68097 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu Principales difficultés et facteurs de réussite Accès au financement Forum Rapports CGAP et partenaires No 1, septembre 2011 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite A “La prévention de l’endettement multiple ou excessif repose essentiellement sur la capacité de l’IMF à s’informer sur l’encours de crédit d’un emprunteur potentiel. Cela n’est possible que si l’on établit rapidement une centrale des risques.” – Informe del Comité Malegam, Banco de Reserva de India, janvier 2011 “N’attendez pas que les problèmes se présentent pour mettre en place une centrale des risques.” – Un responsable d’IMF au Nicaragua, automne 2009 “[Notre] Registre central d’information sur les crédits est très complet puisqu’il rassemble les banques commerciales, [les organisations de microcrédit et] toutes les autres catégories d’institutions de crédit. En plus, il est détaillé : il reprend toutes les informations utiles sur tous types d’emprunts, tant pour les particuliers que pour les personnes morales. Ainsi donc – et puisqu’il prévient l’endettement multiple et excessif – il est indispensable de le consulter si l’on veut prendre des décisions de crédit rationnelles. La mise en place du Registre central d’information sur les crédits nous a permis d’atteindre un degré supérieur de discipline financière et... le nombre de prêts insolvables [a] considérablement diminué.” – Kemal Kozarić, gouverneur de la Banque centrale de Bosnie-Herzégovine, avril 2011 © 2011, CGAP et SFI. Tous droits réservés. CGAP 1818 H Street, N.W., MSN P3-300 Washington, DC 20433 USA Téléphone : +1 202.473.9594 Courriel : cgap@worldbank.org www.cgap.org Introduction Au cours des cinq dernières années, le secteur du micro- prêteurs desservant la clientèle “au bas de la pyramide”. crédit a connu une croissance sans précédent. Le MIX Dans de nombreux pays comme le Pérou et le Maroc1, le indique que le nombre d’emprunteurs desservis par les risque de surendettement chez les emprunteurs s’est accru institutions de microfinance (IMF) a triplé pendant cette considérablement. période et atteint 120 millions de clients (en déc. 2009). D’autres estimations portent ce nombre à pas moins de Au cours des derniers mois, rares sont les articles ou blogs 190 millions (campagne du Sommet du microcrédit de sur la crise d’insolvabilité du secteur du microcrédit qui ne 2011). Dans les grands marchés comme le Mexique et mentionnent pas le rôle crucial d’une centrale des risques ef- l’Afrique du Sud, les banques commerciales et les établisse- ficace pour éviter, au moins réduire, le risque de surendette- ments de crédit à la consommation ont élargi leurs activités ment et d’insolvabilité des emprunteurs. Si les centrales des au microfinancement pour les ménages à faible revenu. risques ne peuvent à elles seules engendrer une discipline de crédit dans un marché, ni même compenser l’insuffisance Malheureusement, la croissance du microcrédit n’est pas tou- des normes de souscription de prêt, elles peuvent aider les jours viable. Certains marchés emblématiques comme l’Inde microprêteurs à améliorer leurs pratiques d’octroi de crédits et la Bosnie-Herzégovine sont aux prises avec des crises de et de gestion du risque de crédit ; elles créent aussi une forte crédit à grande échelle, et ils ne sont pas les seuls. En effet, incitation au remboursement pour les emprunteurs. Ces dix selon l’indice Symbiotics SYM50, ces trois dernières années, dernières années, les structures d’information sur la solvabili- le portefeuille à risque des IMF à travers le monde a con- té se sont développées sur les marchés émergents. Toutefois, stamment augmenté. C’est là une tendance inquiétante pour elles sont nombreuses à avoir émergé dans les secteurs un secteur acclamé pour l’excellente qualité de son actif. traditionnels de la banque et du crédit à la consommation. Ce faisant, elles ont souvent laissé de côté les microprêteurs La détérioration de la qualité du portefeuille de prêts des et consommateurs à faible revenu qu’ils servent. Aujourd’hui, IMF peut être attribuée à plusieurs facteurs. Certaines IMF, seul un petit nombre de pays ont des systèmes d’information dont la croissance a été rapide, fonctionnent avec des sur la solvabilité des emprunteurs qui fonctionnent conve­ systèmes et contrôles de gestion du risque qui sont devenus nablement et incluent l’éventail complet des prêteurs ban- insuffisants. Souvent, ces carences ont été exacerbées par caires et non bancaires au service des populations pauvres. un fort taux de renouvellement du personnel, ce qui a érodé davantage la discipline vis-à-vis des crédits. Cette croissance Le présent rapport propose un nouvel état des lieux des rapide s’est concentrée sur des régions peu étendues, ce qui systèmes d’information sur les emprunteurs à faible revenu ; a perturbé les incitations au remboursement et la discipline les données et analyses qui ont servi à son élaboration sont des emprunteurs. Dans certains marchés de microfinance, issues des recherches de la SFI et du CGAP sur ce sujet. l’apparition des banques et des institutions de crédit à la Dans la partie I, nous présentons le marché du microcrédit, consommation a précipité une concurrence malsaine entre la diversité des acteurs et l’évolution de leurs exigences 1. On entend par surendettement le risque qu’encourent les clients de crédit à contracter des dettes dont le montant peut excéder leurs capacités, ou dont le rem- boursement occasionne des sacrifices excessifs. Cette situation peut être attribuable à de nombreux facteurs, dont les erreurs humaines dans l’estimation du niveau d’endettement tolérable (de la part du client ou du prêteur), les changements de revenu des ménages ou encore des événements imprévus qui ont des incidences économiques considérables, par exemple les urgences de nature médicale ou les catastrophes naturelles. Dans de nombreux marchés de microfinance, le surendettement constitue un risque croissant ; il demeure toutefois difficile à déterminer puisqu’il est sous-tendu par cette question, qui est subjective et éminemment personnelle : “qu’est-ce qu’un endettement excessif ?” Toutefois, Schicks et Rosenberg (2011) désignent six concepts, qui peuvent servir de définitions ou de critères indicatifs du surendettement : l’impact négatif, l’insolvabilité et les arriérés (remboursements en retard), les ratios d’endettement, les emprunts multiples, les difficultés et les sacrifices supportés par les emprunteurs, enfin les indicateurs composites. Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite 1 vis-à-vis des informations sur le crédit. La partie II décrit revenu ; y sont également décrits les principaux éléments trois principales approches en matière de partage des de réussite et les problèmes fréquemment rencontrés. données sur les emprunteurs : les centrales des risques, La partie IV présente une synthèse de recommandations les registres de crédit et les mécanismes d’échange de formulées à l’intention des responsables politiques, micro- données clients propres aux IMF. Chaque approche est prêteurs et autres acteurs désireux d’encourager le partage illustrée par un exemple suivi dans un pays. La partie III d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible analyse les enseignements tirés des mécanismes efficaces revenu. de partage d’information sur les emprunteurs à faible Encadré 1. Partage d’informations sur les emprunteurs à faible revenu — Principales considérations • Dans de nombreux marchés, les IMF continuent de à payer pour obtenir et traiter des données de dominer le secteur du crédit au bas de la pyramide. qualité sur les emprunteurs à faible revenu ; (IV) Toutefois, et de plus en plus, d’autres prêteurs l’établissement de l’identité des emprunteurs à – banques commerciales, établissements de prêt à faible revenu ; enfin, (V) la protection de la con- la consommation et détaillants, ainsi que d’autres fidentialité et l’exactitude des renseignements institutions non financières – ciblent ces segments produits, à un prix raisonnable vu le gros volume de marché. Pour que les mécanismes d’information de transactions et la modicité des prêts. Mais les sur les emprunteurs constituent un moyen efficace expériences acquises sur le plan international pour éviter le surendettement au bas de la pyra- révèlent aussi certains facteurs de succès permet- mide, il faut obtenir la participation de tous les tant de surmonter ces difficultés. prêteurs concernés présents sur un marché donné. • Les responsables politiques, bailleurs de fonds et • L’approche à privilégier pour avoir les meilleures prêteurs au service des populations à faible revenu chances de succès – centrales des risques, regis- peuvent tous contribuer à créer des systèmes tres de crédit, bases de données clients propres d’information sur le crédit qui recueillent des don- aux IMF, ou encore une combinaison de ces nées raisonnablement exactes et complètes sur les méthodes – dépend de facteurs propres à chaque emprunteurs du bas de la pyramide et couvrent pays. Ces diverses approches ne s’excluent pas les toute la gamme des institutions formelles auprès unes les autres puisque, dans un même pays, on desquelles ces clients contractent des prêts. Les peut tout à fait envisager de conjuguer deux ou responsables politiques sont en mesure d’écarter plusieurs démarches. les obstacles de réglementation qui entravent la • Les systèmes d’information sur les emprunteurs, participation ; ils peuvent aussi créer des mesures comme les marchés de crédit, sont dynamiques ; incitatives, voire établir des mandats, si la sup- ils sont donc susceptibles d’évoluer en fonction pression des barrières réglementaires ne suffit pas des mutations du marché et de la réglementation, pour couvrir convenablement le marché. Quant mais aussi en réponse aux exigences des prêteurs aux bailleurs de fonds, ils ont les moyens d’aider et des consommateurs réclamant des services de les responsables politiques, les fournisseurs de meilleure qualité. services d’information sur le crédit et les prêteurs • Aucune approche ne garantit à elle seule le succès au bas de la pyramide à comprendre les avantages sur aucun marché, et chacune présente certaines offerts par des systèmes exhaustifs d’information contraintes, prévisibles ou probables, en particulier sur la solvabilité et à surmonter les obstacles ; ils liées à la catégorie de prêteurs autorisés ou incités ont aussi les moyens d’expliquer aux emprunteurs à participer. à faible revenu pourquoi de tels systèmes sont à • Au bas de la pyramide, il existe des obstacles leur avantage. Le premier rôle revient aux prêteurs : à l’efficacité des systèmes d’information sur la les données qu’ils fournissent et les rapports sur la solvabilité, notamment (I) la difficulté de mettre en solvabilité qu’ils achètent constituent les fonde- place des systèmes d’information sur les em- ments des systèmes d’information sur les emprun- prunteurs qui couvrent toutes les catégories de teurs, qui ont le potentiel d’encourager la respon- prêteurs dans un marché donné ; (II) les contraintes sabilité dans l’octroi de crédits aux segments à de réglementation ou de coûts qui limitent la faibles revenus et d’éviter les pratiques de prêt participation ; (III) le prix comparativement élevé irresponsables qui aboutissent au surendettement. 