 ou plus) de communes pour une latitude considérable pour contribuer à l’année 2012, particulièrement sur les une vaste gamme de services locaux, l’absence grandes lignes de dépenses (organisées de mandat clair et précis réduit la possibilité, par classification économique) ainsi que pour les communes, de jouer un rôle clé dans les recettes globales. Cependant, il manque l’amélioration de la prestation locale des toujours de données sur les dépenses par services. En conséquence, le Gouvernement classification fonctionnelle. central joue en pratique un rôle primordial dans la prestation de nombreux services « locaux ». 9. Le cadre juridique actuel indique 10. Le rôle des communes est limité ; que les communes sont généralement de nombreux services locaux sont fournis responsables des affaires locales. Le premier par des antennes déconcentrées du pouvoir pilier conceptuel de la décentralisation central. Les services éducatifs de base et les budgétaire est la répartition des responsabilités services de santé, deux activités dévolues au relatives au fonctionnement et aux dépenses. niveau communal dans certains pays, sont gérés, 38 au Burundi, par des antennes déconcentrées des recettes publiques pour cette année-là.38 des Ministères de l’Enseignement et de la Santé Selon notre analyse des données budgétaires avec peu de contributions (s’il y en a) à l’échelon des communes, il semblerait que ces dernières communal (cependant on retrouve une certaine aient tendance à dépenser plus ou moins ce implication locale, par exemple, au moyen des qu’elles perçoivent pour une année donnée (surtout qu’elles ne reçoivent pas encore de comités de parents dans l’école primaire). La transferts intergouvernementaux de fonds). Par responsabilité de l’entretien des routes est exemple en 2012, la proportion de dépenses partagée par les communes, les agences du totales et de la totalité des recettes était de 1,04 Gouvernement et le secteur privé, avec parfois résultat cohérent avec la présence d’arriérés des agences nationales (par exemple pour le café communaux. et le thé) assurant quelques travaux d’entretien pour garantir la mise sur le marché des produits. 12. La dévolution des dépenses publiques La fourniture d’électricité et d’eau courante constitue un élément des dépenses (lorsqu’elle est disponible) est gérée par une publiques locales. Les mesures traditionnelles de décentralisation budgétaire n’évaluent que agence nationale (REGIDESO) qui perçoit un les dépenses et recettes dévolues présentes paiement direct des usagers. Les services de dans les comptes des communes, ce qui, dans le police et de protection civile (dont la lutte contre cas du Burundi, suggèrerait un faible niveau de les incendies) sont nationaux. décentralisation en termes de responsabilités liées aux dépenses. On peut cependant avancer 11. Le rôle limité des communes dans la que, compte tenu des résultats pour d’autres prestation de services publics se reflète dans pays (voir Figure 2.1), s’intéresser exclusivement la part succincte des dépenses publiques aux dépenses dévolues ne permet de dépeindre dévolues à l’échelon communal. En l’absence qu’un tableau incomplet du processus de de données détaillées relatives aux dépenses décentralisation en cours dans le pays. Comme pour toutes les communes, il est difficile de ailleurs, les ministères de tutelle du pouvoir déterminer précisément l’importance relative central continuent de jouer un rôle important des dépenses à l’échelon communal. Toutes dans le financement et la prestation des services les dépenses communales étant financées par au niveau local. Surtout, tout personnel sectoriel des sources propres de recettes, la totalité des en poste dans les collectivités locales au Burundi dépenses communales peut être estimée sur la continue d’être employé et rémunéré par son base du niveau de perception des recettes dans ministère de tutelle au niveau du pouvoir central. De même, ces ministères de tutelle la commune. En 2012, les communes comptaient continuent d’assumer les responsabilités d’une pour 3 % des recettes et dépenses publiques au part importante des dépenses sectorielles Burundi. Ce pourcentage est tiré des informations relatives au développement des services publics financières pour la ville de Bujumbura-Mairie (qui comprend 13 « communes ») et pour 94 des 116 communes hors Bujumbura pour lesquelles 38  Il convient de remarquer que ce tableau ne change pas des données financières sont disponibles. Pour beaucoup, même en prenant en compte les transferts en nature (par exemple, les matériaux de construction) que les communes les 107 communes pour lesquelles des données ont reçu du FONIC avant 2013, pour une valeur de 460 millions sont disponibles, les recettes se montent à 15,4 BIF en 2009 et 934 millions BIF en 2010. Ajouter les contributions du FONIC en 2010 a augmenté les recettes des communes de 10 %. milliards BIF. Si l’on ajoute une estimation de À partir de 2013, ces contributions devraient apparaître comme 600 millions BIF de recettes supplémentaires augmentation des recettes communales. Les transferts de capitaux par le FONIC devraient être d’environ 8 milliards BIF, augmentant pour les 22 communes manquantes, cela fait les recettes des communes d’environ 50 % en 2014 (ou d’environ un total de 16 milliards BIF, soit 2,9 % du total 1 % de la totalité des recettes publiques). République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 39 Figure 2-1: La composition du secteur public local dans 15 pays, 2010–12 (%) 120.0 100.0 80.0 60.0 40.0 20.0 0.0 In azil au ia am ia e ia ue o sh ia m a a li n l a pa on d di Ba Fas er Ma ni ric s oz ger an an de Bu biq an ne Ne bo Be Br Le rit nz Af la Ug Ni a do in ng ra Ta h Ca rk ut M So Si M Devolved Deconcentrated Centrally-controlled Central government expenditures spending 'local' spending spending Source : Rapport N° 85735-SL Decentralization, Accountability and Local Services in Sierra Leone: Situation Analysis, Key Challenges and Opportunities for Reform, 2 avril 2014, Banque mondiale. Légende : Anglais Français Devolved expenditures Dépenses dévolues Deconcentrated spending Dépenses déconcentrées Centrally-controlled ‘local’ spending Dépenses « locales » contrôlées au niveau central Central government spending Dépenses du Gouvernement central à l’échelon local. En somme, les dépenses les collectivités locales, tels que l’enseignement communales dévolues seules ne renseignent pas ou les services de santé. Bien que la préparation précisément sur l’ampleur des services publics, d’un profil complet des dépenses du secteur infrastructures et activités publiques du secteur public à l’échelon local aille au-delà de l’objet public local. de cette étude, une analyse partielle a été faite uniquement dans les secteurs de l’éducation et 13. L’étape suivante doit être une analyse de la santé, afin de déterminer l’ampleur du « globale de la décentralisation budgétaire au secteur public local ». Cette analyse suggère que Burundi qui examine tous les financements le financement des services publics locaux par acheminés vers les collectivités locales et le pouvoir central est important : les dépenses comprenne à la fois les dépenses dévolues du Gouvernement central, qu’elles concernent et les dépenses déconcentrées. Des mesures des activités déconcentrées ou contrôlées par ce permettant de montrer la distribution dernier dans les secteurs de l’éducation et de la géographique des dépenses du budget santé représentent 40 % des dépenses publiques national central devraient également totales.39 Une analyse plus systématique peut- être prônées. Le niveau actuel de dépenses communales ne révèle pas le montant des dépenses déconcentrées qui ont lieu au niveau 39  Les résultats de l’analyse sont disponibles auprès des auteurs local pour la prestation des services clés dans sur demande. 40 être proposée comme partie Figure 2-2 : Recettes communales en pourcentage des intégrante du travail analytique recettes totales du Gouvernement, Burundi : continu sur la décentralisation et 2001, 2005 et 2010 la gestion des finances publiques dans le pays. Dans ce contexte, 3.7% 4.0% le Gouvernement pourrait 3.5% 3.1% envisager d’introduire un suivi géographique des dépenses 3.0% 2.7% publiques territoriales au sein 2.5% du budget central, sur la base des 2.0% % Communes/ provinces et des communes, afin 1.5% totales de pouvoir suivre les dépenses 1.0% exécutées par secteur et source 0.5% de financement. 0.0% 14. Au Burundi, les sources 2001 2005 2010 de recettes affectées aux Source : Annuaire statistique du Burundi 2010, 2012 tableaux 14.01 et 14.11. communes génèrent des recettes communales limi- tées. Le second pilier de la décentralisation montant des recettes perçues en 2010 n’est en budgétaire est l’affectation de sources de fait que de 4,4 milliards (BIF de 2001). De plus, recettes pour financer les collectivités locales. lorsque les recettes communales sont exprimées Les principales recettes affectées aux communes en part des recettes totales du Gouvernement comprennent la taxe foncière locale, les taxes (voir Figure 2.2), la tendance montre une commerciales, celles sur les vélos et motos, baisse de l’importance relative des recettes les taxes sur le bétail et plusieurs autres taxes communales entre 2000 et 2010. La population d’importance mineure. Comme nous l’avons 40 du Burundi a augmenté de 52 % au cours des 18 déjà remarqué, en 2012, les communes du années écoulées entre le recensement de 1990 Burundi ne percevaient que 3 % des recettes et celui de 2088 ; pour les années suivantes, on totales du Gouvernement. En effet, l’analyse estime la croissance démographique à 25 %. des données de perception des recettes sur une Ainsi, en termes réels corrigés pour tenir compte longue période (2000-2010) confirme la faible de la croissance démographique, les ressources importance des recettes relatives et absolues des financières des communes au Burundi sont communes dans le pays. Tandis que le revenu restées essentiellement inchangées entre 2001 communal a augmenté en valeur nominale pour et 2010. passer de 3,6 milliards BIF en 2001 à 4,5 milliards 15. La perception des recettes dévolues BIF en 2005 et 9,9 milliards BIF en 2010, une au Burundi est faible par rapport aux grande part de cette augmentation résulte de la normes internationales. Le rôle limité joué pression inflationniste. Le taux d’inflation sur la période étant de 225 %, en termes réels, le 41 par les communes en termes de perception des recettes publiques se confirme davantage lorsqu’on compare la perception des recettes dévolues aux recettes perçues par les autres 40  Une revue complète des sources de recettes pour les pays de la région. La Figure 2.3 indique la taille communes est présentée dans une note sur la structure et les taux des sources de recettes auxquels les communes ont accès et est des recettes dévolues dans plusieurs pays disponible aupres des auteurs sur demande. . africains ; le Burundi aurait été classé parmi les 41  Annuaire statistique du Burundi, janvier 2001-janvier 2010 cinq derniers s’il avait été compris dans cette tableau 11.01 Indice général. figure. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 41 Figure 2-3 : Les recettes locales en part des recettes publiques totales dans 22 pays africains : 2006-2008 30.0% 25.0% 24,2% 19% 20.0% 17,9% 15.0% 15% 9,8% 10,4% 10.0% 7,4% 6,8% 6,6% 5.0% 4,2% 4,9% 5% 3,7% 3,3% 3,8% 2,6% 3% 2,3% 1,7% 1,3% 0,8% 1,8% 0.0% Ga ia Gh on Ke a M ya am co i Ni er A l go Ug isia m ia Af e Et pt nz a a Eg o Ni e ia n M or i So Sen a Z a a aw an bw M al Ta fric ric qu ri d s ut eg op Zi amb ni y g oz oc an n To b Fa M an ge n al Be bi ba hi Tu a h in rk Bu Source : figure 3, p. 25 l’Afrique (avec François Yatta) in Local Government Finance: The Challenges of the 21st Century (United Cities and Local Government Ed) (GOLD II 2010). Barcelone : Edward Elgar, 2011 : p. 25–59. Figure 2-4 : Recettes fiscales des communes, Figure 2-5 : Dépenses fiscales des Communes, par quintile, 2012 par Quintile, 2012 5th (highest) 5th (highest) 4th 4th 3rd 3rd 2nd 2nd 1st (lowest) 1st (lowest) Bujumbara Mairie Bujumbara Mairie No data No data Note : Note : 1st quintile : 395-1050 1st quintile : 168-958 2nd quintile : 1051-1326 2nd quintile : 959-1306 3rd quintile : 1327-1948 3rd quintile : 1307-1922 4th quintile : 1949-2931 4th quintile : 1923-3629 5th quintile : 3067-30344 5th quintile : 3630-30283 Source : Burundi Budget Exécuté de 2012 Source : Burundi Budget Exécuté de 2012 42 17. Les pratiques de perception des Figure 2-6 : Taux de Pauvreté (%) Communes du Burundi par quintile, 2008 recettes communales sont faibles. Les principales sources des recettes communales sont des impôts et des taxes levés par les communes. Une étude récente42 remarque plusieurs faiblesses dans la perception des impôts au niveau de la commune, comme par exemple l’absence de listes de contribuables, le manque d’identifiant pour les contribuables redevables de plusieurs impôts, la faible connaissance des lois fiscales par les percepteurs et la mauvaise application des pénalités en cas de défaut de paiement. Ceci a été confirmé par les discussions de groupes organisées pour cette étude (voir chapitre 4) et suggère l’existence d’une marge de manœuvre pour un meilleur rendement fiscal des communes : il s’agit d’améliorer les 5th (highest) 4th pratiques de l’administration fiscale à l’échelon 3rd 2nd 1st (lowest) local et de renforcer le lien entre perception des Bujumbara Mairie recettes et services locaux. Note : 18. Le Gouvernement central ne verse 1st quintile : 41.2%—54.2% aucun transfert fiscal intergouvernemental 2nd quintile : 54.3%-60.8% 3rd quintile : 60.9%-65.9% récurrent. Dans de nombreux pays, les transferts 4th quintile : 66.0%-69.4% fiscaux intergouvernementaux (considérés 5th quintile : 69.5%-76.2% comme le troisième pilier de la décentralisation Source : ISTEEBU rapport official base sur l’enquete sur la pauvreté de 2006 et le recensement de 2008 census. budgétaire), sont une importante source de financement pour les gouvernements locaux. Contrairement à certains de ses voisins dans 16. Les recettes communales peuvent la région (par exemple le Rwanda, la Tanzanie varier d’une commune à l’autre. Bien que les et l’Ouganda), le Burundi ne complète pas les communes ne perçoivent qu’environ 3 % de la sources propres de recettes des communes par totalité des recettes publiques (limitant ainsi leur des transferts de fonds supplémentaires pour capacité à fournir les services publics à partir des couvrir les dépenses courantes de ces dernières recettes issues de sources propres), ce chiffre (sauf pour le salaire de trois responsables ne tient pas compte des recettes potentielles communaux). Ce manque de soutien de la part du de nombreuses communes rurales. Il existe en Gouvernement central pour couvrir les dépenses fait de grandes variations dans le potentiel de courantes (mis à part le salaire des personnels recettes entre les communes (voir Figure 2.4), évoqués ci-dessus) a des conséquences majeures et nombreuses sont celles qui manquent de sur l’efficacité et l’efficience du système potentiel en termes de recettes. Ainsi, 40 % des budgétaire intergouvernemental : communes ne perçoivent pas plus de 1 326 BIF • Les communes démunies sont peu (moins de 0,9 $US) en recettes par habitant. Le Nord-est du pays semble posséder des communes plus performantes dans ce domaine. 42  Étude Sur La Viabilité Institutionnelle et Financière Des Une tendance similaire peut être observée à Communes Rurales Au Burundi, Coopération suisse, 2012, Charles travers les dépenses (voir Figure 2.5). Nihangaza. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 43 susceptibles de fournir tous les services de financement fournissant des dotations en de base à leurs résidents, puisque les capital aux communes. Il est désormais attendu recettes fiscales supplémentaires, bien que que les communes supervisent elles-mêmes nécessaires, s’obtiennent difficilement. leurs activités de construction44. • Les transferts du FONIC sont une incitation 20. Si l’on observe le budget du FONIC au recours à des dépenses en capital pour 2013 et 2014, on remarque tout d’abord subventionnées plutôt qu’à des dépenses la croissance projetée de 12 % des recettes d’entretien adéquates. nationales affectées au FONIC, et de 26 % de la • Les dépenses complémentaires permettant totalité des ressources du FONIC (voir Tableau une utilisation optimale du capital 2.1). Le poste budgétaire le plus important est communal manqueront de financement. un transfert identique à chaque commune. Ce L’augmentation du capital du FONIC créera poste budgétaire représente 70 % du total en une demande pour les dépenses courantes 2013 et 77 % du financement national du FONIC qui entravera les autres dépenses ou ne sera (80 % du financement total du FONIC en 2014). pas satisfaite.43 Le financement selon la performance et la « villagisation » a augmenté entre 2013 et 2014, • La généralisation du Service foncier tandis que celui de la construction des écoles communal (SFC, discutée dans le chapitre 3) primaires a chuté. nécessite des ressources financières que les frais facturés pour les services fonciers ne 21. Les communes ont des arriérés pourront fournir. budgétaires mais peu de possibilités • L’objectif national d’un développement d’endettement. Le quatrième et dernier pilier équitable dans toutes les régions, tel qu’il de la décentralisation budgétaire est le marché est entériné dans la constitution, est peu obligataire et l’emprunt infranationaux. Bien susceptible d’être atteint sans transfert de que l’emprunt par une entité infranationale soit péréquation. souvent découragé dans les pays à faible revenu et aux mécanismes de comptabilité locale 19. Les investissements communaux fragiles, il importe néanmoins de posséder sont soutenus par l’épargne communale et un cadre qui encourage de fortes contraintes les transferts à partir du pouvoir central, à la budgétaires au niveau local et fournisse un fois en nature (matériaux) et en liquidités. Le accès à des capitaux lorsque c’est nécessaire. principal mécanisme de transfert soutenant les Il n’existe aucune institution spécialisée dans investissements communaux est le FONIC, créé le prêt public aux communes au Burundi, et en 2007 après la fusion de fonds préexistants. les institutions financières privées accordent En 2013, le rôle du FONIC a été modifié pour rarement des prêts aux communes. Tandis qu’il passer de la distribution de matériaux de n’y a pas de données systématiques sur le sujet, construction et d’agence de supervision des les communes semblent avoir des arriérés à la activités de construction à la fonction d’agence fois auprès de caisses nationales d’assurance sociale et du fournisseur national d’électricité. De tels arriérés confirmeraient les risques 43  La relation exacte varie selon le type de projet ; l’hypothèse potentiels d’un accès plus élargi à l’emprunt d’un ratio de .05 (c’est-à-dire 50 000 BIF pour 1 million) est par des entités infranationales dans le contexte probablement raisonnable. Ainsi, un projet typique du FONIC d’une valeur de 50 millions BIF en 2014 génère un besoin de 2,5 millions actuel. pour les dépenses courantes de toutes les années à venir jusqu’à ce que le capital ne soit plus utile. Pour de plus amples détails, voir : Recurrent Expenditure Requirements of Capital Projects Estimation for Budget Purposes, Ron Hood, David Husband, Fei Yu, 2002, 44  Une description de la réglementation et de la formule Document de travail de recherche politique de la Banque mondiale des transfers du FONIC est disponible auprès des auteurs sur 2938. demande. 44 Tableau 2-1 : Résumé budgétaire du FONIC, 2013 et 2014 Éléments 2013 2014 Observations Transferts Écoles primaires (fondamentales) Investissements dans le Plan 40 millions par commune forfaitaire aux 5,160 millions communal (PCDC) 6 450 en 2013 ; 50 millions en 2014 communes millions. Bonus de 90 millions, soit 5 millions à 200 millions pour 65 communes Le montant par commune en performance chacune des 18 communes (63 régulières + 2 Bujumbura) ; 2014 est proportionnel à la note Le montant varie entre 2 370 obtenue lors de l’évaluation 000 BIF et 3 863 000 BIF annuelle des communes Achèvement 728 millions 607 millions Le montant par commune en des écoles 2014 est proportionnel à la note abandonnées obtenue lors de l’évaluation annuelle des communes Projet villagisation 341 millions 500 millions Pour le logement Construction de 501 millions salles de classe 3,9 chacune GIZ/ADLP 0 1 020 millions Nouveau en 2014 Total 7 417 millions (sommes des 9 358 millions ou 8 338 sans GIZ éléments ci-dessus, calculs propres) Source: 2013 Plan d’action du FONIC révisé le 9 juillet 2013 ; 2014 Budget d’investissement du FONIC, 16 janvier 2014. Les montants égaux pour chaque commune de 40 (en 2013) et 50 (en 2014) millions sont des droits de tirage payés sur justificatif de décaissement par les communes ; le total est réparti entre la masse salariale et le matériel. Les communes ayant dépensé moins de 40 millions en 2013 voient le restant disponible pour 2014. En 2014, GIZ a mis à disposition du FONIC 500 000 € pour qu’il puisse fournir 60 millions BIF à chaque commune des provinces de Gitega et Monoro. Le FONIC a choisi de ne pas réduire les fonds propres de ces communes à partir des recettes burundaises dans ces provinces afin qu’elles aient accès à 110 millions. 2.2 La gestion de la quelles responsabilités fonctionnelles devraient précisément être affectées aux communes ? ; décentralisation budgétaire (iii) comment les communes peuvent-elles malgré les contraintes augmenter les recettes issues de sources financières : les questions propres ? ; (iv) comment mettre en place des dispositifs de transfert au bénéfice des commu- politiques clés nes démunies pour compléter les recettes 22. À la suite de près de 10 ans d’efforts fiscales de celles-ci ? ; (v) comment améliorer sur la voie d’une plus grande décentralisation l’efficacité du mécanisme de transfert de budgétaire, certaines questions nécessitent capitaux (FONIC) ? ; et (vi) quel est l’impact encore la prise de décisions politiques potentiel des recettes tirées de l’exploitation stratégiques. La façon dont sont gérées ces minière sur les finances des communes ? Les questions politiques aura un impact considérable paragraphes suivants traitent de chacune de ces sur la capacité du secteur public burundais à questions. parvenir à une meilleure efficacité et à améliorer 2.2.1 Question politique N°1 : le nombre l’accès aux services publics de base. Suite a de communes au Burundi est-il optimal ? des discussions avec les autorités du Burundi et a une demande d’assistance technique, 23. Le nombre (et la taille moyenne) cette partie traitera des questions politiques des communes est une question politique soulevées et actuellement au centre du débat importante. Comme nous le remarquons public autour de la décentralisation budgétaire dans le chapitre 1, le nombre de communes au au Burundi : (i) le nombre de communes actuel Burundi a évolué au fil du temps. Il n’est pas est-il approprié ou devrait-il être réduit ? ; (ii) inhabituel pour des pays d’aligner la structure République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 45 Tableau 2-2 : Nombre de gouvernements locaux (échelon le plus bas) et population moyenne dans 17 pays africains, 2006–2008 Nombre de gouvernements Population moyenne, par Population du pays (en Pays Locaux commune (en milliers) milliers) Algérie 1 541 21 33 800 Bénin 77 120 9 300 Burkina Faso 351 43 15 200 Côte d’Ivoire 987 20 19 600 Malawi 40 330 13 200 Mali 703 18 12 700 Maroc 1,497 21 31 478 Mauritanie 216 14 3 200 Mozambique 43 477 20 530 Namibie 54 33 1 830 Niger 265 55 14 700 Rwanda 30 310 9300 Sénégal 431 29 12 700 Afrique du Sud 283 172 48 687 Tunisie 264 39 10 326 Togo 354 19 6 800 Zimbabwe 90 129 11 631 Source : Travaux préliminaires non publiés pour « l’Afrique » (avec Francois Yatta) in Local Governance Finance: The Challenges of the 21st Century (United Cities and Local Government Ed) (GOLD II 2010) Barcelone : Edward Elgar, 2011 : p25-59. de gouvernance locale sur deux nécessités rurale efficace est de 600 millions BIF.45 D’autres concurrentes : d’une part, garantir pour les comparent le Burundi au Rwanda, où le nombre communes une proximité avec les communautés de districts a été réduit à 30 depuis 2006, avec qu’elles servent, et d’autre part, assurer que la une population moyenne de 400 000, et des juridiction communal soit d’une taille suffisante responsabilités de prestation de services dans les secteurs de l’éducation et de la santé. pour que ces autorités remplissent leurs fonctions efficacement et avec efficience. Les 25. Les communes du Burundi ne sont cercles politiques du pays se sont récemment pas si petites en termes de population, intéressés à la question de l’éventuelle réduction compte tenu de leurs responsabilités. Le du nombre de communes. Tableau 1.1 (chapitre 1) présente les données relatives à la taille des communes par province. 24. Plusieurs facteurs expliquent l’intérêt Il montre quelques variations dans la taille des d’une réduction de ce nombre. Une des raisons populations qui pourraient justifier des fusions, est la viabilité financière (ou plus exactement, le mais les communes fournissant principalement manque de viabilité). Certaines communes ont des services qui nécessitent une proximité avec de petits budgets. Selon une étude, même si l’on considère que les responsabilités fonctionnelles 45  Étude Sur La Viabilité Institutionnelle Et Financière Des des communes sont limitées en nombre, le Communes Rurales Au Burundi, Coopération suisse, 2012, Charles budget annuel minimum pour une commune Nihangaza. 46 les résidents mais qui sont peu techniques (un 2013,47 simultanément à un décret sur la fort contenu technique est associé avec des coopération des communes du Burundi et celles services tels que le traitement des eaux usées ou d’autres pays.48 En conséquence, des modalités le compost, par exemple) ou n’ont pas des coûts de collaboration intercommunale et volontaire fixes très élevés (services similaires), il serait pourraient ainsi émerger comme alternative à délicat de prôner une politique nationale de la fusion. fusion. Le Tableau 2.2 présente les données de 17 pays africains. En comparaison, le Burundi, et 28. Le regroupement de communes ne ses 116 communes rurales, avec une population pallie pas nécessairement le manque de moyenne de 90 000, n’est pas une aberration resources et pourrait créer des tensions entre statistique. les communes. La fusion de trois communes ayant la même population et un budget de 200 26. Il n’y a pas de nombre de communes millions BIF chacune augmenterait le budget en stable ou naturel.46 En 1960, il y avait 18 valeur absolue à 600 millions BIF mais n’aurait provinces et 181 communes. Mais en 1965, aucun impact sur le montant des ressources par le nombre de communes est tombé à 79. En habitant. À moins de s’accompagner de réformes 1981, le Burundi comptait 15 provinces et administratives plus étendues, il est peu 114 communes ; 10 ans plus tard, en 1991, probable que la consolidation des communes il y avait 113 communes hors Bujumbura. crée une plus grande marge budgétaire Enfin, en 1998, 3 nouvelles communes ont été affectée aux services locaux par les économies créées et Bujumbura divisée en 13 communes d’administration locale. Tandis que l’argument supplémentaires, pour parvenir au nombre selon lequel le regroupement de communes total actuel de 129. Aucun fait ne montre que ces pourrait réduire certaines des inégalités modifications du nombre de communes aient budgétaires entre communes, une telle fusion eu un impact significatif sur la performance en ne se ferait pas sans coût social et politique. termes de prestation des services. Ceci pourrait Par exemple, si l’on envisage de fusionner trois constituer un argument contre une nouvelle communes : toutes ont la même population en modification du nombre de communes (à moins nombre d’habitants, mais l’une a un budget de qu’elle ne soit accompagnée par un changement 800 millions BIF (une commune « riche ») et les substantiel des responsabilités fonctionnelles deux autres, seulement 200 millions chacune de ces dernières). (communes « pauvres »). En théorie, la fusion doublerait les ressources disponibles par 27. Les regroupements intercommunaux habitant pour les communes « pauvres ». Dans sont quasi-inexistants. La politique nationale la pratique, une telle fusion créerait des tensions de décentralisation de 2009 prône l’utilisation sociales et politiques puisque, pour parvenir à de regroupements intercommunaux (modalités une péréquation intracommunale, la majorité de collaboration entre deux communes ou des électeurs de la nouvelle juridiction (située plus) comme moyen d’atteindre les objectifs dans les parties pauvres de la commune) devra de développement. L’apparition de ce type de réduire (de moitié) les ressources à disposition regroupement a été ralentie par le manque de cadre juridique clairement défini. Un décret visant la facilitation de ce processus a été adopté par le Gouvernement du Burundi en octobre 47  DÉCRET N° 100/ 243 DU 06 OCTOBRE 2013 PORTANT RÉGLEMENTATION DE L’INTERCOMMUNALITÉ AU BURUNDI http://www.presidence.bi/spip.php?article4118. 48  DÉCRET N° 100/ 244 DU 06 OCTOBRE 2013 PORTANT 46  Détails tirés de Le sénat et la politique de décentralisation au RÉGLEMENTATION DE LA COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE AU Burundi, août 2010, partie II. BURUNDI http://www.presidence.bi/spip.php?article4119. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 47 Encadré 2-1. L’évaluation des inconvénients et avantages d’une réduction du nombre de communes : analyse empirique sans modification des services Pour établir les avantages et les inconvénients d’une réduction du nombre de communes au Burundi, il faut employer les étapes suivantes : • Définir le nombre annuel d’interactions entre les résidents des communes et le bureau communal : 157 500 (pour les communes hors Bujumbura) • Définir le coût en termes de temps et de finances de ces interactions : 1 milliard BIF (à nouveau pour les communes hors Bujumbura) • Définir un nombre réduit et plausible de communes (par exemple, 40) • Calculer la réduction des coûts liée à cette réduction du nombre de communes : les coûts salariaux pour les communes diminuent d’environ 200 millions BIF et les coûts salariaux pour le pouvoir central d’environ 400 millions BIF, pour un total de 600 millions BIF • Calculer l’impact du nombre réduit de communes sur les coûts d’accès individuel (aux services) : l’accès aux sièges communaux centralisés coûterait 1 milliard BIF de plus aux résidents49. La question devient donc : que peut-on faire avec la seule autorisation soit des Administrateurs communaux, soit celle des conseillers techniques ? Et que peut-on faire en leur absence ? Si leur présence n’est pas nécessaire, alors les services peuvent être maintenus au même endroit, avec un coût réduit d’environ 5 % des recettes communales (même si une partie est économisée au niveau central). Les réponses recueillies dans les groupes de discussion communautaires organisés par la Banque mondiale et discutés dans le chapitre 4 indiquent que les citoyens sont préoccupés par l’accès à l’Administrateur communal. Dans une enquête auprès du personnel de 16 communes, les personnes interrogées ont indiqué que certains services nécessitaient l’intervention de l’Administrateur communal et qu’une plus grande distance entre les bureaux administratifs et les communautés desservies pourrait mener à une réduction de la demande de services. Si le nombre de responsables politiques est réduit mais pas le nombre d’autres employés, une réduction du nombre total des communes ne se justifie pas sur le plan financier. de la minorité d’électeurs vivant dans la partie 30. Le statut juridique des 13 communes plus riche de la commune. de Bujumbura fait l’objet de discussions. Les communes de Bujumbura ont un conseil élu mais 29. Le regroupement affecte l’accès des aucun pouvoir financier, celui-ci étant exercé par résidents aux services. L’augmentation de la la province / municipalité de Bujumbura. Une taille des communes pourrait générer de petits proposition a été formulée en janvier 2014 de gains financiers mais augmenterait les coûts en transformation des communes de Bujumbura termes de temps et de finances pour accéder à ces en communes de plein exercice. Selon certains, services, voire réduirait leur utilisation par les cette proposition est un pas en avant vers une ménages. Cette question n’a pas été étudiée par fusion en trois communes ; d’autres croient que le Gouvernement du Burundi. Des données ont c’est une tentative de formalisation d’égalité été recueillies en 2013 par la Banque mondiale de traitement pour toutes les communes du pour une analyse des avantages et inconvénients Burundi. d’une réduction du nombre de communes hors Bujumbura, et les constatations lors du travail mené à l’époque sur le terrain suggèrent qu’une 49 De plus amples détails sur les calculs de répartition des fonds telle réduction n’est pas justifiée (voir Encadré non affectés de FONIC sont disponibles aupres des auteurs sur 2.1 et Annexe 5). demande. 48 Tableau 2-3 : Les arrondissements dans le monde : les forces et les faiblesses dans trois domaines Statut juridique Statut politique Autonomie budgétaire Montréal Fort Fort Forte Toronto Faible Fort Faible New York Fort Fort Faible Los Angeles Faible Faible Faible Mexico Fort Faible Faible Bogota Fort Faible Faible Buenos Aires Faible Fort Faible Paris, Lyon, Marseille Fort Fort Faible Source : Gouvernance urbaine, mégavilles et décentralisation sous-locale : un tour d’horizon des Amériques, Jean-Philippe Meloche 2014, Mimeo. Remarque : Le statut juridique est considéré « fort » là où le nombre, les limites et les pouvoirs des arrondissements sont protégés par une loi, sinon il est « faible » ; l’autonomie budgétaire est considérée « forte » si l’arrondissement a un contrôle substantiel de son budget, sinon elle est « faible ». 31. L’expérience dans le monde indique nouvelle version a été préparée au cours de que la désignation des communes de l’été 2013 pour être soumise au Parlement en Bujumbura en « arrondissements » serait 2014. Dans les domaines des infrastructures plus appropriée. Les arrondissements sont et des services, ce texte de loi - de ce que nous des sous-divisions de vastes zones urbaines savons, étant donné que la version officielle n’a qui fonctionnent généralement sous un des pas encore été rendue publique - précise les deux statuts juridiques suivants : des villes responsabilités communales dans les termes indépendantes, telles que Bruxelles ou Londres, suivants : et des arrondissements (voir Tableau 2.3). Les communes de Bujumbura faisant partie d’une • Construction, équipement et entretien des zone urbaine intégrée, il semble approprié écoles communales primaire et secondaire d’envisager de les traiter formellement en • Construction et entretien des centres de arrondissements. santé publics, fourniture de l’équipement non médical 2.2.2 Question politique N°2 : quelles responsabilités fonctionnelles devraient • Construction et entretien des points d’eau être assignées aux communes ? (bornes fontaines, sources aménagées et autres adductions d’eau) 32. Au sein du débat politique entourant le nombre optimal de • Construction et entretien des latrines communes, il y a un processus continu publiques, des canalisations d’eaux usées, des de transfert de compétences du pouvoir stations d’épuration et des incinérateurs central vers les collectivités locales. • Construction et entretien des routes Depuis 2009, les responsabilités exactes communales des communes font l’objet d’études. • Construction, équipement et entretien des Un texte de loi longuement discuté sur le transfert des compétences de l’État aux communes infrastructures culturelles, sportives et du Burundi a été présenté à une commission touristiques parlementaire au printemps 2013, et son • Équipement et entretien des tribunaux et examen a été suspendu peu de temps après. Une prisons de la commune République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 49 • Construction de centres de jeu / loisirs ou de les services dans ce domaine. formation professionnelle pour les groupes vulnérables (dans la limite des moyens 34. Tandis que le texte de loi est un pas budgétaires de la commune) dans la bonne direction en ce qu’il clarifie les responsabilités des communes, il doit • Construction, entretien et gestion des être accompagné d’un plan indiquant les marchés modalités de transfert des ressources • Prestation de services sociaux pour les financières et humaines nécessaires. étudiants indigents (dans la limite des Comment se fera le recrutement du personnel moyens budgétaires de la commune) des communes qui prendra en charge ces • Prestation de services de soins médicaux nouvelles compétences ? Par exemple, pour pour les groupes vulnérables (dans la limite conserver un équilibre budgétaire, de combien des moyens budgétaires de la commune) le budget du Ministère de la Santé Publique sera- t-il réduit si certaines compétences sectorielles • Gestion des déchets sont transférées aux communes ? Toutes ces • Préparation et délivrance des certificats questions sont d’une grande importance (avec fonciers50 des implications politiques et techniques), et il • Gestion des forêts et terrains communaux serait préférable d’y répondre avant l’adoption de la loi. Autre préoccupation, le manque de 33. Le texte de loi actuel comprend une connexion entre les ministères de tutelle et les liste de compétences transférables pour lois. Par exemple, en 2013, une loi a été adoptée les infrastructures et les services. S’il est concernant l’enseignement primaire qui visait mis en œuvre, le transfert des responsabilités à « décentraliser » les services de l’éducation assignerait aux communes la charge des services à des directorats communaux déconcentrés de communaux de base (routes, sports, déchets) et l’enseignement. leur déléguerait partiellement la responsabilité de la prestation des services d’enseignement 2.2.3 Question politique N°3 : comment et de santé au niveau local (construction, les communes peuvent-elles augmenter équipement et entretien des établissements). leurs propres recettes ? La commune aurait également, ce qui n’est pas courant au niveau international, un rôle dans 35. Le cadre juridique existant en matière la construction et l’entretien des maisons de d’imposition est responsable de l’érosion détention et des tribunaux sur son territoire. considérable de l’assiette fiscale, les conseils L’absence de compétences explicites en termes communaux ayant tendance à augmenter les de services communautaires typiques, tels taux d’impôts locaux. Les sources propres de que le développement communautaire et recettes sont actuellement la principale source les activités de la jeunesse et des sports, est de financement pour les communes (avec le surprenante. Bien que les communes soient FONIC et les projets financés par des bailleurs chargées de construire, entretenir et gérer les de fonds)51. Dans la plupart des cas, les taux établissements sportifs, elles n’ont pas à fournir d’imposition sont fixés en valeur nominale (c’est-à-dire un montant fixe par article, tel qu’un certificat, une tête de bétail ou par mètre carré 50  Il est important d’observer que la responsabilité de fournir un (m²) de propriété) ; ces taux ont été fixés par une certificat foncier est déjà dévolue aux communes sous le nouveau Code foncier (2011, article 384). Cette reconnaissance reflète les efforts d’abrogation de l’ancienne législation et d’harmonisation des dispositions du Code foncier avec celles régies par la Loi 51  Une note sur la structure et les taux des sources de recettes communale de 2005. Ceci n’est pas un processus inhabituel et auxquels les communes ont accès sont examinés en détails, est reflète le transfert récent de compétences aux communes. disponible aupres des auteurs sur demande. 50 ordonnance en 1997. Depuis lors, l’inflation a été 36. La législation proposée incorpore 500 % mais les taux d’imposition des communes plusieurs changements importants aux taxes n’ont jamais été légalement modifiés, causant communales et à la fiscalité des communes.53 ainsi une érosion significative de l’assiette Le changement le plus courant proposé dans fiscale des collectivités locales. Pour contourner le système d’imposition des communes est ce problème, les conseils communaux ont une augmentation des taxes sur plusieurs augmenté leurs taux d’imposition avec l’accord articles54. Par exemple, le taux par tête de bétail, implicite du Ministère de l’Intérieur, sur la base actuellement un taux fixe de 300 BIF, serait fixé d’une légitimité dépendante de l’acceptation des entre 500 BIF et 1 500 BIF et serait déterminé nouveaux taux par la population. Ceci repose par le conseil communal. De plus, le texte de sur une interprétation de la loi communale loi comprend la promesse d’actualiser les taux qui permet aux communes de passer outre régulièrement (la fréquence n’est pas indiquée) l’ordonnance.52 au moyen d’un décret conjoint des Ministères des Finances et de l’Intérieur.55 Les modifications Une nouvelle loi de finances pour les proposées au système d’imposition des communes est actuellement à l’étude. communes comprennent : Naturellement, une solution plus appropriée à l’érosion de l’assiette fiscale des collectivités • Une clarification du rôle des communes et locales consiste en une révision formelle de la de l’Office Burundais des recettes (OBR) qui structure et des taux d’imposition au niveau accorde aux communes les mêmes pouvoirs local. Les taxes communales de la proposition sur les taxes communales que ceux de l’OBR de structure d’imposition révisée comprennent sur les impôts du pouvoir central les taxes suivantes : • La possibilité pour le conseil communal de choisir une fourchette de taux d’imposition • L’impôt sur le gros bétail pour certaines taxes plutôt qu’un taux unique • La taxe sur la vente de bétail fixé au niveau central • La taxe d’abattage • Des augmentations importantes des taux de • La taxe sur les cycles et cyclomoteurs l’impôt foncier. Le taux pour les bâtiments n’est plus un taux fixe de 36 BIF/m2 mais • L’impôt foncier une fourchette allant de 0 à 500 BIF/m2 • L’impôt sur les revenus locatifs selon le type de services disponibles pour • La taxe sur les pylônes la propriété, tandis que pour des terrains attenants à des bâtiments, on passe de 4 • La taxe forfaitaire sur les activités (patente) BIF/m2 à une fourchette de 0 à 50 BIF/m2. • La taxe sur les cultures industrielles • Le taux marginal le plus élevé pour les La taxe sur les pylônes (relais de téléphone revenus locatifs tombe de 60 % à 30 %, portable) est nouvelle, tandis que les autres taxes sont déjà en place. La loi de finances pour les communes proposée apporte des modifications significatives à la fois de la structure et des taux 53  Ces observations sont inspirées de l’Etude sur la Viabilité Insititutionnelle et Financiere des Communes Ruruales au d’imposition existants. Burundi, mai 2012, Charles Nihangaza. 