2 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite Partie I. Le crédit aux segments à faible revenu et la demande d’information sur les emprunteurs Selon certaines estimations crédibles, le nombre de micro-em- clients ; ils ont plutôt besoin d’informations pour orienter prunteurs desservis par les IMF varie entre 120 millions et leurs modèles et décisions de crédit. À mesure que le crédit 190 millions à travers le monde2 . Cependant, on estime à s’étend au marché de masse des services financiers au bas de 2,7 milliards le nombre d’adultes qui, à l’échelle mondiale, ne la pyramide, la nécessité de disposer d’informations fiables et disposent pas de compte de crédit ou de compte d’épargne exactes sur les emprunteurs à faible revenu – actuels et poten- en leur nom dans une banque ou autre institution officielle tiels – grandit également. (CGAP et Banque mondiale, 2010). La plupart de ces personnes non bancarisées sont pauvres ; bon nombre d’entre elles sont employées dans le secteur informel et leurs revenus sont gé- néralement irréguliers. Ces consommateurs ont besoin de prêts Comprendre les besoins d’information pour lisser leur consommation et acheter des biens de consom- des différents prestataires de services mation ou encore des biens durables comme des terres, des financiers desservant les populations à animaux, un logement ou des outils de travail. Généralement, ils ne disposent pas non plus de biens physiques à offrir en garan- faible revenu tie. Pour ces clients au bas de la pyramide, le fait d’acquérir une “garantie de réputation” au moyen d’un système d’information En général, on peut distinguer quatre grandes catégories de sur la solvabilité peut s’avérer un très grand atout, puisqu’il les microprêteurs : les prêteurs informels ; les prestataires de ser- aide à obtenir des crédits auprès de leur(s) prêteur(s) existant(s) vices financiers spécialisés, comme les IMF ; les banques com- et leur permet de solliciter des crédits auprès d’autres sources, merciales et les établissements de crédit à la consommation ; au lieu d’être lié à un seul prestataire. enfin, les fournisseurs de biens et services comme les détaillants (pharmacies, épiceries, etc.) ou, en milieu rural, les entreprises De plus en plus, les responsables politiques reconnaissent la qui fournissent des intrants agricoles. À l’intérieur de chacune nécessité de services financiers aux segments à faible revenu de ces catégories, l’octroi du crédit peut revêtir plusieurs et la relation existant entre l’accès au financement et d’autres formes. Toutefois, en règle générale, ces microprêteurs ont en objectifs de développement notamment en matière de ren- commun certains éléments opérationnels, notamment la nature forcement des moyens d’existence, de santé, d’éducation et de leur besoin en informations sur la solvabilité des emprun- de parité hommes-femmes. Le secteur privé a lui aussi compris teurs et l’utilisation qu’ils font de cette information. le marché potentiel que représentent ces 2,7 milliards de con- sommateurs. Dans ce segment, les nouveaux arrivants, dont Prêteurs informels. Dans de nombreux marchés, les presta- les banques commerciales, les sociétés émettrices de cartes taires de services financiers informels, comme les prêteurs de crédit, les établissements de crédit à la consommation et d’argent, ainsi que les prêteurs semi-formels, comme les d’autres détaillants proposent maintenant à des consomma- banques villageoises en Afrique ou les groupes d’entraide en teurs de moins en moins fortunés des produits de crédit et au- Inde, constituent une source importante de microcrédit pour tres services financiers. Ces nouveaux prestataires n’emploient les familles à faible revenu. C’est particulièrement le cas en pas de méthodologies de crédit à forte interaction avec les Afrique subsaharienne3 . Les prêteurs informels font partie de 2. Voir la Campagne du Sommet du microcrédit (2011) et l’indice Symbiotics SYM50. Cf. Wyman (2008), dont les estimations portent à 180 millions le nombre d’emprunteurs à travers le monde, tous prêteurs confondus, surtout pour les besoins de microentreprises. 3. Une enquête récente Finscope en Tanzanie révèle que 16,5 % de la population adulte de ce pays contracte des crédits auprès de prêteurs informels, mais que seulement 1,5 % emprunte auprès des institutions financières officielles. Les microprêteurs informels sont caractérisés par des taux d’intérêt relativement élevés et un manque de fiabilité (Armendariz de Aghion et Morduch, 2005). Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite 3 la communauté et, en général, connaissent bien leurs clients. pour offrir de nouveaux produits aux familles à faible revenu. Ils n’ont pas recours aux informations issues des centrales Parmi ces acteurs figurent la Banque centrale populaire au des risques officielles mais recueillent plutôt des renseigne- Maroc, qui propose des prêts à la consommation et d’autres ments sur l’historique de crédit de leurs clients en utilisant produits financiers (épargne et assurance) aux familles pau- leurs réseaux sociaux et leurs relations personnelles avec les vres. Ces institutions de crédit formelles préfèrent octroyer emprunteurs. Vu l’impossibilité de collecter convenablement des prêts aux emprunteurs à faible revenu qui perçoivent des les informations concernant ces prêteurs informels, le taux revenus réguliers sous forme de salaires ou allocations. En de couverture du marché d’un système d’information sur les général, elles recourent à des méthodes de scoring (notation emprunteurs, quel qu’il soit, ne traduit jamais l’intégralité des de crédit) et tiennent à intégrer des informations de crédit activités de crédit dans un pays donné. dans leur processus d’instruction des prêts, lorsque celles- ci existent. Cependant, l’expérience des établissements de Institutions de microfinance. Les IMF sont des prestataires crédit à la consommation dans le secteur du microcrédit financiers qui ciblent en priorité les segments de marché à n’a pas toujours été couronnée de succès. C’est ainsi qu’en faible revenu. Elles peuvent être des institutions financières Bolivie, durant les années 1990, ces sociétés proposaient à réglementées (banques ou sociétés de financement régle- des salariés, rapidement et à des conditions très souples, des mentées), mais dans la plupart des marchés, la majorité des prêts d’un montant similaire aux crédits offerts aux micro- IMF revêtent d’autres formes juridiques, comme les coopéra- entreprises. Bien que, en théorie, le marché du crédit à la tives financières et les organisations non gouvernementales consommation soit différent du marché du microcrédit – des (ONG). Les IMF sont devenues une source majeure de micro- salariés d’un côté et des entreprises du secteur informel de crédit pour les personnes pauvres. Les 1 929 IMF communi- l’autre – dans la pratique, les établissements de crédit à la quant leurs informations au MIX sont présentes dans consommation sont souvent en concurrence directe avec 111 pays et desservent 91,7 millions de clients de microcrédit. d’autres microprêteurs, y compris les IMF. Lorsque le marché Peu à peu, de nombreuses IMF ont acquis des méthodes bolivien du microcrédit a entamé une expansion – non vi- de crédit originales et solides, souvent grâce à l’entretien able – en raison de l’arrivée des établissements de crédit à la de relations étroites entre l’agent de crédit et le client et à consommation, l’une des principales réponses politiques du de bonnes connaissances sur la réputation et les activités gouvernement a été de renforcer les systèmes d’information génératrices de revenus du client, elles-mêmes sous-tendues sur les emprunteurs à faible revenu. par de fréquentes visites sur le lieu de son activité et par un recours à des formes de caution non traditionnelles comme Détaillants et autres prestataires de crédit non financiers. les cautions mutuelles collectives. Les détaillants et autres entreprises qui offrent des produits ou services à crédit ou à paiement différé (services publics, Récemment encore, de nombreuses IMF disposaient d’actifs écoles ou fournisseurs d’intrants agricoles) peuvent aussi de qualité excellente, la moyenne sectorielle pour les prêts employer des méthodes de crédit classiques, lesquelles improductifs – définie comme le portefeuille à risque à plus nécessitent un accès aux dossiers de crédit. Tandis que les de trente jours – ne dépassant jamais 44 %.Dans ce contexte, petits détaillants ont tendance à fonder leurs décisions sur la plupart des responsables d’IMF considèrent qu’ils peuvent des relations informelles avec leurs emprunteurs – à l’instar fonctionner sans mécanismes formels d’information sur la des prêteurs du secteur informel cités précédemment – les solvabilité. Ce n’est que dans de rares marchés, plus matures grands détaillants doivent disposer de certaines informa- et concurrentiels comme le Pérou, la Bolivie et l’Équateur, tions de crédit pour mettre en œuvre leurs techniques de que les IMF tiennent compte des rapports de solvabilité crédit et de gestion du risque. Étant donné que de nom- dans le processus d’instruction des demandes de prêt. breux consommateurs à faible revenu commencent par Toutefois, selon Lascelles et Mendelson (2011), le risque de avoir accès au crédit à l’occasion d’un achat auprès d’un dé- crédit est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands taillant ou via le règlement différé de services publics avant risques pour le secteur des IMF. C’est la raison pour laquelle de bénéficier de prêts d’une institution financière formelle, de nombreux conseillers politiques, experts du secteur et il pourrait être utile d’inclure ces prestataires dans les responsables d’IMF appellent à une intégration des systèmes systèmes d’information sur les emprunteurs pour constituer d’information sur les emprunteurs – existants ou futurs – dans l’historique de crédit des personnes non bancarisées. Par le secteur de la microfinance. ailleurs, il importe de signaler que dans certains marchés, dont plusieurs en Amérique latine (Pérou, Uruguay et Chili), Banques et établissements de crédit à la consommation. les détaillants recueillent et échangent depuis longtemps Les banques et établissements de crédit à la consommation des informations sur les paiements de leurs clients, que ce pénètrent aujourd’hui les segments inférieurs du marché soient des particuliers ou des entreprises. 4. Voir les tendances référentielles 2006-2008 du MIX qui portent sur 1 019 IMF à travers le monde. 4 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite Partie II. Exemples d’approches adoptées pour le partage d’information sur les emprunteurs à faible revenu À travers le monde, trois grandes approches caractérisent les à déterminer les approches à retenir, les obstacles à prévoir tentatives visant à inclure les emprunteurs à faible revenu aux et les initiatives qui ont les meilleures chances de réussite. systèmes d’information sur la solvabilité. Souvent, ces ap- proches ont été combinées, et l’on recense presque autant Il importe également de comprendre que ces trois ap- de déclinaisons nationales que de pays concernés. (Voir proches de gestion des informations sur la solvabilité ne encadré 2.) Les centrales des risques ont tenté d’élargir leurs s’excluent pas l’une l’autre. En effet, dans un pays, il est fort bases de données de manière à inclure les données sur les possible d’allier deux démarches, voire les trois, tout comme remboursements effectués par les particuliers à faible revenu (et il est possible d’adopter des versions hybrides. Par ailleurs, d’étendre leur propre clientèle à des prêteurs comme les IMF les systèmes d’information sur les emprunteurs, comme les qui ciblent ces particuliers). Il est arrivé, quoique rarement, que marchés de crédit, sont dynamiques ; ils sont donc suscep- les registres de crédit intègrent les microprêteurs non bancaires tibles d’évoluer en fonction des mutations du marché et de (principalement dans des pays où ils ont été assujettis à la régle- la réglementation, mais aussi en réponse aux exigences des mentation de l’autorité de surveillance bancaire5 ). Enfin, des prêteurs et des consommateurs réclamant des services de bases de données clients propres aux IMF ont été constituées, meilleure qualité. Enfin, aucun des trois modèles ne garantit souvent en raison des obstacles qui s’opposent à l’intégration en soi le succès sur aucun marché, et chacun présente cer- dans les centrales des risques ou registres de crédit soit des cli- taines contraintes, prévisibles ou probables7 . ents à faible revenu, soit des prêteurs non bancaires qui ciblent ces clients, soit de ces deux groupes à la fois6 . Centrales des risques. Les centrales des risques, ou bureaux de crédit, rassemblent des informations sur l’historique de Cependant, ces trois principales approches ne sauraient crédit d’un emprunteur ; elles s’appuient sur diverses sources, cons­tituer une simple liste à partir de laquelle les respon- dont les institutions financières, les prêteurs non bancaires, les sables politiques ou les acteurs sectoriels peuvent choisir opérateurs de télécommunications, les tribunaux et d’autres leur solution. En effet, de nombreux facteurs influencent la sources d’information disponibles. Les données ainsi obtenues manière dont les mécanismes d’information sur les emprun- sont ensuite fusionnées et analysées pour constituer un dossier teurs sont conçus dans un pays, y compris la structure de complet des antécédents de crédit de chaque emprunteur. Elles ses marchés de crédit de détail (en particulier, la concentra- sont ensuite vendues aux prêteurs sous forme de rapports de tion des actifs au sein de quelques institutions et le degré crédit (ou de solvabilité). La plupart des centrales des risques sont de recoupement du marché cible de différentes classes de de nature privée ; ce sont des sociétés commerciales que l’on prêteurs visant les segments à faible revenu), ainsi que le trouve dans plus d’une centaine de pays à travers le monde. En cadre de réglementation du système financier (en particulier, général, elles recensent un vaste éventail de données, consti- le degré de réglementation réelle des prêteurs non ban- tuées des informations sur les remboursements à la fois positives caires). Les orientations politiques des bailleurs de fonds (paiements honorés dans les temps) et négatives (paiements en ainsi que l’économie politique du pays contribuent elles aussi retard). Bien entendu, au niveau tant national qu’international, la 5. Les centrales des risques et les registres d’information sur les crédits constituent des catégories différentes de fournisseurs d’information de solvabilité. Les prestataires de services sont des organismes soit privés soit publics. Les centrales des risques représentent un modèle d’échange d’information sur le crédit ; elles ont pour mission première d’améliorer et de multiplier les données disponibles aux créanciers pour que ceux-ci prennent des décisions mieux informées. Les registres d’information sur les crédits constituent un modèle d’échange d’information sur le crédit, qui a pour principaux objectifs de contribuer à la surveillance bancaire et de fournir aux institutions financières réglementées les données qui leur permettront d’améliorer la qualité de leur portefeuille de prêts. Pour en savoir davantage, voir Banque mondiale (2011). 6. Aux fins du présent rapport, les expressions “fournisseurs d’information de solvabilité”, mécanismes d’information de solvabilité” ou, simplement, “informations de sol­ vabilité” correspondent globalement aux centrales des risques, registres d’information sur les crédits ou bases de données propres aux IMF, ceci pour éviter de citer plusieurs fois les trois approches générales décrites dans cette section. 7. Les nombreuses contraintes qui s’opposent à la mise en place de systèmes convenables d’information de solvabilité au bas de la pyramide sont décrites dans la partie III. Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite 5 Encadré 2. Équateur Encadré 3. Bosnie-Herzégovine Le réseau équatorien de financement rural, dénommé En Bosnie-Herzégovine, l’année 2000 marque la créa- RFR, a envisagé plusieurs formes de centrales des tion de LRC, centrale des risques dont la structure de risques, décidant en fin de compte de forger un parte- propriété et de gérance est privée. La centrale n’a pu nariat avec l’une des centrales des risques privées cependant préserver le marché du crédit d’une crise opérant dans le pays, Credit Report. RFR a choisi de surendettement survenue en 2009. Apparemment, cette société en raison de la solidité de sa plateforme la crise serait attribuable en partie au caractère volon­ technologique et de sa santé financière, parce qu’elle taire de la participation à LRC, le résultat étant une appartient à Equifax, une centrale des risques inter- couverture incomplète des informations sur la sol­ nationale (gage d’expérience), et en raison du prix vabilité. En réponse au problème de surendettement, garanti aux membres de RFR pour chaque rapport le Conseil d’administration de la banque centrale a de crédit. Au moment où RFR a conclu le marché, il étendu la portée de son registre central d’information existait en Équateur six centrales des risques privées. sur les crédits (connu localement sous la dénomina- En 2011, à l’issue de plusieurs années de concurrence tion abrégée de CRK). Les institutions financières intense et de guerre des prix (un rapport de solvabilité réglementées, c’est-à-dire tous les prêteurs formels, coûtait alors moins de 0,10 USD), seule Credit Report dont les banques et les IMF, sont tenues de s’inscrire demeure. La société doit en partie sa réussite au au CRK. Bien que LRC propose une gamme de ser- fait qu’elle a accès comme nulle autre aux informa- vices plus large, ils sont plus onéreux et ne couvrent tions sur les emprunteurs à faible revenu par le biais toujours pas l’intégralité du marché. En revanche, les des membres de RFR et offre donc une plus grande services du CRK sont plus abordables et, surtout, ce couverture de marché par rapport à ses concurrents. registre couvre la totalité du marché de crédit. En collaborant avec une centrale des risques privée, RFR et les IMF que sert le réseau ont pu accéder à des informations provenant d’autres segments du marché de crédit, à des instruments complémentaires, comme voire toutes (sauf si elles sont agréées comme institutions le scoring, et à des informations solides, et ce à un prix bancaires). Toutefois, dans un nombre croissant de pays, un très avantageux. certain nombre d’IMF sont aujourd’hui surveillées formelle- ment par les autorités bancaires (même si les prêteurs qui ne collectent pas de dépôts sont, à raison, exempts d’une régle- mentation prudentielle complète). Le résultat est que les IMF qualité et l’étendue des centrales des risques varient. Toutefois, ont le choix – mais sont généralement tenues – de s’inscrire à en règle générale, les centrales des risques contiennent des un registre d’information sur les crédits (voir encadré 4). Pour informations qui proviennent de sources très diverses, dont les la plupart des registres de crédit, l’objectif principal est de institutions non bancaires et non financières, comme les services contribuer à la surveillance bancaire et de fournir des infor- publics, dont les informations concernent des clients pauvres sans mations aux institutions financières réglementées pour leur expérience de crédit auprès d’un prêteur formel (voir encadré 3). permettre de mieux gérer leur risque de crédit et d’améliorer Les centrales des risques se distinguent des autres fournisseurs la qualité de leur portefeuille de prêts. d’information sur la solvabilité par la vaste gamme de services à valeur ajoutée qu’elles proposent en plus des rapports de crédit. Bases de données clients propres aux IMF. Pour les mi- Parmi ces services figurent, en général, la cote de crédit, qui croprêteurs, il existe une troisième approche du partage représente un rang ou “score” indiquant la solvabilité relative (ou d’informations sur le crédit qui provient généralement du le risque) des clients, ainsi que d’autres services comme la vérifi- secteur de la microfinance lui-même (voir encadré 5). À travers cation d’identité, le recouvrement de dettes, la surveillance des le monde, les IMF, quelle que soit leur forme juridique, ont fraudes, et d’autres encore. De nombreuses centrales des risques commencé à échanger spontanément certaines informations servent expressément les IMF et d’autres prêteurs qui ciblent concernant l’historique de crédit de leurs clients. Au début, les emprunteurs du bas de la pyramide et sont à la fois fournis- cette pratique était très informelle, et consistait par exemple à seurs d’information et acheteurs de rapports de crédit et cotes communiquer des fichiers Excel contenant des “listes noires” de crédit. Toutefois, on recense également certaines centrales de noms de clients en retard. Ces méthodes ont de sérieuses des risques qui appartiennent à des banques et d’autres grandes limites (sur le plan juridique pour commencer), mais elles peu- institutions financières ou sont dominées par ces acteurs, et qui vent être mises en place relativement vite et fournir des rensei- excluent quasiment la participation des IMF et d’autres prêteurs gnements importants sur la clientèle commune à plusieurs IMF de nature similaire. et sur les emprunteurs en retard. Certains bailleurs de fonds, inquiets des obstacles qui pourraient s’opposer à ces prêteurs Registres de crédit. En général, les registres de crédit ap- s’ils souhaitent participer aux centrales des risques ou aux partiennent à une banque centrale ou autre autorité de registres de crédit, ont encouragé l’établissement de bases surveillance bancaire qui assure son fonctionnement. Dans la de données clients propres aux IMF. Au fur et à mesure, dans plupart des pays, les registres de crédit