54  Une note sur la structure et les taux des sources de recettes auxquels les communes ont accès sont examinés en détails, est disponible aupres des auteurs sur demande. 52 Voir GUIDE PRATIQUE DE MOBILISATION DES RESSOURCES FINANCIÈRES COMMUNALES Bujumbura, avril 2012, Ministère de 55  La légitimité juridique d’une modification par décret de taux l’Intérieur. fixés par la loi pourrait être problématique. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 51 tandis qu’une exonération annuelle pour les de deux taxes sur les petits commerçants (l’une premiers 1 800 000 BIF de revenus locatifs est nationale, l’autre communale) peut conduire est introduite, ces deux modifications certains à croire que l’OBR est impliqué dans la entraînant une perte de recettes perception des taxes locales. Cette confusion est • La taxe forfaitaire sur les activités est limitée alimentée par le fait que l’impôt sur le revenu aux entreprises ayant un chiffre d’affaires de (perçu au niveau central) peut, dans certains cas, moins de 24 millions BIF. Ceci signifie que les être calculé au moyen d’une formule similaire grosses entreprises ne contribuent plus au à celle utilisée pour les taxes communales financement des services publics locaux, ce sur les activités économiques (patente).56 qui segmente les entreprises entre l’OBR et Certains commerçants affirment aux autorités les contribuables au niveau des communes. que le paiement d’une taxe (soit à l’OBR soit à La façon dont les données relatives au la commune) recouvre les deux obligations. changement de taille des entreprises seront Tandis que ce n’est pour l’instant pas le cas, recueillies et gérées n’est pas clairement cette impression de double taxation pourrait précisée. changer avec la révision proposée sur les taxes communales, telle que présentée plus haut.57 37. Un des défis clés consistera à dépasser Une deuxième raison de cette confusion quant le manque d’intérêt généralisé de certaines au rôle de l’OBR dans la fiscalité communale est communes dans la perception des impôts. que dans certaines des discussions politiques, Notre enquête auprès de 16 communes indique les représentants de cet office ont prôné la que depuis août 2013, seules six communes centralisation de l’impôt sur les revenus locatifs, avaient perçu l’impôt sur les revenus locatifs, assigné aux communes par la décentralisation. et quatre, l’impôt foncier. Les raisons avancées pour la non perception de ces taxes, sources clés 39. L’OBR a un rôle potentiel à jouer de recettes, sont les suivantes : (i) le manque dans la perception des taxes locales et peut d’information sur l’impôt foncier ; (ii) le manque aider les communes à renforcer le système de connaissance sur les dispositions juridiques actuel. Puisque l’impôt sur les revenus locatifs permettant aux communes de percevoir l’impôt est un impôt cédulaire parmi d’autres appliqués foncier ; (iii) les conflits d’intérêt des percepteurs à plusieurs types de revenus, il serait normal (propriétaires) ; et (iv) la résistance de la qu’il soit perçu par l’OBR afin de garantir un population locale à se conformer à la législation traitement cohérent de l’imposition sur le et à payer. revenu de l’individu et des entreprises. Suivant un tel scénario, l’OBR pourrait agir comme 38. Le rôle de l’OBR dans la fiscalité agent percepteur pour les communes, tandis locale doit être éclairci afin d’éviter que les sommes recueillies pourraient revenir des dédoublements de perception et aux communes sur la base de dérivations. Ceci d’imposition. Le rôle de l’OBR prête à confusion est apparemment prôné par l’OBR comme en matière d’imposition par les collectivités locales ; certains représentants des communes et du pouvoir central croient que l’OBR est 56  L’Article 40 de la Loi relative aux impôts sur les revenus l’agent percepteur des taxes locales. En réalité, (2013) le permet pour les entreprises ayant un CA annuel de moins les représentants de l’OBR ont confirmé que la de 24 millions BIF avec le formulaire suivant, http://www.obr.bi/ perception des taxes locales ne figurait pas dans images/stories/download/Formulaire_dclaration_Prlevement_ IR_new.pdf. leurs prérogatives. L’impression qu’ont certains des intervenants dans les finances communales 57  Dans d’autres cas, il semble que certaines communes limitrophes veuillent facturer des taxes ou des redevances de que l’OBR est présent dans ce domaine semble marché sur les marchandises en transit (camions scellés), ce due à deux éléments. Tout d’abord, l’existence qu’elles n’ont pas l’autorité pour le faire. 52 participant d’un effort d’harmonisation avec lutte contre la pauvreté pour aider les communes la Communauté d’Afrique de l’Est (comme ayant besoin d’un soutien plus important. Le argument contraire, on pourrait remarquer qu’au Tableau 2.4 présente un exemple de dispositif Rwanda, cet impôt est perçu par les districts de transfert davantage axé sur la lutte contre la jusqu’en 2015). Ce débat ne s’applique pas à pauvreté utilisé actuellement dans la région. l’impôt foncier, également cédé aux communes lors de la décentralisation, qui demeure un Tableau 2-4 : Un exemple de formule de impôt dont la collecte par les communes est tout transfert première génération : le Kenya à fait appropriée. Poids des paramètres (%) 2.2.4 Question politique N°4 : comment Paramètre Formule approuvée par le établir un dispositif de transfert pour les Parlement dépenses courantes des financements Population 45 destinés à la lutte contre la pauvreté en Dotation identique 25 complément du FONIC ? Pauvreté 20 Superficie 8 40. Une caractéristique inhabituelle du Responsabilité fiscale 2 système budgétaire intergouvernemental du Burundi est que les communes ne reçoivent Total 100 aucun transfert pour financer les dépenses Source : Commission on Revenue Allocation, Gouvernement du Kenya, 2013, http://www.crakenya.org/information/ courantes. Une des explications de cette absence revenue-allocation-formula/>. de système de transfert destiné aux dépenses Remarque : cette formule a été mise en œuvre à partir de courantes proposées par les responsables des 2013 ; la part de responsabilité fiscale est actuellement finances est que le pouvoir central a cédé deux également allouée comme une dotation identique puisque les données à utiliser pour l’évaluation de la responsabilité domaines d’imposition aux communes pour fiscale ne sont pas disponibles compte tenu de la création couvrir pleinement leurs besoins en dépenses : récente des comtés (mars 2013). l’impôt foncier et l’impôt sur les revenus locatifs. Mais la concentration de la base de ces deux impôts à Bujumbura et quelques communes 42. Un dispositif de transfert récurrent urbaines signifie que les recettes générées sont plus équitable est tout à fait possible au inadaptées pour garantir un niveau minimum de Burundi. Pour l’illustrer, l’Encadré 2.2 présente services de base dans la plupart des collectivités une formule possible pour un système de locales. transfert communal destiné aux dépenses courantes. La formule proposée contient quatre 41. La réforme des taxes communales critères d’allocation : un montant identique envisagée comprend une proposition de par commune (10 %) ; la superficie, ajustée création d’un dispositif de transfert récurrent. selon les conditions topographiques (20 %) ; la Dans la proposition de loi, l’intention est de payer population vivant sous le seuil de pauvreté (30 0,5 % de la taxe à la valeur ajoutée (TVA) (dont %) ; et la population (40 %). Les simulations le taux était de 18 % en 2013) aux communes, basées sur la formule d’allocation58 montrent à distribuer en fonction de leur population que l’importance de ce type de transfert serait officielle. Ceci représenterait environ 2,75 % significative en termes relatifs : pour 2010, des recettes de TVA. Bien que l’introduction dernière année pour laquelle les données sont proposée d’une dotation récurrente soit un disponibles pour la quasi-totalité des nouvel élément positif, la formule d’allocation basée sur la population limite la capacité de la dotation proposée à soutenir les communes 58  Une note détaillée sur les similations pour un système de démunies. La proposition pourrait être affinée en transfer y compris les formules et résultats est disponible aupres faisant de la formule d’allocation un élément de des auteurs sur demande. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 53 Encadré 2-2. Établir un dispositif de transfert pour les communes équitable et transparent : proposition avec simulations Pour mettre en place au Burundi un système de transfert vers les communes transparent et équitable, les décideurs politiques doivent : (i) identifier les communes éligibles, (ii) instaurer une enveloppe de ressources destinée aux transferts, et (iii) déterminer la formule d’allocation. 1. Identifier les communes éligibles Nous excluons les 13 communes de la capitale (Bujumbura-Mairie) des bénéficiaires des transferts, la pauvreté y étant beaucoup moins présente que dans le reste du pays. Compte tenu du rôle de capitale de Bujumbura, ces 13 communes ont à la fois des besoins spécifiques et un accès spécial au Gouvernement central. 2. Établir une enveloppe pour les transferts Comme nous l’avons vu précédemment, une réforme politique est à l’étude qui affecterait aux communes 0,5 % de la TVA (taux de 18 % en 2013) en fonction de leur population officielle. Cela signifie environ 2,75 % des recettes de TVA, et c’est l’enveloppe destinée aux transferts utilisée dans cette proposition. Il ne s’agit pas là de juger de la pertinence ou non du montant proposé mais simplement de refléter ce qui semble indicatif de l’évolution de la politique du Gouvernement du Burundi. Dans le budget national de 2013, les recettes de TVA représentent 192,1 milliards BIF59 tandis que le montant prévu pour 2014 est d’environ 221,2 milliards BIF.60 Il semble donc raisonnable d’utiliser 210 milliards, ce qui, multiplié par 2,75 %, génère une enveloppe estimée pour les transferts de 5,8 milliards BIF à partager entre les communes. Cela représente environ 1 % des recettes de taxes escomptées pour le Gouvernement central pour l’année 2014. Certains calculs étant basés sur les données de 2010, remarquons que la dotation pour cette année-là aurait été de 2,7 milliards BIF.61 Deux éléments additionnels nécessitent d’être clarifiés avant la mise en place d’un tel dispositif : tout d’abord, la question de savoir s’il faut compter sur les recettes de TVA budgétées ou la perception réalisée ; et deuxièmement, quelle entité sera l’agence chargée des transferts. • L’utilisation du montant budgété implique que toute fluctuation macroéconomique (à la hausse ou à la baisse) soit absorbée par le Gouvernement central. L’utilisation du montant perçu partage la répercussion des fluctuations macroéconomiques entre le pouvoir central et les communes. • Si le choix se fait d’utiliser le montant perçu, les données décalées de l’OBR peuvent servir à fixer le montant mensuel des transferts. L’OBR pourrait verser les paiements directement aux communes ou les faire transiter par le Ministère de l’Intérieur ou celui des Finances. 3. Formule d’allocation Une formule équitable permettant de lutter contre la pauvreté doit tenir compte : • des différences entre les communes en termes de besoins de dépenses (par exemple, les différences de demande en matière de services publics liées aux facteurs démographiques) • des différences entre les communes du coût à l’unité suivant des facteurs tels que la topographie ou le climat • des différences de potentiel fiscal entre les communes Il serait possible d’ajouter des incitations afin d’améliorer la performance en matière de prestation de services publics ou de perception des impôts ; nous suggérons de mettre ces éléments de côté jusqu’à ce que le transfert de compétences et les réformes fiscales faisant l’objet de discussions ailleurs aient été mis . œuvre. , en 59 60 61 Pour le Burundi, il n’y a pas d’indicateur de capacité fiscale au niveau communal, tel que la valeur des 59 192 088 819 724 BIF exactement ; Loi 1/13, 30 juillet 2013, Budget révisé, p16. 60 221 776 438 178 BIF ; Projet de loi, Budget 2014, article 1, p23. 61 Tableau A, loi 1/31, 31 décembre 2009. 54 propriétés ; les discussions avec l’OBR suggèrent qu’aucun indicateur de capacité fiscale pour les taxes nationales n’est disponible au niveau local. De plus, les communes du pays remplissent actuellement des fonctions de niveau municipal tels que l’état civil (certificats de naissance ou de décès), l’entretien des routes communales, la collecte de déchets et les activités culturelles et sportives mais ne fournissent aucun service de santé ou d’éducation. Dans un tel contexte, il convient de retenir les points suivants : • Le poids du montant fixé provient d’estimations faites des données de l’enquête auprès de 16 communes sur les coûts salariaux du personnel obligatoire des communes. Le montant s’élève à 475 millions BIF pour les 116 communes. En prenant en compte 20 % de frais généraux, on atteint 570 millions BIF, soit environ 10 % de l’enveloppe retenue ci-dessus. La dotation identique conduit à une allocation forfaitaire d’environ 5 millions BIF par commune. En travaillant sur la formule à mettre en œuvre, il faudra prendre soin de la mesurer avec un ensemble de données plus large. • L’impact de la topographie est pris en compte de façon égale par le poids de la superficie de chaque commune grâce à deux indicateurs : le degré de dénivellation et le point le plus haut de la commune. • L’impact de la pauvreté est pris en compte par l’introduction de la population indigente dans la formule. Nous utilisons des critères de pauvreté monétaires et non monétaires. Poids des quatre éléments dans la formule d’allocation Critère d’allocation Dotation identique Superficie corrigée Pauvreté Population par commune pour la topographie Poids 10 % 20 % 30 % 40 % Remarque : les données de superficie et de topographie proviennent de l’Institut de Géographie ; les données démographiques proviennent du Manuel des statistiques du Burundi ; les données sur la pauvreté sont calculées par l’institut de statistiques (ISTEEBU) à partir des données d’une enquête sur la pauvreté de 2006 et du recensement de 2008. communes, un tel dispositif de transfert (avec de jouer un rôle important dans le système une enveloppe ajustée aux recettes de TVA de de finances intergouvernementales du 2010) aurait signifié une augmentation de 45 % Burundi. Celui-ci a en fait gagné en importance des recettes totales pour les communes soit un entre 2010 et 2012 (voir Figure 2.8). En tant que tiers de leurs recettes totales, après le transfert. tel, les différentes réformes de sa gouvernance, mises en œuvre en 2010-2013 avec le soutien 43. La relative facilité avec laquelle il de l’Agence de coopération internationale est possible de simuler une dotation plus allemande (Gesellschaft für Internationale équitable basée sur une formule suggère qu’il faudra accorder davantage de considération Zusammenarbeit – GIZ) et le Programme des à l’allocation lors de la planification d’un Nations Unies pour le développement (PNUD), futur dispositif de transfert récurrent. À sont bien accueillies. titre d’illustration, les transferts simulés ont été 45. Pour garantir un solide système calculés selon la formule d’allocation proposée. de dotations, certains des choix du FONIC La Figure 2.7 montre les variations des niveaux doivent être réexaminés. Un mécanisme de dotations simulées, de 558 BIF à 1 330 BIF objectif et transparent basé sur une formule per capita ; les communes les plus favorisées perd de sa crédibilité s’il ne fonctionne pas en par la formule sont concentrées à l’Est du pays accord avec sa propre formule et ses procédures 44. Outre la possible introduction d’un opérationnelles. Par exemple, le fait de payer système de dotation récurrent, le dispositif un bonus aux communes les plus performantes de dotation en capital (FONIC) continuera en 2013 et 2014 ne respecte pas les procédures République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 55 Figure 2-7 : Projection des transferts Figure 2-8: Le Fonds d’investissement FONIC, aux communes rurales per capita, selon 2010–2012 l’hypothèse de la formule d’allocation 8000 7000 6000 5000 4000 3000 2000 1000 0 2010 2011 2012 5th (highest) 000 000 FBu 4th 3rd 2nd 1st (lowest) Bujumbara Mairie Source : Calculs de l’auteur à partir des données BOOST. Source : Calculs de l’auteur selon la formule de transfert détaillée plus haut. communaux. Dans le cas des fonds communaux, Remarque : limites des quintiles (BIF) 1er : [558, 704] 2e : les preuves sont moins concluantes, mais pour [704, 738] 3e : [738, 798] 4e : [798, 889] 5e : [889, 1330]. un marché, on trouve de plus en plus d’arriérés et des montants difficiles a réconcilier. Il sera donc opportun de renforcer les capacités de internes du FONIC mais est justifié par la controle du gouvernement central à la fois au direction du FONIC comme une continuation des niveau provincial et au niveau central par la politiques précédentes (programme PRADECS). Cour des comptes. Il est préférable d’éviter de telles déviations des propres procédures opérationnelles du FONIC 2.2.5 Quelles sont les implications puisqu’elles peuvent favoriser des abus potentiels potentielles des recettes de l’exploitation et des conflits d’intérêt institutionnels. minière dans les finances des communes ? 46. L’augmentation des fonds transférés 47. Le secteur minier promet d’être aux communes devraient être accompagnée un facteur significatif de la croissance au par de meilleures pratiques de gestion Burundi ces dix prochaines années. L’impact des finances publiques. Les récents travaux de l’expansion de l’exploitation minière sur effectués par les partenaires techniques ont les finances des communes mérite d’être mis en évidence les difficultés non seulement examiné dans le contexte de la stratégie de dans la gestion des marchés publics mais aussi décentralisation budgétaire du pays. On dans la gestion des fonds communaux. Dans le prête au Burundi des ressources en minerais cas des marchés publics, une approche possible considérables, le nickel, l’or et le coltan étant pour améliorer les pratiques de passation possiblement les plus importantes. Le pays a un des marchés est d’utiliser les structures potentiel particulièrement remarquable pour intermédiaires regroupant plusieurs communes; l’exploitation du nickel. Musongati, le principal ceux-ci pourraient être des organismes inter gisement latéritique en nickel du pays fait partie 56 des 10 plus grands gisements connus Figure 2-9 : Les mines en activité non exploités, avec une ressource inférée d’approximativement 180 millions de tonnes métriques. Les 62 réserves nationales sont estimées à 285 millions de tonnes, et au cours des cinq dernières années, plusieurs sociétés internationales se sont montrées intéressées par l’exploration commerciale de ces ressources.63 L’analyse du meilleur scénario possible (faite dans le Mémorandum économique du pays pour le Burundi, CEM, en 2011) estime les recettes fiscales d’une exploitation de Muson- gati à l’échelle industrielle entre 50 millions $US et 233 millions $US (2 à 10 % du produit intérieur brut de 2011 [PIB]), selon le cours mondial du nickel. En conséquence, le Gouvernement du Burundi a identifié l’exploitation minière comme une possible source de croissance et de revenu dans son second Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté. Dans ses efforts pour développer le secteur et attirer les investissements, le Burundi a adopté un nouveau Code minier en Source : Banque mondiale, SEGOM, Burundi Artisanal Mining Study, à venir. octobre 2013. Le secteur minier fait également partie du premier et du troisième volet de la Stratégie d’aide-pays (SAP) Les données disponibles sur la production et de la Banque mondiale pour la période 2013- l’export ne reflètent ni la production réelle de 2016. La SAP a identifié l’exploitation minière minerai au Burundi ni la quantité exportée. comme une opportunité de diversification de Le département hydrocarbures et industries l’économie burundaise et de génération de extractives de la Banque mondiale (SEGOM) revenus importants pour le pays. finalise actuellement une étude du secteur 48. Aujourd’hui, le secteur minier minier artisanal et à petite échelle du Burundi, consiste en 20 000 mineurs artisanaux et qui vise, entre autres, à vérifier les données de ne contribue que marginalement au PIB. production et d’exportation de minerai.64 Les données concernant l’or sont particulièrement peu fiables. On estime que les données sur l’exportation représentent moins de 20 % des 62  La Banque mondiale (2011). République du Burundi- Mémorandum économique du pays (CEM) : The Challenge of Achieving Stable and Shared Growth. Washington, D.C. : La Banque mondiale, Rapport N° 51880-BI. 64  Voir Exploitations Minières Artisanales du Burundi sur la 63  Banque africaine de développement (2009), An Infrastructure Période 2009-2013 : Rapport en relation avec l’Étude Diagnostique Action Plan for Burundi: Accelerating Regional Integration. de l’Initiative pour les Industries Extractives au Burundi, à venir. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 57 Figure 2-10 : Les activités d’exploration minière, indiquées par concessions Source : Banque mondiale, SEGOM, Burundi Artisanal Mining Study, à venir. 58 quantités réellement exportées. Les estimations et des coûts supplémentaires en matière disponibles placent la valeur de l’or exporté d’éducation, de santé et d’autres services à partir du Burundi à 400 millions $US.65 Avec sociaux que la région productrice ne pourrait pas une taxe ad valorem de 2 % sur l’exploitation supporter autrement. Par exemple, le transport artisanale des mines d’or, le Gouvernement des minerais pourrait accélérer l’usure des burundais pourrait percevoir jusqu’à 8 millions routes, tandis qu’un afflux de travailleurs attirés $US en 2014, sans compter les autres frais dans la région pourrait engendrer des besoins et cotisations. Il faudrait pour cela que les plus importants en termes de prestation de mécanismes de perception et de déclaration services. Les coûts des dégâts écologiques soient renforcés.66 causés par l’extraction devraient également être pris en considération. D’autres éléments à 49. Les activités minières sont concen- considérer pourraient comprendre les coûts de trées dans plusieurs communes. Les activités réinstallation de communautés touchées par minières actuelles au Burundi concernent l’or, les activités d’extraction, les coûts d’une plus le coltan, la cassitérite et le wolframite et sont grande pression sur les sources d’eau et ceux concentrées dans la zone nord du pays, dans liés à la modification des moyens de subsistance les provinces de Cibitoke, Kayanza, Bubanza, dans leur ensemble. Ngozi, Kirundo et Muyinga, ainsi que Ruyigi à l’Est. Tout récemment, une mine a été ouverte 51. Pour que des activités d’exploitation à Gitega. L’exploration minière est concentrée minière à grande échelle et à fort impact dans le nord du pays et le long des rives du Lac soient acceptées au niveau social, les Tanganyika. compagnies minières devraient peut-être proposer et financer les services locaux 50. La concentration géographique nécessaires. Les compagnies concluent d’exploitation minière potentielle à souvent volontairement des accords avec grande échelle pourrait exacerber les les communautés locales dans des zones où différences intercommunales en matière l’extraction minière a lieu afin d’éviter les conflits de répartition des coûts et des externalités et d’obtenir une « licence sociale » d’exploitation. négatives. L’exploitation minière à grande De tels accords peuvent impliquer des services échelle est susceptible d’être plus concentrée tels que la construction de routes, d’écoles ou géographiquement que l’exploitation à de centres de santé. Plusieurs pays exigent des petite échelle, compte tenu de la nécessité compagnies qu’elles passent un accord avec les de gisements plus vastes pour que l’activité communautés locales pour le développement soit rentable. Cela signifie que certaines communautaire ou qu’elles proposent un plan communes et communautés feront les frais de développement communautaire : c’est alors des impacts environnementaux négatifs d’une la condition à remplir pour obtenir une licence extraction à grande échelle. Actuellement, un d’exploitation.67 Le Burundi pourrait envisager un grand nombre de communes font les frais des mandat légal afin que les compagnies contribuent activités minières artisanales non régulées. Les au développement des communautés touchées activités d’exploitation pourraient nécessiter par les activités minières (contenu local). Une des investissements supplémentaires dans la législation de ce type doit être conçue pour construction et l’entretien d’infrastructures garantir que les compagnies n’entreprennent telles que des routes, les écoles ou les hôpitaux 67 Voir, par exemple, les principales lois relatives au secteur 65  Ibid. minier de la République centrafricaine, la Guinée équatoriale, l’Éthiopie, la Guinée, du Nigéria, de la Sierra Leone et du Soudan 66  Ibid. du Sud. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 59 pas de projets inutiles non conformes aux Le partage élargi des recettes entre les provinces besoins et objectifs de développement des et les communes, même celles qui ne sont communautés. Une possibilité est d’exiger que pas directement affectées par l’exploitation les projets de développement communautaire minière, pourrait constituer une importante lancés par les compagnies soient conformes source supplémentaire de financement pour les aux plans de développement des communes. communes et empêcher l’apparition de grandes Des systèmes de suivi de la mise en œuvre des disparités budgétaires intercommunales avec accords de développement communautaire l’augmentation des recettes de l’extraction devraient également être envisagés. minière. Tandis que le Code minier de 2013 fait référence à cette possibilité, les mécanismes 52. Les communes adjacentes aux réels de distribution des recettes restent à mines peuvent également être affectées. Le préciser. principal site d’une mine sera normalement situé dans une commune mais s’il s’agit d’une 54. Une approche intégrée de la mine à ciel ouvert, il se peut qu’elle soit située décentralisation et de l’exploitation minière sur plusieurs communes. Si le gisement en pourrait être mise en œuvre. L’opportunité sous-sol s’étend sous plusieurs communes, existe d’intégrer à la fois la décentralisation et alors celles qui n’auront pas le site principal l’exploitation minière par un mécanisme qui : verront « leurs » ressources extraites sans (i) compense les communes ayant des activités aucun bénéfice, particulièrement si les liées à l’exploitation minière pour la dégradation obligations de développement communautaire de l’environnement, (ii) épargne des recettes ne sont pas conçues pour recouvrir toutes les issues de l’exploitation des ressources pour les communes affectées. Tandis que l’extraction générations futures, et (iii) partage certaines de minière peut être menée dans une commune, ces recettes entre les communes productrices le raffinage du minerai pourrait se faire dans et non productrices. Il existe des exemples de une autre commune, tandis que le transport modalités de partage des recettes (i) avec les aux fins d’exportation pourrait signifier que le régions productrices uniquement et (ii) avec métal traverse plusieurs communes (par route, les régions productrices et non productrices pipeline ou train). (voir Encadrés 2.3 et 2.4 pour de plus amples détails). 53. Compte tenu des impacts éventuels de l’exploitation minière et de l’ampleur 55. Le Burundi pourrait envisager de potentielle des recettes tirées de cette partager les recettes tirées de l’exploitation exploitation, il importerait de clarifier minière uniquement avec les communes les modalités de partage des recettes productrices ou avec toutes les communes. présentées dans le Code minier. Comme Un minimum de 8 millions $US de recettes nous l’avons remarqué précédemment, le CEM tirées de l’exploitation aurifère par année pour de 2011 estime les recettes fiscales de la seule le Gouvernement burundais est l’estimation exploitation industrielle de Musongati entre retenue pour une évaluation du total des 50 millions $US et 233 millions $US (2 à 10 recettes minières dans les simulations illustrées % du PIB de 2011), selon le cours du nickel. discutées ci-dessous. Les recettes fiscales de l’exploitation minière artisanale pourraient s’élever pour le Burundi à 56. Dans une des simulations, les recettes 8 millions $US en 2014. Le partage des recettes, ne sont partagées qu’avec les communes en supplément aux accords de développement productrices. La faisabilité politique d’un passés avec les compagnies, pourrait aider à tel dispositif doit être étudiée avec soin. compenser les communes affectées pour les Les contraintes capacitaires au niveau local coûts supportés relatifs à ce type d’exploitation. et budgétaires au niveau central pourraient 60 Encadré 2-3. Scénario 1 : Partage des recettes de l’exploitation minière avec les régions productrices Dans un système de partage des recettes avec les régions productrices, les recettes tirées des ressources naturelles sont perçues au niveau central mais une portion est partagée avec les régions productrices, soit sur la base de la contribution de la région aux recettes totales perçues (par dérivation), soit sur la base d’une formule ou d’un pourcentage. Dans de nombreux cas, les recettes sont partagées à la fois au niveau central ou provincial et au niveau de la municipalité ou du district. Au Ghana, 80 % des recettes produites par les ressources sont retenus par le Gouvernement central et 20 % sont partagés avec les régions productrices : 10 % vont à un Fonds de développement des ressources minérales pour la redistribution aux communautés minières et 10 % sont donnés à l’Office de l’Administration des terres stool qui redistribue ensuite ces fonds entre les districts producteurs et les conseils et propriétaires terriens traditionnels (« stools ») des régions productrices (Morgandi 2008 ; Revenue Watch Institute 2013). L’Indonésie distribue les recettes tirées des ressources uniquement aux régions productrices et à celles qui sont affectées par l’exploitation de ces ressources. Tandis que les recettes issues des ressources pétrolières et gazières sont largement retenues au niveau du pouvoir central, la plupart des recettes de l’exploitation minière sont conservées au niveau provincial. Distribution des recettes tirées des ressources en Indonésie Mines Pétrole Gaz Gouvernement central 20% 84.5% 69.5% Provinces productrices 16% 3.1% 6.1% Districts producteurs 32% 6.2% 12.2% Districts adjacents aux districts producteurs 32% 6.2% 12.2% Source : Morgandi 2008 ; Agustina et al., 2012. Remarque : La dotation générale du Gouvernement central pour les provinces diminue à mesure qu’augmente les recettes des provinces. faire d’un modèle tel que celui du Ghana (ou des communes d’autres provinces devraient de l’Indonésie), dans lequel 80 % des recettes être intégrées à cette liste. Il est conseillé de sont retenus au niveau central, le modèle le développer une procédure transparente pour plus pratique pour le Burundi. En d’autres identifier toutes les communes potentiellement termes, 20 % des recettes seraient affectés aux affectées, compte tenu du potentiel de conflit communes productrices (voir Tableau 2.5).68 au sujet des recettes. Par exemple, certaines Actuellement, les provinces comprenant des communes d’une province productrice peuvent communes productrices sont Cibitoke, Kayanza, ne pas être affectées, tandis que des communes Bubanza, Ngozi, Kirundo, Muyinga, Ruyigi et non productrices pourraient subir des impacts. Gitega, pour un total de 61 communes. Si les La faisabilité globale d’un tel modèle doit être recettes étaient partagées non seulement avec étudiée avec soin par les autorités nationales les communes productrices mais aussi celles et un modèle plus équitable (voir ci-dessus) qui sont affectées par l’exploitation minière, pourrait être préférable, compte tenu du contexte du pays. 57. Dans le second scénario, les recettes 68  Bien sûr, le ratio du partage pourrait évoluer au fur et à mesure que le Gouvernement central transfère davantage de sont partagées avec les régions productrices compétences aux communes. et non productrices. Comme l’indique le République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 61 Encadré 2-4. Scénario 2 : Partage des recettes de l’exploitation minière avec les régions productrices et non productrices Dans ce système, les recettes sont généralement perçues par le Gouvernement central, et les régions productrices et non productrices reçoivent une part des recettes tirées des ressources. Toutefois, dans de tels cas, les régions productrices reçoivent souvent une part plus grande que les régions non productrices. En général, il semble que les pays dans lesquels les recettes tirées des ressources représentent une grande part du budget sont davantage susceptibles d’en redistribuer une partie à toutes les régions (Morgandi 2008). La Constitution de 1999 du Nigéria stipule que 13 % des recettes issues des ressources doivent être alloués par dérivation. Après les « premiers frais », y compris les appels de fonds pour financer la compagnie pétrolière nationale, 13 % des recettes pétrolières sont reversés aux régions productrices par dérivation. Le reste est divisé entre les niveaux du pouvoir fédéral, des états et des municipalités (gouvernements locaux), sur la base d’une formule prenant en compte les facteurs tels que la taille de la population, les efforts de contribution aux recettes et de développement social (Ahmad et Mottu 2003 ; Morgandi 2008). Distribution des recettes pétrolières du Nigéria (%) Gouvernement central 45,83 La totalité des 36 états (sur la base d’une formule) 23,25 La totalité des municipalités (sur la base d’une formule) 17,92 Les 9 états producteurs (par dérivation) 13,00 Total 100,00 Source : Morgandi 2008. Remarque : Sous la loi vénézuélienne sur les hydrocarbures, 25 % des redevances et taxes pétrolières doivent être transférés aux gouvernements locaux (Revenue Watch Institute 2013). Tableau 2.6, une version simplifiée des modèles artisanale peut être un sujet pertinent à prendre du Venezuela et du Nigéria peut être imaginée, en compte au moment de planifier le partage dans laquelle, à nouveau, la majorité des recettes des recettes tirées de l’exploitation minière. est retenue au niveau du Gouvernement central Quel est l’impact d’une activité d’extraction (70 %) et le solde est partagé équitablement minière à petite échelle sur le potentiel fiscal de entre toutes les communes (10 %) et les la commune ? S’en trouve-t-il réduit du fait de communes productrices (20 %). Il convient de l’utilisation de terres à d’autres fins que pour remarquer que dans ce scénario, la division entre la culture agricole, ou l’améliore-t-il en créant les montants destinés au Gouvernement central une activité économique locale imposable qui et aux communes devrait être déterminée sur la n’existerait pas autrement ? Si une capacité base de plusieurs facteurs, y compris la capacité fiscale locale est en effet créée, alors comment et la répartition des compétences en termes de la prendre en compte dans une formule de fourniture de services et infrastructures. transfert ? En cas de coûts créés par l’extraction minière à petite échelle, tel que le besoin accru 58. Pour déterminer le « bon » mécanisme de services de police, d’eau ou de collecte des de partage des recettes, pour peu qu’il y déchets, comment gérer ces derniers ? Les en ait un, plusieurs facteurs doivent être projections faites sur la base d’une exploitation pris en considération. L’impact immédiat minière industrielle doivent être envisagées. de l’exploitation minière à petite échelle et Avec l’augmentation des recettes tirées des 62 Tableau 2-5 : Une simulation du partage des recettes uniquement avec les régions productrices Entité % Montant ($US) Gouvernement central 80 6 400 000 Communes ayant des activités de 20 1 600 000 production directes ou indirectes La totalité des communes éligibles Hypothèse de parts égales mais celles-ci pourraient varier 26 230 (61 communes) selon le statut de la commune : productrice (10/20), affectée (6/20), voisine (4/20) Source : Compilation de l’auteur. Tableau 2 6 : Simulation du partage des recettes avec les régions productrices et non productrices Entité % Montant ($US) Gouvernement central 70 5 600 000 La totalité des communes 10 1 800 000 Communes ayant des activités de 20 1 600 000 production directes ou indirectes La totalité des communes (129) Pourrait être basée sur la population ou être identique 9 302 pour chaque commune. Ici, les communes de Bujumbura sont traitées comme des communes ordinaires Communes ayant des activités de Hypothèse de parts égales mais celles-ci pourraient varier 26 230 production directes ou indirectes selon le statut de la commune : productrice (10/20), affectée (6/20), voisine (4/20) Source : Compilation de l’auteur. minerais, la capacité des provinces et des inchangés. Le deuxième scénario introduit communes à gérer des recettes conséquentes a une réforme substantielle de la structure des implications importantes dans la conception intergouvernementale (fiscale). Les compéten- politique. La capacité d’investissement public, ces des communes, rurales et à Bujumbura, ainsi que la capacité de gestion de l’instabilité et leur nombre sont fixés par l’adoption par des recettes tirées de l’exploitation minière, doit le Parlement d’une ou de plusieurs lois. Par être considérée et gérée. exemple, le Burundi pourrait opter pour une réforme inspirée de celle du Rwanda qui réduit 2.3 Les futures réformes de le nombre de communes tout en augmentant décentralisation au Burundi : considérablement leurs compétences en termes de prestation de services. options possibles et recommandations 60. À court terme (jusqu’aux élections de 2015), l’option la plus probable est celle 59. Dans les années à venir, deux options du statu quo. Si des réformes devaient être sont possibles pour les communes du entreprises, il n’y a aucune certitude quant Burundi. La première option de décentralisation à la forme qu’elles prendraient. Depuis budgétaire est celle du statu quo. Dans ce 2010, moment de l’introduction de quelques scénario, rien (ou très peu) ne change quant au amendements à la Loi communale de 2005, nombre de communes, à leur statut juridique peu de progrès ont été faits sur la voie d’une et à leurs compétences, tandis que leurs décentralisation réelle au Burundi. La loi sur pouvoirs fiscaux demeurent essentiellement les responsabilités au niveau de la commune République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 63 doit encore être adoptée, les parlementaires sous forme d’un comité consultatif bipartite. déplorant l’absence de transferts appropriés, On peut également ajouter un représentant humains et financiers, vers les communes. communal au conseil des sept membres de Les lois relatives aux finances des collectivités l’OBR dans le cas ou il fera la collecte des impôts locales et aux modifications du statut des pour les communes. communes de Bujumbura n’ont pas été adoptées non plus. Comme nous l’avons vu dans 63. Pour répondre aux besoins le chapitre 1, plusieurs facteurs comptent, tel particuliers des communes du Burundi que la division des portefeuilles ministériels et gérer les réformes de décentralisation entre les deux Vice-présidents et les élections budgétaire, il est recommandé de mettre en anticipées de 2015. Ces facteurs, comme place les sept actions politiques suivantes : d’autres, suggèrent qu’aucune réforme majeure I. Clarifier les responsabilités fonction- n’est imminente ; la politique dans ce domaine demeure donc incertaine. nelles des communes à long terme. Il est impossible de décider de la taille qui 61. Pour chacune de ces options, convient pour une commune, et donc l’introduction d’un dispositif de transfert du nombre de communes ou de leur récurrent destiné aux dépenses est financement, tant que leurs compétences appropriée. Le degré de déconcentration et ne sont pas clairement établies. L’ajout de de dévolution souhaitable au Burundi n’est pas compétences, tel qu’envisagé dans la loi sur clair. Il s’agit d’un petit pays, et le gouvenrement le transfert de compétences actuellement à central pourrait offrir l’ensemble des services l’étude, est une option, mais ses implications publics. La langue est commune à tous et le doivent être examinées avec soin (voir N°3 pays n’est pas divisé géographiquement entre ci-dessous). Ne pas ajouter de compétences groupes de dialectes ou d’ethnies différents. est une autre option, tout aussi raisonnable. Les nombreuses motivations habituelles pour la Il est cependant conseillé, d’une façon ou dévolution ne sont donc pas pertinentes. Il reste d’une autre, de clarifier les responsabilités toutefois nécessaire de traiter les inégalités à court terme (2014-2016), préférablement entre les communes et le besoin de ressources avant les élections de 2015 : (i) soit par accrues, en particulier compte tenu du fait que l’adoption et la promulgation au Parlement les services fonciers sont désormais dévolus aux d’une loi actuellement à l’étude pour une communes (voir chapitre 3). mise en œuvre en 2016, soit (ii) par un 62. Plusieurs réformes proposées ci- énoncé clair selon lequel les responsabilités dessus nécessitent des collaborations entre existantes demeureront inchangées à court le gouvernement central et les communes. et moyen terme. Les réformes dans la perception des impôts communaux impliquant plus d’activité ou les II. Établir le nombre de communes, et donc interactions avec l’OBR, l’introduction d’un leur délimitation, pour le long terme et système de transfert ou le partage de la richesse permettre des modalités de collabora- des ressources naturelles nécessitent tous une tion intercommunale afin d’optimiser plus grande collaboration ainsi qu’une plus les économies d’échelle. À moins de grande intégration entre le gouvernement s’accompagner de réformes administratives central et les communes. Ainsi, il peut être plus étendues, il est peu probable que approprié d’examiner comment établir des la consolidation des communes, avec mécanismes de consultation plus formelle entre leurs responsabilités existantes, crée une le gouvernement central et les communes. Un tel plus grande marge budgétaire affectée organisme pourrait par exemple être mis en place aux services locaux par des économies 64 d’administration locale. Elle pourrait même