rassemblent des in- certains grands marchés, ces bases de données ont évolué et formations de crédit qu’elles obtiennent auprès d’institutions se sont transformées en centrales des risques de propriété et financières soumises à la réglementation prudentielle, et qui de gérance privées (ou hybrides). peuvent exclure de nombreuses institutions de microfinance, 6 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite Encadré 4. Nicaragua Au Nicaragua en 2002, les IMF ont commencé à échan­ le crédit, et une centrale des risques bénéficiant de ger des informations par le biais de Sin Riesgos, centrale l’investissement d’une grande centrale des risques inter- des risques promue par l’association nicaraguayenne nationale faisait son entrée sur le marché. Aujourd’hui, le de microfinance ASOMIF. À sa création, Sin Riesgos marché du microcrédit au Nicaragua est desservi par Sin était la seule centrale des risques privée fonctionnant Riesgos mais aussi par la centrale des risques internatio- dans ce pays. Les banques commerciales étaient dans nale TransUnion. Peu à peu, Sin Riesgos a approché des l’impossibilité d’échanger des données de crédit en prêteurs hors IMF, dont des détaillants et des banques dehors du registre public d’information sur les crédits en commerciales. De même, TransUnion a gagné le secteur raison d’un cadre juridique régissant le secret bancaire. de la microfinance, surtout après la récente crise et le En 2004, la loi sur le secret bancaire a été modifiée mouvement collectif de refus de remboursement. de sorte à permettre les échanges d’information sur Encadré 5. Les centrales des risques à travers le monde Dans son enquête annuelle Doing Business, la Banque mondiale évalue les réglementations des affaires qui touchent des sociétés commerciales locales dans 183 pays et certaines villes. L’indicateur Obtention de prêts de Doing Business couvre les éléments suivantsa : • Indice de portée des données de crédit. Quantifie les règles et pratiques touchant la couverture, l’envergure et l’accessibilité des données de crédit disponibles par le biais d’un registre public d’information sur les crédits ou d’une centrale des risques privée. • Couverture des registres publics. Énumère le nombre de particuliers et de sociétés inscrits dans un registre public d’information sur les crédits et décrit leur historique d’emprunt au cours des cinq dernières années. • Couverture des registres privés. Énumère le nombre de particuliers et de sociétés inscrits dans une centrale des ris- ques privée et décrit leur historique d’emprunt au cours des cinq dernières années. Données comparatives de la présence régionale des centrales des risques (2010) Indice de portée des Couverture des Couverture des données de crédit registres publics (part centrales des risques (0 à 6, 6 = note maximale) de la population privées (part de la adulte) population adulte) Asie de l’Est et Pacifique 2,1 8,2 17,3 Europe de l'Est et Asie centrale 4,0 13,1 21,3 Amérique latine et Caraïbes 3,3 10,1 31,5 Moyen-Orient et Afrique du Nord 3,3 5,3 7,0 OCDE 4,7 8,0 61,0 Asie du Sud 2,1 0,8 3,8 Afrique subsaharienne 1,7 2,7 4,9 a. Disponible sur www.doingbusiness.org. L’indicateur “ Obtention de prêts “ évalue également les droits légaux des emprunteurs et des prêteurs vis-à-vis des transactions avec garantie. Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite 7 Partie III. Contraintes et succès des systèmes d’information sur les emprunteurs à faible revenu Globalement, on peut regrouper en quatre catégories Couverture du marché. L’un des principaux moteurs de les contraintes qui font obstacle au fonctionnement de l’efficacité des systèmes d’information sur les emprunteurs systèmes efficaces de partage d’information sur les em- à faible revenu est la part de marché couverte par les mi- prunteurs à faible revenu (et les facteurs qui influencent croprêteurs. Vu l’impossibilité de capter des informations l’efficacité de ces systèmes dans la prévention du suren- concernant les prêteurs informels, le taux de couverture de dettement chez ces emprunteurs) : marché ne peut jamais traduire l’intégralité des activités de crédit dans un pays donné. Même si l’on fait abstraction 1. Les difficultés au niveau du marché, qui touchent tous de cette contrainte particulière, l’élaboration de bases de les prêteurs qui ciblent ce segment, toutes catégories données de solvabilité qui captent des données exactes confondues. et complètes sur toutes les catégories de prêteurs offi- 2. Les difficultés au niveau des prêteurs, qui varient en ciels desservant les emprunteurs à faible revenu – IMF (et fonction des caractéristiques de la catégorie de prêteur autres établissements de microcrédit, comme les coopéra- en question, surtout au regard de la réglementation. tives financières), banques, établissements de crédit à la 3. Les difficultés au niveau des fournisseurs d’information consommation et détaillants, ainsi que d’autres institutions sur la solvabilité, liées à la qualité et à la pérennité de crédit non financières – est une tâche formidable ; les des services d’information sur la solvabilité fournis aux prestataires qui ont réussi à la réaliser intégralement et à microprêteurs. la pérenniser sont rares, voire inexistants. Si la couverture 4. Les difficultés au niveau des emprunteurs, qui sont di- maximale de marché constitue l’idéal, en réalité, il n’est rectement en rapport avec les emprunteurs pauvres dont pas toujours possible d’y parvenir. En outre, à court terme, les informations figurent dans les centrales des risques. en essayant d’atteindre cet idéal, on risque de ralentir et d’entraver les initiatives de partage des informations de Ces catégories de contraintes et facteurs de réussite sont crédit concernant les populations à faible revenu. Souvent étroitement liée et se recoupent souvent. Ainsi, un élément les fournisseurs d’information sur la solvabilité commen- de contrainte ou de réussite à un niveau aura probablement cent à collaborer avec les microprêteurs qui possèdent la des effets sur les autres niveaux. plus grande part du marché avant d’approcher les acteurs minoritaires. Les raisons qui expliquent une couverture de marché mar- Difficultés au niveau du marché. ginale sont nombreuses et elles varient selon les régions et les pays. Les facteurs les plus importants relèvent souvent Parmi les problèmes de marché qui touchent les systèmes des prêteurs : statut réglementaire particulier déterminant d’information sur les emprunteurs à faible revenu, il est la participation à un système d’information sur la solvabilité, possible d’en dégager trois parmi les plus importants : (I) considérations de coût et bénéfice propres à chaque prêteur le taux de couverture effectif des systèmes d’information ciblant les clients au bas de la pyramide (voir plus loin), etc. sur les emprunteurs par rapport à la totalité des principaux Parfois, la manière dont un prêteur collecte et consigne ses prêteurs qui ciblent les emprunteurs à faible revenu ; (II) la informations constitue un facteur d’explication. Par exemple, viabilité d’un système d’identification unique des emprun- si une centrale des risques cherche à obtenir des informa- teurs pauvres ; enfin, (III) la qualité des données susceptibles tions sur des paiements en retard de sept ou quatorze d’être collectées sur ces emprunteurs. jours, et qu’un prêteur comptabilise les prêts en retard de 8 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite remboursement à une échéance de trente ou soixante jours, disposent pas de systèmes nationaux d’identification le prêteur peut être contraint de changer ses modalités de fiables et complets. Les approches utilisées dans les pays reporting interne et sa définition de l’insolvabilité pour partici- moins pauvres mais qui n’ont pas de systèmes nationaux per à la centrale. Si l’on décide d’un commun accord d’établir d’identification – comme la saisie de données dans plusieurs des modèles uniformes de collecte et d’enregistrement des champs informatiques (nom, date de naissance et adresse données sur les remboursements de prêts, on peut faciliter le de l’emprunteur) – peuvent ne pas être aussi efficaces pour partage des informations de crédit dans un marché donné. les emprunteurs au bas de la pyramide. La raison est que les noms et coordonnées des emprunteurs à faible revenu Parfois, les pressions concurrentielles découragent l’échange peuvent être saisis différemment chaque fois qu’ils deman- des informations de crédit et une couverture complète du dent un prêt ou un service. Cela peut être lié aux variations marché. En particulier, s’il existe un ou deux gros prêteurs dans l’orthographe d’un nom (un problème particulier desservant le bas de la pyramide, il est possible que ces pour les emprunteurs analphabètes, dont les formulaires der­niers voient peu d’intérêt, voire aucun, à échanger des de demande sont renseignés par un tiers), à l’absence données avec un fournisseur d’information sur la solvabilité d’adresse fixe et d’acte de naissance, voire même au fait que puisqu’ils détiennent déjà des informations sur une part consi- l’emprunteur ignore sa propre date de naissance. Parfois, les dérable de la population qui constitue leur clientèle. Les prê- données d’identification peuvent servir à des fins de vérifica- teurs dominants peuvent aussi considérer que tout échange tion, mais ne sont pas saisies dans un système électronique. d’information nuit à leur position concurrentielle si cet échange permet à d’autres acteurs d’entrer sur le marché plus Dans les pays où existe un système national d’identification, facilement ou d’augmenter leur part. Bien entendu, ce prob- on peut envisager d’accroître l’efficacité du système de lème n’est pas propre au secteur du financement au bas de la partage d’information sur les emprunteurs à faible revenu pyramide ; cette même dynamique est parfois à l’œuvre dans simplement en obligeant les prêteurs souhaitant partici- les marchés bancaires traditionnels, dans lesquels un ou deux per au système à vérifier systématiquement l’identité des prêteurs dominants peuvent retarder ou empêcher le déve­ emprunteurs. C’est ce qui s’est passé au Pakistan, lorsque loppement de systèmes d’information sur les emprunteurs. la base de données clients propre aux IMF a été lancée par Datacheck, une centrale des risques privée déjà présente Les facteurs de réussite en matière de couverture du marché dans le pays, en collaboration avec le réseau pakistanais de sont aussi variés que les obstacles. En général, les systèmes microfinance Pakistan Microfinance Network. Il importe de d’information sur le crédit devraient encourager des échan­ noter que l’absence d’un système national d’identification ne ges d’information exhaustifs, ce qui implique une collecte devrait pas empêcher ou retarder l’élaboration d’un système de données fiables, actualisées et pertinentes auprès de d’information sur le crédit. Dans de nombreux marchés, les toutes les sources d’information utiles et disponibles. Dans centrales des risques ont créé des algorithmes et pro- certains marchés, l’autorité de réglementation financière grammes sophistiqués permettant de dériver l’identité d’une peut contraindre les entités financières réglementées à com- personne à partir de divers éléments d’information. Dans les muniquer des informations au fournisseur d’information sur pays dépourvus de systèmes nationaux d’identification, pour la solvabilité existant, de façon à réduire le risque systémique assurer le succès des systèmes d’information sur les emprun- au moyen d’une transparence accrue. Toutefois, certaines teurs à faible revenu, il faut tout d’abord tirer le meilleur parti sources d’information pertinentes peuvent ne pas être du des méthodes d’identification imparfaites existantes. Il arrive ressort de l’autorité de réglementation financière (par ex. les souvent que les fichiers d’agences publiques contiennent opérateurs de télécommunications, les services publics et les des données d’identification pouvant améliorer la capacité microprêteurs non réglementés) ; il peut arriver également d’un fournisseur d’information sur la solvabilité à identi- qu’elles soient peu encouragées à participer aux échanges fier correctement les emprunteurs. Toutefois, les bases de d’information sur la solvabilité. Par ailleurs, la coordination données détenues par ces agences ne sont pas toujours à entre les autorités de réglementation et la reconnaissance, à la portée de ces fournisseurs ou, lorsqu’elles le sont, elles travers le marché, de l’importance des centrales des risques sont payantes. Par conséquent, pour réduire les problèmes sont essentielles pour garantir l’exhaustivité des données d’identification des emprunteurs, il peut être nécessaire de collectées par les fournisseurs d’information sur la solvabilité. contraindre les agences publiques à communiquer leurs Parmi ces fournisseurs, une certaine concurrence peut aussi données aux fournisseurs d’information sur la solvabilité. encourager la création de bases de données exhaustives ainsi que l’innovation dans les produits et services connexes. Qualité des données. De même que tous les prêteurs au bas de la pyramide sont concernés par l’aptitude à identi- Identification du client. De nombreux pays connaissent des fier les emprunteurs à des fins de partage d’informations sur difficultés considérables à relever le défi de l’identification la solvabilité, de même tous sont concernés par la qualité personnelle des clients au bas de la pyramide à des fins et la fiabilité des données collectées par tout fournisseur de partage d’information sur la solvabilité. Et pourtant, en d’information sur la solvabilité, quelle que soit son approche. l’absence d’un moyen fiable d’identifier les emprunteurs, les mécanismes d’information sur les emprunteurs s’avèrent La capacité des divers prêteurs à fournir des données fiables plus onéreux et la qualité des données s’en ressent, par- et de qualité est sans doute variable et, de ce point de vue, la fois même au point que les informations qui en résultent qualité des données est bien un élément qui relève des prê- s’avèrent peu utiles, voire pas du tout. teurs. De même, les éléments qui contribuent à l’existence de données fiables et de qualité dans les systèmes d’information Les facteurs qui contribuent à cette difficulté sont bien sur les emprunteurs à faible revenu dépendent généralement connus : de nombreux pays, surtout les plus pauvres, ne des caractéristiques des prêteurs qui y participent. Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite 9 et les établissements de crédit à la consommation, qui se basent généralement sur la cote de crédit pour établir Encadré 6. Les limites des les conditions de prêt, ont toutes les chances de tirer systèmes d’information sur avantage d’un tel service. Cependant, selon leur position sur le marché, même ces prêteurs peuvent n’y voir aucun le crédit dans la détection du avantage. Comme indiqué précédemment, les grands surendettement prêteurs, quelle que soit leur catégorie, et dans n’importe quel marché, préfèrent parfois garder pour eux les informa- tions dont ils disposent par crainte que leurs concurrents Le partage des informations de crédit peut être un n’empiètent sur leur part de marché. moyen utile de surveiller le recours aux produits de crédit par les populations à faible revenu. En ce qui concerne les IMF et d’autres prestataires de Les informations ainsi produites peuvent aider à services de microcrédit, comme les coopératives finan- établir certains principes concernant la protec- cières, il arrive souvent que les avantages des mécanismes tion du consommateur ou encore la sélection des d’information sur les emprunteurs n’apparaissent pas claire- emprunteurs et les critères d’octroi de prêts, dans ment avant une saturation sans équivoque du marché et des le cadre de politiques publiques ou du secteur emprunts croisés évidents entre les clients respectifs. Sur de privé. Cependant, les systèmes d’information sur nombreux marchés, une concurrence timide entre prêteurs les emprunteurs ne peuvent pas tout révéler de officiels est courante, surtout en milieu rural. Par ailleurs, leur vie financière. Ainsi, l’historique de crédit des même sur les marchés plus matures, les IMF réussissent emprunteurs doit être allié à d’autres informations parfois à briser la concurrence en décidant officieusement concernant leur vie financière afin de parvenir à un de se partager le marché (comme c’était le cas en Égypte profil plus complet du degré d’inclusion financière pendant longtemps). Cependant, dans des marchés de plus et de tout risque de marché potentiel résultant en plus concurrentiels, les méthodes de crédit traditionnelles d’un surendettement. Suit une liste des principales fondées sur une connaissance approfondie des clients ne limitations propres aux systèmes d’information sur suffisent pas pour écarter le risque de surendettement et, le crédit : souvent, les avantages offerts par les systèmes d’information sur le crédit se précisent alors même que se multiplient les • Les données ne fournissent aucune informa- preuves d’emprunts croisés entre IMF. tion sur le ratio dette/revenu, qui est important pour évaluer la capacité d’endettement de Néanmoins, tous les responsables d’IMF ne considèrent l’emprunteur et son risque de surendettement. pas les crédits multiples sous un mauvais jour. Au début • De même, le critère le plus couramment analysé tout au moins, ils considèrent qu’ils constituent un moyen à des fins de suivi du marché à faible revenu – le de mieux répartir les risques entre microprêteurs. De plus, nombre de crédits en cours simultanés – n’a pas ils sont nombreux à comparer les avantages offerts par fait ses preuves comme mesure universelle du une participation à une centrale des risques avec le risque risque d’endettement à l’échelle d’un individu ou de se faire prendre leurs meilleurs clients par d’autres IMF d’un marché. soucieuses d’accroître leur part de marché. Enfin, la crainte • L’unité économique utilisée par les centrales souvent légitime des IMF que le service d’information sur la des risques est l’individu, alors qu’au bas de la solvabilité ne couvre pas convenablement leurs clients nuit pyramide, particulièrement pour les travailleurs à l’appréciation des avantages d’une éventuelle participa- du secteur informel, l’unité économique la plus tion à ce service. pertinente est généralement le ménage. Pour arriver à persuader les IMF et d’autres microprêteurs qu’il existe des avantages à participer à une centrale des risques, on peut tout simplement démontrer l’existence Difficultés au niveau des prêteurs des emprunts croisés. C’est ce qui a été fait en Bolivie, en Équateur, au Nicaragua et récemment en Égypte, pour ne nommer que quelques marchés où des centrales La question centrale est celle de l’intérêt d’un point de vue des risques pour les IMF ont été créées ou sont en cours commercial des services d’information sur la solvabilité d’élaboration. Pour en savoir davantage sur les incidences pour les prêteurs. Quels sont les avantages apparents ? de ce type de dispositif sur les pauvres, voir l’encadré 7. Quels sont les coûts des services d’information sur la solvabilité ? Pour les prêteurs, quels sont les problèmes de Les coûts des services d’information sur la solvabilité. capacité ou de réglementation qui influent sur la viabilité Étant donné le faible montant des prêts (y compris les gros pratique et économique de la participation à une centrale prêts à la consommation) par rapport à ceux consentis aux des risques au bas de la pyramide ? particuliers dans le secteur traditionnel, tous les prêteurs au bas de la pyramide peuvent avoir des difficultés à payer Avantages de la participation. Pour les prêteurs au bas de le prix d’un rapport de solvabilité. En outre, les échéances la pyramide, les avantages de la participation à un service sont plus courtes et les remboursements plus fréquents, ce d’information sur la solvabilité varient généralement beau- qui augmente les frais inhérents aux rapports en comparai- coup d’une catégorie de prêteurs à une autre. Les banques son de la somme prêtée. 10 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite Pour les IMF et autres prestataires de services de microcrédit, le prix des rapports et analyses fournis par les centrales des ris- Encadré 7. Les incidences ques peut sembler élevé par rapport à l’impact de ces informa- des centrales des risques tions sur le processus d’octroi de crédit. Il ne s’agit pas seule- ment du prix des rapports proprement dit, mais aussi de la sur les populations pauvres qualité des informations sur les emprunteurs au bas de la pyra- – Preuves empiriques au mide. Au Mexique par exemple, cela fait quelque temps que Buro de Crédito, qui desservait auparavant surtout les banques Guatemala commerciales du marché, impose des tarifs relativement élevés aux IMF et autres établissements de microcrédit (en raison de Tant pour les prestataires que pour les emprunteurs, leur faible volume de demandes et de leur pouvoir limité sur l’utilisation d’un système d’information sur la solvabilité le marché) ; il propose en outre peu d’informations sur les em- peut avoir des incidences importantes. Pour mesurer prunteurs à faible revenu. Círculo de Crédito, une centrale des ces dernières, McIntosh, Sadoulet et de Janvry (2006) risques privée, est entrée plus tard sur le marché mexicain pour ont analysé les données des clients et des prêts dans cibler précisément les consommateurs à faible revenu. Dans une IMF guatémaltèque avant et après l’exploitation d’autres marchés, les IMF emploient une simple base de don- des informations de crédit. Leurs conclusions tendent à nées clients, qui leur est propre (en lieu et place de centrales démontrer un impact en termes de développement et des risques) en raison du prix d’achat élevé des rapports de en termes commerciaux et à montrer l’utilité des don- crédit par rapport à leur valeur perçue. nées sur les antécédents des emprunteurs. Capacité de participation. En général, on présume que Dans l’IMF guatémaltèque qui a fait l’objet de cette les banques et les établissements de crédit à la consom- enquête, McIntosh, Sadoulet