paramètres. Simultanément, des efforts engendrer une augmentation des coûts sont nécessaires pour renforcer le système pour les résidents des communes. De plus, d’administration des impôts locaux, une infrastructure globale est nécessaire améliorer le respect des obligations fiscales pour garantir les complémentarités entre et renforcer le lien entre une perception la prestation de services importants, par des recettes améliorée et de meilleurs exemple les services relatifs au réseau services pour les citoyens. Ceci pourrait routier et à la santé. Une alternative plus être facilité par un échange d’information viable à court terme (un ou deux ans) serait entre l’OBR et les communes relatives de profiter du nouveau décret adopté par aux listes de contribuables. Cet échange le Gouvernement en octobre 2013 pour pourrait constituer un premier pas pour lancer la mise en œuvre de dispositifs favoriser la perception des taxes locales intercommunaux de dimensions variables, liées aux activités économiques (le Rwanda en fonction du niveau d’économie d’échelle offre un exemple de collaboration similaire associé aux différents services. entre l’agence fiscale centrale et les agences locales : la dernière réforme de la Loi de III. Régler le statut des communes de taxe au niveau du district a introduit Bujumbura en prenant en compte leur l’obligation pour le pouvoir central de situation dans une zone métropolitaine fournir aux districts des informations sur élargie. Il existe actuellement trois une catégorie de contribuables, ceux qui possibilités : en faire des communes de sont redevables de la TVA). Les plein exercice, avec un statut similaire modifications des paramètres fiscaux à celui des communes du reste du pays, peuvent être introduites à court terme, en conserver leur statut actuel ou les désigner 2015 ou avant, en adoptant et promulguant comme arrondissements. Il faut également la loi qui convient. Le partenariat avec examiner les limites de Bujumbura-Mairie l’OBR peut également être mis en œuvre à afin de voir si celles-ci doivent être étendues court terme par des orientations politiques. pour prendre en compte la transformation Une réévaluation du potentiel fiscal des des communes voisines en faubourgs. Il communes pourrait être menée à moyen serait envisageable d’examiner la création terme, également pour bénéficier d’un d’une communauté urbaine de Bujumbura registre foncier plus étendu (voir le chapitre regroupant Bujumbura-Mairie et certaines 3 à ce sujet). communes de Bujumbura rural. Toute décision sur le statut des communes de V. Introduire un dispositif de financement Bujumbura peut être prise à court terme des dépenses courantes qui complète (un ou deux ans). La modification des le dispositif existant de transfert de limites de Bujumbura-Mairie ou la création capitaux (FONIC). Ceci nécessite l’examen d’une communauté urbaine sont des choix de l’équilibre entre le potentiel de recettes à moyen terme (trois ans ou plus). propres des communes et leurs besoins en dépenses. Il importe de ne pas négliger IV. Revoir les paramètres fiscaux existants l’entretien des équipements existants lors afin de prendre en compte l’inflation du financement de nouvelles infrastructu- et d’instaurer une approche plus res. Les premières priorités sont efficace en matière de taxes locales, en l’augmentation des recettes issues de collaboration avec l’OBR. Le potentiel sources propres et l’introduction d’un fiscal des communes peut également dispositif de transfert général. Le dispositif être évalué, une fois fixés les nouveaux existant (FONIC) peut également être République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 65 amélioré à court terme. Avant la mise en au renforcement de la transparence et de œuvre de ces éléments, la capacité financière la responsabilisation dans l’utilisation des des communes sera en pleine fluctuation et ressources publiques. leur capacité de remboursement sera donc difficile à établir. Un mécanisme d’emprunt VII. Entreprendre une étude systématique pourrait être mis en place à moyen terme des coûts non renouvelables, récurrents, (moins de cinq ans), une fois ces autres et des coûts de prestation de services questions réglées. Un dispositif de transfert liés aux nouvelles compétences des pour les dépenses courantes pourrait communes afin de bien comprendre être introduit à court terme, au moyen du la viabilité budgétaire à long terme budget de 2015 et indépendamment de la du processus des réformes de la loi portant modification des paramètres décentralisation. Ce travail analytique de fiscaux. Une revue à moyen terme de ce suivi peut se concentrer sur (i) le coût des dispositif pourrait être menée en 2017 pour normes existantes en matière de personnel, une mise en œuvre en 2018. les modalités institutionnelles et les coûts à l’unité pratiqués pour les services clés ; VI. Introduire un mécanisme de suivi et (ii) l’estimation des options envisagées permettant de mieux saisir la distri- en termes de facteurs / variables que le bution géographique des dépenses Gouvernement devrait considérer afin infranationales dans le budget central d’assurer la viabilité budgétaire, ainsi afin d’améliorer la transparence du que la réponse à la question de savoir budget et l’efficacité des dépenses si de nouvelles compétences en termes publiques. Présentement, aucun méca- de prestation de services devraient être nisme n’existe dans le budget national dévolues aux communes. Il serait conseillé pour identifier de façon systématique de commencer par les secteurs comportant la distribution des dépenses publiques, une contribution d’importance majeure en qu’il s’agisse de dépenses déconcentrées termes de prestation de services (dont la ou décentralisées. Il est donc difficile, santé, l’éducation, l’agriculture). La question alors qu’il est possible de connaître le clé qui est en jeu est celle de l’utilisation et plafond budgétaire global pour un secteur de la rémunération adéquate des ressources donné, d’obtenir sa désagrégation au humaines dans un contexte décentralisé. À niveau infranational. Un mécanisme cet égard, une analyse plus approfondie des permettant le suivi des allocations de dépenses du secteur public serait utile pour dépenses infranationales dans le budget déterminer la contribution optimale des central fournirait aux autorités un outil communes aux résultats obtenus en termes d’orientation efficace tout en contribuant de prestation des services publics. 66 Chapitre 3 La gouvernance foncière décentralisée : défis et opportunités Résumé des principaux et les résultats d’entretiens et de visites de terrain dans les SFC de la Province de Ngozi. La arguments et constats clés principale innovation institutionnelle traitée Partant d’une analyse des institutions au ici est l’introduction d’une méthode plus niveau macro à la responsabilité des communes pertinente, plus accessible et plus économique en termes de prestation de services locaux, pour enregistrer les droits fonciers en zone ce chapitre examine les expériences de rurale que le système prédominant des titres décentralisation des services administratifs fonciers. Une telle innovation s’appuie sur la fonciers et revient sur les défis et succès présence et l’autorité des collectivités locales rencontrés par le Gouvernement dans ses efforts et introduit le certificat comme une alternative pour déployer l’accès aux services fonciers dans juridique au titre (un certificat pouvant ensuite toutes les communes du pays. être converti en titre, si on le souhaite). Ainsi, ce chapitre: À cette fin, ce chapitre s’appuie sur les résultats de la Revue du Secteur Foncier réalisée en 2013 • Présentera les résultats, forces et faiblesses pour le projet PRODEMA appuyé par la Banque du nouveau certificat foncier et démontrera mondiale (PRODEMA 2014), sur l’analyse coûts- que l’association d’un système décentralisé avantages d’une sélection de Services Foncier d’administration foncière et d’un nouveau Communaux (SFC) menée avec l’aide financière document d’enregistrement des droits (le et technique de l’Organisation des Nations unies certificat foncier) a tout le potentiel pour pour l’Alimentation et l’Agriculture (Banque améliorer la sécurisation foncière au Burundi mondiale / FAO 2014), ainsi que sur d’autres et pour minimiser les conflits liés à la terre études récentes (Habwintahe et al., 2013) et pour favoriser les investissements. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 67 • Discutera des effets des opérations pilotes durabilité financière des SFC et une plus d’établissement des SFC, en mettant l’accent grande efficacité des communes pour sur les résultats et les défis à venir. Le but est contribuer aux efforts de mobilisation de permettre un enregistrement des droits des recettes par des impôts locaux, la fonciers, à grande échelle, qui soit accessible, planification territoriale et une meilleure moins coûteux, plus rapide et intégré à un information foncière. processus géré par les communes afin d’en Ces éléments sont plus amplement détaillés. assurer la transparence et de contribuer à Organisé en quatre parties, ce chapitre : la résolution et à la prévention des conflits. L’analyse suggère tout particulièrement la • Identifiera les principales questions liées à la nécessité d’une évaluation d’impact afin sécurisation foncière, les obstacles auxquels de déterminer avec rigueur les bénéfices elle est confrontée et leurs implications en potentiels pour les ménages. A ce jour, termes de conflit et de violence au Burundi. les éléments quantifiant les effets de • Présentera l’argumentaire pour la promotion l’enregistrement des droits fonciers et d’une réforme de la gouvernance foncière et de la délivrance de certificats fonciers au examinera les innovations clés apportées, niveau communal sur (i) la prévention en mettant l’accent sur la gestion foncière des conflits à long terme et l’efficacité des décentralisée. mécanismes de règlement des conflits, (ii) les • Étudiera l’expérience pilote des SFC et investissements, (iii) les marchés fonciers, et identifiera les principaux résultats obtenus, (iv) la transformation économique en milieu les obstacles à venir et les opportunités de rural, restent limités. réforme. • Définira la séquence de réformes nécessaires • Résumera l’analyse et formulera des recom- afin d’assurer un déploiement durable et mandations opérationnelles susceptible efficace des efforts actuels. Ces questions d’orienter les efforts du Gouvernement pour sont au premier plan du débat national sur une meilleure sécurisation foncière tout en la politique foncière. Le Gouvernement est déployant la décentralisation de la gestion attaché à l’obtention d’un appui technique des terres. de la part de la Banque et des bailleurs de fonds actifs dans ce secteur, puisqu’il vise à 3.1 La rareté des terres et décider des mécanismes les plus efficaces et durables afin de renforcer la gouvernance l’insécurité foncière : facteurs de foncière des zones rurales, ainsi que des conflit au Burundi actions requises pour réussir les acquis du 1. Pays montagneux enclavé, le Burundi déploiement des activités pilotes en cours présente l’une des densités démographiques sur toutes les communes rurales. Plus les plus élevées d’Afrique (310 habitants / km2 précisément, la pérennisation à long terme en moyenne) ; 90 % de la population vit dans des des SFC (en termes de standards de qualité et zones rurales. La densité démographique varie d’intégrité des registres et de durabilité des largement d’une région à l’autre (voir Figure services rendus, des compétences techniques 4.1), surtout lorsqu’on en exclut Bujumbura- et du financement) doit être abordée. Ce Mairie.69 En 2011, la part de terres arables était déploiement nécessite des investissements en faveur d’initiatives de renforcement des capacités et des améliorations pour un fonctionnement responsable et transparent 69  Bujumbura, la seule ville de taille importante à moins d’1 million d’habitants, ce qui est relativement petit pour un pays dont des services fonciers décentralisés, associés la population est actuellement autour de 10 millions d’habitants. à des stratégies permettant de garantir la La deuxième ville du pays, Gitega, à moins de 50 000 habitants. 68 les terres71 a également réduit la possibilité Figure 3-1: La densité démographique des communes, par quintile d’utilisation de la jachère pour restaurer la fertilité des sols, tandis que l’augmentation des cultures céréalières, telle que celle du maïs, sur les terrains souvent en pente a favorisé l’érosion des sols, ce qui exacerbe à son tour le phénomène d’inondation des vallées et des plaines, comme en février 2014.72 3. La demande de terre (destinée à l’agriculture, à l’expansion urbaine, aux investissements, à la protection environnementale, ...) continue de croître. La combinaison d’une demande accrue, d’une raréfaction des terres et de droits fonciers pas toujours clairs constitue un obstacle à la 5th (highest) stabilité au niveau local. De plus, les procédures 4th 3rd 2nd 1st (lowest) juridiques représentent un coût élevé pour les Bujumbara Mairie personnes impliquées dans les conflits fonciers. Les communes sont fréquemment sollicitées par Source : ISTEEBU 2013 les parties impliquées pour intervenir en tant que médiateurs de ces conflits.73 Une meilleure gestion foncière peut contribuer à réduire le estimée à 35,8 % et celle des terres cultivées fardeau pesant sur des ressources financières et à 15,6 % (en augmentation, comparé au 14 % humaines limitées en atténuant les litiges et en de 2000 ; Indicateurs du développement dans accélérant leur résolution. le monde (IDM)). L’agriculture constitue le principal moyen de subsistance des ménages 4. Les conflits et disputes au sujet des en zone rurale, faisant de la terre la principale terres sont généralisés. Les conflits fonciers ressource économique pour la majorité de la peuvent être liés aux divisions politiques et population démunie. ethniques mais la plupart implique les membres d’une même famille ou des voisins de longue 2. Au Burundi, les petits propriétaires dominent le secteur agricole. Ces dernières années, la plupart des paysans 71  La densité démographique du Burundi a changé de façon substantielle ces dernières années, passant de 144 habitants / ont subi à la fois une réduction des surfaces km² en 1979 à 310 habitants / km² en 2008. Cette énorme de cultures vivrières et de la productivité70 ; augmentation est due à la forte croissance démographique, l’exploitation moyenne possède entre 0,4 et 0,5 stimulée par un taux de fertilité élevé. hectares (0,1 ha par personne en 2011 ; IDM) 72  La gestion forestière au sommet des collines, les cultures et ne fait que diminuer (PRODEMA 2014). pluriannuelles (bananes, café et thé), associées au terrassement et à d’autres formes de protection contre l’érosion nécessitent Simultanément, les vagues de conflit violent une sécurisation des droits sur la terre pour les agriculteurs et ont affecté les stratégies de gestion de fertilité une capacité d’investissement soutenue par une règlementation des sols. La pression croissante exercée sur réellement appliquée de l’occupation des sols dans les zones fragiles. 73  Le maire (ou administrateur communal) à Ngozi a estimé avoir passé en moyenne deux jours par semaine dans la médiation 70  Le Cadre Stratégique de Croissance et de Lutte contre la de conflits souvent causés par des disputes au sujet du foncier Pauvreté II (CSLP-II), p. 16–17. (entretien, juin 2013). République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 69 Tableau 3-1 : La fréquence des conflits fonciers, selon la localisation des ménages et le mode d’acquisition de terre Ménages près Ménages Ménages Ménages des % Ménages des zones ruraux urbains paysannats protégées N = 2257 N = 1047 N = 385 N = 306 N = 299 N = 220 Terrains hérités 57,9 % 53,4 % N = 306 34,2 % 36,9 % Terrains achetés 25,6 % 30,8 % 69,8 % 27,4 % 20,9 % Terrains attribués provenant 3,7 % 3,8 % 21,4 % 11,0 % 20,9 % du domaine public Terrains réclamés par les 6,4 % 5,4 % 3,2 % 20,6 % 9,7 % réfugiés de retour Autres 6,1 % 6,6 % 0,4 % 3,9 % 10,8 % Source: Rapport du PRODEMA 2014: 77. Remarque : Le classement provient des participants à des groupes focus. Les pourcentages indiquent le classement des risques (premier ou second en ordre d’importance) pour chaque colonne. date. Ces conflits peuvent être classés dans 5. La plupart des affaires en attente de deux catégories : (i) les conflits structurels, règlement dans les tribunaux burundais simplement déclenchés par la rareté des terres, sont liées aux conflits fonciers. On estime et (ii) les conflits dus aux crises politiques, aux que 72 % des affaires civiles sont liées à des déplacements de population et à la violence questions foncières ; simultanément, les conflits qu’elles entraînent. Les conflits qualifiés fonciers sont souvent la cause d’affaires de droit de structurels concernent généralement la pénal.75 L’engagement obligatoire de médiateurs délimitation des propriétés, les transactions de conflit traditionnels bashingantahe avant de (ventes de terres familiales peu transparentes,74 se tourner vers le tribunal a été aboli en 2005, ventes multiples d’un même terrain, etc.), les bien que la pratique montre qu’ils sont encore droits du sol et l’héritage. Comme le montre le consultés. À ce jour, le seul moyen pour un Tableau 3.1, les conflits de « terrains hérités » tribunal burundais de régler les conflits fonciers sont les plus fréquents (58 %) et les plus difficiles est de prononcer un jugement en faveur d’une à régler. Concernant la deuxième catégorie des des deux parties impliquées. Mais les difficultés conflits, plus de 500 000 réfugiés ayant quitté le liées au bien-fondé des éléments de preuve pays dans les années 70 sont rentrés au Burundi associées aux soupçons de partialité des autorités ces dernières années et cherchent à récupérer judiciaires rendent délicat ce type de résolution. leurs terres, à présent utilisées par d’autres Le cadre juridique actuel a été identifié comme (PRODEMA 2014). Cependant, ces conflits liés un obstacle majeur au règlement des conflits aux crises politiques et impliquant des rapatriés au cours des consultations menées en 2011 par sont généralement peu nombreux dans la le Ministère de la Justice. Le système judiciaire plupart des régions, à l’exception des zones de souffre à l’évidence d’un manque de mécanisme paysannats ; 20,6 %) et dans les zones urbaines de médiation formel (ICG 2013). (voir Tableau 3.1). 75  Bigirimana, Gilbert. « Étude sur la situation des conflits fonciers au Burundi ». RCN Justice & Démocratie. Septembre 2012. (Dans la Province de Ngozi, des entretiens ont été menés avec 74  Les ventes de terres peuvent être sources de conflit, surtout 240 individus, analysant plus de 1 600 jugements civils, ainsi que lorsqu’un individu vend sans le consentement du conjoint et de recueillant l’opinion de près de 230 personnes de l’administration, la famille. du système judiciaire ou du droit coutumier). 70 6. La discrimination systématique des conjoints en faisant figurer le nom du mari envers les femmes exacerbe les tensions et de la femme sur le certificat foncier, bien liées à la propriété foncière. Contrairement que la législation le permette. Peu de femmes à des pays comme le Rwanda et l’Éthiopie possèdent des terres ; selon le droit coutumier, (voir Encadré 3.1), peu d’efforts sont faits au les femmes n’ont pas le droit d’hériter de terres. Burundi pour promouvoir l’établissement Les veuves n’héritent donc pas des terres de leur d’une documentation foncière établie au nom défunt mari mais sont les simples intendantes Encadré 3-1. L’égalité des sexes et la propriété foncière : les enseignements de l’Éthiopie et du Rwanda En Éthiopie, l’égalité entre les sexes en matière de droit foncier s’est améliorée avec la redistribution des terres des années 90, au cours de laquelle les femmes adultes célibataires se sont vues attribuer des terres. Les droits fonciers des femmes et des hommes ont été pleinement reconnus par le Décret fédéral de 1997. Le programme de certification foncière lancé à la fin des années 90 et achevé au milieu des années 2000 a permis d’initier des efforts de consolidation du droit foncier des femmes en reconnaissant officiellement ce droit aux femmes mariées, désormais enregistré simultanément pour les deux conjoints. Grâce à ce programme, les femmes se sont vues attribuer des certificats fonciers, en copropriété ou propriété simple, et des certificats comportant le nom et la photo du mari et de la femme (Deininger, Ali, et Alemu 2011a ; Bezabih et Holden 2010), (La sécurisation des terres en Afrique, Encadré 3.4). Cette initiative a nécessité le soutien actif des décisionnaires, une facilitation active et la représentation des femmes dans les comités accompagnant le processus de reconnaissance des droits et d’enregistrement (Teklu 2005). Le Rwanda a traité la question de la discrimination des femmes en matière de droit foncier par une réforme globale du secteur, renforcée par des politiques juridiques et institutionnelles extensives, initiée à la suite du génocide de 1994 et en soutien d’un programme d’enregistrement des certificats fonciers à l’échelle nationale. Des amendements à la politique foncière nationale ont été faits en 2004, conjointement à la Loi organique de 2005 portant régime foncier qui a poursuivi l’élaboration des lois foncières et instauré plusieurs clauses nouvelles, notamment : (i) l’égalité des droits entre les filles et les fils à hériter des propriétés de leurs parents ; (ii) la protection des droits de propriété des femmes dont le mariage a été officiellement enregistré ; et (iii) le consentement mandaté des deux époux en cas de vente ou d’hypothèque de la propriété par l’une des deux parties (Gouvernement du Rwanda 2005). Une évaluation du programme pilote en préparation de son expansion a cependant montré que la plupart des mariages n’étant pas officiellement enregistrés, les femmes demeuraient lésées. Cet aspect a été corrigé lors de la mise en œuvre du programme à l’échelle nationale qui a inclus les mariages non officiels dans la disposition adéquate. Une étude récente a analysé l’impact à court terme des programmes d’enregistrement foncier et démontré que l’accès aux terres s’était amélioré pour les femmes mariées. L’enregistrement des droits hérités est moins discriminatoire pour les femmes, et surtout, l’investissement dans l’entretien et la préservation des sols a augmenté, particulièrement chez les ménages gérés par des femmes. Le programme d’enregistrement foncier du Rwanda a également démontré que l’enregistrement systématique de toutes les parcelles de terres en zone rurale est faisable s’il est bien préparé (avec le cadre juridique et institutionnel préalablement en place). Mais, bien que les terrains sujets à contestation ne puissent être enregistrés, tout conflit latent – tels que ceux concernant les réfugiés de retour – peut être lors de l’enregistrement. Désormais, il y a 11 809 parcelles classées comme faisant l’objet d’un conflit, ce qui ne représente que 0,1 % de la totalité des terres enregistrées au Rwanda, un chiffre qui semble trop faible pour être exact. Le maintien à jour du registre demeure un enjeu ; les transactions enregistrées ne sont qu’au nombre de 10 535 sur un total de 10,6 millions, soit seulement 0,1 %. Enfin, l’utilisation de la base de données de l’enregistrement foncier par le Gouvernement pour orienter l’utilisation des terres (remembrement des terres agricoles et villagisation) est sujette à controverse (Ali, Deininger, et Goldstein 2011 ; Byamugisha (2013 : Encadré 3.4). République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 71 de l’héritage de leurs fils. Le droit de la famille et Ngozi. Ce service est une administration ne reconnaît pas de droits égaux et le parlement placée sous la tutelle du Ministère de l’Eau, de a rejeté à plusieurs reprises les propositions l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire d’amendement à cet égard (tout dernièrement et de l’Urbanisme (MEEATU). Il est distinct de la en 2013). Conformément à la loi burundaise, Direction des Titres Fonciers (DTF), sous la tutelle une femme n’hérite des terres de ses parents du Ministère de la Justice. La Direction Générale qu’en l’absence de fils. Simultanément, le droit de l’Aménagement du Territoire et la gestion du coutumier oblige les frères à subvenir aux patrimoine (DGAT) du MEEATU est chargée de besoins de leurs sœurs en cas de difficulté en la gestion des Terres domaniales en milieu rural, leur donnant accès aux terres (igiseke). Les tandis que la Direction générale de l’Urbanisme femmes peuvent également cultiver une partie (DGU - MEEATU) assure la gestion du domaine des terres de leur mari mais n’en possèdent public urbain. Le MEEATU est représenté au aucun droit et ne peuvent pas être consultées niveau provincial et exerce également la tutelle en cas de vente, location ou hypothèque de ces de l’Unité de Coordination du Programme terres (Habwintahe et al., 2013). National Foncier (PNF),76 responsable de la coordination de l’engagement des bailleurs 7. Les Batwas représentent une catégorie et de la coordination et du suivi opérationnel d’habitants sans terres. Ils sont une minorité de la réforme de la politique foncière, comme, ethnique représentant environ 1 à 2 % de par exemple, la gestion foncière décentralisée. la population, et ne disposent d’aucun droit Un comité directeur interministériel, le Comité foncier sécurisé. Cette situation est exacerbée de pilotage de la réforme du secteur foncier par la faiblesse de leur statut social dans la société comprend également le Ministère de la Justice, burundaise (même s’ils sont reconnus comme sous l’égide de la première Vice-présidence. étant les premiers habitants de la région). Les Par ailleurs, il existe une Commission Nationale modes de vie des Batwas dépendent de la forêt Foncière. et sont affectés par des siècles de déforestation visant à créer davantage de terres agricoles. 9. La Commission Nationale des Terres et La proportion de forêts encore existantes au autres Biens (CNTB) a été créée en 2006 pour Burundi est estimée à 6,6 % de la surface totale servir trois ans sous le Ministère de la Solidarité (IDM 2011). Les droits limités des Batwas sont Nationale, des Droits de la Personne Humaine et des problèmes reconnus, et les gouvernements du Genre, également sous l’égide de la première ont tenté, à l’occasion, d’attribuer des terres Vice-présidence. Le mandat de la CNTB a été du domaine public à certains de leurs groupes renouvelé en 2009, et en 2010, celle-ci a été (PRODEMA 2014 : 47-50), mais les documents placée directement sous le Cabinet du Président attestant de ces attributions sont parfois de la République.77 Ses pouvoirs judiciaires ont été accrus de façon substantielle en 2013.78 manquants ou incomplets (Habwintahe et al., 2013). 10. Les principaux types de propriété sont les terres des personnes privées physiques 3.2 Contexte : les types de propriété et le dispositif institutionnel 76  Ordonnance ministérielle No 1218/ du 12-8-2010. 8. Les institutions chargées de la 77  Le projet de loi y relatif a été adopté par l’Assemblée Nationale ce 24 décembre 2010. gouvernance foncière au Burundi relèvent de la Présidence et de deux Vice-présidences. 78  Loi N°1/31 du 31 décembre 2013 portant révision de la loi N°1/11 du 4 janvier 2011 portant missions, composition, Le Burundi possède un Service National du organisation et fonctionnement de la Commission nationale des Cadastre avec des bureaux à Bujumbura, Gitega terres et autres biens. 72 ou morales et les terres du domaine de l’État. riz, ainsi que les plantations d’huile de palme. La plupart des petits propriétaires cultivent des Les terres du domaine de l’Etat sont peu ou pas terres privées non-titrées disposant d’un statut connues ni enregistrées ; ni le Gouvernement reconnu par le Gouvernement bien que les ni la commune n’ont de vision d’ensemble de droits coutumiers ne soient pas officiellement leur patrimoine foncier, sur lequel les paysans enregistrés ; différents droits d’usages peuvent peuvent empiéter (PRODEMA 2014 : 38). La exister et concernent essentiellement des femmes principale question de gouvernance concerne sur les terres de leur mari, père ou frères79. cependant les procédures d’attribution officielle Selon la loi, les droits de propriété peuvent de terres du domaine privé de l’Etat à des parties être acquis après une utilisation incontestée privées, un processus qui n’est pas toujours pendant 30 ans. Cependant, cette clause légale transparent, respectueux des procédures ou de de la loi foncière est sujette à controverse : La l’intérêt général (PRODEMA 2014). Le domaine plupart des réfugiés qui ont quitté le pays ne privé de l’Etat se raréfie et un inventaire dans sont pas rentrés avant 30 ans.80 L’étude du quelques communes près de Gitega, indique PRODEMA a par ailleurs constaté qu’un tiers que seuls 8 % des terres appartiennent des ménages interviewés utilisent des parcelles toujours au domaine de l’Etat. Un inventaire de terres louées à d’autres propriétaires privés des terres domaniales est prévu avec l’appui de ou du domaine public comme le marais ou était la Commission européenne et la Coopération constitué en paysannats, avec des baux annuels internationale allemande (GIZ). renouvelables. 12. Les marais constituent la dernière 11. Le domaine de l’Etat a été constitué frontière agricole du Burundi et couvrent par expropriation par les autorités coloniales environ 120 000 ha. Certaines parties des de toutes les terres non cultivées de façon marais sont des zones protégées selon le Code de permanente (bois, jachères, pâturages). l’eau, mais la distinction entre les marais protégés Ces terres sont demeurées propriété de et les bas-fonds cultivables est parfois difficile l’État après l’Indépendance. Les terres du à établir (Habwintahe et al., 2013). Malgré le domaine de l’Etat peuvent être la propriété du risque d’inondation et les autres difficultés liées Gouvernement central ou des communes - Les à leur mise en culture, ces terres fertiles sont terres du domaine des Communes et des autres de plus en plus recherchées depuis les années personnes morales de droit public. Les terres 80. Compte tenu d’une demande croissante, la du domaine de l’Etat sont de deux sortes : (i) pratique courante du Gouvernement, qui était le Domaine public de l’Etat, à savoir les zones d’accorder les droits à ceux qui défrichaient le forestières protégées, les parcs et les marais, qui terrain et le rendaient exploitable, a peu à peu ne peuvent être privatisés ; et (ii) le Domaine été abandonnée. Les marais et bas-fonds sont privé de l’Etat, domaine pouvant être alloué par également au centre de projets d’investissement les autorités à des parties privées. Cette dernière agricoles et des programmes de bailleurs de catégorie comprend des terres fertiles comme fonds. Dans le cas de projets d’investissement, les bas-fonds et les paysannats souvent dans le risque est que les occupants actuels de terres des plaines fertiles, utilisés pour des cultures de soient déplacés sans aucune reconnaissance de leurs droits ni aucune sorte de compensation (PRODEMA 2014 : 50–52). En conséquence, 79  Igiseke est le terme désignant les droits d’utilisation dans la l’insécurité foncière est élevée dans ces zones langue locale de marais (Ouédraogo et al., 2007 ; 2010), et 80  Environ 500 000 personnes (ou 5 % de la population) ont la nouvelle loi foncière (2011) ne résout pas la quitté le pays vers 1972, et nombreux sont ceux qui ne sont rentrés au Burundi qu’après 2002 (Officiellement, ils peuvent perdre tout question du statut ambigu de ces terres. De plus, droit sur leurs terres). les marais sont des terres du domaine public République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 73 Tableau 3-2 : Risques perçus relatifs aux droits fonciers, classés par type de ménage et par source Ménages près Ménages Ménages Ménages des % Ménages des zones ruraux urbains paysannats protégées N = 2257 N = 1047 N = 385 N = 306 N = 299 N = 220 Procès par un membre de 25,6 % 15,8 % 25,0 % 5,7 % 7,5 % la famille Procès par un voisin 14,3 % 8,3 % 11,0 % 4,1 % 4,3 % Procès par un réfugié de 3,7 % 0,8 % 5,0 % 10,7 % 3,2 % retour Procès par d’autres 0,3 % 0,0 % 2,0 % 7,4 % 0,0 % résidents Remise en question des 13,7 % 18 % 16 % 24,6 % 16,1 % droits par un tiers Expropriation par l’État 10,4% 9,0 % 9,0 % 10,7 % 26,9 % Expropriation par la 9,1 % 22,6 % 8,0 % 23,8 % 2,2 % CNTB Autres 14,0 % 15,8 % 18,0 % 8,2 % 11,8 % Source: Rapport du PRODEMA 2014. appartenant au Gouvernement central, mais autorités collinaires et 15 %, avec les communes, certaines communes se déclarent propriétaires en confirmant la transaction par l’acte de et perçoivent une redevance (PRODEMA 2014). notoriété. 13. L’enregistrement des droits fonciers 14. L’insécurité foncière provient de n’est pas pratique courante. Parmi les risques multiples. Selon l’étude du PRODEMA, ménages urbains interviewés pour l’étude du (2014 ; Tableau 3.1), l’intervention du PRODEMA, seuls 40 % ont déclaré détenir un Gouvernement est perçue comme un facteur titre de propriété. D’autres types de documents, majeur d’insécurité foncière. Les personnes tels que l’acte de vente — pas nécessairement ayant participé à l’étude ont déclaré craindre (i) validé officiellement (29,4 %) — l’acte de l’expropriation, la spoliation ou l’éviction par notoriété (16,7 %) et la note d’attribution pour l’État, comme dans le cas d’allocation de terres à les anciennes terres du domaine public (4,3 %) des entreprises, telles que la Société Régionale de permettent de confirmer la propriété (PRODEMA Développement de l’Imbo (SRDI) ou, à Gihanga 2014 : 83–84).81 Dans les zones rurales, les et Mutimbuzi, pour la canne à sucre, l’huile de titres sont très rares ; mais la tendance est palme et la création de camps militaires, (ii) à l’enregistrement des transactions, tout du le retrait des droits des paysannats pour des moins de façon informelle (« petits papiers »). terres recherchées par les investisseurs, (iii) la L’étude du PRODEMA (2014) a constaté, sur révision du plan d’occupation des sols (c’est-à- un petit échantillon, que 58 % des acheteurs dire la création de zones protégées telles que les n’avaient pas enregistré la transaction de façon marais), et (iv) la confiscation de terres par la officielle, 29 % l’avaient enregistrée avec les CNTB ou d’autres autorités centrales. De plus, les procédures d’expropriation ne sont pas souvent respectées, avec une compensation tardive ou inexistante. Un deuxième facteur d’insécurité 81  Enquête auprès de 159 ménages et couvrant 211 parcelles— soit 67 % de tous les ménages de l’échantillon. Les autres n’ont pas foncière se situe au niveau de la communauté répondu à la question. et de la famille. Les droits de propriété peuvent 74 être remis en cause par des voisins aisés, forçant la restitution de terres aux citoyens touchés les petits propriétaires à défendre leurs droits par les conflits violents, et (ii) la réforme de la devant les tribunaux à grands frais. Selon l’étude gouvernance foncière. Compte tenu du grand du PRODEMA, sur les ménages interviewés, 33 nombre de réfugiés et de personnes déplacées % ont exprimé un intérêt dans la possibilité internes au Burundi, il n’est pas surprenant que d’enregistrer leurs droits, et 20 % d’enregistrer les questions foncières soient un élément clé les transactions (2014 : 86)82. de l’Accord d’Arusha et un axe des programmes post-conflit initiés par les bailleurs de fonds 3.3 La promotion de la réforme et les ONG, pour favoriser la médiation et le de la gouvernance foncière : règlement des conflits. Avec l’établissement de la CNTB en 200683, une procédure de restitution argumentaire et objectifs de la des terres aux réfugiés et personnes déplacées politique a été élaborée, tandis que la réforme foncière et la révision du Code foncier de 1986 ont Encadré 3-2. La gouvernance foncière : pris davantage de temps à se concrétiser et definition commencent à peine (ICG 2013). La gouvernance foncière est définie comme 16. Plusieurs bailleurs de fonds ont établi le processus de prise de décisions relatives un partenariat avec le Gouvernement sur au droit foncier, à l’accès à et l’utilisation des le processus de réforme de la gouvernance terres et ressources naturelles, à la façon foncière, qui s’est soldé par l’approbation dont ces décisions sont appliquées et dont de la Lettre de Politique foncière (2010) et les intérêts divergents sont réconciliés. Les caractéristiques de la gouvernance foncière du nouveau Code foncier (2011). Le dialogue sont : (i) le cadre juridique et institutionnel de politique centré sur le développement d’une la reconnaissance des droits et leur application ; politique foncière, la révision du code foncier (ii) le plan d’occupation des sols, la gestion de 1986 et le développement de la gestion foncière et l’imposition ; (iii) la gestion des foncière afin de faciliter la sécurisation des terres du domaine public ; (iv) la mise à droits fonciers en zone rurale ont été considérés disposition du public des données foncières comme les éléments d’une stratégie de lutte (registres, cadastres, etc.) ; et (v) la gestion et le contre les conflits fonciers. Dans ce contexte, règlement des conflits. l’adoption de la lettre de politique et la réforme Source : Palmer et al., 2009 ; Deininger et al., 2011. du code foncier ont fait l’objet de consultations participatives sur plusieurs années, aux niveaux 15. Avec l’Accord de Paix et de central et provincial, et a reçu des financements Réconciliation d’Arusha signé en 2000, la et un soutien technique de la part des partenaires restitution des terres et la réforme de la techniques et financiers.84 Le Code foncier gouvernance foncière se sont avérées des (2011) détaille la procédure d’enregistrement priorités clés dans les efforts déployés pour des droits de propriété sous forme de titre ou traiter des racines du conflit. L’Accord d’Arusha de certificat. proposait un ensemble de mesures liées à (i) 17. Les procédures actuelles d’imma- 82  À la suite de l’expansion des marchés fonciers, des initiatives semi-officielles d’enregistrement des transactions foncières sont 83  Avec l’appui financier du Fonds des Nations Unies pour la apparues (petits papiers) ou les acheteurs de terres ont aussi fait consolidation de la paix. la demande d’un acte de notoriété auprès de la municipalité pour lequel un % de la valeur de la transaction devait être payé (10 84  Les principaux financements ont été assurés par la %, ramené à 3 % par la plupart des collectivités locales à la suite coopération suisse, l’Union européenne, USAID, les Pays-Bas et le d’une déclaration du Président de la République). Fonds international de développement agricole (FIDA). République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 75 triculation foncière remontent à l’époque services de l’État en charge du foncier pourrait coloniale et ont été maintenues après contribuer à une plus grande sécurisation l’indépendance. Le titre de propriété est délivré foncière dans les zones urbaines et pour le par le Conservateur de la Direction des titres secteur privé, mais pas dans les zones rurales fonciers (DTF) au sein du Ministère de la Justice. à court ou moyen terme. Des investissements Il ne peut être contesté au tribunal sauf si le ont été faits pour améliorer les capacités et titre délivré est le fruit d’actes frauduleux85. La renforcer le système d’administration foncière quasi-totalité des titres de propriété concernent (archives, numérisation, formation, etc.) ce qui des terrains urbains (zones résidentielles, est important dans les zones urbaines où 60 % entreprises ou commerces) ; les détenteurs de des propriétés pourraient être informelles. Les grandes étendues de terres rurales disposent capacités demeureront néanmoins insuffisantes également de titres de propriété. La DTF estime pour les zones rurales où sévissent la plupart à 62 000 le nombre total des titres de propriété des conflits fonciers et qui constituent l’essentiel au Burundi, dont 58 000 délivrés à Bujumbura, des préoccupations politiques. Une étude menée et la plupart des autres dans les villes de Gitega en 2003 souligne le besoin urgent de traiter (854 titres en 2013) et Ngozi. Selon la DTF, seul des questions de gouvernance foncière rurale 1 % des superficies rurales comporte un titre afin d’empêcher des éruptions de violence (ICG (PRODEMA 2014 : 75-76). La délivrance de 2003). Plusieurs organisations internationales titres de propriété via le système classique de ont ensuite engagé des recherches afin l’immatriculation foncière est un processus long d’identifier les principaux problèmes fonciers et et onéreux, du fait de la nécessité d’un processus d’établir des priorités d’action.88 Les problèmes d’arpentage précis, et du manque de ressources identifiés sont les suivants : conflits fonciers humaines et matérielles de l’administration. Cette procédure est inabordable pour la majorité généralisés et persistants, intensifiés par la de la population, même dans les zones urbaines, réintégration des réfugiés demandant qu’on sans mentionner les zones rurales (Galpin leur rende leur propriété, faiblesse des capacités 2011).86 Ainsi, la délivrance de titre de propriété de médiation locale et des mécanismes de n’est ni appropriée ni abordable pour les petits règlement des conflits, inégalité d’accès aux propriétaires, les coûts étant d’un montant élevé terres, appropriation illicite de terres, et absence notamment au regard de la valeur des terres. Le de politique agraire. Une action a été définie nombre de parcelles à enregistrer est au moins comme prioritaire : la nécessité d’élaborer une de 8 à 9 millions de parcelles87. alternative au système de délivrance des titres.89 Rendre l’enregistrement des droits fonciers 18. L’amélioration des capacités des faisable et abordable pour tous est retenu comme une stratégie clé de lutte contre les conflits fonciers. Cette décision prise au Burundi n’est 85  Cependant, le registre est sujet à des irrégularités. pas unique, et le besoin de réforme des systèmes 86  Avant de soumettre leur demande à l’un de ces bureaux d’enregistrement foncier est largement reconnu (Bujumbura, Gitega, Ngozi), les requérants doivent recruter un et déjà mise en œuvre dans plusieurs pays géomètre de Bujumbura, documenter la délimitation précise aux services cadastraux nationaux et délimiter leur terrain par des (Deininger et al., 2003 ; Byamugisha 2013). bornes de béton importé. La plupart des individus à la campagne, habitués à délimiter leurs terres par des plantes vivaces ne connaissent pas du tout ces procédures. De plus, pour la plupart d’entre eux, le prix à payer pour le béton est déjà supérieur à la 88  Plusieurs études de terrain détaillées ont été notamment valeur de leur lopin, sans mentionner le coût du géomètre et les menées par des ONG et des agences des Nations unies (RCN Justice taxes des services cadastraux (Kohlhagen, 2010 : 4). & Démocratie 2004 ; Ntampaka et Mathieu 2009). 87  Au moins 1,6 million de ménages ruraux avec en moyenne 2 89  CED-caritas 2005; Global Rights; Kamungi and others 2005; parcelles de terrain. Van Leeuwen 2004; Ntampaka 2005 76 19. Le Gouvernement central a instauré vente, location, division ou héritage, et un une nouvelle méthode d’enregistrement certificat peut être converti en titre de propriété des droits fonciers : le certificat foncier. Le selon le souhait. Afin d’éviter les superpositions Gouvernement a en effet décidé d’introduire de droits et les demandes concurrentielles pour dans les zones rurales une alternative au titre un même terrain, la première action d’un SFC est de propriété, en vue de répondre à la demande d’établir un inventaire géoréférencé des terres de délimitation et d’enregistrement des droits domaniales et des titres de propriété dans le et sera accessible au niveau des communes.90 territoire communal. S’inspirant de l’expérience Ces innovations portent sur deux éléments clés : de Madagascar (voir Encadré 4.3), la délivrance (i) l’instauration de services de gestion foncière, du certificat par les communes suit un processus gérés par les communes; et (ii) l’introduction clairement défini et codifié dans le Code foncier d’un nouveau document d’enregistrement des de 2011 ; des décrets spéciaux afin d’orienter droits sur la terre. La Lettre de Politique foncière son application sont en préparation (2014). (LPF 2010) et le Code foncier (CF 2011) ont 21. L’utilisation du certificat pour introduit l’établissement de services de gestion documenter les droits fonciers devrait foncière décentralisés, les Services Fonciers également favoriser les transactions ou Communaux (SFC) pour l’enregistrement marchés fonciers (location, achat). Les des droits fonciers existants, et toutes autres marchés fonciers ruraux sont en expansion dans transactions foncières. les Provinces des environs de Bujumbura, où les prix sont relativement élevés comparé aux 20. La gestion foncière est décentralisée revenus des agriculteurs (Wennink, Lankhorst afin de contribuer à la lutte contre les et Irutingabo, 2012). Selon l’étude du PRODEMA, conflits fonciers et d’améliorer la sécurité 14,9 % des ménages ruraux interviewés avaient des droits. Le nouveau certificat pour les vendu des terres. D’après les indications des terres en zone rurale offre quasiment la personnes interrogées sur le mode d’acquisition même sécurité que le titre de propriété, mais des terrains, en moyenne, 47,8 % des terrains pour un coût bien moindre. Ce certificat est sont hérités et 41,2 % achetés (PRODEMA 2014 : accepté comme preuve au tribunal et a plus 80 — voir Tableau 1.2). Habwintahe et al., (2013) de poids qu’un document informel et que des rapportent que 5 % des terrains cartographiés témoignages (Habwintahe et al., 2013).91 Les par des efforts d’enregistrement systématique deux systèmes d’enregistrement des droits ne (mais pour lesquels aucun certificat n’avait sont pas concurrents mais se complètent et sont encore été délivré) avaient été vendus au cours évolutifs (PRODEMA 2014). Les transactions des 12 mois suivants. Les acheteurs de terres possibles avec le titre de propriété le sont ont montré qu’ils sont prêts à payer pour la également avec le certificat, qu’il s’agisse de sécurisation des transactions foncières en faisant une demande d’acte de notoriété auprès des communes et se sont montrés très intéressés 90  L’article 313 du Code foncier (Loi n°1/13 du 9 août 2011 par l’obtention d’un certificat. Une étude au sein portant révision du code foncier) stipule : Le droit de propriété d’une commune près de Gitega a constaté que foncière peut être établi : soit par un titre foncier établi par le 39 % des terrains enregistrés étaient achetés Conservateur des Titres Fonciers ; soit par un certificat foncier établi par le Service foncier communal reconnaissant une (Gutwara Neza [2010], rapporté dans Teyssier et appropriation régulière du sol se traduisant par une emprise al., [2011]). Habwintahe et al. (2013) ont recensé personnelle ou collective, permanente et durable, selon les usages du moment et du lieu et selon la vocation du terrain. 12 957 certificats dans le registre de six SFC, dont 86 % relatifs à des terrains achetés (pour 7 91  De plus, le processus de conversion d’un certificat en titre, % par des femmes). Le certificat permettra donc si tel est le souhait du propriétaire, est détaillé dans un nouveau décret en cours d’approbation par le Conseil des Ministres (Projet une approche moins coûteuse de formalisation de Décret portant Certification des Droits Fonciers) des transactions. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 77 Encadré 3-3. La gestion foncière décentralisée : l’expérience de Madagascar Le Programme National Foncier de Madagascar a été initié par le Gouvernement en 2005, avec le soutien des bailleurs de fonds, et visait à moderniser la gouvernance du secteur foncier par la décentralisation. La conception du programme comprenait l’introduction des certificats fonciers, l’établissement de guichets fonciers communaux pour gérer les terres au niveau local (un nouveau service fourni par les commues), accompagner la modernisation et la digitalisation de l’administration foncière classique, la révision des lois et règlementations foncières, ainsi que la formation du personnel de gestion foncière décentralisée (Byamugisha 2013 : 62). Cette nouvelle procédure de reconnaissance locale des droits fonciers privés pour les terres non titrées a considérablement réduit le temps et les coûts à la charge des individus pour obtenir des documents légaux prouvant qu’ils sont propriétaires. Le processus de réforme foncière transforme le principe de présomption de domanialité pour permettre la reconnaissance officielle de terres de facto privées, bien qu’elles soient sans titre. Ce processus comprenait l’introduction des certificats fonciers, ainsi que l’établissement d’un « guichet foncier des communes» comme service de compétence juridique fourni par le pouvoir local élu pour traiter des terres privées et non titrées. La valeur juridique du certificat foncier est pratiquement identique à celle du titre de propriété. La plupart des transactions possibles avec un titre de propriété le sont également avec le certificat foncier, qu’il s’agisse de vente, location, division ou héritage. La décentralisation de la gestion foncière a largement contribué à l’augmentation du nombre d’acteurs impliqués dans l’enregistrement des droits fonciers. Depuis 2006, 546 des 1 550 communes ont installé leur propre guichet foncier, qui emploie au moins un agent foncier. Chaque commune a instauré une Commission de Reconnaissance Locale. Il existe en moyenne 10 de ces commissions dans chaque commune comportant au moins 3 membres soit près de 15 000 personnes en total dans les 546 communes, impliquées de temps à autre dans la gestion des droits fonciers (Banque mondiale 2014 : 10). Le coût moyen d’un certificat foncier a été considérablement réduit à 14 $US, avec un délai de traitement moyen d’environ sept mois (Byamugisha 2013: 62). Depuis 2005, les bureaux des gouvernements locaux ont enregistré plus de 170 000 demandes et délivré 96 000 certificats fonciers (Byamugisha 2013 ; Banque mondiale, 2014 : 10). À titre de comparaison, le précédent système produisait 2 000 à 3 000 titres de propriété par an à la suite d’un processus en 24 étapes qui prenait en moyenne 6 à 10 ans, pour un coût estimé à 500 $US par titre. Madagascar a commencé par une approche à la demande et expérimente à présent un enregistrement systématique de tous les droits fonciers sur un territoire donné afin d’améliorer l’accès au certificat en réduisant son coût. 78 Tableau 3-3 : L’acquisition de terrains dans les zones rurales, classée par mode et type de ménage Ménages Ménages des Ménages près des Mode d’acquisition Ménages ruraux Total / moyenne des marais paysannats zones protégées # % # % # % # % # % Héritage 1 340 50,0 412 43,4 175 31,4 282 64,1 2 209 47,8 Achat 1 161 43,4 364 38 3 260 46,7 122 27,7 1 907 41,2 Don / cadeau 108 4,0 44 4,6 48 8,6 12 2,7 212 4,6 Attribution 39 1,5 110 11,6 55 9,9 21 7,4 225 4,9 Échange 8 0,3 3 0,3 1 0,2 1 0,2 13 0,3 Abolition du 6 0,2 2 0,2 0 0 0 0 8 0,2 « Ubugerewa » Décision judiciaire/ 5 0,2 0 0 8 1,4 1 0,2 14 0,3 CNTB Total 2 678 950 557 440 4 625 Source: Rapport du PRODEMA 2014. Remarque : Le classement provient des participants à des groupes focus. 22. Les transactions foncières constituent plus l’acte de notoriété, trois le facturait 3 % une importante source de recettes pour les et le cinquième continuait à le facturer 10 %. communes. Les ventes de terrains peuvent être Dans une des communes, le paiement d’un acte accompagnées d’actes de notoriété, délivrés par de notoriété à la municipalité était même une les autorités locales, qui fournissent un statut condition de réception du certificat de la part quasi-légal aux achats (Leisz 1996), comme il du SFC (Habwintahe et al., 2013 : 60–61). Bien est mentionné ci-dessus. Jadis, le coût d’un acte que le prix ait tendance à être sous-évalué, les de notoriété correspondait à 10 % de la valeur actes de notoriété sont une source de recettes de la transaction ; ce coût a été ramené à 3 % non négligeable pour les autorités locales. par de nombreuses collectivités locales à la suite D’après notre enquête succincte sur les finances d’une déclaration présidentielle devant le Sénat en 2008 (afin de faciliter le retour des réfugiés). publiques dans 16 communes (voir Chapitre Les coûts sont généralement à la charge de 2), les recettes déclarées provenant d’actes de l’acheteur des terres. La base juridique de l’acte notoriété varient de 2 à 80 millions de BIF pour de notoriété se distingue de celle d’une taxe sur 2013. Ceci constituait, en moyenne, 4,8 % des les transferts de propriétés foncières et autres. recettes totales (de 0,6 % à Giteranyi à 24 % à En 2008, le Sénat a également promulgué Mutimbuzi, une commune près de Bujumbura, une loi abolissant les taxes sur la vente de tandis qu’une commune a déclaré 0 %).92 propriétés foncières et autres (Loi N° 1/31 du 4 novembre 2008 portant suppression de la taxe de transaction des propriétés foncières et 92  Dans les zones pilotes des SFC, les administrateurs ont d’immeubles) (Habwintahe et al., 2013: 17). Mais exprimé leur préoccupation quant au fait que les certificats remplacent ces actes de notoriété, ce qui n’est pas le cas, car certaines communes ne font pas de différence aucune transaction n’est impliquée. Les administrateurs semblent entre l’acte de notoriété et la taxe ; les pratiques peu enclins à collecter des recettes sur les transactions foncières sont variables d’une commune à une autre. Dans disponibles pour recouvrer les coûts de fonctionnement des SFC. Un autre obstacle est que la délivrance d’un acte de notoriété n’est une étude de cinq communes comportant un SFC, pas automatiquement accompagnée d’une mise à jour du registre, on a constaté que l’une d’entre eux ne facturait ce qui doit changer. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 79 Encadré 3-4. La sécurisation des droits fonciers au Burundi : pourquoi est-elle importante ? Les objectifs de la politique visant à investir dans la sécurisation des droits fonciers au Burundi se basent sur des évaluations d’impact global et d’autres recherches (Deininger et al., 2011 ; Binswanger et al., 1995 ; Banerjee et Iyer, 2005 ; Iyer, 2010 ; Nugent et Robinson, 2010 ; Naritomi et al., 2009 ; Rajan et Ramcharan, 2011) : • Le principal but est de limiter et lutter contre les conflits. L’intérêt d’un enregistrement des droits est croissant du fait (i) de l’augmentation de la concurrence foncière, (ii) du durcissement des conflits, ou (iii) de la crainte d’expropriation. La sécurisation foncière est un besoin spécifique dans un contexte de post-conflit, les réfugiés désirant récupérer des terres avec l’aide d’une médiation externe bénéficieraient de l’existence d’une preuve officielle. • Là où l’insécurité foncière est généralisée, clarifier les droits par une adjudication et un enregistrement systématique peut être une méthode efficace pour améliorer la sécurité foncière et l’efficacité des règlements de conflits. La documentation des droits et transactions est considérée comme essentielle au règlement des conflits et à l’amélioration de la sécurité foncière, le processus de reconnaissance publique et d’enregistrement des droits, ainsi que de délimitation, pouvant être utilisé pour résoudre les disputes et désamorcer de futurs conflits. L’enregistrement des droits et les cartes foncières peuvent également contribuer à l’accélération des jugements au tribunal et à la reconnaissance des droits dans les procédures d’expropriation et de compensation. • Un autre argumentaire en faveur de cette politique d’enregistrement foncier est d’encourager les investissements en réduisant les sources d’insécurité foncière due aux conflits portant sur les droits et les délimitations. Les avantages potentiels de l’enregistrement comprennent également un plus grand nombre d’investissements fonciers à moyen et long terme (amélioration de la qualité des sols, plantation d’arbres, atténuation de l’érosion). La formalisation des droits fonciers est moins importante dans un contexte où les systèmes coutumiers et les institutions locales sont fonctionnels, ou quand il n’y a pas de risque d’expropriation. • Un nombre croissant d’ouvrages souligne l’importance de la facilitation des marchés de la location et du fermage (Baland et al., 2007 ; Deininger et al., 2008a). Des documents de propriété clairs, acceptés et accessibles contribuent au règlement des conflits et à une attitude favorable aux transactions foncières, notamment à la location de terres. Il s’agit d’un mécanisme peu coûteux et flexible pour favoriser l’utilisation la plus productive des terres pour générer des opportunités dans le contexte d’une transformation structurelle d’économies rurales (Janvry et al. 2001). Des coûts de transaction élevés, causés par des droits peu clairs ou liés à l’inefficacité des institutions, peuvent réduire l’incidence de ces transactions et avoir des effets à long terme (Libecap et Lueck, 2011). Des institutions qui permettent la location de terres à bas prix et garantissent la possibilité de récupérer les terres louées peuvent contribuer à répondre à cette préoccupation. Elles peuvent également permettre à des ménages ruraux de quitter l’agriculture sans renoncer aux avantages de la fonction de filet de sécurité sociale jouée par la propriété foncière. Les certificats délivrés par les SFC peuvent apporter cette sécurité. 3.4 Le pilotage de la gestion alternative au titre de propriété, ce nouveau processus, mis en œuvre par les autorités locales, foncière décentralisée : résultats est plus accessible et moins coûteux (compte tenu et défis entre autres de la modification des exigences en termes de levé). Ce processus participe à un 23. La lettre de politique foncière (Décret processus de garantie de la transparence et de N° 100-72 du 26 avril 2010), a introduit un contribution au règlement des conflits et à leur système de gestion foncière décentralisée prévention. Le Code foncier de 2011 a apporté afin de faciliter et accélérer les premiers le cadre juridique par la lettre de politique enregistrements fonciers. Par cette approche (Loi n° 1/13 du 9 août 2011). Les procédures, 80 détaillées dans les manuels correspondants certificats fonciers, enregistre les accords de (sur les implications juridiques, le recrutement vente foncière et les autres transactions, et gère du personnel, les procédures opérationnelles, l’archivage des enregistrements au niveau local. les structures des frais facturés, etc.), ont été L’équilibre financier des services fonciers pilotes élaborées par le Gouvernement en consultation est escompté sur la base de recettes permettant avec les responsables de la mise en œuvre des de couvrir les coûts opérationnels du SFC et programmes pilotes. De plus, les procédures générées par les frais d’enregistrement des d’établissement d’un SFC sont en cours de transactions et les frais de certification. Le codification dans le Projet de Décret portant mandat du SFC est limité aux terres privées Certification des Droits Fonciers mais ne non titrées. Les SFC n’ont pas pour mandat de sont pas encore approuvés par le Gouverne- délivrer les certificats dans les zones urbaines ou ment.93 Les étapes spécifiques telles que la d’enregistrer les baux pour les terres du domaine demande d’enregistrement, la reconnaissance public (telles que les marais) ou bien les locations publique des droits exercés et reconnus sur gérées par l’État (telles que les paysannats) qui la parcelle ainsi que les limites de celle-ci n’ont pas encore été privatisées.94 (par une visite sur site du comité collinaire de reconnaissance), l’enregistrement des données 25. L’établissement des SFC est coordonné foncières, la publication de la demande, la par une unité gouvernementale spécifique préparation des contestations, des procédures et est largement financé par les bailleurs de d’opposition aux demandes et la délivrance de fonds. Cette innovation en termes de service est certificats y sont clairement décrites. De plus, le le fruit du travail de plusieurs programmes de décret clarifie les procédures de mise à jour des bailleurs ayant œuvré en étroite collaboration registres (pour les modifications telles que les avec l’Unité de coordination du Programme transferts, subdivisions ou remembrement des National Foncier, une structure sous tutelle du terrains). Il définit également les responsabilités MEEATU. Le but des programmes pilotes était de l’administrateur, des SFC, des ministères de de concevoir et tester des systèmes de services tutelle et, au niveau local, de l’administrateur fonciers d’enregistrement des droits fonciers communal, du comité de reconnaissance, ainsi qui soient fiables, transparents, accessibles, que du chef collinaire. efficaces et conformes au cadre légal. Les premiers programmes pilotes ont démarré en 24. Sous ce nouveau Code foncier, (2011), 2007, essentiellement soutenus par l’Union les communes jouent un rôle central dans européenne (UE) et l’agence suisse pour le l’administration du foncier rural et des développement et la coopération (SDC) dans transactions foncières. Les communes ont six localités. Il y a actuellement 28 communes acquis les outils nécessaires à la gestion foncière (dont 3 viennent de démarrer) comportant un décentralisée et peuvent utiliser les données SFC, soutenues par 5 bailleurs différents (SDC, générées pour la planification et la fiscalité UE, Fonds international de développement communale. Les certificats sont délivrés par agricole – FIDA, Programme Post-Conflit de le SFC situé dans les bureaux communaux, Développement Rural – PPCDR, Association une modalité qui rapproche ce service des pour la Paix et les droits de l’Homme), avec des paysans. Le SFC est institué par l’administrateur ressources variables. Sept autres SFC sont prévus communal et son conseil, et il délivre les 94  Le nouveau Code foncier introduit la possibilité que les 93  Compte tenu du fait que la gestion foncière est l’une des baux annuels des agriculteurs sur les terres du domaine public responsabilités assignées aux communes par la législation de (paysannats) puissent être privatisés. Les zones non protégées 2005 sur la décentralisation (Gouvernement du Burundi, 2005a), des marais (les bas-fonds) peuvent également être privatisées ; il n’a pas été nécessaire d’amender cet article de la législation. cependant, les décrets requis ne sont pas encore disponibles. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 81 pour 2014, tandis que les autres communes est donc un outil essentiel pour le SFC n’ont pas encore mis en place ce service95. L’un afin d’éviter toute superposition entre les des SFC (établi avec l’appui de la Coopération terres domaniales et les terrains titrés (voir technique belge – CTB) n’est plus financement également paragraphe 19). Cela permet au soutenu. SFC de vérifier si une demande n’est pas en contradiction avec d’autres demandes et 26. La première activité d’un nouveau de cartographier correctement le terrain SFC est l’inventaire et la cartographie des certifié. Cette tâche est bien plus facile depuis terres domaniales et des terres titrées y 2013 pour un SFC, puisque des ortho-photos compris les terres déjà utilisées ou mises de détaillées sont maintenant disponibles au côté pour des zones résidentielles (lotissements 1:10.000 pour chaque localité grâce à une et terres loties). Le plan foncier communal contribution de l’UE. Encadré 3-5. Principes du processus de premier enregistrement • Les systèmes d’enregistrement foncier doivent être soigneusement établis afin d’éviter tout impact négatif et plusieurs études documentent les exemples d’échec des efforts d’enregistrement de terres rurales qui n’ont pas atteint les objectifs annoncés ou ont produit un effet inverse en réduisant l’accès aux terres et en augmentant l’insécurité foncière du fait de : (i) la négligence des impacts de la distribution des droits ; (ii) des efforts inefficaces de remplacement de droits existants coutumiers, et / ou (iii) l’accent mis sur une technologie coûteuse peu viable et le développement spontané des enregistrements (Colin et Ayouz 2006 ; Fenske 2010 ; Benjaminsen et Sjaastad, 2002 ; Peters, 2004 ; Berry, 2009 ; Lavigne-Delville, 2000 ; Meinzen-Dick et Mwangi, 2008). • La documentation systématique des droits de propriété existants sur la base d’une zone définie en cohérence avec le plan d’occupation des sols sera non seulement plus économique, transparente et alignée sur les critères d’un plan d’occupation des sols adéquat qu’une approche sporadique au cas par cas, mais permettra également un meilleur fonctionnement des marchés fonciers et réduira les risques d’empiètement sur des droits existants ou d’interaction avec des individus ou des groupes qui ne sont pas les véritables propriétaires. • Pour plus de rapidité, de proximité et d’impact équitable, il est souvent préférable de commencer l’enregistrement par les délimitations de terres communales grâce à une imagerie peu coûteuse et obtenir ainsi rapidement des économies d’échelle, quitte à les compléter ensuite par des levés plus précis à la demande des propriétaires (et à leurs frais).96 La prestation de service par des institutions de gestion foncière peut également être améliorée en remplaçant par exemple les méthodes classiques sur papier par la technologie moderne en utilisant des photos aériennes détaillées (au moins 1:10.000), en partageant les données entre plusieurs services publics, en rendant publiques les normes de service et en institutionnalisant l’enregistrement systématique des mutations afin d’améliorer la qualité et l’accessibilité des données foncières. • Dans l’idéal, l’enregistrement devrait comprendre un document sur les droits secondaires, tels que les droits d’usage, mais celui-ci est souvent manquant. Ceux détenant ces droits dits secondaires (droits d’usage, baux, métayage, etc.) sont particulièrement exposés aux risques de perte des droits, comme le sont les utilisateurs de terres communes ne résidant pas dans la communauté (par exemple, les pasteurs) ou ceux qui occupent une position sociale vulnérable. Un autre risque est lié au fait que des 95  Une catographie illustrant les expériences pilotes des SFC est disponible aupres des auteurs sur demande. 96 Même en Afrique du Sud, un pays comptant plus de 500 géomètres qualifiés, l’arpentage de haute précision des parcelles informelles estimées à 20 millions sera extrêmement long, ce qui nécessite une méthode plus expéditive. 82 droits collectifs (famille, clan) gérés par les autorités coutumières au nom de tous les membres, soient enregistrés au nom du chef ou leader du clan. • Un premier enregistrement soigneux des droits, associé à une démarcation des limites, contribue à la sécurité foncière et la prévention des conflits. Il faut donc suivre un processus précautionneux, de grande qualité et réalisé en public et avec témoins, ainsi que des mécanismes de contestation ou de redressement dans un laps de temps raisonnable (surtout s’il n’existe aucun enregistrement des terres contestées). Des documents frauduleux sape la sécurisation foncière et contribue à affaiblir la gouvernance et à déclencher les conflits. Les conditions essentielles d’une amélioration de la transparence du processus d’enregistrement sont les suivantes : (i) informer tous les demandeurs potentiels des processus et critères utilisés pour arbitrer en cas de droits opposables, (ii) exiger des demandeurs de se présenter, et (iii) statuer sur les droits à un moment précis et en public. Ces conditions sont essentielles pour éviter la perte de droits et l’apparition de nouveaux conflits fonciers. • Le registre doit être fiable. Les registres non crédibles ont un rôle limité pour le règlement des conflits, la diligence des transactions ou la garantie pour un crédit. L’altération des documents représente un autre risque. Des procédures irréprochables doivent être mises en place pour assurer la fiabilité du registre et de la carte foncière et il devrait également être possible et aisé d’annuler les modifications ou les documents frauduleux. • L’utilité d’un registre pour la prévention et le règlement des conflits, comme pour le développement économique, dépend du fait qu’il soit complet et à jour. Pour cela, les détenteurs de certificats devraient déclarer tout changement tel qu’une transaction (vente ; hypothèque, baux, etc.), une subdivision ou un remembrement de terrain. C’est un défi majeur pour les registres, dépendant de l’adhésion des détenteurs des droits, des coûts de transactions et de modifications. Si les registres ne sont pas entretenus, les systèmes d’enregistrement foncier retombent dans l’informalité. Il existe des exemples de dérèglement en cas de non entretien du registre, même lorsque des titres de propriété avaient généré d’importants bénéfices d’investissement (Galiani et Schargrodsky, 2010 ; Galiani, 2011 ; Barnes et Griffith-Charles, 2007). Les structures d’enregistrement foncier et le fonctionnement d’un registre ne vont pas sans engendrer de frais. Un enregistrement de terres agricoles en zone rurale exige du travail et des ressources (nombreux terrains, distances), ainsi qu’un processus soigneusement conçu afin d’éviter la perte de droits, et le règlement des conflits nécessite également des ressources humaines et financières. La section suivante discutera des défis princi- que la législation le permette. Certaines femmes paux : les contraintes pour les femmes d’avoir possèdent seules des terres. Dans l’opération accès à la terre, la mobilisation des ressources d’enregistrement systématique à Ngozi, environ pour l’enregistrement systématique et le service 10 % des 71 168 terrains enregistrés l’ont été au foncier communal incluant la taxation locale, nom de femmes. Dans les zones urbaines, 11 ,6 la pérennisation des SFC et leur mise a l’échelle % des terrains en moyenne ont été enregistrés assurant une couverture nationale. par des femmes. Parmi les terrains enregistrés « Défi n° 1 : le déséquilibre entre les sexes demeure à la demande » à Ngozi (voir paragraphe 27 ci- en matière d’enregistrement foncier dessous), seuls 3 % l’ont été au nom de femmes et concernaient surtout des terres achetées ; 27. Ce qui n’est pas possédé ne peut être ce chiffre était en moyenne de 7 % dans cinq enregistré ; l’enregistrement foncier en tant autres SFC. Un SFC récemment établi dans la que tel ne peut améliorer la sécurisation Province de Makamba (dans les communes foncière des femmes ou des autres groupes de Mabanda et Vugizo, avec l’appui de l’ONG vulnérables sans terres. Peu d’efforts sont faits ZOA et de l’Ambassade des Pays-Bas) essayera au Burundi pour promouvoir l’établissement de d’enregistrer les droits secondaires des femmes titres de propriété au nom des conjoints, bien (igiseke) sur les certificats (ZOA 203 : 14). Cette République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 83 possibilité pourrait éviter l’affaiblissement de tout changement et à payer les frais de mise tels droits par l’enregistrement foncier. à jour. En 2011, la SDC a changé de méthode, passant de l’enregistrement à la demande à Défi n° 2 : L’enregistrement à la demande n’est l’enregistrement systématique lorsque les pas une option efficace au Burundi ; les communes résultats ont montré que le nombre de terrains ne peuvent pas financer les coûts de lancement de l’enregistrement systématique par leurs propres enregistrés était très faible par rapport à la ressources totalité des terrains, que la plupart de ces terrains avaient été achetés et qu’il faudrait 28. Au Burundi, tous les programmes des décennies pour atteindre l’enregistrement pilotes ont proposé au départ l’enre- complet de la totalité des parcelles. Une étude gistrement à la demande uniquement. a calculé combien de temps serait nécessaire L’enregistrement à la demande (ou au cas par pour certifier toutes les parcelles de la localité, cas) implique qu’un propriétaire soumette une en prenant en compte la productivité du SFC et a demande d’enregistrement, placée sur une conclu qu’il faudrait entre 11 et 240 ans (Banque liste d’attente par le SFC pour être traitée plus mondiale / FAO 2014 ; voir Tableau 4.4). Une tard (soit par ordre d’arrivée ou bien groupée approche d’enregistrement systématique a été par zone afin de réduire les déplacements du conçue et testée en 2011 (opération groupée personnel du SFC). Un premier enregistrement, de reconnaissance – OGR), appliquée à toutes « à la demande », bénéficie à ceux qui sont les communes soutenues par la SDC en 2012 préparés à (et ont les moyens financiers de) dans la province de Ngozi et a produit des payer pour ce type de services mais ne concerne effets considérables sur le nombre de terrains pas les plus vulnérables. L’enregistrement enregistrés. En mars 2014, le nombre total systématique implique que tous les terrains de terrains enregistrés par la méthode « à la d’une zone donnée soient reconnus, démarqués demande » stagnait à 23 019 dans les 19 SFC et enregistrés. Lorsqu’une mise à jour des ; Dans les six SFC soutenus par la SDC, 10 731 documents et des rapports de transactions sont parcelles ont été enregistrées « à la demande faits à la demande, cependant, il est nécessaire » et 96 955 au moyen de l’enregistrement que les propriétaires s’engagent à déclarer systématique, couvrant ainsi près de 20 % Tableau 3-4 : Estimation du délai de certification nécessaire avec l’enregistrement à la demande Nombre de Capacité en Nombre d’années Nombre d’années parcelles Si la demande Nombre termes de nécessaires pour nécessaires pour Communes (si 1 de CF atteint d’habitants demandes traiter 40 % des traiter toutes les ménage = 2 40 % traitées par an parcelles parcelles parcelles)* Giheta 93 560 37 424 288 14 970 52 130 Gitega 123 811 49 524 206 19 810 96 240 Bugenyuzi 72 621 29 048 719 11 619 16 40 Kigamba 43 000 17 200 698 6 880 10 25 Nyabitsinda 58 004 23 202 1 338 9 281 7 17 Gashikanwa 72 621 29 048 2 648 11 619 4 11 Ngozi 127 000 50 800 765 20 320 27 66 Ruhuroro 75 429 30 172 579 12 069 21 52 Source: Rapport du PRODEMA 2014. Remarque : *Hypothèse : un ménage est composé de cinq membres ; le nombre moyen de terrains par ménage est 2. 84 du territoire communal. Cependant 22 % des dans 1 496 cas (89 %), ce qui implique un accord terrains ont déjà fait l’objet d’un certificat obtenu avec l’aide de la commission (Habwintahe imprimé et délivré qui nécessite une demande et al., 2013). La plupart des conflits non résolus, et un paiement du propriétaire. souvent de longue date, sont liés à un héritage. Dans la première série d’OGR pour tous les SFC 29. Les résultats indiquent que en 2012, 71 % des conflits ont été réglés ; l’année l’enregistrement à la demande est moins suivante, le nombre de procès liés au foncier efficace que l’enregistrement systématique dans les tribunaux a chuté de 70 % à 45 %, et le dans la lutte contre les conflits. La couverture temps passé par les autorités en médiation a été totale de toutes les parcelles par l’enregistrement considérablement réduit (Ferrari 2014). De tels systématique peut faciliter le règlement des effets ne peuvent se produire que lorsqu’il y a conflits, empêcher leur apparition, et réduire enregistrement systématique. les effets négatifs de leur dispersion. Enfin, un système d’information foncière est un « bien 31. Bien que l’enregistrement systé- public » qui peut être utilisé à terme pour la matique soit l’option privilégiée, la plupart planification et la collecte d’impôts (génération des SFC ne peuvent proposer ce service par de recettes internes). manque de ressources. A cause des économies d’échelle l’enregistrement systématique est 30. Un processus d’enregistrement moins coûteux par terrain (dont 50 % à la charge systématique, impliquant largement la du propriétaire pour la délivrance du certificat ; communauté, contribue au règlement des conflits. Au Burundi, l’enregistrement voir Banque mondiale / FAO 2014) et il permet systématique des droits accompagné de la une couverture totale beaucoup plus rapidement médiation et de l’arbitrage avec l’implication vu qu’il concerne de nombreux terrains traités des autorités locales, formelles et informelles, en série. L’OGR nécessite donc un financement élaboré dans l’opération pilote OGR de la SDC a initial des opérations et une campagne bien entraîné une diminution du nombre de conflits organisée. Le Gouvernement central convient fonciers déclarés. Certaines plaintes ont même que l’enregistrement systématique est l’option été retirées. Au cours d’un enregistrement à privilégier. initial systématique, de nombreux conflits Défi n° 3 : le modèle économique actuellement souvent latents – sur la délimitation, les droits proposé dans les opérations pilotes pour le ou des transactions – pouvant être résolus par financement du SFC pourrait affaiblir sa fonction la médiation sont révélés. L’approche utilisée de bien public et ne peut s’autofinancer par le comprend la possibilité d’une médiation par petit nombre de certificats imprimés demandés une commission de reconnaissance collinaire. 32. La participation est totale dans les Le processus d’enregistrement crée une sorte campagnes d’enregistrement systématique d’urgence parmi les parties impliquées à mais la demande de certificats imprimés est résoudre leur différend puisque les droits sur la faible. L’opération pilote de la SDC a constaté parcelle ne seront pas enregistrés tant qu’il y a conflit ou opposition97. À Ngozi, par exemple, 25 une participation active dans le programme 400 parcelles ont été mesurées et enregistrées, d’enregistrement systématique (OGR) mais un dont 1 681 (6,6 %) contestées, mais l’opposition certificat imprimé n’a été demandé que pour 19 à la délivrance d’un certificat a fini par être levée % des parcelles pour les OGR. Ce pourcentage était plus élevé dans les communes des zones péri-urbaines et urbaines, telles que Ngozi (38 % ; voir Tableau 1.5). Un faible niveau de 97  Dans environ 2 600 cas, une opposition a été notée dans 5 SFC bien que les documents soient incomplets ; voir Habwintahe demandes de certificat a également été relevé et al., 2013). au Rwanda, en Ouganda et à Madagascar. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 85 été couverts par des bailleurs Figure 3-2: Les recettes du SFC au fil du temps (2011-2013) (bâtiment, matériel, transport et formation) qui ont aussi couvert le coût des opérations de premier 18000000 enregistrement. Les frais de 16000000 fonctionnement comprennent 14000000 12000000 2011 recettes les salaires, le matériel, les 10000000 déplacements, etc. La pérennité 2012 recettes 8000000 financière du SFC est basée 6000000 2013 recettes sur des frais facturés pour les 4000000 services rendus, tel que les frais 2000000 du certificat et l’enregistrement 0 de la transaction. L’argumentaire de l’approche actuelle est qu’un ba a ro a zi ga z ar o en ro an m Ng ng enregistrement peu coûteux re ho ur ar Ta Ki M am Ru associé à un nombre élevé de Ny Source : Agence suisse pour le développement et la coopération, 2014 bénéficiaires maintiendra les frais relativement bas tout en générant suffisamment de L’hypothèse est que les propriétaires dont recettes au total pour le fonctionnement du SFC. la parcelle est cartographiée et le nom est Les sources de recettes d’un SFC sont les frais enregistré perçoivent leurs droits comme étant facturés pour les différents services proposés sécurisés - même sans délivrance du certificat par les communes. Par exemple, pour le SFC papier - puisqu’ils savent qu’un certificat peut travaillant avec Gutwara Neza (financé par l’UE), être demandé (et payé) en cas de besoin (par la tarification est votée par le conseil communal exemple pour la mise en location ou la vente de et peut varier d’une commune à l’autre, mais avec terres, l’utilisation de terres comme garantie ou une certaine constance : au dépôt de la demande : en cas de conflit). Le nombre limité de demandes 1000 Fbu, au retrait du certificat : du 0 a 30 ares ; 2000 Fbu, de 30 à 60 ares ; de 3500 à 5000 de certificats imprimés constitue cependant un Fbu, de 60 ares à 1 ha ; de 7000 à 10.000 Fbu obstacle au modèle de pérennisation financière pour 1 ha supplémentaire 10.000 Fbu. Les du SFC, bien que les données du SFC de la ville frais d’enregistrement d’une mutation sont les de Ngozi et d’autres communes de la Province mêmes. L’enregistrement d’une hypothèque ou montrent que les recettes augmentent au fil des d’un bail est de 2 000 Fbu par parcelle. Enfin, une ans, parfois de façon substantielle (Figure 3.2). copie du certificat coûte 2 000 Fbu. Habwintahe 33. Le Gouvernement et les bailleurs de et al. (2013) ont constaté de grandes variations fonds ont opté pour le financement des SFC d’une commune à l’autre, ainsi qu’une tendance à l’augmentation des frais au fil des ans pour à partir des frais d’utilisation de services garantir au SFC le recouvrement des coûts. mais cette approche ne considère pas la sécurisation foncière comme un bien public. 