et de Janvry ont décou- mation possèdent les systèmes d’information de gestion vert que, après avoir commencé à exploiter la base (SIG) requis et sont dotés des personnels compétents pour de données de solvabilité, “ la part moyenne des participer soit aux centrales des risques soit aux registres prêts individuels affichant au moins un paiement en de crédit. Habituellement, ce n’est vrai que des IMF et retard avait diminué, passant de 67,2 % à 52,8 % après autres établissements de microcrédit qui sont suffisam- exploitation de la base de données ”. (Les prêts de ment grands et sophistiqués pour exploiter des plateformes groupe n’ont révélé qu’une variation modeste dans la informatiques bancaires (généralement, il s’agit des institu- fréquence de remboursement.) En triant ces données tions réglementées par l’autorité bancaire ou un organisme en deux catégories suivant le montant d’actif détenu analogue de réglementation non bancaire). par les clients (supérieur ou inférieur à 1 000 quetzals, soit environ 125 USD), les auteurs de l’enquête ont Pour le reste, les contraintes liées aux capacités tech- découvert que l’impact était plus important chez les nologiques et humaines sont très variables. Á un extrême se clients plus démunis. En effet, le nombre de prêts situent les établissements de microcrédit dotés de SIG très contractés par des clients possédant un actif inférieur perfectionnés et des personnels compétents pour les exploi­ à 1 000 quetzals et présentant au moins un paiement ter. Pour ces institutions, la participation à une base de don- en retard était passé de 63 % à 48 % (contre 54 % nées clients propres aux IMF n’exige probablement qu’une à 48 % pour les clients dont la valeur de l’actif était adaptation modeste. Toutefois, elles devront probablement supérieure à 1 000 quetzals). Il faut noter qu’au début, opérer une transformation plus significative de leurs systèmes les informations de crédit collectées auprès de la base existants ; par ailleurs, il leur faudra probablement réaliser des de données de solvabilité ont provoqué une diminu- actualisations dans leurs mécanismes de traitement (sur le tion de la masse totale des prêts consentis aux clients plan matériel et logiciel) pour acquérir la capacité et la vitesse plus pauvres. Toutefois, cette évolution en faveur des de traitement nécessaires pour participer aux centrales des clients plus fortunés a fini par disparaître lorsque l’IMF risques ou registres de crédit. En général, ces IMF occupent a commencé à exploiter les données de crédit de le premier rang sur le marché ; elles rassemblent également manière plus efficace pour analyser la solvabilité de le plus grand nombre de clients. ses clients plus démunis. À l’extrême opposé se trouvent les nombreuses IMF, et autres établissements de microcrédit à travers le monde, dont les opérations ne sont automatisées qu’à moitié, ou qui continuent Le rapport coût/avantages perçu dépend parfois du type d’exploiter des systèmes manuels. Pour elles, l’investissement de prêteur concerné. Étant donné que le scoring a toutes supplémentaire requis sous forme de SIG, ainsi que le person- les chances d’être intégré au processus de traitement des nel nécessaire pour exploiter ce système, ont toutes les chan­ demandes de prêt des banques et des établissements de ces de les dissuader de participer à toute forme de centrale crédit à la consommation, les frais de communication des des risques. (Bien que certains fournisseurs d’information sur la données, d’achat et d’analyse des rapports peuvent se solvabilité acceptent des informations sous format papier, les justifier en comparaison de la somme prêtée. D’autre part, frais de traitement de ces informations, ainsi que les problèmes étant donné que ces prêteurs consentent généralement des connexes de qualité et d’opportunité des informations font prêts plus importants, le volume global de leurs demandes que cette solution s’avère peu pratique.) d’information – et parfois leur participation à la structure de propriété des centrales des risques – pourrait leur permettre En ce qui concerne les IMF et autres établissements de de conclure des accords avantageux en échange du gros microcrédit qui se situent entre ces deux extrêmes, la pos- volume de rapports et d’analyses acheté. sibilité de participer à un mécanisme d’information sur la Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite 11 solvabilité pourrait bien les porter à investir dans un SIG membres du groupe. Même lorsqu’il est possible d’établir un pour accroître leurs capacités. Le résultat d’un tel exercice historique de crédit pour un membre de groupe, les mé- pourrait être une amélioration globale dans leurs opérations canismes de solidarité sociale peuvent influer sur le com- en termes de performance, de productivité, de rentabilité, portement réel de l’individu. Toutefois, les informations sur d’analyse du risque et de volume de clientèle atteinte. l’exposition des clients ont leur importance même s’il est dif- ficile d’analyser l’historique de remboursement de l’individu. Les méthodologies de prêt de groupe employées par cer- taines IMF et autres établissements de microcrédit peuvent Les améliorations réalisées au niveau des SIG et des ressour­ exacerber les difficultés de participation à une centrale ces humaines des IMF facilitent considérablement l’intégration des risques. Certaines IMF analysent les données de crédit de ces institutions aux mécanismes d’information sur les em- uniquement à l’échelle d’un groupe et il existe très peu de prunteurs. Parmi les éléments fondamentaux qui permettent données sur le comportement individuel de chacun des aux IMF et autres établissements de microcrédit de participer Encadré 8. Les systèmes d’information sur les emprunteurs à faible revenu – Problèmes de réglementation au niveau des prêteurs Pour les centrales des risques au bas de la pyramide, si réglementation à caractère non bancaire, et ils sont certains problèmes de réglementation comme l’octroi de souvent assujettis aux mêmes règles de confidentialité licences, la surveillance et les règles de fonctionnement des données clients (tout comme ils peuvent recourir varient en fonction de la nature du mécanisme en question aux mêmes formules pour les contourner) que les (registres de crédit, centrales des risques ou bases de don- établissements non bancaires de crédit à la consom- nées clients propres aux IMF), le type de prêteur (banques, mation. Les mêmes règles s’appliquent probablement établissements non bancaires de crédit à la consommation, à la participation aux centrales des risques et aux IMF ou autres établissements de microcrédit, détaillants bases de données clients propres aux IMF (bien que et autres prestataires non financiers de services de crédit, certains échanges d’information moins officiels entre comme les entreprises de services publics) est souvent à IMF puissent échapper au contrôle des autorités de l’origine de problèmes de réglementation spécifiques. Suit réglementation et ce, même s’il n’est pas clair que les une liste des problèmes rencontrés le plus souvent : dispositions de réglementation les autorisent effec- tivement). • Dans la législation bancaire d’un pays, les disposi- • Du point de vue réglementaire, les détaillants et tions relatives au secret bancaire limitent souvent la autres prestataires non financiers de services de crédit participation à des centrales des risques privées (sauf recevront probablement le même traitement que les lorsque les dispositions sont modifiées ou abrogées), établissements de crédit à la consommation et IMF mais en général, elles n’interdisent pas l’échange non réglementés par l’autorité bancaire ou un autre d’information avec les registres de crédit exploités organisme de réglementation non bancaire ; ils peu- par un organisme public. Comme c’est le cas pour la vent aussi employer les mêmes contournements pour protection de la confidentialité des données clients, il participer aux centrales des risques (à condition d’être est possible de contourner les restrictions d’échange motivés en ce sens). d’information imposées par le secret bancaire en obtenant le consentement de l’emprunteur et en La réglementation n’est pas toujours un obstacle à sur- indiquant cette mention dans les documents de prêt monter pour les prêteurs intéressés à participer à des sys- (à supposer que la banque en question soit motivée tèmes d’information sur les emprunteurs à faible revenu. En dans ce sens). effet, dans certains pays, la réglementation a été employée • Les établissements non bancaires de crédit à la à bon escient, non seulement pour favoriser une large par- consommation peuvent être interdits de participation ticipation aux systèmes d’information sur les emprunteurs aux registres de crédit, sauf s’ils sont réglementés par mais aussi pour l’encourager, voire l’imposer. En Afrique l’autorité bancaire ou un autre organisme de régle- du Sud et en Bolivie par exemple, les contrats de prêt à mentation non bancaire. Souvent, les réglementations la consommation n’ont pas de valeur légale opposable sur la confidentialité des données clients limitent les s’ils ne reposent pas sur les données d’un rapport de sol­ échanges d’information sans le consentement du cli- vabilité ou d’une autre analyse personnalisée de la capacité ent, bien que dans de nombreux cas l’on puisse aisé- de remboursement de l’emprunteur. De plus en plus de ment contourner ces limitations en prévoyant dans les pays essayent de s’adapter ou de parer à la saturation du documents de prêt certaines dispositions standards marché et aux problèmes liés au surendettement au bas sur le consentement (comme pour les dispositions de la pyramide ; c’est la raison pour laquelle il se produira relatives au secret bancaire). probablement une augmentation du nombre de pays qui • Les IMF et d’autres établissements de microcrédit adopteront des réformes pour permettre, encourager ou sont aussi souvent interdits de participation aux forcer la participation des prêteurs concernés aux systèmes registres de crédit sauf s’ils sont réglementés par d’information sur les emprunteurs. l’autorité bancaire ou un autre organisme similaire de 12 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite aux centrales des risques figurent l’intérêt du bailleur (et par- efforts considérables pour travailler avec les microprêteurs fois de l’investisseur) à subventionner les améliorations requi- afin de susciter une prise de conscience et une valorisation ses, l’appui actif des associations ou réseaux d’IMF (comme des avantages offerts par les centrales des risques (par ex- c’est le cas de PMN au Pakistan et de RFR en Équateur), ainsi emple en leur offrant des produits au rabais sur une période que l’appui au niveau politique qui permet d’accorder la d’essai, des analyses de portefeuille gratuites et même des priorité à cette modalité de renforcement des capacités. séances de formation). La prestation de services person- nalisés est également un facteur de réussite. Il peut s’agir de rapports de crédit ou même de scoring adaptés aux marchés à faible revenu. La