34. Des procédures de travail efficaces, Le coût d’un certificat dépend de (i) la méthode associées à un volume de transactions utilisée pour l‘enregistrement des droits croissant, pourraient faire du SFC, en théorie, fonciers ; (ii) les frais d’investissements pour une source de recettes supplémentaire pour l‘établissement des bureaux, du matériel et de les autorités locales. Un SFC peut générer l’équipement ; (iii) les frais de fonctionnement des recettes lorsque les frais de délivrance des et (iii) la productivité du personnel. Pour tous certificats et l’enregistrement des transactions les SFC existants, les frais de lancement ont et modifications sont inférieurs aux frais 86 Tableau 3-5 : Terrains enregistrés et certificats délivrés par le SFC de la Province de Ngozi (Pilote SDC) Nombre Nombre Nombre Nombre Nombre de terrains Certificats d’enregis- moyen de Commune SDC de de sous- Ménages pour lesquels un payés (% de trissment terrains / collines collines certificat a été payé terrains) des terrains ménage Ngozi 8 27 3 761 17 949 4,8 6 745 38 % Marangara 7 29 s.o. 11 574 2 197 19 % Ruhuroro 8 23 3 792 12 069 3,2 1 409 12 % Tangara 6 26 3 186 11 231 3,5 1 612 14 % Nyamurenza 3 13 2 805 9 956 3,5 598 6% Kiremba 6 15 2 418 8 389 3,5 743 9% Total 37 133 71 168 13 304 19 % Source: Données administratives du pilote SDC, juin 2013. Tableau 3-6 : Coûts d’un enregistrement initial (à la demande) pour 8 SFC Coût de la Procédures Procédures + procédure Procédure + + opérations opérations + Deman- Prix du CF Communes (formulaires opération + outils de outils de travail des / appliqué utilisés) travail + moto mois BIF $ BIF $ BIF $ BIF $ BIF $ Giheta—UE 6,737 4.3 23,353 15.1 27,115 17.5 19.9 24 3,000 1.9 30,877 Gitega—UE 6,737 4.3 29,923 19.3 35,172 22.7 26.1 17 3,000 1.9 40,420 Bugenyuzi—UE 2,280 1.5 16,227 10.5 16,593 10.7 10.9 60 3,000 1.9 16,960 Kigamba— 6,401 4.1 11,562 7.5 13,043 8.4 9.4 58 5,000 3.2 PDDRC 14,525 Nyabitsinda— 6,448 4.2 8,541 5.5 9,659 6.2 7.0 112 7,500 4.8 ancienne CTB 10,777 Gashikanwa— 1,895 1.2 5,765 3.7 5,864 3.8 5,964 3.8 221 6,000 3.9 SDC Ngozi—SDC 3,463 2.2 4,714 3.0 6,705 4.3 8,696 5.6 64 4,000 2.6 Ruhuroro-—SDC 3,463 2.2 6,283 4.1 7,205 4.6 8,127 5.2 48 6,000 3.9 Source : Banque mondiale / FAO, 2014. Remarque : CTB = Coopération technique belge ; UE = Union européenne ; PPCDR = Programme Post-conflit de Développement Rural ; SDC = Agence suisse pour le développement et la coopération. facturés et quand davantage de transactions sont par les bailleurs, dans l’idée que les futurs coûts enregistrées, dans l’hypothèse où ils peuvent de fonctionnement du SFC seront couverts par les être facturés. Cependant, la demande d’actes frais facturés. L’analyse des coûts par certificat de notoriété, une source de revenus importante pour l’approche « à la demande » a donné pour la commune, plus coûteux, est susceptible des résultats très variables d’un SFC à l’autre de chuter lorsque la mutation peut être notée sur (Banque mondiale / FAO 2014). Les différences le certificat à la place. Comme déjà indiqué, pour proviennent des procédures utilisées, du type l’instant, tous ces investissements sont financés de matériel et de transport (voiture, moto). République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 87 Cette étude a également constaté de grandes officiellement toute modification, ce qui affecte variations dans la productivité du personnel la mise à jour du registre. De plus, le Burundi ne des SFC. De telles différences de productivité, possède pas de système d’impôt foncier rural voire de qualité de service, ont également été et les taxes sur les transactions ont été abolies constatées par une autre étude sur sept SFC. en 2008. L’imposition foncière dans les zones La délivrance de certificats est plus lente dans urbaines est possible, bien que le montant certains cas. Le taux de rotation du personnel soit faible (voir chapitre 2) et puisse ne pas est élevé (66 %) ; les membres du personnel compenser les coûts de sa perception. interviewés considèrent leurs responsabilités, impliquant beaucoup de travail sur le terrain, Défi n° 5 : la durabilité nécessite un leadership dans le secteur et un plus grand transfert des comme étant relativement lourdes comparées ressources aux communes aux autres fonctions des autorités locales. D’autres obstacles à la productivité du personnel 36. Les questions de durabilité doivent sont liés aux flux de trésorerie au niveau des être traitées en priorité. L’installation des autorités locales, qui affectent les ressources SFC dans toutes les 116 communes rurales disponibles pour les déplacements et la présence du Burundi implique que tous les citoyens des de comités locaux pour l’approche à la demande zones rurales aient accès à un SFC et que ce (Habwintahe et al., 2013). service ait la capacité de servir tous les habitants dans un délai raisonnable. La totalité des coûts Défi n° 4 : les résultats obtenus par les communes d’établissement d’un SFC et de registres complets utilisant les SFC pour générer des recettes au niveau local sont limités par un enregistrement systématique ne peut être supportée par les ressources propres des 35. En théorie, les communes pourraient communes, qui nécessiteront certainement augmenter leurs recettes fiscales en un financement extérieur à la commune. (Ce utilisant les données générées par les sujet est traité dans le chapitre 2). Le principal levés parcellaires, l’enregistrement des enjeu de durabilité est de s’éloigner d’une propriétaires et l’expansion des marchés dépendance quasi-totale du financement par les fonciers. Dans d’autres pays, ces données bailleurs pour aller vers un transfert progressif foncières recueillies grâce à un premier du Gouvernement central aux communes, enregistrement servent aussi de base pour les une mobilisation locale des ressources par la impôts fonciers. Aux Philippines, par exemple, collecte d’impôts, ajoutée aux frais facturés aux les communes financent elles-mêmes les coûts propriétaires. de régularisation foncière (également au moyen d’une sorte de certificat), et les données sont 37. L’appropriation des SFC varie selon ensuite utilisées pour préparer les registres les parties prenantes. Au niveau du Gouverne- fiscaux (qui permettent de recouvrer les coûts ment central, la réforme foncière suscite un en quelques années grâce à la collecte d’impôts). intérêt (tel que remarqué précédemment, le À Madagascar, un programme pilote mené Code foncier a été accéléré et approuvé en dans cinq communes a également montré que 2011) mais le soutien pour une gestion foncière l’amélioration des données utilisées pour la décentralisée est probablement moins net. Des collecte d’impôts est un facteur clé pour motiver enjeux à dimension politique semblent prioriser les communes à augmenter le nombre de terres le rôle de la CNTB dans le paysage institutionnel, enregistrées, bien que certains propriétaires, la villagisation et l’allocation de terres fertiles pour ne pas payer l’impôt, n’aient pas voulu du domaine public à des investisseurs privés, enregistrer leurs droits sur le sol. Les taxes sur dont les marais et les paysannats. Pourtant, les transactions font cependant aussi obstacle la sécurisation foncière semble intéresser la à la volonté des propriétaires d’enregistrer société burundaise ; la promesse de délivrance 88 de titres de propriété ayant été utilisée dans les capacité des autorités locales. La concurrence campagnes politiques de 2010. Il est possible entre les services déconcentrés et les communes que les communes soient plus intéressées par la constituait également un facteur de méfiance. Au réforme foncière que le Gouvernement central, Burundi, on a pris soin dès le départ d’associer bien que tous les SFC ne soient pas intégrés dans au processus des représentants de ces ministères les plans et budgets des gouvernements locaux. et services notamment comme membres du Cependant, les SFC restent parfois perçus comité de pilotage des programmes pilotes. Vu comme des projets de bailleurs et non comme les doutes portant sur la durabilité financière un service public (Habwintahe et al., 2013). de l’approche actuelle (que le SFC puisse seul Les organisations de la société civile (OSC) rentrer totalement dans ses frais), le projet soutiennent la politique de réforme et ont appuyé de décret propose de financer le personnel dès le début la gestion foncière décentralisée des SFC avec les ressources du Gouvernement ainsi que les SFC. Leur principale préoccupation central. Cette proposition reste à examiner par est liée à la pérennisation, la qualité des services le Ministère de l’Intérieur. et la garantie de transparence. Défi n° 6 : La mise à l’échelle des SFC pour une 38. La coordination des deux systèmes couverture nationale nécessite des données sur la de gestion d’information foncière. Les deux performance, les résultats et les impacts systèmes (titre de propriété et certificat foncier) 40. La programmation d’une extension d’enregistrement des droits de propriété sont des SFC dans toutes les communes nécessitent complémentaires et non en concurrence. Ils devraient continuer de coexister pendant au la mise à disposition de données fiables et moins une décennie. Même si la conversion des régulières fournies par un dispositif de suivi certificats en titres fonciers est possible, elle du processus et un dispositif d’évaluation n’est probablement pas une priorité pour la d’impact. Présentement, il y a peu de données plupart des propriétaires au Burundi. La gestion de suivi en termes de production, de coûts, de et des mécanismes de partage de l’information qualité, et les données foncières sont éparpillées, foncière éviteront toute superposition des droits peu digitalisées et non agrégées au niveau central. (PRODEMA 2014). La supervision se montre irrégulière, tandis que l’analyse des avancées et la capitalisation des 39. Les ministères sectoriels s’intére- résultats semblent dépendre des initiatives des ssent à la réforme foncière bien que leur bailleurs de fonds (l’auto-évaluation comme engagement ne soit pas constant. Plusieurs pour les évaluations externes), qui paraissent ministères sectoriels jouent un rôle important également manquer de coordination. Le coût dans la mise en place du système pérenne de par certificat pourrait, par exemple, être réduit gestion foncière décentralisée (aux niveaux davantage en optimisant les procédures et en institutionnel, technique et financier) et dans améliorant l’efficacité, mais tout ceci nécessite le maintien des standards, l’information un suivi régulier du processus, des tests avec foncière, la formation des cadres et la bonne une comparaison systématique et rigoureuse application des procédures afin de garantir entre différentes alternatives. des services efficaces et adaptés. Au départ, le personnel des ministères sectoriels 41. La mise en place d’un mécanisme impliqués dans l’administration foncière (titres d’évaluation d’impact (EI) des acquis est fonciers, cadastre, aménagement) n’a pas été nécessaire. Une EI est nécessaire pour évaluer unanimement favorable au développement et analyser les résultats en termes de prévention des SFC et des certificats. Cela était dû à des et de résolution de conflits, de changements divergences professionnelles quant aux normes dans les stratégies d’investissements des de précision minimum, et à des doutes sur la ménages ruraux, de la gestion durable des sols République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 89 ou des transactions foncières et une estimation et les OSC. En conséquence, le Burundi a mis en de leurs contributions au bien-être, à la sécurité place un service d’administration foncière à la alimentaire, et au développement économique. fois accessible et efficace pour la majorité de la Ces analyses sont aussi importantes pour justifier population rurale. la mobilisation de financements supplémentaires auprès des bailleurs en perspective d’une 43. Le service de gestion foncière couverture du programme à l’échelle nationale. fourni par le SFC devrait être perpétué; L’EI systématique et rigoureuse ; conforme sa pérennisation est donc essentielle. Les aux normes internationales, est déficiente certificats fonciers ont pour but de documenter au Burundi et la plupart des efforts d’études les droits et sont un aspect essentiel d’un semblent se limiter à des focus groupes et à des Etat de droit. Tous les SFC sont actuellement évaluations rapides. Le travail d’enregistrement mis en place avec l’appui des bailleurs. La systématique à Ngozi (conduit en 2012) s’est pérennisation des SFC fait l’objet de discussions fait sur une échelle suffisante pour faire une régulières au Burundi. Un SFC fournit un bien public : il contribue à la prévention des conflits telle analyse , en reconstituant une base de et accélère leur règlement, il fournit une base référence grâce à la méthode d’échantillonnage favorable aux transactions foncières (dont la développée par la Banque mondiale pour le location), il recueille des données foncières Rwanda ; elle prendrait environ 6 mois, suivie pouvant être utilisées pour la planification par des enquêtes réguliers tous les 2 à 3 ans et la fiscalité locale. En outre, le service (Ali, Deininger, et Goldstein, 2011). De plus, des devrait être mis à la disposition de tous, et enquêtes auprès des ménages doivent intégrer pas seulement de la population pouvant le un module de questions sur la gestion foncière, payer. L’enregistrement foncier aura sa plus ce qui n’est pas encore le cas. grande valeur en tant que bien public lorsque toutes les parcelles seront enregistrées et que 3.5 Pour aller de l’avant : les toutes les transactions seront régulièrement actions nécessaires pour avancer déclarées au SFC, garantissant ainsi la validité la réforme foncière au Burundi des données publiques en matière de foncier. L’enregistrement complet des transactions et 42. Depuis 2005, le Burundi a fait de des subdivisions est particulièrement important remarquables progrès en permettant aux pour la qualité du registre. La façon dont les propriétaires ruraux l’enregistrement transactions sont taxées influence la volonté de leurs droits, en instituant une nouvelle des propriétaires de déclarer officiellement garantie écrite (le certificat foncier) délivré par ces dernières. Des transferts de fonds du les communes et actuellement intégré au cadre Gouvernement central pour couvrir les coûts juridique et institutionnel de la gouvernance de base tels que le salaire du personnel des SFC foncière du Burundi. Les programmes pilotes est une option à considérer. La fiscalité sur la ont conçu un système de reconnaissance, propriété et / ou sur la transaction est un autre d’enregistrement et de certification foncière aspect à considérer mais des taxes élevées sur dans lequel la population locale a confiance les transactions entraînent la non déclaration de et qui peut être mis en place et entretenu celles-ci et peut constituer un affaiblissement de techniquement par les communes. Le personnel la validité du registre. des SFC a montré que la délivrance de certificats est à leur portée et que les cas de conflits 44. L’enregistrement foncier systématique diminuent. Ces réussites sont le résultat est d’un intérêt supérieur à l’enregistrement d’investissements considérables et d’un appui à la demande mais le total des frais initiaux soutenu de partenaires de développement engendrés par cette démarche est relativement travaillant en étroite collaboration avec le PNF élevé, car il concerne un plus grand nombre de 90 parcelles, même si le montant par parcelle est fait de préoccupations au sujet de la durabilité inférieur grâce à des économies d’échelle. financière. Une proposition est que ces coûts soient intégrés à la législation en préparation et 45. La gestion foncière décentralisée payés par transferts de fonds du Gouvernement est un élément clé de l’amélioration de la central, tandis que les communes demeurent gouvernance foncière, mais pas le seul d’un chargées du SFC, conformément aux conclusions programme global de réformes foncières. Autres de cette étude. L’utilisation du FONIC pour questions qui sont également des sujet de l’établissement des SFC doit être considérée, gouvernance foncière essentiels de gouvernance afin de permettre aux communes de solliciter foncière sont l’accessibilité, l’efficacité et cet établissement, même lorsqu’un bailleur n’est la transparence du système judiciaire ; la pas directement actif dans leur zone. gestion transparente et efficace des terres du domaine public et la procédure de cession et de 47. Adopter un programme national de concession de ces terres ; l’utilisation des terres réforme foncière. A partir de l’engagement en zone rurale et le plan d’occupation des sols du Gouvernement sur la mise en œuvre du en zone urbaine et son extension (par exemple processus de réforme, ce programme pourrait pour empêcher la dégradation des sols et les inclure un plan stratégique pour la mise inondations) ; la question des droits fonciers en œuvre de la lettre de politique foncière des femmes ; et la réduction de l’informalité et du code foncier, et plus spécifiquement qui nécessite une amélioration de la capacité l’institutionnalisation de la gestion foncière de l’administration foncière classique en zone décentralisée. Il pourrait également présenter urbaine. La mise en œuvre du cadre d’analyse des mécanismes d’intégration de la gestion de la gouvernance foncière (CAGF) est donc des terres dans une logique de fonctionnement nécessaire pour une évaluation plus complète et courant de la décentralisation et de la fiscalité fournira à la fois un repère et une base pour un locale. En outre, le programme devrait système de suivi d’indicateurs fonciers essentiels envisager un plan opérationnel d’extension de performance pour tracer les avancées de la pour permettre la couverture nationale des réforme de la gouvernance foncière. Le CAGF peut SFC avec l’enregistrement à grande échelle des contribuer à l’établissement des priorités pour droits fonciers, selon des modes opératoires, un un audit institutionnel et financier du secteur calendrier et une hiérarchisation de la couverture foncier, ainsi qu’un processus participatif de géographique décidés avec l’ensemble des planification de la politique de réforme foncière, partenaires. tel que recommandé par l’étude du PRODEMA 48. Mise au point des procédures (PRODEMA 2014). normalisées et des directives pour la 3.5.1 Les priorités de la réforme à court supervision des SFC. Le Burundi a défini un terme (1 à 3 ans) modèle de développement des SFC sur la base des expériences pilotes financées par les PTF, 46. Adopter le décret en suspens portant en collaboration avec les autorités et services sur la certification des droits fonciers. Le concernés. Le développement de normes de projet de décret sur la certification des droits performance et le renforcement des systèmes fonciers présente les étapes du processus de d’appui-conseil constituent un effort partagé demande de certificat, de l’OGR (enregistrement du Programme Foncier National, des autorités systématique) et de la conversion d’un certificat locales, les OSC et les structures qui soutiennent en titre de propriété. Par ce décret, les résultats actuellement les SFC. L’unité de coordination de l’approche émergeant des programmes du PNF pourrait piloter ce processus et établir, pilotes seront codifiés. L’adoption du décret idéalement, un appui dédié à l’organisation et a été reportée par le Conseil des Ministres du à l’accompagnement des nouveaux SFC et du République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 91 renforcement de leurs capacités, ainsi qu’un certifiées et les propriétaires. Le suivi régulier suivi-appui-conseil régulier. Les ministères de d’impact est également important comme tutelle peuvent également jouer un rôle d’appui mécanisme d’alerte précoce de l’apparition de des SFC ainsi qu’un rôle d’intégration des problèmes, compte tenu de la sensibilité de la informations foncières. gouvernance foncière. 49. Tester des approches alternatives 51. Développer une stratégie fiscale pour augmenter la productivité des agents efficace pour les terrains ruraux, en plus et réduire les coûts d’installation et de des terrains en zone urbaine.98 Faut-il lever fonctionnement des SFC. Une couverture les taxes sur les transactions et instaurer à la nationale nécessite un processus efficace et de place une fiscalité foncière locale ? Les recettes bonne qualité pour que ce nouveau système des taxes sur le transfert99 compenseraient gagne la confiance des usagers. Les analyses celles des actes de notoriété pour les communes financières relatives aux coûts d’installation mais ne devraient pas être trop élevées pour d’un SFC, des premiers enregistrements et de ne pas dissuader l’enregistrement officiel des maintenance nécessitent d’être affinées et faire mutations, au risque d’affaiblir la validité du l’objet de analyses plus détaillées. Pour les SFC, le registre (voir point suivant). L’option selon suivi de leur performance n’est ni systématique ni laquelle les communes des zones rurales du agrégé, bien qu’il existe de bonnes opportunités Burundi investiront dans l’enregistrement pour mettre en place un tel mécanisme. A titre foncier pour augmenter les recettes fiscales indicatif, le rapport de la Banque mondiale / est peu probable pour le moment, les terrains FAO pourra servir de base analytique. Comme ruraux étant exonérés de taxes, tandis que les l’indique ce rapport, les coûts peuvent être transactions foncières ne font plus l’objet de réduits et les capacités augmentées grâce à des taxes. procédures optimisées, une efficacité améliorée et une meilleure utilisation des ressources 52. Promouvoir des campagnes de humaines selon le type de travail et même la sensibilisation afin de garantir l’enre- possibilité de collaboration entre différents gistrement de toutes les transactions services au sein de la commune (par exemple foncières. La qualité d’un registre foncier dépend de sa mise à jour permanente. Maintenir l’état civil) ou partage de expertise spécialisé un registre actualisé peut aussi nécessiter des entre communes. La diminution des coûts ne campagnes d’information et de sensibilisation. devrait cependant pas se faire aux dépens de Par exemple, il semble que les certificats sont l’engagement local, de la transparence et des délivrés au cours de la vente à l’acheteur mais capacités à traiter les conflits latents. En plus, celui-ci n’est pas conscient qu’il doit également une évaluation d’impact de la sécurisation déclarer la transaction au niveau du SFC foncière est souhaitable à court terme et peut (Habwintahe et al., 2013). être entreprise relativement rapidement avec l’aide technique de la Banque mondiale. 53. Améliorer l’accès des femmes au foncier en développant et testant une 50. Institutionnaliser le suivi-évaluation pas la mise en place d’un mécanisme d’évaluation du processus et des résultats par un observatoire du foncier à usages et parties 98  Une autre source de recettes est la location de terres du domaine public par les communes. Certains gouvernements locaux prenantes multiples. Les projets d’extension de facturent la location de ces terres (redevances marais). SFC nécessitent la mise à disposition de solides 99  Il serait possible d’introduire une taxe de 2 000 BIF par données de suivi sur le processus, la production parcelle datant de 2016, avec une augmentation jusqu’à 100 BIF des certificats, les coûts et la qualité, les parcelles par an sur les 20 ans suivants. 92 stratégie encourageant les certificats et de l’administration décentralisée devrait titres de propriété au nom des conjoints. également être formé en gestion foncière aux Légalement possible, le certificat au nom côtés du personnel des autorités locales. L’Unité des conjoints n’est pas pratique courante au de Coordination du PNF développe actuellement Burundi, tandis qu’il constitue une stratégie clé des modules de formation pour le personnel des au Rwanda et est largement répandu. SFC pour le Centre National de Formation des Acteurs Locaux de la Décentralisation, mais le 3.5.2 Les priorités de la réforme à moyen financement de leur mise en œuvre n’est pas terme (3 à 5 ans) encore sécurisé. Un programme de formation universitaire axé sur le foncier est également 54. Renforcer le cadre institutionnel, prévu. dont l’implication des autorités locales, les relations avec les services décentralisés 56. Établir un système intégré de données et l’appui-conseil au niveau national du foncières. La priorité du système national de processus d’enregistrement des droits données foncières, qui rassemblerait tous les fonciers. L’instauration de normes de documents fonciers et l’information spatiale, performance et la supervision de leur réussite sera d’abord focalisée sur l’information sont essentielles au maintien d’un système géospatiale : (inventaire des terres domaniales, fiable et qui inspire confiance. localisation des terrains titrés, notamment celles concernées par un certificat, etc.). À 55. Établir des structures permanentes moyen terme, l’information produite par les pour le renforcement des capacités et la SFC (désagrégée par sexe et par région) devra formation de la gestion foncière décentralisée. être mise à disposition sous forme numérique L’amélioration de la sécurité foncière à grande et régulièrement transmise à une unité de suivi échelle (couverture nationale) nécessite la centrale. D’autres services et les tribunaux disponibilité des ressources humaines pour faire devront également alimenter ce système de les « brigades » pour l’enregistrement initial données foncières avec les titres, transferts et style OGR et pour les structures des SFC. Un hypothèques relatifs aux propriétés, les conflits cadre dédié de fonctionnaires de carrière dans la fonciers et la taxation. Ces données peuvent être structure décentralisée des ressources humaines utilisées aussi par un observatoire du foncier / personnels est requis pour fournir au Burundi afin de suivre les avancées de la politique, les compétences nécessaires au maintien de informer le dialogue politique et améliorer la services d’administration foncière. Le personnel transparence. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 93 Chapitre 4 Promouvoir la redevabilité sociale par la décentralisation : la voix des citoyenss Nota Bene: L’équipe tient à souligner que les résultats présentés dans ce chapitre sont basés sur divers groupes de discussion tenus dans 16 communes dans 8 provinces du Burundi. Les activités de terrain ont été réalisées par des consultants burundais, en étroite coordination avec l’équipe de la Banque. Les évaluations des relations de redevabilité entre l’État et les citoyens relevent des points de vue de plus de 300 résidents locaux et des fonctionnaires communaux élus qui ont participé aux enquêtes qualitatives. Ils sont destinés à titre indicatif seulement, et ne prétendent capter systématiquement les tendances nationales. Résumé des principaux formulation des plans de développement communal, la répartition du budget communal arguments et constats clés et la prestation des services publics à l’échelon 1. L’objectif de ce chapitre est d’examiner territorial. le contexte de la redevabilité sociale, ainsi que les possibilités d’action sociale et la 2. Pour recueillir l’opinion des nature des relations État-société dans Burundais, une série de 16 groupes de le Burundi actuel. Partant de l’idée que le discussion a été menée dans huit communes contexte a son importance, ce chapitre traite à travers le pays. Dans chacune de ces de l’opinion des citoyens burundais sur les communes, des séances de discussion ont eu questions clés, telles que l’utilisation des re- lieu avec deux groupes distincts, l’un composé cettes fiscales, la perception de l’impôt, la de citoyens sans lien avec la fonction publique, 94 et l’autre composé de représentants des commu- L’État a, lui aussi, des limites, la plus évidente nes et des administrations déconcentrées. Le étant celle d’une augmentation substantielle des groupe de citoyens comprenait des membres tensions politiques tout au long de la campagne des comités de développement local, des pour les élections de juin 2015. associations locales et des représentants de groupes vulnérables, dont des jeunes et des 5. Les réformes politiques récentes ont femmes. Le groupe de représentants des créé des opportunités dont les communes communes et des administrations déconcen- peuvent se saisir pour jouer un rôle plus trées comprenait des Administrateurs locaux important dans la construction de la et des membres du personnel technique cohésion sociale au niveau local, en particulier (conseillers des Administrateurs), des membres l’élection directe des conseils communaux du conseil communal, des membres élus du et des conseils locaux. Avec le soutien récent conseil de colline et des responsables locaux de la Banque mondiale (à travers le Projet de services déconcentrés des secteurs de d’appui au développement communautaire et l’éducation, de la santé, de l’eau et de la justice. social, PRADECS) et la communauté élargie des bailleurs de fonds, les administrations 3. Le cadre macro utilisé pour orienter communales parviennent de mieux en mieux à cette analyse et présenter les constats clés gérer la responsabilité des fonds destinés à de est le « Cadre conceptuel des éléments petits projets de développement. Ce programme constitutifs de la redevabilité sociale ». Ce a permis : la formulation des premiers plans de cadre a été élaboré pour le Rapport phare sur développement communal ; l’identification de la redevabilité sociale de 2014 de la Banque sous-projets prioritaires au moyen de réunions mondiale (Banque mondiale 2014b). Il présente communautaires participatives ; ainsi que le les cinq éléments constitutifs d’une analyse de soutien dans plusieurs domaines clés, tels que la la redevabilité sociale : (i) l’action des citoyens, gestion du processus de passation des marchés (ii) l’action de l’État, (iii) l’information, (iv) publics, le suivi des sous-projets et la garantie mobilisation, et (v) l’interface de concertation de l’entretien des infrastructures nouvellement entre les citoyens et l’État. construites. En facilitant un dialogue ouvert et l’inclusion des groupes vulnérables, ces 4. Le principal constat ressortant interventions ont constitué une importante de l’examen du contrat social à l’échelon contribution à la cohésion sociale et l’atténuation territorial au Burundi est que l’État a des conflits. davantage de possibilités de promouvoir la redevabilité sociale que les citoyens. En 6. En dépit des récents progrès, la d’autres termes, en matière de redevabilité redevabilité sociale au Burundi demeure sociale, c’est le côté de l’offre plutôt que celui faible, et les citoyens et les communautés de la demande qui fournit pour le moment le ont peu d’occasions de s’engager dans plus de points d’accès potentiels. L’utilisation du les processus décisionnels et de mettre cadre conceptuel des éléments constitutifs lors les communesdevant leurs redevabilités. des groupes de discussion a permis de dégager L’engagement des citoyens dans le processus la notion selon laquelle il existe de sérieux de prise de décision et la participation au obstacles à l’action des citoyens. Il y a notamment développement local demeurent limités, ce un manque d’efficacité parmi les citoyens (par qui constitue une entrave s’il s’agit de profiter efficacité, on entend ici la perception par ces des réformes de décentralisation comme d’un derniers qu’ils peuvent changer les choses), un instrument d’amélioration de la redevabilité manque d’action collective et une motivation et de renforcement de la gouvernance locale. intrinsèque limitée (une notion limitée de Compte tenu du fait qu’au Burundi, la majorité redevabilité morale face à un problème donné). des citoyens a accès aux services de base République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 95 à l’échelon territorial, il est essentiel de 4.1 Redevabilité sociale et mieux comprendre ce qui fonctionne bien et moins bien, et comment les interventions de gouvernance locale : leur lien et redevabilité sociale pourraient être favorisées leur importance pour améliorer la qualité de la prestation de 9. La définition de la redevabilité sociale services et renforcer la gouvernance locale. varie selon les pays, comme les interventions 7. Les recherches auprès des groupes destinées à l’améliorer. Bien qu’il n’y ait pas de discussion ont fait émerger un message de consensus universel sur la définition de clé : la redevabilité sociale peut être redevabilité sociale, ou sur la gamme d’actions immédiatement consolidée en rendant qui y sont liées, il est possible d’en évoquer les cadres de perception de l’impôt et les plusieurs caractéristiques clés. La redevabilité budgets communaux plus transparents et sociale implique généralement un processus de systématiques. Sur la base des discussions concertation, de dialogue et de négociations entre en groupe, les représentants communaux les citoyens et l’État, le but étant d’influencer le semblent ouverts et prêts à communiquer plus programme élargi de développement. Il s’agit efficacement avec les citoyens afin d’augmenter également d’un processus par lequel les citoyens les recettes fiscales des communes. D’autre mettent les représentants communaux devant part, les citoyens sont demandeurs d’une plus leur responsabilité de tenir les engagements grande transparence en matière de ressources pris au sein du pacte de gouvernance envers et désirent mieux comprendre l’utilisation la société civile.100 De plus, elle s’applique aux des recettes fiscales par les représentants situations contractuelles lorsque demande et communaux. offre sont en interaction, et crée des relations de redevabilité, y compris dans les secteurs 8. Bien que la nature de la relation non lucratifs et privés. À travers différentes État-société au Burundi se soit améliorée dimensions (la transparence, la participation et de façon significative depuis que le la redevabilité), la redevabilité sociale donne le Gouvernement a lancé un processus pouvoir aux citoyens de s’exprimer davantage ambitieux de décentralisation en 2005, les dans les processus de gouvernance et de réalités politiques et l’héritage des conflits prise de décision, améliore la transparence et persistent. Après des décennies de conflits, on renforce un contexte favorable à l’engagement observe au Burundi une nette diminution des civique. De tels processus participent à leur violences graves. Mais les sources du conflit tour à l’information et à la consolidation des (telles que l’exclusion sociale, économique interventions en matière de redevabilité. et politique) restent inchangées. Même avec une restauration de la cohésion sociale dans 10. Si l’on s’en réfère à la documentation les communautés locales, la domination d’un sur le sujet, la réussite ou l’échec des système néopatrimonial de gouvernance interventions en matière de redevabilité empêche la réforme de l’État et restreint, au sociale dépendent largement du contexte. niveau local, les améliorations en termes de Les expériences issues des précédentes prestation de services. Ce chapitre explore interventions dans ce domaine ont montré des le contexte local du pays et la façon dont les réussites comme des échecs, avec des résultats processus endogènes de la réforme de l’État non seulement négatifs pour les populations affectent la redevabilité sociale et propose des recommandations pour l’avenir. 100  Banque mondiale, Flagship Study on Social Accountability (Rapport d’étude phare sur la redevabilité sociale, Note conceptuelle préliminaire) 2013. 96 pauvres mais également pour l’ensemble des sociale, aucun ne montre que celle-ci ne peut objectifs de développement. En conséquence, être atteinte même dans des contextes de les faits montrent que : « le contexte donne faible capacité (Gaventa et Barrett 2010). D’une sa forme et son efficacité à la redevabilité part, les données empiriques indiquent que le sociale mais souvent de façon imprévisible et niveau de la démocratisation de l’État influence complexe » (Banque mondiale, 2013). De plus, l’émergence et l’efficacité de la redevabilité les faits montrent que certains contextes sont sociale. McGee et Gaventa (2011: 12, tel que plus favorables que d’autres, et le contexte cité dans Développement social, Banque influence (sans pour autant nécessairement mondiale 2013) déclarent : « dans un régime qui déterminer) la forme que la redevabilité sociale manque des libertés essentielles d’association, prendra et la probabilité qu’elle atteigne ses d’expression ou de médias, les initiatives pour objectifs. Des analyses complètes de contextes la transparence et la redevabilité menées par opérationnels sont donc nécessaires avant les citoyens n’ont pas les mêmes chances de d’entreprendre des interventions en matière de réussir que dans des sociétés réunissant ces redevabilité sociale. conditions. » D’autre part, les faits semblent indiquer que la démocratisation de l’État seule 11. Il est clair que le contexte est ne détermine pas les relations État-citoyen. fondamental dans l’élaboration, l’application Plus précisément, Crook et Booth (2011) ont et la rupture des interventions de ce type, ainsi que leurs résultats, mais il est encore constaté que : « la présence d’institutions et difficile de déterminer de quelle façon. La de cadres démocratiques officiels ne révèle connaissance du mode d’influence du contexte qu’une partie du tableau dans de nombreux sur les résultats des interventions demeure contextes, puisque ce sont les institutions limitée. Un rapport de la Banque mondiale, informelles et l’arrangement politique sous- Mapping Context in Social Accountability, fournit jacent qui expliquent ce qui se passe et un cadre analytique à travers six domaines pourquoi. » Par ailleurs, Stasavage (2005) contextuels : la société civile, la société conclut que « différentes formes de contrat politique, les relations inter-élites, les relations social ou de redevabilité de développement État-société, les relations intra-sociétales et peuvent émerger au sein d’un régime peu les dimensions internationales. Ces domaines démocratique ou semi-autoritaire, comme alimentent le Cadre conceptuel des éléments c’est le cas pour l’enseignement primaire en constitutifs de la redevabilité sociale développé Ouganda. » En résumé, et comme nous l’avons par l’équipe de la redevabilité sociale de la noté précédemment, la façon dont le contexte Banque mondiale pour le Rapport phare sur la influence la redevabilité sociale reste imprécise. redevabilité sociale (Banque mondiale 2014b). 13. La concertation avec les citoyens 12. La documentation existante sur la dans les États fragiles ou touchés par un relation entre la redevabilité sociale et le conflit (Fragile and conflict affected States- contexte indique précisément l’importance FCS) a particulièrement besoin d’appui. de l’engagement citoyen. Les constats issus Compte tenu de la faiblesse de l’environnement de cette documentation suggèrent que la sociopolitique des FCS, les interventions de volonté des citoyens à atteindre des objectifs redevabilité sociale en soutien à de solides de redevabilité sociale et à défier l’État relations État-citoyen restent à explorer. Ceci constitue un facteur clé, souvent formé par n’entraînera pas seulement une amélioration les expériences historiques que les citoyens de la prestation de services dans les domaines ont de leur relation à l’État. Même si les faits où ils sont le plus nécessaires mais peut soulignent l’importance de la capacité de l’État à également aider ces sociétés à éviter et résister fournir des résultats en matière de redevabilité au conflit et à envisager la reconstruction République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 97 dans un scénario post-conflit.101 Surmonter les pour aider les professionnels travaillant dans obstacles à l’engagement citoyen et les limites cette spécialité. Ce cadre a été conçu pour être éventuelles de la réactivité de l’État sont des utilisé comme outil d’évaluation des éléments domaines nécessitant d’être explorés de façon de redevabilité sociale les plus influents au sein plus approfondie, surtout dans les contextes de d’un contexte donné. fragilité où les capacités institutionnelles et la légitimité de l’État sont faibles.102 Lorsque les 16. Comprendre la redevabilité sociale rôles et redevabilités ne sont pas clairement par un cadre conceptuel promet d’appro- délimités entre les institutions et que l’influence fondir les recherches clés. Le cadre (Cadre des autorités est imprécise, promouvoir la conceptuel des éléments constitutifs de la redevabilité sociale relève de la véritable redevabilité sociale) illustré dans la Figure 4.1 gageure. présente les cinq éléments clés de la redevabilité sociale : l’action des citoyens, l’action de l’État, 14. Compte tenu du statut de FCS du l’information et la mobilisation, et l’interface de Burundi, l’hypothèse critique selon laquelle concertation entre les citoyens et l’État. L’élément les faibles niveaux de redevabilité consti- crucial est la façon dont l’action des citoyens tuent une menace pour la paix est un aspect et l’action de l’État peuvent être favorisées dont l’examen est essentiel. Si les formes dans le but d’influencer l’élément d’interface d’exclusion sociale, économique et politique sont et le rôle fondamental de l’information (accès, des sources de conflit, alors la cohésion sociale transparence, exactitude, etc.) utilisée comme est un objectif louable. Pour cela, comment la outil à la fois par l’État et les citoyens. cohésion sociale peut-elle être développée par la redevabilité et, à son tour, avoir un impact 17. Utiliser le cadre, et comprendre positif sur la nature de la relation entre le citoyen l’importance des éléments constitutifs et l’État ? de la redevabilité sociale, convient au contexte spécifique du Burundi. L’équipe de 4.2 Cadre analytique, données et la redevabilité sociale de la Banque mondiale a élaboré ce cadre macro en appui aux méthodologie professionnels dans leur analyse des éléments 15. Le concept de redevabilité sociale contextuels déterminants de la redevabilité fait actuellement l’objet d’un examen par les sociale et afin d’en évaluer les facteurs favorables décideurs politiques et les universitaires. et défavorables. Les éléments clés peuvent être La possibilité qu’une plus grande redevabilité considérés comme des points d’accès pour sociale favorise davantage d’interactions État- les interventions en matière de redevabilité société et contribue à des États plus forts et plus sociale. De plus, chaque élément constitutif est ouverts, est une promesse stimulante qu’il reste accompagné d’une liste de contrôle diagnostique à renforcer par des données concrètes. Pour afin de guider l’analyse contextuelle sur le approfondir les recherches dans cet important terrain. Le cadre a été spécifiquement utilisé domaine, l’équipe de redevabilité sociale de la au Burundi pour étudier les rôles de l’action de Banque mondiale a élaboré un cadre conceptuel l’État et de celle des citoyens dans des groupes de discussion. L’information a été évaluée comme un élément transversal affectant à la fois l’État et les citoyens et indiquant le besoin de 101  Par exemple, voir Banque mondiale (2012), qui suggère que la fracture au sein des relations sociales et de la relation entre renforcer l’interface de concertation entre ces citoyens et État renforcent les situations de fragilité et de conflit. derniers et l’État. 102 Voir Banque mondiale (2012) pour un examen intéressant de la documentation sur la redevabilité sociale dans les États 18. Les recherches au Burundi pourraient fragiles. aider à clarifier le lien entre la fragilité 98 Figure 4-1: Les éléments clés de la redevabilité sociale : cadre conceptuel ACTION DE L’ÉTAT INFORMATION INTERFACE CITOYEN-ÉTAT MOBILISATION ACTION DU CITOYEN Source : Développement social, Banque mondiale, 2014. de l’État et la redevabilité sociale (ou plus et absence de redevabilité, déclarant que exactement son absence). Dans ce pays, les « les périodes marquées par le manque de recherches étaient motivées par la question capacités, de redevabilité ou de légitimité des suivante : quelle est la nature du contrat social états ou institutions en matière de médiation à l’échelon territorial ? Cette question fait des relations entre les groupes de citoyens et précisément référence aux attentes mutuelles entre les citoyens et l’État les rend vulnérables en termes de droits, de rôles et de redevabilités face à la violence. » L’argument selon lequel entre l’État et les citoyens. Nous espérons que l’absence de redevabilité est une caractéristique les réponses trouvées dans le travail sur le fondamentale de la fragilité nécessite qu’une terrain contribueront à éclaircir la façon dont attention particulière soit portée sur la façon les relations État-citoyens et les dynamiques dont la redevabilité peut être améliorée afin sociétales influencent la redevabilité sociale. de favoriser les relations État-société et de Le Rapport sur le développement dans le promouvoir la stabilité. monde 2011 a souligné le lien entre fragilité République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 99 19. Les recherches menées pour ce représentants du gouvernement et l’un avec un chapitre comprennent trois aspects de groupe séparé constitué de citoyens103. Deux collecte des données initiales et d’analyse guides différents ont été préparés comportant quantitative. Les recherches principales des questions pour les groupes. Chaque groupe ont consisté en 16 groupes de discussion de discussion a duré environ deux heures, et dans 8 communes, une collecte de données toutes les questions du guide ont été abordées approfondies auprès de 4 de ces communes et dans chacune des huit communes, par une une analyse quantitative approfondie pour 2 méthode de discussion semi-directive. Un d’entre elles. Ceci s’est fait au moyen du cadre chercheur international et un chercheur conceptuel macro expliqué ci-dessus. burundais ont mené chacune des 16 discussions. Chaque groupe de discussion a recueilli le nom 20. Une série de 16 groupes de discussion des individus interrogés, et pas moins de 250 a été menée dans 8 communes à travers le personnes ont pris part à ces discussions sur pays. Les huit communes ont été sélectionnées l’ensemble des 16 groupes. Pour confirmer et pour (i) représenter la variété géographique du mieux comprendre les informations collectées pays, (ii) être en cohérence avec les communes dans ces groupes de discussion, des données ayant fait l’objet d’une visite de collègues dans supplémentaires ont été recueillies dans quatre le cadre des recherches relatives au chapitre 2 des huit communes (Tableau 4.2).104 sur la décentralisation budgétaire (et renforcer ainsi les points de comparaison), (iii) évaluer la Tableau 4-2 : Liste des communes où des distinction urbain / rural entre les communes, données supplémentaires ont été recueillies et (iv) identifier les différences entre les au-delà des groupes de discussion communes avec plus ou moins de ressources. Commune Province Les communes sélectionnées sont détaillées Mutimbuzi Bujumbura dans le Tableau 4.1. Rutegama Muramvya Tableau 4-1 : Liste des communes où ont été Makebuko Gitega organisés les groupes de discussion Gisozi Mwaro Commune Province Mutimbuzi Bujumbura 22. La collecte des données a porté sur Rutegama Muramvya des sujets parallèles à ceux du guide de Makebuko Gitega discussion et était principalement axée sur Gisozi Mwaro la disponibilité des services sociaux, les Mabayi Cibitoke données budgétaires et les taxes locales. Les Gihanga Bubanza budgets communaux (comprenant le soutien Busoni Kirundo de bailleurs de fonds pour des investissements Butaganzwa Ruyigi spécifiques), les recettes fiscales et la mise Source: travail de collecte de données par l’auteur sur le à disposition des services sociaux et des terrain, 2013. infrastructures par les secteurs majeurs (santé, 21. Pour mieux comprendre le contexte local, des informations ont été recueillies à 103  Une note détaillée sur les guides pour les questions posées aux focus groupes est disponible aupres des auteurs sur la fois auprès des citoyens et des autorités demande.  locales. Dans chacune des 8 communes, deux 104 Les tableaux complets comprenant toutes les données groupes de discussion distincts ont été organisés, recueillies pour les quatre communes sont disponibles auprès des l’un avec un groupe d’individus comprenant des auteurs sur demande. 100 éducation, eau) ont été examinés grâce aux citoyenne constituent un élément plus enraciné documents communaux et aux représentants au Burundi, et pour cela, les activités utilisant communaux. un outil de redevabilité sociale dans une communauté donnée auront peu d’impact en 23. Deux communes sur les huit, Rutegama termes d’initiation du changement. La conclusion et Makebuko, ont été analysées de façon fournie par Fox (2014) sur l’importance du plus approfondie, en tant qu’exemples de maintien d’une « stratégie du sandwich », c’est- la chaîne des processus de l’investissement à-dire coordonnant le côté de l’offre et celui de la communal. Plus précisément, pour examiner demande, est une approche plus utile en faveur la participation des citoyens dans le contexte de la théorie du changement. de la redevabilité sociale, quatre projets d’infrastructure financés par le projet de 25. Quatre domaines d’interaction entre Développement Conduit par les Communautés les citoyens et l’État ont été continuellement (DCC) de la Banque mondiale, le PRADECS, ont soulignés au cours des groupes de discussion. fait l’objet d’une étude en termes de participation Il s’agit des domaines suivants : (i) le rôle de la citoyenne à la prise de décision et au suivi des participation dans la société, (ii) la préparation projets. Les données ont été recueillies au des plans de développement communal moyen d’entretiens qualitatifs semi-directifs (PDC), (iii) la préparation du budget et les avec des citoyens qui avaient participé aux transferts fiscaux au moyen du Fonds National projets d’infrastructures sociales. d’Investissement Communal (FONIC), et (iv) la perception de l’impôt. Réunis, ces éléments font 4.3 L’analyse empirique : les émerger des modèles permettant de conclure que les communes du Burundi sont non seulement constats clés un lieu de développement mais également un 24. Le principal constat ressortant de domaine de contrôle par les autorités du pouvoir l’examen de la nature du contrat social à central. Ce contrôle s’étend non seulement sur l’échelon territorial au Burundi est que l’État le territoire mais aussi sur la population. Cette a davantage de possibilités de promouvoir conclusion corrobore les constats de l’analyse la redevabilité sociale que les citoyens. En d’économie politique ressortant de cette étude. d’autres termes, en matière de redevabilité Ainsi, comment la redevabilité sociale peut- sociale, c’est le côté de l’offre plutôt que celui elle être mieux comprise pour faire croître, de la demande qui fournit pour le moment le dans un premier temps l’engagement citoyen, plus de points d’accès potentiels. En utilisant et influencer ensuite la relation État-société en le Cadre conceptuel des éléments constitutifs vue d’instaurer des changements significatifs de la redevabilité sociale, il est apparu évident dans les communautés locales ? Les quatre au cours des discussions avec les citoyens que parties à suivre s’articulent autour des opinions des obstacles critiques existaient dans l’élément exprimées au cours des groupes de discussion de l’action citoyenne, notamment un manque dans les huit communes à travers le pays, et les d’efficacité entre citoyens (par efficacité, on données collectées auprès de quatre communes entend ici la perception par ces derniers qu’ils sur huit. peuvent changer les choses), un manque 4.3.1 Les obstacles à la participation à d’action collective et une motivation intrinsèque l’échelon local limitée (une notion limitée de redevabilité morale face à un problème donné). Au sein de 26. La participation politique des l’élément de l’action de l’État, certains groupes citoyens se caractérise par son aspect sont bien sûr limités mais ce sont des groupes nominal plutôt que réel. Il existe de multiples plus opérationnels. Les limites de l’action occasions de participation au niveau local. Une République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 101 pléthore d’acronymes recouvre l’existence de décisions ».105 D’autres ont exprimé le même comités de développement local à l’échelon sentiment, expliquant que le temps de la des villages et des communes, ainsi que des plupart des personnes pauvres et vulnérables comités d’école. La culture de la participation était gaspillé dans des réunions sans fin ne sociale domine également dans le pays. Les leur apportant aucun bénéfice immédiat et communautés locales témoignent d’un capital les empêchant d’utiliser ce temps précieux à social solide dans l’organisation d’événements travailler leurs champs ou gérer leur ménage. importants tels que les mariages, les remises de 28. La participation citoyenne est diplômes et les enterrements. La mobilisation généralement considérée pour les repre- des amis et de la famille dans des comités pour sentants communaux comme un moyen organiser ces événements, avec un calendrier de recueillir des informations au niveau détaillé, des redevabilités et la nécessité de communal sans necessairement engager mobiliser des ressources montre la capacité les citioyens dans la prise de decision. Cette des citoyens burundais à participer, planifier culture politique verticale au Burundi s’est et exécuter. Des groupes de citoyens au sein confirmée dans les réponses obtenues auprès des communautés locales du pays (familles des groupes de discussion. Les citoyens ont élargies et réseaux de voisins) indiquent un évoqué l’existence de plusieurs réunions, la degré élevé de participation sociale. Pourtant, plupart portant sur des questions de sécurité, le niveau de participation civique est faible destinées à la transmission d’informations (engagement civique). Pourquoi une telle par les représentants communaux. Les seules participation nominale et peu d’ouvertures sur réunions davantage axées, en termes de contenu, la voie d’un processus d’évolution ? Pour deux sur les questions de développement, étaient les raisons : L’exclusion (souvent auto-imposée) et sessions financées par des bailleurs de fonds la stigmatisation. pour l’élaboration de la nouvelle série de PDC. Ces réunions participatives ont été organisées 27. L’exclusion sociale est un phénomène dans chaque colline au sein des communes généralisé au Burundi, et de nombreuses bénéficiant du soutien d’un bailleur de fonds personnes interrogées ont donné la pour élaborer le nouveau plan sur cinq ans. sensation d’être automatiquement exclues de la vie citoyenne. Dans la totalité des huit 29. Bien que les autorités locales aient communes participant à l’enquête, les deux organisé de nombreuses réunions au groupes de représentants et de citoyens ont niveau communal, les citoyens manque soulevé le même problème : une participation d’opportunités pour participer activement plus conséquente est bloquée par la question et discuter des besoins locaux. Le omniprésente de l’exclusion sociale, le plus Gouvernement organise de nombreuses souvent liée à l’extrême pauvreté. Plusieurs réunions à l’échelon de la colline et de la individus ont évoqué le fait de s’être eux-mêmes commune, à travers tout le pays. Les chefs mis à distance de l’administration locale, une de colline doivent organiser une réunion femme résumant ainsi le sentiment régnant hebdomadaire sur la sécurité et des réunions dans tous les groupes de discussion : « Les ad hoc sur les questions de développement. questions que vous posez, sur l’élaboration du La majorité des citoyens ont déclaré que ces budget, la collecte des impôts, les priorités du réunions étaient utilisées comme un moyen de plan de développement communal, ce sont des diffusion des messages politiques. En outre, les questions pour eux. Ce sont eux qui prennent les décisions et nous disent. Ce n’est pas à moi de discuter de ces questions et de prendre des 105  Citation du groupe de discussion, commune de Rutegama. 102 réunions portant sur des questions pertinentes, réalité s’ajoute à la détérioration de la confiance telles que les problèmes de sécurité ou une durant les cycles de violence continuelle qui se nouvelle initiative au sein de la commune, sont sont succédé depuis les années 60. dominées par les membres locaux du parti au pouvoir. Une des personnes interrogées a 4.3.2 La préparation des Plans de déclaré : « Il n’y a pas d’invitation officielle ou développement communal d’annonce pour ces réunions. Tout le monde 31. Le processus des réformes de la sait qui est censé y aller et qui n’est pas invité. » décentralisation initié par le Gouvernement Elle poursuit : « Les deux réunions mandatées peut être favorisé par le développement pour la redevabilité sociale sont contrôlées par conduit par la communauté. En 2005, le l’élite de notre communauté et sont simplement Gouvernement du Burundi (GdB) s’est lancé organisées parce qu’elles constituent un critère dans un programme de décentralisation dont parmi les indicateurs de performance de la les objectifs déclarés étaient de renforcer la commune. »106 cohésion sociale, d’améliorer la gouvernance 30. Une longue tradition de « tyrannie de locale et de promouvoir l’accès aux infrastruc- la participation » (Gaynor 2013, 2011) est tures et services de base. Les partenaires enracinée dans la culture, particulièrement techniques et financiers ont initié des projets au sein de la population rurale. Du côté de la d’appui à l’elaboration de PDC (notammant demande, la gouvernance est très faible dans les projects FIDA et GIZ). La Banque mondiale le pays. Au cours des groupes de discussion, a également répondu à la demande du GdB en il est ressorti que même lorsque certains soutenant une initiative de Développement représentants communaux avaient tenté conduit par les communautés à grande échelle d’introduire davantage d’interaction avec qui répondait à cette notion de construction de les citoyens (par exemple dans la commune cohésion sociale au niveau local (le PRADECS). de Rutegama), des obstacles perduraient, En 2007, le GdB, soutenu par l’équipe du notamment l’auto-exclusion (décrite plus haut) PRADECS, a lancé les premiers PDC dans la et une perception dominante parmi les citoyens totalité des 126 communes du pays pour une que l’État n’était pas véritablement intéressé période de cinq ans. En 2012-2013, la seconde par un dialogue ouvert (ce dernier élément a été génération des PDC a été élaborée au Burundi fortement exprimé en rapport aux politiques pour une deuxième période de cinq ans. au niveau central, tandis que les participants 32. Les groupes de discussion ont révélé indiquaient davantage d’interaction avec les le succès du processus de planification représentants de l’administration communale). des PDC qui ont permis une augmentation Un proverbe en kirundi traduit bien cette norme significative de la participation citoyenne culturelle : Nta muntu yitumira mu rubanza (tout à l’identification des besoins prioritaires le monde sait exactement qui est invité et qui des communautés locales. Le processus de ne participe à aucun forum). Un des obstacles développement des PDC exige des réunions majeurs à une plus grande redevabilité sociale communautaires aux niveaux de la colline et de au Burundi n’est donc pas seulement lié aux la commune, et des interventions sectorielles des contraintes institutionnelles mais à l’existence représentants communaux travaillant dans les de normes culturelles limitant les points d’accès domaines de la santé, l’éducation, l’agriculture, pour un engagement plus transformateur de la l’eau, etc. Tous les groupes de discussion ont population dans les affaires citoyennes. Cette confirmé le processus ouvert entrepris pour les consultations publiques des PDC, cependant largement mené par les bailleurs de fonds. 106  Citation du groupe de discussion, commune de Gihanga. Des animateurs externes ont été recrutés pour République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 103 travailler dans les communes aux côtés des tenir. »108 Les PDC sont perçus de façon positive représentants communaux à l’organisation des par les citoyens, ainsi que par les représentants réunions avec les groupes communautaires. de l’administration communale ; il est cependant Dans un des groupes de discussion évident que du fait des ressources limitées, la (Makebuko), les citoyens ont réitéré le fait diffusion du plan est rarement faite. Bien que la que grâce à Gesellschaft für Internationale diffusion des PDC soit utile en termes de partage Zusammenarbeit (l’Agence de coopération de l’information, la principale contrainte liée au internationale allemande – GIZ), ils étaient manque de réalisme du plan lui-même laisse peu régulièrement informés du lieu et de la date de marge de réussite. Pour le moment donc, la des réunions.107 Il semblerait que la mécanique diffusion des plans existants pour améliorer la communication avec les citoyens ne constituerait de l’organisation de réunions participatives pas un bénéfice. (identifier et inclure les membres vulnérables de la communauté, fournir un feedback) 34. De plus, de nombreux citoyens incombait principalement aux acteurs externes ont déclaré avoir reçu des informations engagés dans des projets financés par des spécifiques sur le financement d’une bailleurs. Ce processus a cependant mobilisé priorité du PDC seulement au moment où les des équipes communales de planification qui, représentants de la commune sollicitaient pour la première fois au Burundi, ont préparé des contributions informelles. Les infor- un document de priorités et de planification. mations concernant la réalisation d’un élément L’élaboration de nouveaux PDC a été financée du PDC prend généralement la forme d’une en grande partie par des bailleurs de fonds, demande de contribution volontaire matérielle ce processus étant géré et coordonné par le ou financière. « On apprend la construction Ministère du Développement Communal. d’une nouvelle école ou d’une nouvelle route lorsque quelqu’un de la commune vient chez 33. Le processus d’élaboration des PDC a nous demander une contribution financière et a encouragé la participation à l’identification également besoin de main d’œuvre bénévole ou des priorités devant être transmises au de matériaux comme du sable ou des pierres pour sommet, mais peu ou aucune information la construction. »109 Le processus d’élaboration n’est redescendue vers la base. Les citoyens des PDC manque donc de redevabilité envers ont confirmé leur engagement dans les réunions la base et ne permet aucune émancipation de de planification, mais personne dans les huit la population. La participation mécanique au groupes de discussion organisés avec les départ justifie la caractérisation du processus comme processus participatif mais le document citoyens n’a déclaré avoir vu la version finale final et la sélection réelle des investissements du document de PDC. Il semble n’y avoir aucune financés échappent aux citoyens. restitution du contenu des PDC aux citoyens. Un Administrateur communal a déclaré : « On ne 4.3.3 La préparation et l’exécution du peut informer les citoyens que sur les projets budget d’investissement spécifiques une fois que le financement est identifié. On ne peut pas leur 35. Il n’existe aucun lien pratique transmettre l’intégralité du plan, car ce serait un entre le PDC et le budget communal. Le suicide politique : notre population considérerait la diffusion du plan comme une promesse, promesse que je nous sais incapables de 108  Citation d’un Administrateur communal au cours d’un groupe de discussion avec les responsables de l’administration locale. 109  Citation d’un groupe de discussion, commune de 107  Groupe de discussion, commune de Makebuko. Mutimbuzi. 104 Encadré 4-1. L’évaluation de la performance des communes par le GdB Au Burundi, le Ministère de la Décentralisation et du Développement Communal a instauré une évaluation de la performance des communes sur la base des obligations de transparence et de redevabilité incombant aux autorités communales sous la Loi communale. Le processus d’évaluation de la performance vise à améliorer la qualité de la gouvernance et de la gestion dans chaque commune. Organisée chaque année, cette pratique est basée sur un nombre de critères vérifiables de façon objective et facilement mesurables. Vingt critères sont répartis sur 3 domaines d’évaluation : (i) la gouvernance administrative de la commune (10 critères), (ii) la gestion des ressources budgétaires de la commune (6 critères), et (iii) l’inclusion sociale et le genre (4 critères). Tous ces critères sont mesurés sur un total de 100 points. Ainsi, toutes les communes du Burundi, après évaluation, sont classées selon leur note. Sur la base des résultats de l’évaluation, une allocation financière supplémentaire au-delà des 50 millions par commune est accordée par le Fonds National d’Investissement Communal (FONIC) aux communes jugées performantes, c’est-à-dire ayant une note de 60 sur 100 ou plus110. Source : Gouvernement du Burundi, Manuel d’évaluation des performances, 2010. développement d’un PDC de cinq ans n’est 36. Le budget communal est publié dans lié à aucun exercice de planification toutes les communes depuis 2011, mais soit budgétaire. Les PDC sont essentiellement cette information est inconnue du public, une liste de tous les besoins de la commune, soit la publication n’est pas accessible. Dans organisée selon les priorités. Au Burundi, les toutes les communes visitées, nous avons besoins sont écrasants et engendrent une confirmé par une inspection visuelle que le budget déconnexion entre les PDC et les budgets communal était bien affiché publiquement dans communaux. Celle-ci est aggravée par le le bureau de l’administration communale en vue fait que tous les PDC semblent irréalistes : de l’examen des citoyens, comme le requièrent il est impossible pour une commune de réussir, les indicateurs de performance communaux dans une période de cinq ans, la concrétisation (voir Encadré 4.1). La diffusion de cette du plan. Par exemple, le PDC récent de 2013- information n’est cependant pas comprise, le 2017 de la commune de Rutegama nécessite budget étant rédigé en français et la plupart des 9,5 millions $US pour tous les investissements citoyens n’étant pas capable de lire cette langue. identifiés, c’est-à-dire près de 2 millions $US Le format est également compliqué et couvre par an pour son exécution, alors que le budget de nombreux feuillets de papier comportant annuel de la commune n’est actuellement que lignes budgétaires et montants ; aucun résumé de 182 000 $US. Le PDCD n’est donc absolument simple n’est affiché dans un format aisément pas un document de planification des actions lisible en kirundi et destiné à son examen par de la collectivité mais un cahier de doléance les citoyens. dans l’espoir d’obtenir un minimum de la part du Gouvernement et des PTFs.Même avec un 37. Les informations sur le budget financement externe, soit par le FONIC soit par affichées concernent le budget annuel d’autres bailleurs, le fossé entre le plan et le mais les dépenses réalisées ne sont pas budget annuel demeure abyssal. 111. 110 diffusées publiquement. Les communes du Burundi ne fournissent aucune information au public sur leurs dépenses réelles et leurs rapprochements annuels. Au cours d’une 110  De plus amples détails sur les calculs de répartition des fonds non affectés de FONIC sont disponibles aupres des auteurs sur demande. 111  Données recueillies auprès du comptable communal, commune de Rutegama. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 105 activités du FONIC. Ils connaissent Figure 4-2 : Affichage public du budget communal son existence et le fait qu’il finance la construction des écoles, mais les citoyens ont peu de choses à dire sur le FONIC. Ceci est cependant compensé par les nombreux avis des représentants communaux. Une perception globalement fortement négative est ressortie sur trois sujets : (i) un manque total de pouvoir de décision sur l’utilisation des fonds au niveau local, (ii) des paiements partiels et tardifs (qui engendrent des problèmes dans la mise en œuvre et l’achèvement des projets), et (iii) des matériaux livrés en nature (plutôt qu’en espèces) par Bujumbura plutôt que des achats locaux. Ces trois problèmes participent de l’opinion Source : visite sur le terrain dans la commune de Makebuko entreprise par les auteurs, septembre 2013. des représentants communaux selon laquelle ils ont peu discussion, un participant a déclaré que fournir d’autorité sur l’utilisation des fonds transférés des informations sur les dépenses nécessiterait par le pouvoir central aux collectivités locales. une trop grande transparence de la part des élus Plusieurs Administrateurs communaux sont de la commune.112 Ceci contredit les objectifs préoccupés par le fait de ne pas pouvoir du nouveau processus de décentralisation financer leurs priorités mais de devoir suivre mentionné plus haut. Bien que chaque commune un plan standard de construction des écoles affiche concrètement son budget, pour certaines, primaires (fondamentales). Deux problèmes des feuillets manquent ou sont déchirés par le importants se dégagent de ces opinions. Tout vent ou la pluie, et d’autres sont affichés trop d’abord, il n’y a pas de participation citoyenne hauts sur le mur pour être lus. Il y a donc une aux investissements financés par le FONIC ni de absence de communication réelle du budget aux suivi et de supervision des fonds reçus. Ensuite, aucune place n’est faite aux citoyens ou aux citoyens (voir Figure 4.2). représentants communaux dans le processus 4.3.4 Les transferts effectués par le de prise de décision relatif aux investissements pouvoir central : le cas du FONIC devant être financés par le pouvoir central. Il est attendu que la reforme récente (2014) du 38. Avant les effets de la réforme récente FONIC contribuera à transformer cette image (voir chapitre 2), les représentants de négative. Cette reforme consiste à verser les l’administration locale ont une perception fonds aux comptes des communes et il revient très négative du FONIC, du fait du faible a la commune elle-même de gérer ses propres niveau de décision sur l’utilisation des fonds. fonds. Les citoyens ont une connaissance limitée des 4.3.5 La perception de l’impôt 39. Au Burundi, les impôts ne sont 112  Feedback d’un citoyen au cours du groupe de discussion pas perçus de façon uniforme au niveau dans la commune de Gihanga. 106 communal. Dans chaque commune visitée, l’incapacité d’avoir un revenu stable, et lorsque l’équipe a interrogé les représentants commu- le montant est payé, il équivaut à seulement naux sur la méthode de collecte des impôts, et il 17 $US. La deuxième raison avancée est la en ressort que chacune a développé son propre prévalence du réseau de contacts dans les collines système. Une commune a mentionné l’obligation qui préfèrent le partage des biens au paiement de suivre les directives communales présentées des taxes en espèces. Ce système informel est dans le Guide administratif et financier élaboré profondément enraciné dans les communautés par le Ministère de l’Intérieur, bien que cette locales du pays. Plusieurs groupes de discussion obligation ne soit pas suivie en pratique.113 ont évoqué le système traditionnel de partage La plupart des communes utilisaient jusque de la bière de banane et de brochettes avec le récemment les chefs collinaires élus pour chef de colline comme forme de paiement de superviser la perception des impôts. Les chefs l’impôt. Une femme a déclaré : « Quand le chef de colline travaillaient en équipe avec d’autres de colline, qui est mon voisin, venait collecter les membres du conseil collinaire pour collecter taxes, il me disait toujours à l’avance quand je les taxes, fournissaient une quittance (reçu) devais préparer mon argent. Il me laissait aussi aux citoyens s’étant acquittés de leurs taxes et le payer en nature. Maintenant que la commune déposaient les fonds auprès du comptable de la a recruté des percepteurs que je ne connais pas, commune. Dix % du montant perçu était conservé ils viennent à tout moment me demander un par les percepteurs comme rémunération. Au paiement en espèces. »114 cours de la dernière année, une modification est apparue dans certaines communes, qui recrutent 41. Une profonde méfiance quant à des percepteurs sous contrat ou utilisent les l’utilisation des recettes fiscales dissuade chefs de colline associés à des percepteurs les citoyens de s’acquitter de leurs impôts. sous contrat. Seule une commune sur les huit L’immense majorité des groupes de discussion communes visitées a uniquement recours à des citoyens ont exprimé leur incompréhension percepteurs sous contrat. de la méthode de perception des taxes, de la destination et de l’utilisation des fonds et de 40. Des incitations insuffisantes l’absence de compte rendu sur les fonds perçus. conduisant à des détournements. Tous les Aucune des communes visitées n’affichait groupes de discussion, composés de citoyens et publiquement le montant des recettes fiscales, des représentants communaux, ont mentionné et il existe une forte perception de niveaux un niveau élevé de détournement des recettes élevés de corruption en matière de perception fiscales perçues. Deux raisons principales ont des impôts. été avancées pour expliquer ces fuites : tout d’abord, la rémunération des percepteurs est 42. Du fait de leur profonde méfiance si faible que la tentation de détournement des envers l’utilisation des fonds collectés, fonds l’emporte. Par exemple, dans la commune les citoyens préfèrent participer avec des de Rutegama, un percepteur est payé sur remise contributions non fiscales aux projets de cinq quittanciers. Le paiement du percepteur d’investissement locaux. Traditionnellement, est de dix % (5 000 BIF), pour 50 000 BIF perçus lorsqu’une commune se lance dans un projet par quittancier. Il peut falloir jusqu’à deux mois d’investissement lié au PDC, tous les ménages pour collecter l’équivalent de cinq quittanciers, qui seront bénéficiaires du projet contribuent ce qui signifie que le percepteur est dans en espèces. Dans ce processus, une structure officialisée permet aux représentants des 113  Donnée recueillies dans les quatre communes disponibles sur demande. 114  Citation d’un groupe de discussion, commune de Gisozi. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 107 travailler en partenariat avec Figure 4-3 : Recettes de la commune de Rutegama, réelles et projetées (2010–2013) la commune et expliquer aux citoyens l’intérêt du paiement Recettes Commune Rutegama des taxes et leur utilisation ; et (iv) invitant les OSC locales à des 140000000 réunions de discussion portant 120000000 sur le budget et la collecte de 100000000 l’impôt. L’évolution de la collecte des taxes dans la commune de 80000000 Recettes projetées Rutegama est présentée dans la 60000000 Recettes réelles Figure 4.3. 40000000 44. Une transparence 20000000 accrue peut également aug- 0 Recettes Recettes Recettes Recettes menter le taux de perception 2010 2011 2012 2013 des recettes communales. Au cours des groupes de discussion dans la commune de Rutegama, Source : Agence suisse pour le développement et la coopération, 2014 le représentant d’une OSC locale a été consulté sur le processus bénéficiaires d’être élus pour percevoir les de budgétisation et de perception de l’impôt. fonds et rendre compte de leur utilisation dans L’aspect le plus remarquable de la réussite de le projet. De nombreux citoyens ont déclaré Rutegama peut se résumer par la transparence. que, comme ils pouvaient voir la progression du Depuis 2011, l’administration communale projet et qu’ils connaissaient le montant collecté permet aux OSC locales de suivre la collecte au niveau local, ils étaient davantage disposés à des taxes et d’examiner l’utilisation des fonds y contribuer. dans le budget communal. Les citoyens de Rutemaga ont accès à la même information mais 43. La disposition des citoyens à sont généralement dans l’incapacité de lire les contribuer de façon non fiscale indique un documents en français et de déchiffrer le long point d’accès pour la redevabilité sociale format du budget. L’association locale fait le lien qui permettrait d’accroître la capacité entre les citoyens et l’administration : à chaque des communes à générer des recettes par messe de l’église et réunion communautaire, elle la collecte de taxes. Nous avons analysé de explique aux citoyens le contenu des documents façon plus approfondie deux communes. L’une, (budgets communaux, recettes perçues et la commune de Rutegama, s’est lancée dans méthode utilisée, utilisation des recettes fiscales un processus d’encouragement d’une plus dans la commune, etc.). grande redevabilité sociale dans le but explicite 45. Les désaccords politiques entravent d’augmentation des recettes fiscales. En 2010, les mécanismes de redevabilité sociale au le nouvel Administrateur communal a entrepris sein de la commune. La deuxième commune une réforme locale en (i) révisant le mécanisme étudiée dans le détail n’a pas obtenu les mêmes de perception de l’impôt par le recrutement de résultats. Makebuko a été sélectionnée pour représentants collinaires élus et de percepteurs un examen approfondi du fait d’un différend sous contrat ; (ii) révisant le système de dépôt connu entre les représentants communaux et des fonds sur le compte communal et le mode l’ancien Administrateur, autour d’allégations de supervision de ces fonds ; (iii) recrutant de corruption. L’examen des recettes fiscales une organisation de la société civile (OSC) pour (Figure 4.4) perçues dans la même période de 108 Figure 4-4 : Recettes de la commune de publics et l’Administrateur est juste à côté. Makebuko, réelles et projetées Je n’ai pas envie d’aller en prison demain. » (2010–2013) En termes de mobilisation des recettes, une commune (Rutegama) a démontré une volonté Recette Commune Makebuko d’interaction avec les acteurs de la société civile 70000000 et a concentré ses efforts sur l’augmentation 60000000 des recettes communales, tandis que l’autre 50000000 commune (Makebuko) se trouve minée par Recettes projectées les allégations de corruption et un fort taux de 40000000 Revenues fluctuation des Administrateurs. La Figure 4.5 30000000 Recettes réelles montre les résultats dans le temps, indiquant 20000000 un important « écart de performance » entre 10000000 Makubeko et Rutegama en matière de perception 0 des recettes. Les deux communes sont proches Recettes Recettes Recettes Recettes géographiquement, toutes deux sont gouvernées 2010 2011 2012 2013 par le parti au pouvoir, la commune de Makebuko a une population plus grande, mais aucune Source : Données recueillies sur le terrain par les auteurs, septembre 2013. activité commerciale substantielle dans l’une ou l’autre des communes n’explique l’écart en termes de recettes. 2010 – 2013 indique que Makebuko a moins bien progressé. Bien que les recettes soient 47. L’Administrateur communal de Rutega- généralement en augmentation (à l’exception ma a reconnu qu’ils étaient en train de lancer de 2012), il existe un écart conséquent entre les un processus de réforme en recrutant de recettes projetées et les recettes réalisées. nouveaux percepteurs, en créant un nouveau système de paiement et en révisant le mécanisme 46. Les groupes de discussion étaient de suivi de la perception des recettes. Les variables d’une commune à l’autre, certains données recueillies auprès de la commune plus tendus que d’autres. Un citoyen a de Rutegama confirment une perception des quitté la séance de discussion en déclarant : « recettes progressive, mais en constante Vous m’interrogez sur l’utilisation des fonds augmentation. Ce constat est cohérent avec des expériences similaires dans Figure 4-5 : Comparaison des efforts de perception des d’autres contextes fragiles où les recettes entre Makubeko et Rutegama (2010–2013) initiatives de réforme innovantes pour impliquer les citoyens dans 140000000 le processus de prise de décision 120000000 agissent comme un moteur 100000000 essentiel de l’amélioration de la Collecte de recettes 80000000 perception des recettes. Dans la 60000000 région du Sud-Kivu de la Répu- blique démocratique du Congo 40000000 (RDC), par exemple, l’instauration 20000000 de la budgétisation participative 0 2010 2011 2012 2013 (BP) grâce aux mécanismes de Makebuko 27769145 35942700 41219100 56493790 la technologie de l’information Rutegama 44592956 67286760 95459688 117538216 et de la communication (TIC), essentiellement la téléphonie Source : Données recueillies sur le terrain par les auteurs, septembre 2013. mobile, a été fondamentale dans République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 109 Encadré 4-2. La budgétisation participative (BP) dans le Sud-Kivu, RDC : soutenir la décentralisation et donner le pouvoir aux citoyens de participer au processus de budgétisation grâce aux TICB En République démocratique du Congo, le premier cycle de l’initiative de budgétisation participative (BP) a été mis en place en 2011 dans la province du Sud-Kivu (population : 4 millions), qui cible huit entités infra-provinciales décentralisées dont la capitale (population : 250 000). Le projet a permis de traiter un blocage majeur dans le programme récent de décentralisation du pays, réforme hautement prioritaire inscrite dans la constitution de la RDC, blocage lié au dysfonctionnement en termes de transferts de fonds entre les différentes entités territoriales ; le projet a également aidé à promouvoir la bonne gouvernance, action prioritaire de la Stratégie d’aide-pays (SAP) 2008-2011 de la RDC, grâce à une décentralisation (plus grande proximité des représentants communaux et des citoyens) et une gouvernance locale efficace. Au moyen des diagnostics et études de l’Institut de la Banque mondiale (WBI) de 2010, une série d’obstacles qui nécessitaient d’être levés ont été identifiés et ont permis d’améliorer la gouvernance et la prestation de services au niveau local. Il s’agissait, par exemple, d’une asymétrie entre les parties prenantes et le faible niveau de compréhension des procédures budgétaires et d’interaction avec la société civile. Ces diagnostics ont indiqué que la BP en tant que mécanisme de redevabilité sociale pouvait agir comme un point d’accès prometteur sur la voie d’une réforme élargie de la gouvernance dans le pays. La province du Sud-Kivu a été sélectionnée comme la province la plus prometteuse, les communautés ayant montré un intérêt à participer au processus de BP. Les constats du diagnostic ont également montré l’effet de levier potentiel de l’utilisation des TIC en termes d’amélioration du processus par la concertation, la distribution de l’information, la surveillance et le suivi. Le projet a mobilisé pour la réforme une coalition de membres de la société civile et du secteur privé, ainsi que des experts en TIC, et les gouvernements provincial et locaux ont collaboré à l’utilisation des TIC pour impliquer les citoyens dans les budgets locaux. Le taux de pénétration du téléphone mobile étant relativement élevé dans le pays (estimé à 47 % en 2013, avec seulement 55 % de la population résidant dans des zones couvertes par les réseaux de téléphonie mobile, y compris dans les zones les plus rurales de la province de l’Est du Sud-Kivu), les conditions requises pour une application réussie de la composante TIC étaient réunies. L’utilisation des téléphones mobiles pourrait dont contribuer à la création d’un processus participatif plus inclusif (femmes, minorités) et transparent de prise de décision sur les allocations budgétaires et de suivi des dépenses publiques. Les téléphones mobiles ont été intégrés dans le processus suivant différents modes : (i) les citoyens résidant dans une zone donnée étaient informés par SMS de la réunion suivante, (ii) à l’essai, des citoyens ont pu voter par SMS les travaux publics qu’ils jugeaient important de mener, (iii) les citoyens éteint informés des résultats du vote par SMS, et (iv) les citoyens pouvaient commenter par SMS la qualité des projets en cours d’exécution ou ceux qui avaient été mis en œuvre. Pour la première fois, le processus de BP a permis aux citoyens de déterminer comment les fonds publics devaient être dépensés tout en établissant leurs priorités. Autre « première », la décision par le gouvernement provincial de transférer les fonds aux gouvernements locaux. Bien qu’exigé par la loi, ceci avait été ignoré par le passé. Conséquence du processus, le Ministère du Budget a également institutionnalisé le processus de BP dans le Sud-Kivu, mandatant tous les gouvernements locaux de suivre ces principes lors de la préparation de leur budget. La qualité du processus de préparation du budget a également connu une amélioration. Plutôt que de se terminer en liste de souhaits, les budgets sont à présent formulés de façon plus réaliste, les dépenses mieux alignées avec les recettes. Avec l’augmentation des transferts de fonds du niveau provincial vers l’échelon local, les gouvernements locaux ont commencé à allouer une partie de leur budget aux investissements, plutôt que de les consacrer uniquement au paiement des salaires et à l’achat de fourniture. Certaines communautés sont passées d’un budget d’investissement nul à des investissements représentant 40 % de leur allocation budgétaire. Avec davantage de 110 ressources budgétaires disponibles, elles ont accru les ressources pour les services destinés aux populations indigentes. À Luhindja, le processus a permis la réparation de 54 classes et d’un pont, à Bagira, l’établissement d’un centre de santé et la réparation des canalisations d’eaux usées et à Ibanda, des fontaines et des latrines sont en cours de construction. Un des résultats les plus encourageants lié au projet est une augmentation substantielle des recettes au niveau local. Un plus grand nombre de citoyens semblent disposés à s’acquitter de leurs impôts, puisqu’ils associent l’amélioration en termes de prestation de services aux dépenses publiques. Les faits montrent que depuis le début du processus, les recettes fiscales ont augmenté jusqu’à 20 fois. Autre réalisation importante du projet, une forte appropriation par le pays s’est produite, conduisant à l’institutionnalisation du processus de BP. Suite à un décret gouvernemental, une loi a été adoptée par le Parlement provincial en 2012 pour institutionnaliser la pratique dans la province. Le processus de BP est désormais appuyé localement dans le Sud-Kivu par les acteurs locaux, forts de s’être appropriés ce système et d’avoir élargi, de leur propre initiative, les cycles suivants à l’ensemble de la province. D’autres provinces du pays suivent et se lancent dans la réplication et l’adoption du processus de BP. Source : Banque mondiale / WBI, 2012. l’augmentation significative des recettes fiscales, mécanisme de financement décentralisé, allant jusqu’à les multiplier par 20 en 2012 transparent et participatif qui émanciperait (Encadré 4.2). les communautés et gouvernements locaux afin de garantir une prestation de services 4.3.6 Le suivi de la mise en œuvre améliorée et plus équitable à l’échelon du projet : étude de cas à partir des local. Le projet comprenait deux composantes communes de Makebuko et Rutegama — majeures : (i) le renforcement des capacités des l’expérience des opérations de DCC de la deux représentants du gouvernement central Banque mondiale au Burundi au niveau communal, ainsi que la formation des 48. Le Projet d’appui au développement responsables de la décentralisation au sein du communautaire et social (PRADECS), financé Gouvernement central ; et (ii) le financement par la Banque mondiale a été conçu suite au de sous-projets axés sur la demande au sein des conflit civil et en pleine transition politique communes les plus rurales du pays. L’essentiel majeure au Burundi. Le processus de du financement, 30 millions $US a été utilisé décentralisation initié par le Gouvernement en pour la réalisation de 1 067 de ces sous-projets. 