méthode de prestation de ser- Difficultés au niveau des fournisseurs vices peut aussi constituer un facteur important de qualité d’information sur la solvabilité et un moyen de se démarquer. Un système facilement accessible pour les employés concernés de l’institution de Les fournisseurs d’information sur la solvabilité – centrales microcrédit contribue à diminuer les frais de transaction et des risques, registres de crédit ou bases de données facilite l’intégration des données de crédit dans le processus clients propres aux IMF – ont constamment des difficul- d’instruction des prêts. tés à trouver des modèles commerciaux durables offrant des services de bonne qualité aux prêteurs ciblant les segments inférieurs du marché. Ils doivent concevoir des processus automatisés pour réduire leurs frais tout en of- Difficultés au niveau des emprunteurs frant aux microprêteurs, dont le volume d’activités est très élevé, des services à valeur ajoutée. De nombreuses difficultés liées aux caractéristiques spéci- fiques des emprunteurs à faible revenu se répercutent sur Prix des rapports de crédit. La qualité des données fournies les prêteurs et les fournisseurs d’information sur la solvabi­ par les prêteurs aux centrales des risques (comme indi- lité, au moins aussi radicalement qu’ils touchent les clients qué précédemment, pour les IMF, c’est une question de eux-mêmes. Toutefois, deux catégories de problèmes ont capacité) peut aussi influencer les prix auxquels ils achètent une incidence directe sur les emprunteurs : la protection les rapports et analyses. En effet, si la centrale des risques de l’exactitude et de la confidentialité des données les encourt des frais élevés pour épurer et traiter les données concernant dans le système d’information sur la solvabilité communiquées par les microprêteurs, ces frais se réper- (et dans les rapports et autres outils analytiques qui en cutent sur le prix du rapport de solvabilité. Réciproquement, sont issus) et la connaissance qu’ont les emprunteurs des les prix établis par un fournisseur d’information sur la centrales des risques. solvabilité sont fonction de la qualité et de l’exhaustivité de sa base de données. Les fournisseurs d’information sur la Confidentialité et exactitude des informations sur les solvabilité qui offrent des données de meilleure qualité et consommateurs. Pour les emprunteurs, les problèmes les plus complètes sur les emprunteurs au bas de la pyramide plus pressants à l’égard des centrales des risques sont la sont en mesure d’imposer des prix plus élevés que leurs protection de la confidentialité des données clients et la concurrents. garantie d’un degré acceptable d’exactitude des informa- tions qui les concernent et qui figurent dans les bases de Le degré de concurrence sur le marché des services données des centrales. d’information sur la solvabilité constitue un autre composant du coût des rapports et analyses produits par les centrales Comme indiqué dans l’encadré 9, les mesures de protection des risques. Selon les informations issues de plusieurs de la confidentialité des données, qu’elles soient prévues marchés dotés de systèmes d’information sur les emprun- dans les règles sur le secret bancaire ou dans des règles teurs desservant les emprunteurs à faible revenu, le coût générales de confidentialité des données clients, peuvent moyen d’un rapport de solvabilité ordinaire pour ces clients être adaptées le plus souvent moyennant le consentement peut descendre à 0,08 USD dans des marchés très concur- de l’emprunteur à communiquer les informations de crédit rentiels comme celui de l’Équateur (récemment), ou inverse- qu’il fournit dans sa demande de prêt. En général, on peut ment, dépasser 1 USD dans un marché moins concurrentiel régler les problèmes d’exactitude des informations en don- ou moins mature. De nombreux marchés font état de prix nant aux clients des occasions répétées de revoir et corriger variant entre 0,25 USD et 0,40 USD par rapport. les informations qui les concernent et figurent dans la base de données. En ce qui concerne les emprunteurs au bas de Qualité du service. Les quelques fournisseurs d’information la pyramide, les mesures de protection de l’exactitude et de sur la solvabilité qui ont développé un créneau sur le la confidentialité des données peuvent ne pas être efficaces marché du microfinancement sont allés plus loin pour com- en l’absence de mécanismes particuliers de divulgation et prendre les caractéristiques particulières des prêteurs de ce de voies de recours qui tiennent compte des caractéris- marché et la complexité de leur situation. Dans les marchés tiques particulières de leur situation. d’Amérique latine, les prestataires de services déploient des Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite 13 Il faut noter que les règles de protection de la confidentialité Encadré 9. Centrales des des données ne pourront être efficaces sans un dispositif systématique de sanctions. Sans cela, les clients du bas de risques et sensibilisation des la pyramide peuvent devenir encore plus vulnérables que les clients plus fortunés vis-à-vis du vol d’informations ou de consommateurs divulgation indue à des tiers. Les autorités, les responsables politiques, les presta- Sensibilisation du consommateur. Au niveau des emprun- taires de services et les prêteurs contribuent largement teurs, il est tout aussi important de sensibiliser aux centrales à garantir que les informations à caractère personnel des risques les consommateurs qui feront l’objet des com- des consommateurs sont protégées conformément à munications de données. Lorsqu’ils sont sensibilisés aux leurs droits et que ces consommateurs reconnaissent avantages que présente la constitution d’un historique de l’importance de ces dispositifs de protection. Pour crédit favorable, les bons clients sont en position de bénéfi- cela, il peut être nécessaire de réaliser diverses cam- cier des meilleures conditions du marché, ce qui peut aussi pagnes d’information et de sensibilisation à travers les contribuer à une saine concurrence entre les prêteurs au bas médias populaires (télévision, radio et presse écrite) de la pyramide. La connaissance des éventuelles incidences ainsi que des activités d’information à la charge des négatives d’un historique de crédit peut avoir un effet de fournisseurs d’information sur la solvabilité aussi bien dissuasion et encourager les clients à observer un comporte- que des prêteurs. Les autorités peuvent elles aussi ment responsable lorsqu’ils contractent des prêts. remplir un rôle important en garantissant ou en faisant appliquer les droits des consommateurs à la confiden- tialité des informations qui les concernent en prenant des mesures correctives à l’encontre des fournisseurs d’information sur la solvabilité et de crédit qui ne respectent pas les droits des consommateurs. Quant aux nouvelles technologies, elles offrent diver­ ses méthodes adaptables pour sensibiliser les consom- mateurs au sujet des centrales des risques, y compris au bas de la pyramide. Ainsi, on pourrait envisager de transmettre aux micro-emprunteurs des messages SMS pour leur rappeler l’échéance d’un rembourse- ment, avec un message rappelant que tout défaut de paiement sera transmis au système d’information sur la solvabilité ou, inversement, que des données favo- rables ont été transmises au fournisseur d’information sur la solvabilité pour refléter un remboursement con- forme à l’échéance. Les bandes dessinées et le théâtre ambulant sont d’autres moyens de retenir l’attention des emprunteurs à faible revenu peu alphabétisés, car ils permettent de faire passer des messages sur leurs droits et devoirs vis-à-vis des centrales des risques. Dans certains marchés comme la Colombie, les séries télévisées servent à communiquer au grand public des informations essentielles sur la manière dont fonctionnent les centrales des risques. Même si les fournisseurs d’information sur la solvabilité ont un rôle cardinal à jouer pour instruire les consommateurs (et s’ils peuvent effectivement atteindre l’emprunteur à des moments propices à l’enseignement, par exemple lorsqu’il se voit refuser un prêt parce que son dos- sier de crédit ne lui est pas favorable), les incitations offertes par le marché peuvent ne pas compenser convenablement l’investissement souhaitable dans ce type d’éducation du consommateur. Les prêteurs qui souhaitent que leurs emprunteurs remboursent leurs prêts, et les responsables politiques qui veu- lent encourager une culture solide d’emprunt (et de remboursement) devraient eux aussi contribuer aux efforts d’initiation à la finance et de renforcement des aptitudes des consommateurs concernant les informa- tions sur la solvabilité. 14 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite Partie IV. Recommandations sur l’élaboration des systèmes d’information sur les emprunteurs à faible revenu Il existe des preuves solides que les emprunts à répétition des mécanismes d’information sur les emprunteurs – cen- et le risque de surendettement causent déjà quelques trales des risques, registres de crédit, bases de données tensions dans des marchés de microcrédit réputés, comme clients propres aux IMF ou une combinaison – qui ont les ceux de la Bosnie-Herzégovine et le Maroc. Nul doute que plus fortes chances de couvrir ces segments du marché cette tendance continuera de s’étendre à d’autres pays à sont diverses. En tout état de cause, il incombe aux respon- mesure de l’augmentation du nombre d’institutions desser- sables politiques de se concentrer sur les contraintes de vant les emprunteurs au bas de la pyramide. Les systèmes politique et de réglementation qui entravent le développe- d’information sur les emprunteurs qui contiennent des ment de systèmes d’information sur les emprunteurs qui informations sur les emprunteurs à faible revenu peuvent maximisent la couverture du segment inférieur du marché, largement contribuer à gérer l’expansion rapide de l’offre quel que soit le statut du prêteur au regard du droit ou de crédit dans ces marchés cibles. de la réglementation. Parfois, les responsables politiques peuvent prendre des mesures pour améliorer la couverture Toutefois, comme indiqué dans la partie III, les systèmes de marché des registres de crédit, par exemple en permet- d’information sur les emprunteurs qui collectent des tant aux prêteurs non bancaires de participer au registre informations raisonnablement complètes et exactes sur les ou en révisant à la baisse, voire en éliminant le montant emprunteurs du bas de la pyramide, et qui couvrent tout minimal des prêts ouvrant droit à l’inscription au registre, si l’éventail des prêteurs officiels desservant ces clients, font de telles règles existent. En outre, ces responsables peuvent face à de nombreuses difficultés. Ces dernières ne peuvent largement contribuer à réduire les obstacles qui s’opposent être surmontées sans l’engagement des responsables poli- à une identification unique des emprunteurs au bas de la tiques, des bailleurs de fonds et des prêteurs qui touchent pyramide dans les systèmes d’information sur les emprun- les