2005 visait à émanciper les communautés afin 50. Le PRADECS s’est achevé en décembre d’améliorer la gouvernance locale et la cohésion 2012, la Banque et le Gouvernement ayant sociale, ainsi que l’accès aux infrastructures convenu ensemble que le projet avait été socioéconomiques. Le projet de 40 millions $US sur cinq ans a été conçu comme un projet de exécuté avec succès. La Banque a pu re- Développement conduit par les communautés connaître que le PRADECS avait bénéficié (DCC) avec une double approche : soutenir la de l’appropriation et du leadership du nouvelle stratégie nationale de décentralisation Gouvernement. De plus, grâce au PRADECS, et garantir un accès amélioré et plus équitable les administrations communales ont pu, aux infrastructures socioéconomiques et aux pour la première fois, assumer la redevabilité services dans les zones rurales où vit 90 % de la directe des fonds destinés aux sous-projets. population burundaise. Cette redevabilité comprenait l’élaboration des premiers PDC, l’identification de sous- 49. L’objectif global du projet était projets prioritaires au cours de réunions d’instaurer et de mettre en œuvre un communautaires participatives, la gestion République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 111 du processus de passation des marchés, le FONIC existent, mais selon les administrations suivi des sous-projets et enfin, la garantie de locales, ces transferts doivent être faits selon l’entretien des infrastructures communautaires des mécanismes participatifs et transparents. nouvellement bâties. Malgré la bonne Le PRADECS ayant été évalué favorablement, performance du Gouvernement sur le PRADECS, les principales recherches de ce chapitre un inconvénient majeur s’est révélé : l’absence comprennent l’examen de quatre sous-projets de mécanisme opérationnel pour les transferts du PRADECS, dans le but d’illustrer le rôle de de fonds du niveau central vers les communes. la participation et du suivi par les citoyens. Des transferts de fonds limités à partir du L’Encadré 4.3 résume cette analyse. Encadré 4-3. Équilibrer les besoins à court terme avec des objectifs à long terme: résultats sur le développement (DCC) les projets axés sur la communauté du rapport de l’IEG 2013 sur Les projets de Développement conduit par la communauté (DCC) soutenus par la Banque mondiale ont changé au fil du temps : initialement destinés à fournir un filet de sécurité, ils ont évolué vers de multiples objectifs pertinents dans un contexte d’État fragile. Les projets de DCC sont initialement apparus sous la forme de fonds sociaux au cours des années 1990, agissant comme des filets de sécurité pour compenser les impacts négatifs des prêts d’ajustement structurel. Lorsque le développement social, l’agriculture et le développement rural, l’eau et les secteurs urbains ont adopté les modalités de DCC, leur ampleur s’en est trouvée considérablement étendue. Dans les FCS, ils ont eu trois objectifs différents, impliquant plusieurs formes et degrés d’action collective, avec un accent différent selon les projets : fourniture de biens et services publics aux communautés locales, construction d’institutions locales et amélioration de la redevabilité envers les citoyens. Dans les FCS, lorsqu’ils sont bien exécutés, ces projets se sont avéré des véhicules efficaces pour étendre les capacités de l’État et lui rendre une légitimité. Plusieurs Directeur pays ont expliqué que les projets de DCC étaient des projets à décaissement rapide essentiels au maintien d’un bon taux de décaissement et, pour cette raison, ont été réticents à autoriser une évolution de leur concept au fil du temps. Les projets de DCC ont progressé en nombre et en volume engagés, beaucoup plus vite dans les FCS que dans les pays appuyés par l’IDA qui ne sont pas des FCS. Dans plusieurs États affectés par les conflits, ces projets ont fourni les principaux moyens d’interaction des communesavec certaines communautés isolées. Ils ont servi à établir leur présence et, outre leur contribution à l’économie locale à court terme, ils ont favorisé la légitimité de l’État. Ces projets recouvrent une gamme considérable de projets axés sur la demande dans de nombreux secteurs. La plupart d’entre eux financent des sous-projets d’infrastructures locales ou de services, bien que certains, comme le Fonds d’action contre la pauvreté du Népal (FAP) associent le financement de sous-projets et le microcrédit destiné aux communautés locales. Ils ont en commun trois aspects : ils sont généralement axés sur la demande ; ils impliquent une organisation communautaire et la participation de la communauté, et sont administrés par une entité spéciale établie par le Gouvernement en dehors des structures des ministères de tutelle. L’Afghanistan, le Népal et la République du Yémen ont des programmes de DCC bien établis à grande échelle qui fonctionnent efficacement depuis plus d’une décennie et qui bénéficient à des communautés rurales isolées. Haïti s’est également appuyé sur le DCC pour fournir des services aux habitants des bidonvilles en zone urbaine. Un aspect remarquable est leur proximité avec les femmes et leur capacité d’implication de ces dernières dans la prise de décision, comme le montrent les évaluations d’impact dans ces trois pays. Mais le recours au financement de projet demeure le talon d’Achille des programmes de DCC et, sans une évolution institutionnelle, les deuxième et troisième objectifs de construction d’institutions locales durables et de promotion de la redevabilité sociale envers les citoyens pourraient ne pas être atteints. 112 Malgré une utilisation généralisée, les projets de DCC demeurent sujets à controverse. Un des aspects discutables est de savoir si les projets de DCC constituent une entrave aux communesen créant des structures parallèles. L’autre problème potentiel est la mesure dans laquelle ces projets se transforment en monopole des élites. Un rapport récent d’étude politique conclut : « Il n’y a que lorsque les projets relient explicitement les organisations communautaires aux marchés ou dispensent des formations en compétences qu’ils tendent à améliorer la cohésion du groupe et l’action collective au-delà de la vie du projet » (Mansuri et Rao 2012). Le rapport conclut que les programmes de participation communautaire sont les plus efficaces lorsqu’ils sont systématiquement liés aux institutions publiques : « Les programmes les plus réussis sont ceux qui sont mis en œuvre par les gouvernements locaux, relativement discrets et responsables envers les citoyens… La participation locale semble augmenter plutôt que diminuer, le besoin d’institutions opérationnelles et fortes, au centre. » Enfin, selon Mansuri et Rao, la participation locale ne fonctionne pas lorsqu’elle est une simple création ad hoc d’un projet. Les programmes de DCC impliquent la construction d’institutions à deux niveaux, au niveau communautaire et au niveau du programme. Les études de cas de FCS montrent qu’il est relativement aisé de former des organisations communautaires informelles ad hoc lorsqu’elles sont la voie choisie pour recevoir les dons de développement. Elles sont durables suivant la durabilité du programme et la continuité du flux des bénéfices. Comme dans le cas de la microfinance, la structure de soutien au niveau du programme doit être durable pour que perdure l’implication de la communauté. Le programme peut aussi être lié à des structures communaux avec des transferts de fonds réguliers à partir du budget annuel, comme dans le cas du Bangladesh et de l’Indonésie. Un tel lien entre les programmes de DCC et les structures communaux décentralisées n’a pas été établi dans aucun des FCS. Au contraire, ceux-ci semblent constituer une concurrence, en termes de pouvoir, à la gouvernance locale. Aucune structure institutionnelle alternative n’a été établie non plus pour ces programmes dans les FCS, bien que des organisations de tutelle viables, de micro-financement en Afghanistan et au Bangladesh et le FAP au Pakistan, ont été établies dans des situations fragiles. En conséquence, les programmes de DCC ne se sont pas associés aux communesni n’ont créé de système alternatif pour garantir la durabilité institutionnelle ; ils demeurent donc entièrement dépendants des bailleurs de fonds. Le Programme de solidarité nationale en Afghanistan est le plus grand programme de DCC des FCS. Il a très bien réussi à soutenir les projets de DCC dans tout le pays, financer les sous-projets locaux, favoriser la gouvernance locale, émanciper les femmes, et, à son tour, améliorer la légitimité de l’État afghan. Son modèle de financement n’est toutefois pas pérenne et dépend de larges injections de fonds par les bailleurs pour des dons non renouvelables aux communautés locales. Pour l’exercice fiscal 2014, plus d’une décennie après sa création, le programme entreprend un ensemble d’études afin de développer un modèle plus durable, mais avec la transition de 2014 qui se profile, il reste très peu de temps pour tester et institutionnaliser un modèle alternatif. Les programmes devraient commencer à planifier leur durabilité institutionnelle beaucoup plus tôt. L’expérience du programme de DCC de l’Afghanistan est semblable à celui de nombreux autres FCS. Ces programmes jouent un rôle important pour répondre à la fragilité par des mesures intérimaires à court terme de soutien aux communautés locales au moment de leur conception. Mais leur succès en tant que filet de sécurité devient un handicap pour leur évolution et leur pérennisation institutionnelle. Il serait utile de s’appuyer sur ce type de projets pour aider, à terme, leur adaptation et institutionnalisation au sein des systèmes et budgets du pays. La Banque n’a pas institué de mécanismes alternatifs pour garantir leur viabilité au-delà de la vie des projets qui les soutiennent. En conséquence, les projets de DCC ne sont pas jugés durables. Source : Rapport de l’IEG, Banque mondiale, 2013. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 113 51. L’équipe chargée de cette étude et la sélection de sous-projets financés au a mené des groupes de discussion dans moyen du PRADECS ont été monopolisées huit communes du Burundi. Deux de ces par les élites, se prolongeant dans la mise communes, Rutegama et Makebuko, ont été en œuvre du projet pour sous-traiter le sélectionnées pour faire l’objet d’un suivi contrôle de l’exécution et ne laisser qu’un approfondi afin d’évaluer qualitativement le rôle rôle limité aux citoyens de suivi des travaux. de la participation citoyenne dans la sélection et Les quatre sous-projets, d’après les réponses la mise en œuvre des sous-projets du PRADECS. des citoyens, ont été sélectionnés par un petit Dans chacune des communes, deux sous-projets groupe de représentants communaux. Pour ont été examinés. Cette analyse repose donc sur chacun des quatre projets, l’Administrateur l’examen de : communal était le principal coordinateur de la sélection des sous-projets. En effet, le PRADECS 1. Commune de Rutegama, la construction a été instauré dans une collaboration principale d’une nouvelle école primaire avec les Administrateurs, au moyen de réunions participatives entre les représentants et les 2. Commune de Rutegama, la construction membres de la communauté afin d’ouvrir le d’un collège communal dialogue et les redevabilités dans le processus 3. Commune de Makebuko, les marchés publics de prise de décision. Un des quatre sous-projets, pour meubler plusieurs écoles l’acquisition de mobilier scolaire pour Makebuko a suscité des réactions contrastées des citoyens. 4. Commune de Makebuko, la construction Les trois autres sous-projets ont été qualifiés d’un nouveau centre de santé de façon similaire : ils comprenaient peu d’élément participatif dans la prise de décision, 52. L’objectif de cette analyse était de mais ont été reçu de façon positive par leur relier concrètement les questions posées au contribution à l’accès aux services sociaux au cours des groupes de discussion à des projets sein de la commune. Toutefois, l’acquisition du réalisés dans des communautés locales. Ceci mobilier scolaire a été perçue de façon négative, fournit une illustration permettant une analyse essentiellement contrôlée par l’Administrateur, approfondie des constats clés de ce chapitre. tous les aspects du marché ayant été dissimulés, Les principales questions posées aux citoyens même des autres représentants travaillant au impliqués d’une façon ou d’une autre dans sein de la commune. le sous-projet étaient les suivantes : (i) qui a identifié le sous-projet ? (ii) comment avez-vous 54. Comme pour les réponses au cours été informé(e) du sous-projet ? (iii) quelle a été des groupes de discussion, la participation votre contribution au sous-projet ? (iv) avez- des citoyens aux sous-projets ne s’est faite vous été impliqué(e) ou informé du processus de que dans la réception de l’information en passation des marchés ? (v) en tant que citoyen, provenance du sommet et dans les demandes quel a été votre rôle dans le suivi du sous- de contribution sous forme d’argent, de main projet ? et (vi) comment a été organisé l’entretien d’œuvre ou de matériaux. La construction de du sous-projet ? La matrice détaillée résumant l’école primaire à Rutegama fournit un exemple les réponses à chacune de ces questions par utile. Les citoyens interrogés ont déclaré projet est disponible, mais l’on peut d’ores et qu’ils avaient, ainsi que la majeure partie des déjà dire qu’une tendance s’est globalement membres de la communauté, été informés du dégagée des quatre projets parallèlement au financement de l’école par les chefs collinaires. feedback issu des groupes de discussion. Les Cette information leur était parvenue lors de constats sont les suivants : l’annonce avisant du projet, avec une demande de contribution financière pour chaque ménage 53. Dans certains cas, l’identification (pour parvenir aux 3 % de contribution requis 114 pour tous les projets du PRADECS) et d’aide chantier. Le comité a donc réagi en effectuant un aux travaux de terrassement et de livraison suivi plus étroit de l’exécution du sous-projet. de remblai sur le chantier. La communication relative au mobilier scolaire du sous-projet de 56. Les entretiens qualitatifs avec les Makebuko est encore plus déficiente (en matière citoyens pour discuter concrètement de de processus participatif), car les bénéficiaires sous-projets plus spécifiques ont révélé leur et les responsables de l’école n’ont été informés opinion : exiger davantage de redevabilité du projet qu’au moment de la livraison de la part des représentants communaux des meubles. Les deux citoyens interrogés apparaîtrait comme une attitude « rebelle » supposent, ainsi que d’autres représentants aux yeux de ces derniers. Pour conserver ce communaux, que le fournisseur a payé 1 % de que les citoyens ont appelé la « paix sociale », contribution communale et 3 % de contribution l’idée était de ne pas trop remettre en question communautaire pour obtenir le marché ; le les actions des responsables locaux. Plus service de comptabilité communal n’a donc concrètement, au cours des entretiens, il est jamais été impliqué dans une quelconque phase apparu que pour les quatre sous-projets, les de ce sous-projet.115 représentants communaux n’avaient pas fait de gros efforts pour inclure les citoyens ; toutefois, 55. Bien que le processus de passation les projets ayant finalement servi à améliorer les des marchés et le suivi de l’exécution des services, ils étaient relativement bien acceptés sous-projets fût essentiellement géré par et le faible niveau de redevabilité sociale restait les individus qui les avaient sélectionnés, inchangé. Le sous-projet de Makebuko (relatif à aux côtés de l’ingénieur communal et de la fourniture de mobilier scolaire) a, quant à lui, l’entreprise retenue, les comités locaux de suscité de la colère et des avis très prononcés. Les gestion n’ont pu participer que de façon citoyens l’ont qualifié de fictif, l’Administrateur limitée. Le processus de décision relatif à la ayant contrôlé l’intégralité du processus pour sélection de l’entreprise n’a pas été communiqué livrer des meubles qui ont fini cassés ou abîmés aux citoyens pour les quatre sous-projets ; au bout de quelques mois. cependant, particulièrement dans la commune 57. En conclusion, les avis issus de ces de Rutegama, les comités de gestion mis en entretiens, associés aux réactions exprimées place ont pu modestement influencer le suivi et lors des groupes de discussion, dressent le l’exécution du sous-projet. Ces comités de gestion tableau d’un niveau de redevabilité sociale comprenaient de nombreux responsables de faible au Burundi, aucune exigence d’une plus l’administration communale, mais également grande redevabilité dans les zones rurales, et des des chefs collinaires, ainsi que des représentants tentatives limitées de la part des représentants des comités communaux de développement, communaux pour favoriser des relations plus ces derniers étant plus représentatifs de la solides avec les citoyens au moyen d’outils de communauté locale. Les comités de gestion ont responsabilisation sociale. Si l’on s’en réfère à tous été formés par l’Administrateur communal, nouveau au cadre macro utilisé pour cette analyse, mais à Rutegama, ils étaient plus largement l’élément constitutif de redevabilité sociale qui représentatifs. Au cours de la construction du apparaît comme le plus faible est l’élément relatif collège communal, le comité a découvert que à l’action des citoyens. Culturellement, l’opinion les ouvriers volaient des sacs de ciment sur le mentionnée ci-dessus selon laquelle les citoyens font preuve d’une sorte d’acceptation du statu quo afin de préserver la « paix sociale » avec 115  Un responsable communal de Makebuko a déclaré durant un les élites locales sera difficile à dépasser. Bien entretien que plus de 60 % des meubles étaient cassés ou abîmés quelques mois après la livraison, et qu’il était évident, même à la que le pays entre dans une période fiévreuse livraison, que le mobilier était de mauvaise qualité. avec la préparation des élections nationales République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 115 de 2015, l’élément constitutif relatif à l’action maximum ; (iii) traduire le budget en kirundi et le de l’État permet des ouvertures plus tangibles diffuser dans les collines pour qu’il soit lu à voix et immédiates pour favoriser la redevabilité haute au cours des réunions de développement sociale, particulièrement autour du souhait local ; (iv) afficher, au minimum chaque mois, les exprimé par les représentants des communes recettes fiscales perçues par la commune ; et (v) d’accroître les recettes fiscales afin de gagner afficher dans un format simplifié en kirundi, au en autonomie par rapport au pouvoir central. La début de l’exercice fiscal, les dépenses réalisées partie suivante présente nos recommandations du budget de l’année précédente. spécifiques pour l’avenir. 4.4.2 Augmenter les efforts d’information 4.4 Recommandations à la fois parmi les citoyens et les responsables élus 58. Les recommandations pour une plus grande redevabilité sociale au Burundi 60. Les faits suggèrent que l’information sont orientées vers une action de l’État seule suffit rarement à améliorer les émergeant des interactions entre celui-ci résultats en matière de redevabilité sociale et la société politique, ainsi que vers le rôle (O’Meally, 2013). En se concentrant sur une de l’information. Créer la demande citoyenne approche multiple de réforme de la redevabilité, est un élément essentiel pour favoriser la il sera essentiel de compléter toute stratégie redevabilité sociale, mais au sein du contexte d’information / communication par de solides burundais, il semble que cela ne pourra être efforts de sensibilisation pour soutenir les entrepris qu’en encourageant la réactivité de citoyens dans un engagement continu et durable l’État en matière de développement. L’argument auprès des autorités locales. Par ailleurs, le présenté ci-dessus est que l’obstacle majeur soutien apporté à la sensibilisation des élus demeure l’absence de demande de la part locaux est tout aussi important. Au cours des des citoyens (manque d’action collective et entretiens avec ces derniers, les conseillers d’engagement parmi les citoyens), ce qui signale communaux ont justifié leur manque de qu’un point d’accès plus pertinent pour le pays se transparence par le fait qu’ils étaient élus par la trouve dans le domaine de la société politique. population. Chaque décision étant prise au nom de la population, nullement besoin de rendre 4.4.1 Soutenir une stratégie de davantage de compte à cette dernière (données communication globale communales recueillies à Makebuko, p. 24).116 59. L’information est le seul grand point 61. Compte tenu du rôle actuel des d’accès pour favoriser une plus grande OSC au niveau communal dans la diffusion redevabilité sociale au Burundi. Tous les de l’information, il est spécifiquement groupes de discussion composés de citoyens recommandé de soutenir les OSC pour (i) ont mentionné le manque d’information sur les accroître la participation citoyenne par des affaires communales. La situation dépeinte est stratégies de sensibilisation plus proactives, (ii) la suivante : soit l’information est affichée, mais soutenir activement les citoyens en contribuant elle n’est pas bien communiquée ou comprise, aux activités et projets communaux, exiger soit elle est complètement absente et les activement la redevabilité des communespar affaires communales se font dans le secret. Nos leur contribution, et (iii) soutenir activement recommandations spécifiques sont les suivantes : les citoyens dans la transformation des relations (i) augmenter l’information des citoyens au politiques traditionnelles. niveau local concernant les réunions, les lieux et le droit de participation ; (ii) simplifier le format du budget communal pour y inclure les soldes 116  Les données complètes recueillies pour la commune de d’ouverture et de clôture d’exercice sur une page Makebuko sont disponibles sur demande. 116 4.4.3 Soutenir les acteurs de la société la société civile doit soulever les problèmes civile en tant qu’élément articulant les qui apparaissent et encourager les citoyens citoyens de la collectivité locale et les à se renseigner sur le rôle des représentants représentants communaux communaux et leurs propres redevabilités de citoyens, (iv) les OSC doivent encourager les 62. Un plus grand engagement auprès citoyens à participer pleinement aux réunions des acteurs de la société civile à l’échelon locales (particulièrement celles portant sur la local peut potentiellement constituer un « redevabilité » qui se tiennent deux fois par an liant entre citoyens et responsables de dans chaque commune), et (v) les OSC doivent l’administration, et favoriser une culture de défendre les intérêts des groupes vulnérables au redevabilité sociale accrue. Au Burundi, le sein de la société et porter leurs préoccupations manque de redevabilité du côté de la demande auprès des responsables de l’administration au niveau local est marquant. La capitale et locale. les grandes villes possèdent une société civile active mais la majorité des communautés 63. Les recommandations ci-dessus rurales manquent d’acteurs de la société civile reposent largement sur les administra- focalisés sur les questions de gouvernance et de tions locales qui doivent se préparer à se redevabilité. Les OSC locales des communautés réformer et à répondre de leurs actions rurales, largement axées sur les objectifs de devant les citoyens. Les réactions apparues au développement, sont de nature technique. cours des groupes de discussion indiquent que Si l’on reconnaît le rôle joué par GIZ dans le la plupart des responsables communaux sont processus de PDC, par la diffusion régulière prêts, tout particulièrement en ce qui concerne d’information sur les réunions et leur lieu la nécessité de se monter plus respectueux des d’organisation, et par l’identification des citoyens pour une meilleure perception des mécanismes pour inclure les membres recettes. Les communes visitées dans lesquelles vulnérables de la communauté, un point d’accès les commentaires des citoyens ont été les plus semble émerger pour permettre aux admi- positifs quant à la performance des communes nistrations communales d’interagir avec les OSC (notamment Rutegama et Gisozi, par exemple) en vue de sensibiliser les citoyens aux affaires avaient déjà lancé quelques petites réformes. publiques. L’utilisation des OSC locales servira Ces communes sollicitent un soutien pour de mécanisme intermédiaire pour favoriser normaliser les méthodes et leur apporter des un contrat social plus positif au Burundi. Si on conseils relatifs aux outils spécifiques qui s’en réfère à nouveau au cadre conceptuel, pour pourraient correspondre à leur besoin. Mais renforcer l’élément constitutif d’« information », les communes qui manquent de leadership le citoyen burundais moyen nécessite une aide (changement récent d’Administrateur commu- pour comprendre des informations qui n’ont nal, davantage de plaintes des citoyens sur le pas été largement discutées en public à ce taux de corruption élevé au cours des groupes de jour, telles que les données relatives au budget discussion) auront plus de difficultés à accepter communal, aux recettes fiscales perçues et à leur les réformes qui nécessitent une plus grande utilisation. Nos recommandations spécifiques transparence et un dialogue ouvert avec les sont les suivantes : (i) les communes doivent OSC et les citoyens. Sur la base des recherches développer un partenariat avec les OSC locales initiales entreprises pour ce chapitre, les particulièrement autour des recommandations communes du Burundi ont déjà commencé citées ci-dessus (ce qui nécessite une formation à se révéler appartenir à deux voies différentes : et une sensibilisation des deux côtés quant aux celles qui œuvrent à la participation des citoyens questions qui doivent concentrer l’action), (ii) et à une meilleure redevabilité sociale, et celles les OSC doivent superviser la planification du qui luttent contre les problèmes de gouvernance budget communal et la collecte de l’impôt, (iii) au sein de leur administration. Ces dernières République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 117 devront se diriger vers la première voie. opportunités de concertation avec le citoyen au sein du contexte et du processus actuels. 4.4.4 Harmoniser la collecte de l’impôt Par exemple, la Loi communale stipule que : « entre les communes Le conseil communal organise au moins deux 64. Une méthode transparente et fois par an des rencontres ouvertes aux conseils harmonisée de collecte de l’impôt devrait de collines [et….], pour les informer de manière être adoptée par toutes les communes. transparente sur la situation politique, sociale Au cours des groupes de discussion, tous les et économique prévalant dans la commune et groupes ont mentionné un énorme problème ses perspectives » (GdB Manuel d’évaluation de relatif à l’évolution de la tradition locale de la Performance des communes). paiements des taxes en « nature » plutôt qu’en espèces. Les groupes de discussion composés 66. Bien que les entretiens avec les de représentants communaux ont montré que communesrévèlent qu’ils sont informés les communes étaient prêtes à s’engager dans des réunions du conseil communal et de des réformes et à travailler avec les citoyens à ses activités, les groupes de discussion l’augmentation des recettes. L’exemple de la composés de citoyens montrent le contraire. commune de Rutegama offre une démonstration Selon certains citoyens : « Les chefs de colline concrète de la possibilité d’user d’une stratégie sont invités mais les membres des conseils de de redevabilité sociale pour augmenter, dans un premier temps, la confiance des citoyens dans colline, rarement. » ; d’autres pensent que les leur relation aux communes, et parvenir ensuite, dates des réunions du conseil communal ne sont en conséquence, à une augmentation des recettes ni publiées ni annoncées ; et certains ne sont fiscales disponibles pour les investissements pas sûrs d’avoir le droit d’assister aux réunions communaux. Nous faisons les recommandations du conseil communal. Dans les faits, l’approche suivantes : (i) en lien avec la catégorie ci-dessus, d’une interaction verticale partant de la base lancer une campagne d’information ciblant les dans le processus de décentralisation n’est pas citoyens et les acteurs de la société civile locale réelle et la redevabilité continue de se faire sur l’intérêt de s’acquitter des taxes, et surtout envers le pouvoir central. sur l’utilisation de ces recettes fiscales ; (ii) tel que mentionné ci-dessus, afficher chaque mois 67. Conscient du fait que le processus de les recettes fiscales perçues par la commune ; décentralisation du Burundi vise à éman- et (iii) abandonner l’emploi des élus locaux, tels ciper et engager les citoyens, par ses que les chefs de colline, comme percepteurs de différents textes et procédures, et que ce l’impôt en recrutant et formant des percepteurs cadre est connu par les autorités locales, sous contrat. Il sera nécessaire de déterminer il importe d’assurer sa mise en pratique sur une échelle de salaire raisonnable afin de lutter le terrain. Il est donc recommandé aux contre les détournements de fonds. partenaires du pays : (i) d’être pleinement conscients des différentes opportunités 4.4.5 Soutenir la concertation et la offertes de concertation avec le citoyen au participation des citoyens dans le cadre sein du contexte actuel, et (ii) de soutenir les actuel de la décentralisation responsables des entités locales y compris les 65. Un examen minutieux du cadre citoyens élus locaux, afin que soient respectées actuel de la décentralisation, de ses règles les règles et les procédures de décentralisation et procédures, montre qu’il existe des en place. 118 Références Ali, D.; Deininger, K.; and Goldstein, M. 2011. Environmental and Gender Impacts of Land Tenure Regularization in Africa: Pilot Evidence from Rwanda. Policy Research Working Paper 5765 World Bank, Washington, DC. Association Burundaise des Elus Locaux (ABELO). 2009. L’État actuel de la Décentralisation et la Situ- ation des Communes au Burundi. Etude de Base. Octobre (ABELO 2009) Baltissen, G, Sentamba, E. 2010. Programme et Plan d’action opérationnel de renforcement des ca- pacités des acteurs en charge de la mise en oeuvre de la politique de la décentralisation et du développement communautaire (PRADECS). Banerjee, A.; and Lakshmi, I. 2005. “History, Institutions, and Economic Performance: The Legacy of Colonial Land Tenure Systems in India.” American Economic Review. Berry, S. 2009. “Property, Authority and Citizenship: Land Claims, Politics and the Dynamics of Social Division in West Africa.” Development and Change 40 (1): 23-45. Bezabih. M. and Holden, S. 2010. “The Role of Land Certification in Reducing Gender Gaps in Pro- ductivity in Rural Ethiopia: Environment for Development. EFD Discussion Paper, RFF Press, Washington, DC. November. Bigirimana, G. 2012. Étude sur la situation des conflits fonciers au Burundi. RCN Justice & Démocratie. Septembre Bigirimana, G.; Thinon, P.; Sindayigaya, S. and Seberege, P-C. 2014. PRODEMA: Revue du Secteur Fon- cier au Burundi. (PRODEMA Report). Unpublished draft. January Boeckmann, S. 2012. Social Accountability in Fragile States: A synthesis of Findings from the Available Literature. Social Accountability and Demand for Good Governance Group, The World Bank. March Boulenger, S., Gauthier, I., & Vaillancourt, F. 2012 Déconcentration, délégation et dévolution : avan- tages, inconvénients et mise en place. Aout (Vaillancourt et al. 2012) Brachet, J., & Wolpe, H. 2005. Conflict-Sensitive Development Assistance: The Case of Burundi. Social Development Papers, The World Bank. June Brosio, G., & Singh, R. (forthcoming) Revenue Sharing of Natural Resources: A review of International Practices. Background Paper, the World Bank 2014. Bukenya, B., Hickey, S., & King, S. 2012. Understanding the role of context in shaping social account- ability interventions: towards an evidence-based approach. Report commissioned by the World Bank’s Social Accountability and Demand for Good Governance Team. June Byamugisha, F. 2013. Securing Africa’s Land for Shared Prosperity: A Program to Scale up Reforms and Investments. World Bank, Washington DC. Colin, J. P. and M. Ayouz. 2006. “The Development of a Land Market? Insights from Cote d’Ivoire.” Land Economics 82 (3): 404-23. Coopération Suisse. 2012. Document de Capitalisation méthodologique des expériences pilotes en Province Ngozi. Programme d’appui à la gestion foncière au Burundi. Avril République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 119 Deininger, K. 2008. “A Strategy for Improving Land Administration in Inda.”Land Policy and Adminis- tration Note 33, Agriculture and Rural Development, World Bank, February. Deininger, K., D. A. Ali, and T. Alemu. 2011a. “Impacts of Land Certification on Tenure Security, In- vestment, and Land Market Participation: Evidence from Ethiopia.” Land Economics 87 (2): 312–34. Fenske, J. 2010. “L’Etranger: Status, Property Rights, and Investment Incentives in Cote d’Ivoire.” Land Economics 86 (4): 621-644 Ferrari, F. 2014. « L’Appui de la DDC aux Reformes Foncières en cours au Burundi et en RD Congo : Mise en œuvre de mécanismes de reconnaissance et de sécurisation des droits fonciers cou- tumiers » Working Paper presented at the Annual World Bank Conference on Land and Pov- erty, Washington DC. March 24-27 Galiani, S. 2011. “The dynamics of land titling regularization and market development.” Working Paper. Helsinki: United Nations University. Galpin, C., Niyonkuru, R-C., Habwintahe, JM., & Nkurunziza, A. Ingoro Yamotongo out le Service fon- cier communal : Province de Gitega. Gasabanya, Z. 2012. Bilan de mise en œuvre de la politique nationale de la decentralisation et du plan d’actions triennal de la decentralisation 2009—2011. Perspectives d’avenir pour la periode 2012—2014. Mai Gaynor N. 2011. Opportunities for Citizen Participation in Local Governance in Burundi “A Research Report prepared in collaboration with the Governance and Human Rights Programme of Tró- caire-Burundi” Gaynor N. 2013. The Tyranny of participation revisited: international support to local governance in Burundi. Oxford University Press and Community Development Journal. Guidance Note. 2005. Formalizing Informal Artisanal Mining Activity. A review and comparative analy- sis of mining codes and policy approaches towards Artisanal and Small-scale Mining. CASM/ BRGM Research Project. November Habwintahe, J-M. et Nkurunziza, A. 2011. Diagnostic Socio-foncier dans la commune Bugenyuzi de la province Karuzi, Bujumbura: Programme « Gutwara Neza ». Heinkele, J. 2011. Programme d’appui à la décentralisation et à la lutte contre la pauvreté au Burundi. Rapport préparé pour la GIZ Septembre Hilhorst, T. 2012. Innovating Land Governance in Rural Burundi to Reduce Conflict and Promote Food Security. Royal Tropical Institute. January Hilhorst, T. 2011. Burundi MJSP 2012-2015 “Feedback on law and regulation: Access to land”. Royal Tropical Institute. November Hood, R.; Husband, D. & Yu, F. 2002. Recurrent Expenditure Requirements of Capital Projects Estima- tion for Budget Purposes. World Bank Working Paper 2938 Huggins, C. 2004. Preventing Conflict through Improved Policies on Land Tenure, Natural Resource Rights, and Migration in the Great Lakes Region. African Centre for Technology Studies. Eco- Conflicts Volume 3. January International Crisis Group. 2013. “Comprendre les conflits dans l’Est du Congo (I): la plaine de la Ruzizi » Rapport No. 206 Juillet International Crisis Group. 2014. “Fields of Bitterness (I): Land Reform in Burundi” Report No. 213 February International Crisis Group. 2014.“Fields of Bitterness (II):Restitutuion and Reconciliation in Burundi” Report No. 214 February 120 Iyer, L. 2010. “Direct Versus Indirect Colonical Rule in India: Long-Term Consequences.” Review of Economics and Statistics, 92(4), 693-713. Kamungi, P. M., J. S. Oketch & C. Huggins. 2005. Land access and the return and resettlement of IDPs and refugees in Burundi, in C Huggins and J Glover eds., From the ground up - landrights, conflict and peace in Sub Saharan Africa: Pretoria, ACTS -Institute for security studies, p. 195- 268. Kohlhagen, D. 2007. Le tribunal face au terrain : Les problèmes d’exécution des jugements au Mugamba, dans une perspective juridique et anthropologique. Rapport de RCN Justice & Démocratie. Kohlhagen, D. 2009. Statistiques judiciaires burundaises: Rendement, délais et typologie des litiges dans les tribunaux de résidence. Rapport de RCN Justice & Démocratie. Kohlhagen, D. 2010. Land reform in Burundi: Waiting for Change after Twenty years of Fruitless De- bate. Kohlhagen, D. 2010. Vers un nouveau code foncier au Burundi? L’Afrique des Grands Lacs, Annuaire 2009—2010, p. 1. Kohlhagen, D. 2011. In quest of legitimacy: Changes in land law and legal reform in Burundi. In Natu- ral Resources and local livelihoods in the Great Lakes Region of Africa: A political economy perspective. Palgrave Macmillian. Kohlhagen, D. 2012. Burundi: Land policy making in a conflict-prone country. Summary paper for the Annual World Bank Conference on Land and Poverty, Washington DC, April 23-26 Larizza, M. & Glynn B. 2013. The Institution-Building Context in Sierra Leonne. In Barma, N.H; Huy- bens, E. and Vinuela, L. (Eds) Institutions Taking Root: Building State Capacity in Challenging Contexts. Washington D.C. World Bank Group Latouche, D. 2012. Programme d’appui à la reconstruction et au développement Communal dans la province de Rutana (PARDC-R) Burundi. Projet UNCDF May Lavigne Delville, P. (2000) Harmonising Formal Law and Customary Land Rights in French-Speaking West Africa, Paris: Groupe de Recherche et d’Echanges Technologiques. Leisz, S. 1996. “Burundi Country Profile”, in: J. W. Bruce (ed.), Country profiles of land tenure. Africa, 1996, Madison: Land Tenure Center, University of Wisconsin-Madison. Libecap, G. D. and D. Lueck. 2011. “The Demarcation of Land and the Role of Coordinating Property Institutions.” Journal of Political Economy, 119 (3), 426-467. Martinez-Vasquez, J., & Vaillancourt, F. Forthcoming. Obstacles to Decentralization: Lessons from the Developing World Draft. Maurer, N. and L. Iyer. 2008. “The Cost of Property Rights: Establishing Institutions on the Philippine Frontier under American Rule, 1898-1918.” Working Paper 14298, Cambridge, MA. Mbonabuca, T. 2010. La réforme administrative et fiscale de l’institution communale au Burundi à la croisée des chemins : opportunités et défis. Ministère de l’Intérieure. Gouvernement du Bu- rundi. Aout Meloche, J.-P. 2014. Gouvernance urbaine, mégavilles et décentralisation sous-locale : un tour d’horizon des Amériques. Mimeo. Mosley, P., 2014. Two Africas? Why Africa’s ‘Growth Miracle’ is Barely Reducing Poverty. Brooks World Poverty Institute Working Paper No. 191 Naritomi, J., R. R. Soarez & J. J. Assuncao. 2009. “Instiutional Development and Colonial Heritage with- in Brazil.” Working Paper, Rio de Janeiro. National Democratic Institute (NDI). 2010. Atelier de Concertation et de réflexion sur la gouvernance participative locale. Novembre République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 121 Ndikumana, L. 2005. Distributional conflict, the state, and peace building in Burundi. University of Massachusetts, Amherst Nihangaza. C. 2012. Etudes sur la viabilité institutionnelle et financière des communes rurales au Bu- rundi. Juin Nimubona, J. 2013. Revue institutionnelle et de gouvernance (IGR) sur la decentralization: Economie Politique de la décentralisation au Burundi. Rapport provisoire préparé pour la Banque Mon- diale Nimubona, J. Forthcoming. Revue institutionnelle et de Gouvernance (IGR) sur la décentralisation « Economie politique de la décentralisation au Burundi » Rapport provisoire Nkurunziza, J., & Ngaruko, F. An Economic Interpretation of Conflict in Burundi. Journal of African Economies, Volume 9, Number 3, pp. 370-409 Ntampaka, C., & Mansion, A. 2005. Etude sur la problématique foncière au Burundi. GRET, CCFD, ACORD. (general overview issue, policy , donor responses , recommandations) O’Meally, S. 2013. Mapping Context for Social Accountability. Social Development Department, the World Bank O’Neill, K. 2003. Decentralization as an Electoral Strategy. Comparative Political Studies 36 : 1068-91 O’Neill, K. 2005. Decentralizing the State : Elections, Parties and Local Power in the Andes. New York : Cambridge University Press. Observatoire de l’Action Gouvernemental (OAG). 2007. Analyse du processus de décentralisation au Burundi (Cas des Conseils communaux et des structures locales de développement) Octobre (OAG 2007) Observatoire de l’Action Gouvernemental (OAG). 2010. « Evaluation du processus de décentralisation au Burundi » Décembre Observatoire de l’Action Gouvernementale (O.A.G). 2010. « Evaluation du processus de décentralisa- tion au Burundi » Décembre Ould Kebd, Y., & Sindayihebura, C. 2011. Etat des lieux et besoins en renforcement des capacités des acteurs en décentralisation et développement communautaire. Ministère du développement communal. Gouvernement du Burundi. Octobre PEM Consult. 2007. Mission d’étude sur la problématique foncière et les solutions alternatives face aux défis de la réintégration et réinsertion des sinistrés au Burundi. UNOPS-PNUD-CNTB, Bu- jumbura. Perks, R. Forthcoming. The Inclusion of Artisanal and Small-scale mining in National Legislation: Case studies from Sub-Saharan Africa. World Bank Peters, P. 2004. “Inequality and social conflict over land in Africa” Journal of Agrarian Change 4 (3): 269-314 Programme d’Appui à la Bonne Gouvernance (PABG). Projet de décret portant règlement général de la comptabilité communale. Programme d’appui à la gestion foncière au Burundi. 2012. Document de capitalisation méthod- ologique des expériences pilotes en province Ngozi. April 2012 (SDC- Bujumbura) (overview approach and implementation, including role of local government, mandate, legal, human re- sources, and not that much on taxation) République du Burundi. 2005a. Loi no. 1/02 du 25 Janvier 2010 portant Révision de la Loi no. 1/016 du 20 Avril 2005 portant Organisation de l’Administration Communale. 122 République du Burundi. 2005b. Loi no. 1/016 du 20 Avril 2005 portant Organisation de l’Administration Communale. République du Burundi. 2007a. Lettre Nationale Politique sur la Décentralisation et le Développe- ment Communal. République du Burundi. 2007b. Programme d’actions Prioritaires de mise en œuvre du CSLP 2007- 2010. Mai 2007 République du Burundi. 2009a. Politique Nationale sur la Décentralisation et le Développement Com- munal République du Burundi. 2009b. Ministère de la Décentralisation et du Développement Communal. « Document de Politique Nationale de Décentralisation du Burundi » Mai République du Burundi. 2010a. « Le Senat et la politique de décentralisation au Burundi » Aout République du Burundi. 2010b. Loi No.1/02 du 25 Janvier 2010 Portant Révision de la loi No.1/016 du 20 Avril 2005 Portant Organisation de l’Administration Communale. (Loi Communale 2010) République du Burundi. 2011a. Décret no. 100/95 du 25 Mars 2011 portant Missions, organisation et fonctionnement du Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme. République du Burundi. 2011b. Loi No 1/13 du 9 août 2011 portant révision du Code Foncier du Burundi. République of Burundi. 2011c. Second Strategic Framework for Growth and the Fight against Poverty (Cadre Stratégique de Croissance et de Lutte contre la Pauvreté II (CSLP-II), p. 16–17). République du Burundi. 2011d. Projet de Loi Portant Code Minier du Burundi République du Burundi. 2012a. Cadre Stratégique de Croissance et de Lutte contre la Pauvreté CSLP II. République du Burundi. 2013a. « Note sur le Secteur de la Bonne Gouvernance »Ministère a la présidence charge de la Bonne Gouvernance et de la Privatisation. Octobre République du Burundi. 2013b. Ministère de la Solidarité Nationale, des droits de la Personne Hu- maine et du Genre. Note analytique sur le secteur du relèvement communautaire. Octobre République du Burundi. Ministère du Développement Communal « Note sur la décentralisation au Burundi : La commune porte d’entrée du développement et de la démocratie » République du Burundi. 2013c. Projet de Loi relative au transfert de compétence de l’État aux com- munes. Gouvernment of Rwanda. 2005. Organic Law Establishing the Land Tenure System in Rwanda. (accessed 13 October 2010). Thinon, P. 2012. Rapport de la mission d’appui de Pascal Thinon au Programme Foncier de la Coo- pération Suisse au Burundi. Avril-Mai Thinon, P., Rochegude, A., & Hilhorst T. 2012. Rencontres foncières, Bujumbura 28-30 mars 2011. Coo- pération suisse (Bujumbura, Burundi) & Cardère éditeur (Lirac, France), 288p. Uhuru, F. 2004. Le Régime foncier dans la région des grands lacs : Le cas du Burundi Aujourd’hui. Jan- vier United States Agency for International Development. Burundi Policy Reform: Report for Validation of Land Code Revisions. United States Agency for International Development. 2006. Enabling an Inclusive Private Sector in Burundi: Opportunities and Constraints. May République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 123 United States Agency for International Development. 2007. Réformes de la Filière Café au Burundi: Perspectives d’Avenir pour la Participation, la Prospérité et la Paix. Février Uvin, P. 2008. Local Governance After War: Some reflections on donor behavior in Burundi. The Fletcher Journal of Human Security, volume xxiii Vaillancourt, F. 2013. La Gouvernance Locale en Afrique Francophone : sept notes sur des enjeux traités par le réseau FAGLAF. Project report Centre Interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) Février (Vaillancourt 2013) Van Leeuwen, M. 2014. Land Disputes and Local Conflict Resolution Mechanisms in Burundi. 2nd Aegis Euroconference in African Studies, African Alternatives: Initiative and Creativity beyond Cur- rent Constraints, Leiden, The Netherlands. July Vandeginste, S. 2010. Power-sharing as a fragile safety valve in times of electoral turmoil: the costs and benefits of Burundi’s 2010 elections. The Journal of Modern African Studies, 49 pp.315-335 Vervisch, T. and Titeca, K. Bridging community associations in post-conflict Burundi: the difficult merg- ing of social capital endowments and new ‘institutional setting’. The Journal of Modern Afri- can Studies, 48, pp 485-51 World Bank. 2007. Burkina Faso: Making Decentralization work. September World Bank. 2009. Burundi Mining Sector: Mining as a potential source of diversification and growth. CEM Background Paper World Bank. 2011. Republic of Burundi - Country Economic Memorandum (CEM): the challenge of achieving stable and shared growth. Washington, DC: World Bank. http://documents.world- bank.org/curated/en/2011/03/14730161/republic-burundi-country-economic-memoran- dum-cem-challenge-achieving-stable-shared-growth World Bank. 2011. World Development Indicators (WDI) < http://data.worldbank.org/data-catalog/ world-development-indicators/wdi-2011> World Bank. 2012. Demand-side Governance and Strengthening of Civil Society. Unpublished draft note, Washington DC: World Bank Institute. World Bank. 2012. Participatory Budgeting (PB) in South Kivu, DRC: Support to decentralization and empowering citizens to participate in the budgetary process through ICT. Draft Project Concept Note. World Bank Institute World Bank. 2013. Social Accountability Flagship Study Concept Note Draft. Social Development De- partment May World Bank. Forthcoming 2014 SDV Flagship Report on Social Accountability, World Bank Social Ac- countability Department, Washington DC World Bank. Forthcoming 2014. Social Accountability Flagship Report, Social Development Depart- ment Bank. Forthcoming 2014. Madagascar Land Policy Reform: Perspectives and Prospects. Policy Re- search Report, World Bank, Washington, DC. World Bank/Food and Agriculture Organization (FAO). 2014. Analyse financiere de la gestion fon- ciere decentralisee. Study Report. ZOA International Relief. 2013. « Rapport foncier communal dans les communes de Mabanda et Vu- gizo dans la Province de Makamba du Burundi ». Novembre. 124 ANNEXES République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 125 Annexe 1 Découpage du Territoire Communal: Information Supplémentaire Données Une enquête a été réalisée en Août 2013 pour les 16 communes énumérées dans le tableau A1.1. Il s’agit d’un échantillon axé sur une commune dans chaque province avec une diversité en termes de population, superficie, topographie et urbanisation. La disponibilité de l’information (administrative et financière) a également été prise en compte. Tableau A1-1 : Characteristics des communes enquêtées en août 2013 Province Commune Population Superficie km² Bujumbura Mutimbuzi 69 037 181,1 Bubanza Gihanga 53 222 287,3 Cibitpoke Mabayi 66 531 347,5 Kayanza Matongo 70 652 167,8 Ngozi Ngozi 64 321 121,3 Kirundo Busoni 146 188 420,9 Muyinga Giteranyi 152 276 397,8 Cankuzo Mishiha 49 941 381,2 Ruyigi Butaganzwa 64 063 341,3 Rutana Rutana 52 445 255,3 Makamba Mabanda 44 792 294,9 Karuzi Buhiga 70 392 275,4 Gitega Gitega 156 096 315,4 Muramvya Rutegama 39 896 83,5 Mwaro Gisozi 27 953 118,7 Bururi Matana 44 059 207,4 Source: Rapport Définitif De Collecte Des Données En Rapport Avec Les Frais De Fonctionnement des Communes et la Fiscalité Communale par BUGAFIRO Pascal et MBARUBUKEYE Séverin et données du Recensement 2008. Le travail de cueillette de données a été réalisé de façon efficace par BUGAFIRO Pascal et MBARUBUKEYE Séverin. Les objets principaux de l’enquête étaient de recueillir de l’information sur le temps utilisé en déplacement, sur les dépenses engagées par les résidents d’une commune pour satisfaire une obligation légale ou acquérir un service contre paiement et sur les coûts de fonctionnement interne de la commune plus particulièrement les coûts fixes et variables. Pour obtenir une estimation du temps et des dépenses, un échantillon de cinquante quittances par commune a été prélevé. Ceci fait, les enquêteurs ont demandé aux informateurs communaux d’indiquer pour chaque créance le temps type qu’un résident devait consacrer à se rendre au siège de la commune. Les figures A1.1 et A1.2 présentent Figure A1-1 : Distance de marche, 16 communes, des informations sur la distance et Burundi 2013 – commune ordonnées par le temps de marche pour atteindre le superficie croissante siège communal. Le nombre d’interactions 30.0 24.4 annuelles entre les résidents 25.0 21.5 18.6 des communes PE et le siège 20.0 16.3 14.9 18.0 14.5 17.7 13.6 communal 15.0 12.7 10.8 13.4 12.3 11.9 10.0 8.0 8.0 Nous disposons d’information sur 5.0 le nombre annuel de quittances 0.0 payés par les résidents de quinze zi i a ut go M zi Gi ga ab a ga a Ru a Bu a M a M ayi te a Bu yi ni da M goz am M ang ta eg an n Gi hih w des seize communes faisant partie so bu n so hi m ton ta an nz ab ra t at Gi n g Bu Gi im is h te a Ru de l’enquête. Le nombre moyen de quittance par année par habitant pour ces quinze communes s’élevé à 12,5 Source : Compilation de l’auteur, en utilisant les données d’enquête. par cent habitant si nous incluons les valeurs extrêmes et 8,3 lorsque nous excluons les quatre extrêmes Figure A1-2 : Temps de marche, 16 communes, Burundi, (deux petites et deux grandes). Le 2013 – communes ordonnées par superficie croissante paiement de quittances n’est pas la seule interaction possible avec la 300 commune. Étant donné ceci nous 247 255 présumons que durant une année il y 250 a 15 interactions par 100 habitants. 200 177 168 158 Nous utilisons une population 152 135 127 134 145 131 142 150 119 communale hors Bujumbura de 108 83 85 10,5 millions ce qui donne 1 575 100 000 interactions annuelle entre les 50 résidents des communes PE et leur 0 administration communale. ng i ga a te a Bu yi a i M zi Bu a Gi ga ab a ut go Ru a M ayi ni M a da oz M oz m n M ang ta eg Gi hih an w bu n so hi m ton ta s an nz ab ga ra t at Gi Bu Gi im is h te a Le coût en temps et en Fbu Ru de ces interactions Source : Compilation de l’auteur, en utilisant les données d’enquête. Pour les 800 quittances ayant fait l’objet de questions, la distance moyenne parcourue pour utiliser les services communaux est de 15km (aller-retour) et le temps moyen de 150 minutes. La distance moyenne est raisonnable. En effet nous écrivions avant de disposer de données que117 : La superficie totale du Burundi (lacs exclus) est 25 650 km² et donc la superficie moyenne des 129 communes incluant les communes de la mairie est de 200 km². Corrigeant pour le fait que 117  La décentralisation financière au Burundi: quelques observations rapport préparé pour la Banque Mondiale Juin 2013 Bujumbura compte 87 km² avec 13 communes-mairies, une commune type mesure 225 km² (25 550/116). Donc 116 carrés d’environ 15kmX15km couvrent le Burundi hors Bujumbura. Si le centre administratif est au milieu de ces communes carrées, la distance maximum à vol d’oiseau est de 7,5km et la distance moyenne entre le centre et la résidence d’un usager des services communaux, présumant une densité uniforme de la population, est 3,75km. Mais les humains suivent les sentiers, pistes et routes et non pas une ligne droite. Nous corrigeons pour ceci en disant 3,75 *2=7km aller simple et 14km aller-retour. Le temps requis semble un peu faible considérant la topographie du Burundi et les données disponible sur la vitesse moyenne de marche118 (5km/h) mais n’est pas implausible. En multipliant 150 minutes par 1 575 000 nous obtenons 236 250 000 minutes ce qui équivaut à 3 937 500 heures. Ceci correspond à 491 818 jours de travail si nous considérons qu’une journée de travail est constituée de huit heures ouvrables. Comme le travail a une valeur faible au Burundi comme l’indique son PIB annuel, nous utilisons une valeur de 1000 Fbu par jour et donc en arrondissant nous estimons à 500 million de Fbu la valeur du temps de déplacement consacré aux interactions résident-administration communale. Établir un nombre réduit plausible de communes Nous ne disposons d’aucune indication sur le nombre cible de communes; nous allons donc discuter du cas d’une réduction de deux tiers soit à 40 communes PE. Ceci est une réduction significative laissant entre deux à trois communes par province. Calculer la réduction des coûts publics associée à cette réduction du nombre de communes avec et sans maintien de bureau de services Le coût par habitant en primes versées par les communes aux administrateurs communaux et aux deux conseillers techniques est de 31Fbu par habitant, soit 325 500 000 Fbu pour les 116 communes. En réduisant le nombre de communes de deux tiers (a 40), on obtient une économie de 215 M de FBu pour la société dans son ensemble. À ce montant il faut rajouter les dépenses en salaires payés par l’État central. Le salaire annuel moyen d’un conseiller est de 1,5 million de francs burundais; ainsi la baisse du nombre de communes réduirait les coûts du gouvernement central de 228 millions. Le salaire des maires coûte 1,6 millions chacun ou une baisse de 122 millions de francs burundais119. Ainsi, la réduction minimale plausible des coûts salariaux est de 565 millions d’euros. Toutefois, il peut y avoir une réduction des autres coûts. Ainsi, un PCDC (PRADECS) coûte 27 M Fbu en 2012 et est valide pour cinq ans. Le coût moyen par année est donc d’environ 6 M de Fbu. Une réduction du nombre de communes de 116 à 40 réduit les coûts de 456 M en supposant que le coût d’un PCDC ne varie pas avec la superficie de la commune. Cette hypothèse nous semble peu probable vu le besoin de consultation des populations. Si nous supposons que le coût annuel du PCDC augmente 50%, passant ainsi de 6 à 9 M de Fbu par année, nous obtenons alors 456-120= 336 M de réduction. En ajoutant cette réduction, on aura une réduction totale de 931 million. 118  See references cited in http://en.wikipedia.org/wiki/Walking 119  Ce nombre est obtenu en combinant les informations du ministère de l’Intérieur et du bureau de la paye du ministère des Finances. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 129 L’ensemble des employés de la commune hors ces trois individus coûtent 285 Fbu par habitant soit trois (3) milliard pour les 116 communes. En réduisant le nombre de communes de deux tiers engendre une diminution des coûts de deux (2) milliard de FBu. Ceci n’est pas compatible avec la position de plusieurs interlocuteurs burundais de maintenir dans les anciens chefs-lieux communaux des points de service et /ou de renforcer les bureaux de zone. L’impact sur l’usager des services communaux Avec 40 communes, leur population sera d’environ 250 000 avec une superficie de chaque région estimée a 640 km ² d’un carré de 25 km X 25 km et une distance en ligne droite maximum de 12, 5 km. La nouvelle distance moyenne sera de 28 km pour un trajet aller-retour. Ce qui doublera le coût en terme de temps d’accès au siège communal. Ceci a son tour augmentera les coûts privés par FBu 1.000 millions. Cela suppose qu’il n y aura aucune baisse dans le nombre d’interactions résidents-communes. En cas de baisse l’augmentation des coûts sera moindre, mais d’autres conséquences pourront suivre une telle baisse en ce qui concerne par example le nombre de naissances enregistrées ou les impôts payés. 130 Annexe 2 Liste des personnes consultées pendant la phase de préparation de l’étude Pour assurer un dialogue efficace avec les autorités gouvernementales, et afin de maximiser la copropriété de l’étude, l’équipe projet de la Banque a effectué six missions au Burundi. Plus précisément, deux missions au début de 2013 (janvier et mars 2013, respectivement) ont été effectuées pour lancer le processus de consultation avec le gouvernement et les représentants de la communauté des bailleurs de fonds et pour définir la portée de l’étude ainsi qu’avoir le support financier des bailleurs de fonds dans le cadre de la «RDP programmatique ». Une troisième mission a permis de poursuivre les discussions sur l’avant-projet de la note conceptuelle (mai 2013) et a été suivie de deux cycles de collecte de données (Août -Septembre et Novembre- décembre 2013, respectivement), bien coordonnés. Les projets préliminaires de l’analyse ont été communiqués lors d’une mission ultérieure (Janvier 2014), afin de donner aux autorités la possibilité de réagir et de fournir des commentaires et orientations à l’équipe. Une mission de validation du projet de rapport avec les autorités gouvernementales et les partenaires techniques et financier a été tenue en juin 2014. Une derniere mission a été organisé en septembre 2014, afin de partager avec le gouvernment le rapport final incluant tous les commentaires du gouvernment, des partenaires et les membres de la société civile. La liste des personnes rencontrées et interviewées au cours des missions et leur affiliation institutionnelle respective est fournie ci-dessous. Tableau A2-1 Gouvernement du Burundi NOM TITRE Organisation Présidence Ntahiraja ,Térence Conseiller Présidence de la République Nkinahamira, Pascasie Conseillère Juridique 1ere Vice-Présidence Nshimirimana, Térence Conseiller 2eme Vice-Présidence Ministère du Développement Communal Giteruzi, Dieudonné Ministre Ministère du Développement Communal Sindakira, Lazare Secrétaire Permanent Ministère du Développement Communal Ntihirageza, Jean-Marie Directeur Général de la Ministère du Développement Communal Décentralisation Manirakiza, Léopold Directeur General Ministère du Développement Communal Kwizera, Priscille Agent Ministère du Développement Communal Njebarikanuye, Spès- Directeur Général Fonds national d’investissement Caritas communal (FONIC) Bigirindavyi, Thomas Département Comptabilité Fonds national d’investissement communal (FONIC) Ntahomvukiye, Mathias Chef Comptable Fonds national d’investissement communal (FONIC) Manirakiza, Eric Directeur Administratif et Fonds national d’investissement Financier communal (FONIC) Ntavyohanyuma, Letitia Chargée de la Communication Fonds national d’investissement communal (FONIC) Ministère de l’Intérieur Nduwimana, Edouard Ministre Ministère de l’Intérieur Mbonabuca, Thérence Directeur Général de Ministère de l’Intérieur l’Administration du Territoire Sindayihebura, Firmin Directeur du Département des Ministère de l’Intérieur Finances communales Melchior, Gahungu Inspecteur des Finances Ministère de l’Intérieur Ministère de la Solidarité Nationale, des Droits de la Personne Humaine et du Genre Munyaneza Aline Cadre Ministère de la Solidarité Nationale Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme (MEEATU) Macumi, Damien Coordinateur National- Unité de Gestion du Programme National MEEATU Foncière (PNF) Ndikumana, Ernest Directeur Général MEEATU Aménagement du Territoire Ngendabakana, Frédéric Directeur Bureau Centralisation MEEATU Géomatique Mboneko, Félix Directeur- Cadastre MEEATU Ministère des Finances et de la planification du Développement Economique Bigirimana, Immaculée Secrétaire Permanent Ministère des Finances et de la Planification du Développement Economique Kwizera, Christian Coordonateur Adjoint des Aides Ministère des Finances et de la Planification du Développement Economique Mushariste, Désiré Coordonateur des Aides Ministère des Finances et de la Planification du Développement Economique Office Burundais des Recettes Holmes, Kieran Commissaire Général Office Burundais des Recettes Nzeyimana, Thacien Directeur Office Burundais des Recettes 132 Ndayzeye, Avit Chef de Service Affaires Office Burundais des Recettes Juridiques Tesfaye Wondim Directeur Informatique Office Burundais des Recettes Ministère de la Fonction Publique Nderagakura, Janvier Conseiller du DCAPR Ministère de la Fonction Publique Batungwanayo, Chef de Service Centre Inter- Balthazar Ministériel des Ressources « Ministère de la Fonction Publique Database of Civil Servants » Hakizimana Potame Secrétaire Exécutif du CERAP Ministère de la Fonction Publique Esperance Habonimana Directeur Général Ministère de la Fonction Publique Balthazar Responsable Administratif Batungwanayo du Centre de Traitement Ministère de la Fonction Publique Informatique Parlement du Burundi Honorable Nkurunziza, Sénateur Sénat du Burundi Innocent Kigeme Ariane Conseillère Décentralisation Sénat du Burundi Honorable Nkurunziza, Député Assemblé Nationale du Burundi Aimé Nkunzimana, Tharcisse Chef de Service Décentralisation Sénat du Burundi Organisations de la Société Civile Nzohabonimana, Alexis Président Association Burundaise des Elus Locaux (ABELO) Bikebako, Pontien Président ONG Twitezimbere Nihangaza, Charles Expert en Finances Publiques Academie Banderembako, Paul Vice-Recteur Université du Burundi Tableau A2.2 Partenaires en Développement NOM TITRE Organisation Tognola, Claudio Directeur de Coopération Coopération Suisse Pitteloud, Alansar Directrice de Coopération Coopération Suisse Elisabeth Ndikumasabo Directrice du Programme Coopération Suisse Annonciata Johannsen Achim Chef de Coopération Ambassade d’Allemagne Proehl Alexander Coordinateur du Programme GIZ ADLP Bafutwabo Léopold Programme ADLP GIZ Nzobambona Isidore Représentant Local KFW Nindorera Yves Chargé de Programme Ambassade de Belgique République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 133 Hermouet Murielle Assistante Technique PADILPC Coopération Technique Belge (CTB) Corbel Hervé Assistant Technique Coopération Technique Belge (CTB) Tilli Blomhammar Chargée de Programme Délégation de l’Union Européenne Charlotte Charvet Eric Responsable Programme d’Appui à la Bonne Gouvernance Okry Marc Assistant Technique Programme d’Appui à la Bonne Gouvernance Vrijlandt, Anthe Responsable Trade Mark East Africa Tableau A2-3 Personnel de la Banque mondiale Alain-Désiré Karibwami Spécialiste Principal Santé Andre Teyssier Spécialiste Principal en Gestion Foncière Aurelien Serge Beko Economiste Pauvreté Mamadou Ndione Economiste Principal Pays Nadia Belhaj Hassine Belghith Economiste Principale Pauvreté Rachel Bernice Perks Spécialiste Secteur Minier 134 Annexe 3 Rapport de Synthese de l’atelier de validation du Rapport A. Allocutions d’ouverture Le 2 juin 2014, la Banque mondiale en collaboration avec le Gouvernement du Burundi et ses partenaires techniques et financiers a olrganisé un atelier de validation du rapport préliminaire de l’étude sur la décentralisation fiscale et la gouvernance locale à l’hôtel Royal Palace de Bujumbura. La cérémonie d’ouverture de l’atelier a été marquée par la présence du Représentant Résident de la Banque mondiale, plusieurs membres du gouvernement, dont le Ministre du Développement Communal, un député de l’Assemblée Nationale, de nombreux hauts cadres de l’administration publique burundaise, ainsi que la société civile. L’objectif principal de l’atelier était d’ouvrir le débat autour des résultats clés de l’étude ainsi que de recevoir des commentaires et observations constructives du gouvernement et de la société civile. Compte tenu de l’importance des questions traitées dans ce rapport, le ministre du Développement Communal a félicité l’équipe projet d’avoir fourni des analyses très pertinentes et de répondre aux besoins du Gouvernement Burundais dans la mise en œuvre de son programme de décentralisation tel qu’énuméré dans l’Accord de paix d’Arusha. Un groupe technique composé de quatre membres du gouvernement a été mis en place afin de donner une position unie et claire des commentaires et observations du gouvernement. Les discussions de l’atelier ont été organisées autour des chapitres clés du rapport notamment la décentralisation budgétaire qui a traité les questions de fiscalité et des politiques publiques liées à la décentralisation ; la gouvernance foncière décentralisée qui traite des questions de gestion et sécurité foncière, ainsi que le chapitre sur la redevabilité sociale. Un panel de 5 experts dont un représentant du gouvernement (le Directeur Général au Ministère du Développement Communal) ; un représentant du Parlement (un Député a l’Assemblée Nationale) ; un expert en finance publique (Conseiller fiscal agréé) ; un expert en politique foncière (le Coordonnateur national de l’Unité de Coordination du Programme National Foncier, PNF) et un représentant de la société civile (Président de l’, ABELO). B. Commentaires et observations du Gouvernement Observations/Commentaires Soulevés Réponses de l’équipe Observations générales sur le rapport préliminaire Les observations générales sur le rapport sont les suivantes : En tant que rapport préliminaire • Le titre du document de rapport semble un peu flou le titre n’est pas encore définitif et comparativement au contenu ; l’équipe trouvera un titre reflétant mieux le contenu du rapport. • Il n’y a pas un lien dans la succession des chapitres ; • Le document nécessite un toilettage au niveau de la forme car certaines affirmations et chiffres ne sont pas correcte et dans L’équipe a réalisé que la traduction tous les chapitres ; n’a pas pu prendre en compte les termes techniques du rapport. Un • Certains paragraphes sont à reformuler ; toilettage se fera sous peu. • Il y a certains termes ou vocabulaires qui ne sont pas utilisés au Burundi ; • Les analyses effectuées par cette étude de la Banque Mondiale sont en général objectives, bien fouillées reflétant des observations et recommandations pertinentes mais quelques conclusions ou recommandations sont à reformuler. Chapitre 1 : Comprendre le contexte de la décentralisation au Burundi Le chapitre titré « comprendre le contexte de la décentralisation Une revue sera effectuée afin au Burundi » a été bien analysé mais il faut ajouter les récentes de s’assurer que tous les textes évolutions du cadre réglementaires par rapport à la décentralisation. règlementaires y compris les Il faut signaler que le Gouvernement vient d’adopter certains textes nouveaux ne sont pas omis. réglementaires. Chapitre 2: La décentralisation budgétaire- contexte, questions liées aux politiques publiques et possibilités de changement De manière générale et du point de vue d’un praticien Merci. de ce secteur de décentralisation fiscale et budgétaire les analyses effectuées dans le chapitre 2 qui traite de la « Décentralisation budgétaire, contexte, questions liées aux politiques publiques et possibilités de changement » sont réputées objectives, bien fouillées reflétant des observations et recommandations pertinentes. L’état des lieux de la Décentralisation budgétaire actuelle est celui réellement vécu aujourd’hui par les communes. Il est effectivement caractérisé par de faibles transferts de ressources de l’Etat aux communes. Chapitre 3 : Gouvernance foncière décentralisée : défis et opportunités De façon globale, les conclusions et observations du chapitre qui Bien noté. traite la gouvernance foncière décentralisée sont correctes mais L’équipe de la Banque mondiale dans le développement de ce chapitre les données et les analyses effectuera ses changements. restent à améliorer. A titre illustratif : 136 • l’Unité de Coordination du Programme national foncier, re- sponsable de la décentralisation de l’administration foncière » : cette expression paraît équivoque. On ne décentralise pas l’administration foncière classique (DG cadastre et DG titres Fon- ciers notamment) mais on crée des services fonciers au niveau des communes qui ont des rapports avec cette administration foncière classique mais n’en sont pas des entités décentralisées. Les procédures utilisées, les documents délivrés, les acteurs in- tervenants ne sont pas les mêmes. Donc il faut plutôt dire que « l’Unité de Coordination responsable de l’accompagnement du Gouvernement dans la mise en œuvre de la gestion fon- cière décentralisée » ; • Le nombre de parcelles à enregistrer au niveau national est entre 8 et 9 millions au lieu de 3-4 millions, • Il semble important de rappeler que les Opérations Groupées de Reconnaissance (OGR) n’ont (actuellement) pour résultat direct et automatique « que » la réalisation des reconnaissances collinaires et la production du PV de reconnaissance et non pas le Certificat Foncier, qui n’est lui produit que sur demande et après paiement par l’usager. Chapitre 4 : Promouvoir la redevabilité sociale par la décentralisation : la voix des citoyens Les analyses effectuées par cette étude de la Banque Mondiale L’équipe de la Banque mondiale sont, sur ce chapitre, peu objectives car certaines conclusions sont remercie le gouvernement tirées sur base d’un cas isolé. Les conclusions de ce chapitre sont à d’avoir relevé ces commentaires améliorer notamment : et souhaite rappeler que les • L’exclusion sociale est un phénomène généralisé au Burundi et conclusions tirées de cette étude de nombreuses personnes interrogées ont donné la sensation sont basées sur les résultats des d’être automatiquement exclus de la vie citoyenne différents groupes focus organisés dans 16 communes provenant de • La participation citoyenne est généralement considérée 8 provinces burundaises. Toutes comme un moyen de recueillir les informations venant du les informations contenues dans sommet, des représentants du pouvoir local et non comme un ce chapitre ne relèvent pas du forum de décision et d’échange. point de vue des consultants • La participation peut être considérée comme un moyen internationaux de la Banque d’élargir le contrôle de l’Etat sur les citoyens et le territoire. mondiale mais plutôt du point de • Le Processus d’élaboration des PCDC a encouragé la préparation vue des plus de 300 résidents et à l’identification des priorités devant être transmises au élus locaux des communes ayant sommet mais peu ou aucune information n’est redescendue participés dans cette enquête. vers la base L’équipe souligne aussi que • Le processus d’élaboration des PCDC manque donc de les équipes de consultants qui redevabilité envers la base et ne permet aucune émancipation ont coordonnées cette enquête de la population étaient composées de citoyens Burundais et non des consultants • Avant les effets de la réforme récente du FONIC, les internationaux. représentants de l’Administration locale ont une perception très négative du FONIC, du fait du faible niveau de décision sur l’utilisation des fonds. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 137 • La redevabilité sociale au Burundi demeure faible et les citoyens et les communautés ont peu d’occasions de s’engager dans le processus décisionnel et de mettre les autorités locales devant leur redevabilité • L’élaboration du plan communal de développement commu- nautaire, outil de la planification ne peut pas s’accommoder avec le budget communal. C. Contributions des panelistes et des participants Observations/Commentaires Commentaire Réponses par : Observations générales sur le rapport préliminaire L’assistant technique du projet Marc Okry L’assistant du Ministre du déve- « Gutwara Neza » indique que le rapport loppement communal a affirmé que aborde les sujets les plus importants le projet de loi sur le transfert des au Burundi dont la décentralisation, la Gutwara Neza compétences aux communes est en court gestion foncière, la redevabilité sociale et avance et le gouvernement est engagé etc. Les nouvelles modifications de la à l’adopter. loi communale n’ont pas toujours été Cependant M. le député a l’Assemblée adoptées malgré que le gouvernement nationale affirme que le 2 juin ait promis l’adoption de cette loi depuis (aujourd’hui) marque le début de la le début de cette année. Ceci montre un session de Juin à l’Assemblée nationale, manque de volonté politique de la part Honorable pourtant le projet de loi portant sur le du gouvernement face à la question de Aimé transfert des compétences ne figure décentralisation. Sur ce il faut que les Nkurunziza pas sur l’agenda des lois qui seront représentants du gouvernement clarifient débattues et analysées au cours de cette si la décentralisation est une priorité pour session. Par contre l’amendement à la loi le GdB. communale sera traité dans cette session afin que la loi soit en harmonie avec le Jean-Claude nouveau code électoral. Hatungimana Il est alors important que le projet de loi MDC portant sur le transfert des compétences aux communes soit adopté de préférence avant la loi communale afin de l’harmoniser avec cette dernière, ou soit que le projet de loi soit adopté ensemble avec la loi communale présentement au parlement. Par conséquence, le bureau du ministre du développement communal doit accélérer le processus d’approbation du projet de loi au gouvernement. 138 Résumé executive Le Directeur général de l’Aménagement Ernest L’équipe de la Banque mondiale du Territoire pose la question de savoir Ndikumana/ a expliqué qu’elle ne fait pas une pourquoi à la page 7 du rapport, on fait Directeur recommandation du retour des « Bashin- une référence aux Batwas, ce qui n’a Général de gantahe » mais que l’on ne peut pas aucun lien au contenu du rapport. Il pense l’Aménage- ignorer le rôle important qu’ils jouent cependant que ce paragraphe devrait être ment du sur le terrain en matière de résolution supprimé. Territoire des conflits fonciers malgré qu’ils ne Sur la page 5, il se demande si la Banque soient plus reconnus par la loi. mondiale recommande le retour des « Bashingantahe » en tant qu’institution reconnue en ce qui concerne la résolution des conflits fonciers. Chapitre 1 : Comprendre le contexte de la décentralisation au Burundi Le Directeur général au Ministère du Jean Marie L’équipe de la Banque mondiale trouve Développement Communal a passé en Ntihirageza/ que ses observations et commentaires revue les avancées de la décentralisation MDC sont en accord avec les résultats du tout en signalant qu’il y a des efforts en rapport préliminaire. appui et des renforcements de capacités à fournir aux élus locaux. Il constata aussi quelques autres défis notamment : • Le manque de transferts de certaines compétences aux communes • L’amélioration du cadre institutionnel du processus de décentralisation afin que le gouvernement puisse mieux faire ses transferts de compétences aux communes • La communication a grande échelles du processus de la décentralisation • La coopération décentralisée afin de promouvoir l’intercommunalité entre communes Honorable Aimé Nkurunziza à son Aimé Merci tour a félicité l’équipe projet pour un Nkurunziza rapport de projet bien fait. Il ajoute que le rapport a bien répondu aux demandes du gouvernement. Néanmoins, il souligne quelques observations notamment : • La page 17 du rapport explique le processus de la décentralisation jusqu’en 2010 et aurait pu ajouter une analyse sur l’architecture insti- tutionnelle comme étant une entrée à la décentralisation. Il ajoute aussi que le rapport aurait pu aller de l’avant et soulever d’autres questions sur la compatibilité entre l’accord de paix d’Arusha et la décentralisation. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 139 • Une comparaison de la décentralisation du Burundi avec les autres pays notamment le Rwanda n’est pas acceptable car ces deux pays malgré similaires ont de différentes réalités socio-politiques. Il a aussi ajouté que la décentralisation est un choix politique. Chapitre 2: La décentralisation budgétaire- contexte, questions liées aux politiques publiques et possibilités de changement L’Expert en finances publiques du panel Charles La faiblesse de la décentralisation est a fait les constats suivants sur la Nihangaza due notamment au fait que : décentralisation notamment : • Toutes les communes ne maitrisent • Le revenu faible des communes faute pas l’assiette fiscale. de mobilisation financière sauf les • Les exonérations du gouvernement communes qui ont un appui des PTFs qui ne sont pas bien définies. • L’analyse sur la mobilisation des • La question des passations des ressources propres des communes marchés devrait inclure la société civile et le • Le manque de communication budgé- secteur privé. taire • Il signe aussi l’anarchie observée dans • Le manque de contrôle au niveau certaines collines ou certains chefs de comptabilité du fait que le comptable collines jouent le rôle de percepteurs est recruté par l’administrateur. d’impôts • La nécessité d’ouvrir un débat avec le gouvernement sur le transfert des compétences et le renforcement des capacités. Le Représentant de l’OBR a porté une Thacien observation sur l’harmonisation des Nzeyimana collectes de recettes communales et aussi l’élimination de la double imposition au niveau communal afin que l’OBR puisse OBR avoir un partenariat gagnant-gagnant avec les communes. Le Secrétaire exécutif du CERA de la Potame L’équipe de la Banque mondiale a Fonction Publique indique son désaccord expliqué que le problème de regroupage avec les recommandations sur la réduction des communes ne résoudra pas les des communes. Il pense qu’un regroupage Hakizimana faiblesses existantes des communes. Le communal serait plus bénéfique aux problème le plus immédiat a résoudre est communes. CERA/Fonction le transfert des compétences, sans lequel Il ajoute que pourquoi ne pas changer Publique les communes ne pourront pas fournir la procédure actuelle de transferts de des services à leurs résidents. compétences aux communes suivi du Un représentant du gouvernement a financement de FONIC et suggère de indiqué que suite aux nouvelles réformes transférer les compétences aux communes, du FONIC, il y a eu notamment des une fois ces compétences acquises, le nouvelles avancées dont la contribution gouvernement devrait lier les exercices du FONIC a la fourniture des matériaux de performances des communes à leur pour la construction des écoles financement. fondamentales. 140 La Directrice de la Coopération Suisse Coopération Le GdB est tout à fait d’accord avec a apprécié que cette étude sur la Suisse les observations sur l’absence de décentralisation ait soulevé les questions mécanisme de contrôle au niveau de la gestion et sécurité foncière ainsi que communal. Actuellement, il n’existe des recommandations pertinentes pour le aucun mécanisme de contrôle interne ni futur. externe pour règlementer les finances En outre elle pense que le rapport aurait communales et ceci est l’une des priorités pu aborder les questions de gestions du gouvernement. et contrôle des finances au niveau Un représentant du programme “Gutwera communal. Une recommandation axée Neza” a indiqué que le programme avait sur des mécanismes de contrôle aurait été créé un manuel de procédure pour la souhaitable. comptabilité communale ainsi qu’un En ce qui concerne la mobilisation des projet de loi qui reste à être discuté et ressources propres des communes elle approuvé par le gouvernement. se demande pourquoi l’équipe s’est-elle L’équipe de la Banque a expliqué que focalisée sur l’exploitation minière à grande l’exploitation minière a été choisie du fait échelle comme moyen de financement qu’elle représente l’un des principaux potentiel des communes et s’il y avait axes prioritaires dans la Stratégie d’aide- d’autres sources de financement. pays ainsi que la CSLP II. Le choix sur la Elle a aussi soulevé les questions sur la gestion foncière est basée sur le fait que la gestion faible des marchés publics. reforme foncière n’avance pas. En outre, puisant des expériences d’autres pays, le coût des certificats devient élevé quand il n’est pas un processus d’enregistrement complet donc ce rapport a trouvé qu’il existe une opportunité de combiner la gestion foncière de la décentralisation. Le gouvernement a répondu qu’un nouveau décret vient d’être approuvé pour mieux répondre à la problématique de la gestion des marchés Le représentant de l’ambassade d’Alle- Représentant de Un membre du gouvernement a expliqué magne a demandé une clarification du l’ambassade de que ce terme définit le niveau de fonds terme “basket fund” au gouvernement. l’Allemagne commun du gouvernement destiné à l’investissement communal. Ce fonds sera régi par des critères que le gouvernement devrait tenir en considération avant tout transfert au FONIC. Un représentant du gouvernement a MDC Bien noté. L’équipe de la Banque mondial suggéré que les textes du rapport en modifiera ce paragraphe pour mettre à page 40 mettent en exergue les nouvelles jour les réformes du FONIC. réformes du FONIC et ses nouveaux mécanismes de transferts. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 141 Chapitre 3 : Gouvernance foncière décentralisée : défis et opportunités L’expert en politique foncière du panel Damien a noté qu’il y a eu des confusions dans Macumi/ la traduction du rapport de l’anglais au Coordonnateur français notamment la gestion foncière National- Unité qui est un système classique et la gestion de Coordination foncière décentralisée qui sera un nouveau Nationale de système. Il ajoute que le gouvernement la Politique a commencé quelques petites réformes Foncière foncières notamment la lettre de la politique foncière de 2010. Malgré qu’il ne soit pas un décret, il contient la vision du gouvernement sur ce secteur. Cependant il a constaté aussi qu’il manque un cadre institutionnel foncier ainsi qu’un programme national foncier, ce qui relève la question d’appropriation du gouvernement vis-à-vis des questions de la gestion foncière. Le représentant de l’ambassade Représentant de L’expert en Politique Foncière du panel d’Allemagne a demandé une clarification l’ambassade de souligne que la CNTB est chargée de ré- sur le rôle de la CNTB par rapport à la l’Allemagne soudre les conflits liés au retour des ra- gestion foncière au niveau communal. patriés tandis que la gestion foncière communale contribue sur le terrain à la reconnaissance et clarté des frontières des terres ; un rôle souvent joué par les “Bashingantahe”. Il a aussi souligné que la CNTB et le service foncier communal travaillent en synergie. Chapitre 4 : Promouvoir la redevabilité sociale par la décentralisation : la voix des citoyens Le représentant de la société civile du Alexis L’équipe de la Banque mondiale explique panel a trouvé ce rapport préliminaire Nzohabonimana qu’il est important de rappeler à très enrichissant et la définition de la l’audience la méthodologie suivie dans redevabilité sociale compréhensive. Par ce rapport issu d’une étude et donc sa contre il trouve le rapport un peu trop nature académique et théorique. académique et théorique. Association L’équipe a ajouté que le chapitre sur L’étude sur les 2 communes (Rutegama Burundaise des la redevabilité sociale est basé sur et Makebuko), 2 communes de la même Elus Locaux les résultats des groupes focus de 16 province partageant des traits similaires (ABELO) communes provenant de 8 provinces. ont bien éclairé la situation actuelle au niveau communal. Cependant, il aurait été souhaitable que le rapport puisse examiner en profondeur la différence entre la performance de ces 2 communes. 142 Il souligne alors que l’administrateur Toutes les informations contenues dans communal de Rutegama est un ingénieur ce chapitre ne relèvent pas du point de agronome alors que l’administrateur vue des consultants internationaux de communal de Makebuko n’a pas de la Banque mondiale mais plutôt du point diplôme universitaire d’où le grand de vue des plus de 300 résidents et élus écart dans leurs performances en ce qui locaux des communes ayant participés concerne la collecte des recettes ainsi que dans cette enquête. Elle souligne aussi l’application de certains mécanismes de que les équipes qui ont coordonnées redevabilité sociale. cette enquête étaient composées de citoyens Burundais et non des consultants internationaux. La recommandation du rapport devrait Le directeur du département des finances mettre l’accent sur la nécessité des communales du ministère de l’Intérieur autorités gouvernementales d’éviter le est d’accord sur la problématique soulevée militantisme en ce qui concerne le choix par le représentant de la société civile et des candidats sur la liste bloquée de souligne la nécessité du gouvernement candidature au niveau communal. Plutôt, il d’organiser un atelier de sensibiliation faudra sensibiliser les autorités centrales sur l’importance d’ériger des candidats et locales afin de mettre les candidats compétents pour la gouvernance de la les plus qualifiés, compétents et mieux commune. éduqués sur les listes électorales. République du Burundi Décentralisation fiscale et gouvernance locale: Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables 143 La thématique de la décentralisation est au cœur du programme du Gouvernement tel que défini par le Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté II. L’objectif de la Banque mondiale en initiant les travaux qui ont mené à cette étude, en collaboration avec le Gouvernement du Burundi et les autres partenaires au développement, est de fournir une base solide au Gouvernement pour la prise de décision ainsi que la formulation des options de politique dans ce domaine. Cette étude fait ressortir quelques messages forts. Ainsi, les responsabilités générales dévolues aux Communes devraient être clarifiées. Aussi, compte tenu de la fragilité budgétaire du pays, l’administration centrale dispose de peu de marge de manœuvre pour améliorer la viabilité budgétaire des Communes. Pour cette raison, des efforts sont nécessaires pour renforcer le système d’administration des impôts locaux et renforcer le lien entre un recouvrement amélioré des impôts et de meilleurs services pour les citoyens. En lien avec ceci, il est nécessaire d’améliorer la redevabilité sociale et de promouvoir la création de mécanismes plus transparents et systématiques pour la perception de l’impôt et la préparation ou exécution des budgets communaux de développement. Concernant la gestion foncière, la mise en place d’un système de délivrance des titres de propriété sur l’ensemble du pays appelle des appuis financiers conséquents de la part de l’administration centrale ainsi que l’établissement d’un dispositif central de coordination adapté. Tout en saluant les efforts fournis par les autorités nationales, nous espérons que ce rapport fournira une contribution utile pour permettre d’identifier des réformes prioritaires nécessaires pour avancer l’agenda de la décentralisation et de la gouvernance locale au Burundi. Rachidi B. Radji, Représentant Résident pour plus d’informations, veuillez visiter : www.worldbank.org/en/country/burundi Rejoignez la discussion sur: http://www.facebook.com/worldbankafrica http://www.twitter.com/worldbankafrica http://www.youtube.com/worldbank