populations à faible revenu. teurs, par exemple en facilitant ou en imposant l’échange d’information entre les organismes gouvernementaux et les Les responsables politiques doivent soutenir, encourager systèmes d’information sur les emprunteurs, ou encore en et accélérer les initiatives existantes qui visent à développer prévoyant des programmes qui établissent ou élargissent ou consolider les échanges d’information de crédit entre des systèmes nationaux d’identification unique des clients. les établissements de microcrédit ; il leur revient également d’identifier quelles sont les contraintes qui s’opposent à Au niveau des prêteurs s’adressant au bas de la pyramide, la réalisation de telles initiatives. Comme indiqué dans la l’établissement d’un cadre de réglementation propice aux partie III, les responsables politiques ont un rôle à jouer échanges d’information de crédit est la tâche principale qui dans chacune des catégories de problèmes rencontrés attend les responsables politiques. Là encore, les dispositions – au niveau du marché, des prêteurs, des fournisseurs spécifiques de la réglementation qui seront les plus por- d’information sur la solvabilité, et des emprunteurs à faible teuses varient d’un pays à un autre mais, dans chaque pays, revenu eux-mêmes. les responsables politiques doivent s’attacher non seulement à éliminer les obstacles à une large participation de tous Au niveau du marché, les responsables politiques peuvent les prêteurs concernés mais aussi à proposer des mesures contraindre les établissements de microcrédit à participer incitatives – voire à établir des règles incontournables – pour aux échanges d’information, à condition toutefois qu’il obtenir cette participation. Les responsables doivent aussi existe des mécanismes viables d’information sur la solva­ rechercher un équilibre entre les exigences individuelles de bilité. Si les dispositifs d’échange d’information n’existent protection de la confidentialité et de l’exactitude des don- pas encore, les autorités peuvent établir un calendrier pour nées et les besoins de l’économie globale en matière de le développement d’un système qui couvre les populations transparence et d’instruments viables qui renforcent la disci- à faible revenu. D’un pays à l’autre, les approches vis-à-vis pline de remboursement et évitent le surendettement. Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite 15 Au niveau des fournisseurs d’information sur la solvabilité, les échanges d’information de crédit concernant les emprunteurs responsables politiques devraient évaluer les exigences de ré- à faible revenu et ce, dans n’importe quel pays. Si ces prêteurs glementation qui alourdissent inutilement le coût d’élaboration ne voient pas l’utilité du partage des informations sur le crédit des rapports de crédit sur les emprunteurs au bas de la par rapport aux frais de participation et au prix des rapports de pyramide. En outre, les règles de protection de l’exactitude crédit, il est peu probable qu’ils réaliseront les investissements des données peuvent contribuer à une meilleure qualité de préalables requis pour une participation utile. Au-delà des l’information, par exemple en exigeant que les fournisseurs éventuels investissements en matériel informatique et logiciels d’information sur la solvabilité divulguent le nombre de plaintes peuvent s’ajouter d’autres coûts liés au dispositif de télécom- reçues et proposent des mesures correctrices, qu’ils se sou- munication pour assurer des connexions sécurisées avec la mettent à des vérifications pour juger de la qualité des données base de données, à la modification de la présentation ou de la produites par leurs services, enfin qu’ils établissent des procé- définition des données de paiement (et éventuellement pour dures précises et pratiques pour résoudre les plaintes déposées modifier les méthodes d’octroi de prêts) de sorte à les rendre par les emprunteurs à faible revenu. conformes aux exigences des fournisseurs d’information sur la solvabilité, à la mise aux normes réglementaires sur la Au niveau de l’emprunteur, outre les règles sur la confi- confidentialité des données et le règlement des plaintes des dentialité des données, les responsables politiques doivent clients, enfin au renforcement des capacités du personnel, de contribuer à sensibiliser la population à faible revenu sur les sorte qu’il puisse fournir et exploiter les données de manière centrales des risques. Ces responsables ne sont pas tenus efficace. Dans certains marchés, les prêteurs réalisent parfois de jouer un rôle direct (même si, dans certains pays, ce rôle ces investissements en réponse à une crise ou en réaction à est bienvenu et possible) puisqu’il est possible d’établir des des mesures incitatives, des pressions ou même des injonc- partenariats avec d’autres acteurs concernés à ces fins. En tions de la part des responsables politiques. Lorsque ces inci- particulier, ils doivent s’attacher à déterminer les approches tations ou injonctions sont absentes, le soutien des bailleurs de sensibilisation des micro-emprunteurs les plus adaptées de fonds peut contribuer à réduire les coûts de participation et aux besoins et aux compétences de la population à faible à accroître les chances qu’un système d’échange d’information revenu de leur pays. Dans de nombreux pays, les formules sur le crédit soit en place avant la survenue d’une crise les plus efficaces comprennent les médias non traditionnels, d’insolvabilité. notamment les bandes dessinées ou même les messages SMS par téléphonie portable. Des systèmes efficaces d’information sur la solvabilité cou- vrant tant les prêteurs concernés au bas de la pyramide que Les bailleurs de fonds aussi peuvent largement contribuer leurs clients à faible revenu constituent un investissement à la mise en place de mécanismes d’information sur les em- primordial pour le secteur international du microcrédit, car ils prunteurs efficaces pour les populations au bas de la pyra- sont une source de croissance durable et permettent d’éviter le mide et ce, à chacun de ces différents niveaux. On pourrait surendettement des clients. À travers le monde, les expériences par exemple envisager les rôles suivants : démontrent qu’il n’existe pas un ensemble unique d’interventions optimales pour tous les marchés, et qu’il est nécessaire de • Encourager la participation aux systèmes d’information consentir des efforts à long terme pour surmonter toutes les sur les emprunteurs de l’ensemble des institutions de contraintes à l’établissement de systèmes d’information sur les crédit aux populations défavorisées qui reçoivent un emprunteurs efficaces pour les populations à faible revenu. En soutien de ces bailleurs (ce qui permettrait d’élargir la conséquence, il conviendrait de se concentrer dans l’immédiat couverture de marché). sur des solutions pragmatiques, adaptées au marché local actuel, • Réaliser des enquêtes au niveau national qui contribuent et respectueuses de la capacité et des besoins des microprêteurs à démontrer les avantages des centrales des risques présents ou émergents sur le marché desservant les populations (et l’incidence des emprunts croisés parmi les emprun- du bas de la pyramide. Avec la participation des responsables teurs au bas de la pyramide, précurseurs potentiels du politiques, des bailleurs de fonds, des fournisseurs d’information surendettement). sur la solvabilité, des prêteurs, mais aussi des emprunteurs • Appuyer les initiatives de renforcement des capacités au de ce segment, ces solutions portent en elles un potentiel sein des IMF et d’autres prêteurs ciblant les populations d’amélioration, et elles peuvent évoluer à terme pour accroître à faible revenu de sorte qu’ils puissent communiquer aux l’étendue de la couverture et la portée des services d’information fournisseurs d’information sur la solvabilité des données proposés. Elles peuvent donc constituer des outils toujours plus de qualité et exploiter à bon escient les rapports produits efficaces pour atténuer l’éventualité de crises d’insolvabilité et de par ces fournisseurs. surendettement parmi les micro-emprunteurs. • Fournir des fonds pour couvrir les coûts initiaux de participation aux systèmes d’information sur les emprun- Dans quelques pays et régions, la croissance sans précé- teurs, notamment les investissements en technologie de dent du microcrédit observée ces cinq dernières années a l’information. porté ce secteur à la maturité ; pour certains d’entre eux, • Soutenir les activités de sensibilisation des consommateurs cette croissance a abouti à une saturation du marché. Il ainsi que les programmes de renforcement des capacités fi- s’agit là des premiers cas mais, si ce secteur continue sur nancières afin d’approfondir les connaissances des emprun- sa lancée, de plus en plus de marchés atteindront ce stade. teurs au bas de la pyramide sur leurs droits et devoirs par Dans ce contexte, la création dès le début de mécanismes rapport aux centrales des risques, ainsi que sur les avantages d’information efficaces sur les emprunteurs qui couvrent les d’un historique de crédit favorable et les conséquences clients à faible revenu et la gamme complète des prêteurs négatives potentielles d’un historique défavorable. officiels qui les desservent est non seulement importante, mais urgente. Il existe plusieurs manières de procéder et Les prêteurs au bas de la pyramide sont ceux qui influencent elles ne sont pas sans contraintes. L’expérience démontre le plus directement toute initiative tendant à développer les cependant qu’il est possible d’y parvenir. 16 Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite Bibliographie Beatriz Armendariz de Aghion et Jonathan Morduch, The Economics of Microfinance, Cambridge, Mass. : MIT Press, 2005. CGAP et Banque mondiale, Financial Access 2010 -, “La situa- tion de l’inclusion financière à travers la crise”, Washington, D.C. : CGAP et Banque mondiale, 2010. David Lascelles et Sam Mendelson, Microfinance Banana Skins 2011: The CSFI Survey of Microfinance Risk, Royaume-Uni : Centre for the Study of Financial Innovation, 2011. Craig McIntosh, Elisabeth Sadoulet et Alain de Janvry, “Better Lending and Better Clients: Credit Bureau Impact on Microfinance”, BASIS Brief No. 45, Madison, Wisc.: Department of Agricultural and Applied Economics, University of Wisconsin, Madison, mai 2006. 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Les auteurs du présent rapport sont Timothy Lyman, Les commentaires judicieux de Greg Chen, Tilman Tony Lythgoe, Margaret Miller, Xavier Reille et Erhbeck, Rich Rosenberg et Peer Stein ont contribué Shalini Sankaranarayan. Les assistants recherche sont à la révision du texte. Rafael Mazer, Valentina Saltane et Olga Tomilova. Le format suggéré pour citer l’ouvrage est le suivant : Timothy Lyman, Tony Lythgoe, Margaret Miller, Xavier Reille et Shalini Sankaranarayan, “Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite”, FORUM 1, Washington, D.C. : CGAP et SFI, 2011. Les systèmes d’information sur la solvabilité des emprunteurs à faible revenu : Principales difficultés et facteurs de réussite